Sur les bords du Golfe de l'oubli, épaves, ruines et varech sont témoins d'une agitation inhabituelle. Quelques navires ont mouillé non loin du rivage désert ; il en est descendu une armée de charpentiers qui s'active, s'agite et plante des clous. Des campements de jongleurs, des roulottes de foire ou des tentes d'organisateurs complètent peu à peu le décor... « Les olympiades de Manost », qu'ils appellent ça. Moules et zombies restent dubitatifs. Des helmites, faire la fête ?...
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Ici a été installée une arène longue, dont le sol est constitué de sable fin porté depuis la plage. Des ballots de pailles et des enclos de bois garantissent très imparfaitement la sécurité des spectateurs invités à prendre place sur de confortables gradins de bois garnis de coussins.
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[LEFT]Ici ont lieu les tournois à cheval et les duels de piétons. Toutes les armes sont permises, toutes les techniques de combat, la magie autorisée, les familiers bienvenus. On n'a même pas pensé à interdire les coups de revolver. Sur le bord de l'arène, des clercs de Tempus et de la Cavalière Rouge veillent au bon déroulement des combats, prêts à louer la vaillance et la stratégie des protagonistes. [/LEFT]
[LEFT]Les organisateurs déclinent toute responsabilité dans les éventuels dommages irréversibles subis par les participants. On a néanmoins dressé une tente de guérisseurs au cas où, près des gradins remplis de spectateurs...
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HRP: Si vous avez depuis toujours une envie refoulée de vous en mettre sur la goule (j'en connais... ), c'est ici ! Pas de règles donc, jouez cela en sérieux ou délire selon votre goût, avec des dés ou à l'amiable ; les prêtres n'interviendront pas pour vous séparer, et les guérisseurs ne s'aventureront dans la lice qu'une fois le combat terminé. Une entente préalable entre joueurs est vivement conseillée.
Kasumi avait bu encore quelques bières avant de daigner répondre au défi parfaitement ridicule de l’elfe. Le barde maigrichon ne pouvait espérer l’emporter dans un duel à la loyale contre lui. Il ne pouvait s’empêcher de savourer par avance l’affrontement contre Taliesin. Celui-ci avait réussi là où Kasumi avait échoué à savoir épouser Galathée et devenir le père adoptif du petit Desmoulins. Cela faisait des mois qu’il nourrissait une rancune tenace à l’encontre de ce parvenu. Il allait enfin pouvoir recouvrer son amour propre en ridiculisant son adversaire dans l’arène.
Pour marquer son dédain total, le rôdeur fit son entrée sans ses épées sur le champ de lutte. Il fit quelques pas et, constatant que sa victime n’était pas encore là. Avait-il renoncé par lâcheté à défendre son honneur ?
- Montre-toi chanteur d’opérette ! Ceci ne sera pas un combat de théâtre ! Montre-toi-même si tu n’es pas un homme !
La foule amassée sur les gradins retint son souffle comme les derniers échos du défi de Kasumi rebondissaient sur les parois de l'arène. Peu à peu, un bruit se fit entendre, lent, régulier, le pas d'un cheval qui approchait sans se presser. Les spectateurs commencèrent à murmurer entre eux, puis ce fut une explosions de cris, de vivats. Les hommes hurlaient leurs encouragements, leur dévouement, les femmes tombaient en pamoison, les enfants suppliaient le nouveau venu de les prenne comme écuyers.
Celui-ci était juché sur un blanc palefroi à la blanche robe, à la tête fine, au corps élancé et musculeux caparaçonné d'or et d'argent. D'or et d'argent aussi étaient la brillante armure du chevalier, son bouclier flamboyant, son haume ouvragé, la garde de sa mortelle épée.
Le chevalier leva son arme en guise de salut, puis s'apprêta à éperonner sa monture. Mais il hésita. L'air décontenancé, il souleva la visière de son casque, dévisagea Kasumi, puis regarda sa montre. -Ah, merde, je me suis planté d'heure. Je me disais bien aussi que vous ressembliez pas au Chevalier Noir des Ténèbres Obscures. La foule supplia qu'il reste. Il la salua courtoisement mais s'en fut néanmoins. Et à sa place apparut Taliesin, joli brin d'elfe mais, en matière d'apparence martiale, ne souffrant pas la comparaison avec le héros précédent. Le public, dépité, demeura silencieux et boudeur. Seuls retentissaient les cris de Victor. -Vas-y Talie ! Fais lui manger ses dents ! Et pique lui les exemplaires du journal dont il a parlé !
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Le rôdeur partit d’un rire méprisant, puis tandis que Taliesin s’approchait lentement du centre de l’arène, il se précipita vers le bas des tribunes et se mit à lancer les exemplaires incriminés de la gazette Luménienne dans la foule afin de faire monter la fureur de son adversaire et de démoraliser son supporter. Il s’aperçut, trop tard alors qu’il avait le dernier en main qu’il s’était trompé de numéro et avait distribué celui qui le montrait arborant sa robe rose. Frappé de honte et de rage, il se précipita vers Taliesin armé du magazine comme s’il se fut s’agit d’un gourdin.
- Aaargh ! Tu vas crever pour tout ce que tu m’as fait ! Monstre !
Lestement, souplement, l'elfe fit un bond de côté, une roulade arrière, un triple saut périlleux, une quadruple boucle piquée et se retrouva... juste face à son ennemi. -Tout ce que je t'ai fait ? s'exclama-t-il. Ce n'est pas moi le responsable, mais ta mère ! Moi, je ne voulais pas qu'elle te garde !. Il décocha un coup de poing au demi-elfe et tenta un repli stratégique avant que l'autre ne se fut remis de sa surprise.
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Abasourdi par la révélation, le rôdeur se prit le coup de poing en pleine figure ce qui donna à l’elfe le premier sang et brouilla la vue du combattant. Alors que le monde tournoyait dans une gigue d’étoiles, que la bataille entre les deux stars du RP Luménien, non la guerre plutôt faisait rage, le rôdeur eut la vision d’un combat faisant écho au sien mais se déroulant dans une galaxie fort lointaine : deux hommes en armure se battaient à coup de sabre dans une danse macabre. L’un d’eux tout vêtu de noir s’adressa au plus jeune sur le même ton qu’avait employé Taliesin bien que manifestement essoufflé par son combat :
- Je suis ton père !
Le rôdeur revint à lui alors que Taliesin encouragé par Victor revenait à la charge.
- La force est avec moi !
Kasumi creusa un trou dans le sable, espérant que le barde tomberait dans le piège.
Il y tomba.
Taliesin aperçut bien le trou, mais trop tard. Il s'immobilisa juste au bord, tangua un instant, battant des bras pour retrouver son équilibre. En vain. Il glissa, bascula, et disparut dans les profondeurs du sable. Kasumi écarquilla les yeux, mais il n'y avait pas à s'y tromper : le sable était vide. Plus de barde.
Un silence pesant tomba sur l'arène. Les secondes passèrent, puis les minutes, et un cri déchirant monta des gradins. -Noooooooooooooooooooooooooooon ! hurla Victor, le visage inondé de larmes.Nooooooooooooooooooon ! Il avait les billets de retour et tout notre argent sur lui !
Déjà, certains spectateurs jetaient des regards apitoyés au petit garçon éploré. Mais tous se retournèrent bientôt vers l'arène : le sol s'était mis à trembler. Une petite bosse était apparue dans le sable. Elle grossissait, grossissait, de plus en plus vite, tandis qu'un grondement grave faisait bourdonner les oreilles de l'assistance. Et tout à coup, elle explosa.
Une gigantesque créature venait de surgir à la verticale. On aurait pu la prendre pour un ver de terre, n'eut été sa taille époustouflante et la rangée d'effroyables crocs qui lui ourlaient la bouche. Sur son dos était assis Taliesin. Il n'en menait pas large mais trouva la force d'adresser un petit salut à la foule pétrifiée.
-Muad'dib ! hurla Victor. Il ne savait pas ce que cela signifiait ; mais ça lui avait semblé être la chose à dire.
Le monstre se pencha, courba sa silhouette épaisse et longiligne et amorça un plongeon vers les profondeurs de la terre. Le barde eut juste le temps de sauter au sol et de courir pour ne pas être aspiré par le maelström sableux qui s'ensuivit.
Bientôt, il ne subsista aucune trace du ver. Juste quelques vagues remous figés à la surface de l'arène. -Bon, où en étions-nous ?fit taliesin, flegmatique, en se tournant vers son ennemi mortel.
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Le rôdeur était assis nonchalamment dans un fauteuil confortable devant une table qui avait surgi d’on ne sait où pendant que la foule regardait vers le ver monstrueux. Il regardait, dépité les dés qu’il avait jeté et indiquaient un bon score.
- Fichtre l’invocation de ver de sable aurait du m’assurer de la victoire totale. Cet imbécile t’a sauvé au lieu de s’en prendre à la vermine qui t’accompagne ! Je crois que c’est ton tour de les jeter. Telles sont les règles d’après le manuel « Plongeon et plafond » 4ème édition. Mais tu ne t’en tireras pas si facilement. Nous savons tous ce qu’il en est de ta chance légendaire. Oseras-tu les jeter ?
Le demi-elfe poussa les dés à l’aspect étrange vers le barde avec un petit sourire mauvais.
Taliesin lorgna les dés, perplexe. -Dites, Kas... heu, vil affreux. Tout ceci est-il bien réglementaire ? Ne sommes nous pas censés, au lieu de nous soumettre à semblables confrontations, nous taper sur la figure jusqu'à ce que mort s'ensuive ? Je ne suis pas certain que les organisateurs aient prévu ce genre de débordements... Ou alors si, peut-être ont-ils tout prévu ! En ce cas, jouons leur jeu,, il y a peut-être une cohérence là derrière.
Il tendit la main, saisit les dés, les jeta.
Un vent violent se leva et, véritable tornade, fit voler le sable sur une bonne moitié de l'arène. Une bourrasque aspira Taliesin et le fit disparaître au sein de l'opaque tourbillon.
Lorsque la tempête retomba, un immense castel de sable avait fait son apparition. Le barde trônait sur l'un des chemins de ronde. Il tira la langue à Kasumi. -Attaquez-moi, si vous l'osez ! Jamais vous ne prendrez mes murailles !
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Le rôdeur était incrédule. Ainsi donc son ennemi atavique se terrait-il à l’abri de remparts puissants et le narguait de toute sa hauteur. C’est ce qu’il détestait le plus chez le prétentieux elfe barde. (Un pléonasme certes mais qui qualifiait bien l’individu)
Le premier mouvement de Kasumi aurait été de prendre Victor en otage mais ce serait mal vu par les spectateurs et organisateurs du duel. De même, un siège était à exclure. Nul doute qu’on finirait par les chasser si l’opération s’éternisait et gâcher le spectacle. Le rôdeur réfléchit encore un moment avant qu’une idée toute naturelle lui vienne à l’esprit. Il abaissa ses chausses et entreprit d’abattre les murailles de sable en urinant l’impressionnante quantité de bière qu’il avait déguster avant le duel.
L'assistance demeura un instant muette de stupeur. Puis un violent vacarme éclata. Les femmes poussèrent de hauts cris et se cachèrent les yeux. Les hommes se répandirent en huées ou éclats de rires. Les enfants, eux n'avaient d'attention que pour les murailles fantastiques qui s'effondraient, lamentable, dans un amas de boue innommable.
Quant à Victor, il comparait la réalité avec les images contenues dans le Hélonna Match. -Pffff, ils ont retouché les photos ! s'indigna-t-il.
Taliesin, pour sa part, observait le désastre. -Vous êtes mauvais joueur, tricheur, indigne et fourbe ! maugréa-t-il. Et exhibitionniste ! J'espère que la brigde des moeurs va vous arrêter !
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Une fois les murailles abattues, le rôdeur poussa un soupir de satisfaction tant parce que son plan avait marché à merveille que parce qu’il se sentait bien, la vessie vide. Il n’avait pas osé aller faire ses besoins à la taverne où les toilettes étaient pour le moins rustiques et dans un état de propreté douteux. Il remonta ses chausses et répliqua au barde d’un adouci et conciliateur :
- Arrêtons-là ce combat inique. Ton empire s’est effondré, barde. Les pipis du petit Victor ont érigé une muraille entre nous. Les miens les ont abattus. Essayons de régler ce différent en adulte !
Le rôdeur se tourna vers Victor et lui adressa un sourire qui disparut bien vite lorsqu’il vit que celui-ci distribuait déjà des croquis peu flatteur sur son anatomie avec force commentaires désobligeants.
Si les premières paroles de Kasumi avaient presque apaisé Taliesin, la façon dont il s'adressa à Victor lui fit voir rouge. -Taisez vous, mécréant ! lança-t-il d'une voix aussi froide qu'un sorbet à la guimauve tout juste sorti du congélateur. Il n'y a que moi qui ait le droit de parler ainsi à ce garçon !
La raison pour laquelle il se trouvait dans cette arène lui était enfin revenue à l'esprit. Les derniers événements, aussi étranges que déroutants - même s'il était fort probable qu'il ne s'agissait là que d'hallucinations causées par quelque virus local - lui l'avaient fait oublier. Mais il s'en souvenait, à présent : Kasumi avait insulté Victor, s'était moqué de lui de manière honteuse. L'avait fait pleurer. Et cela... Cela, Taliesin ne pouvait pas le tolérer ! Et pas simplement parce que ça lui avait coûté une chemise ! Une belle chemise dans laquelle le môme n'avait rien trouvé de mieux à faire que chialer et se moucher. -Vengeance !hurla l'elfe, au paroxysme de la fureur.
Se penchant, il saisit la dague cachée dans sa botte et la lança si habilement qu'elle frôla le visage de Kasumi en lui égratignant la joue. La première goutte de sang n'avait pas perlé de la blessure que Taliesin leva la main. Alors, dans un gémissement strident, comme si elle déchirait l'air qu'elle traversait, son épée vint à lui. Il resserra les doigts autour de sa garde et, lame brandie, yeux jetant des éclairs, s'avança vers le rôdeur.
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Le rôdeur porta la main à sa joue et vit, incrédule le sang maculant ses doigts. Puis, comme pris dans une gangue de glace qui lui engourdissait le corps et les sens, son regard détailla la progression lente et terrible du barde vengeur. Les yeux de celui-ci lui semblaient réclamer vengeance et douleur sans nom. Cherchant une échappatoire, le demi-elfe s’apprêtait à prendre la fuite pour éviter le mortel courroux de son adversaire. Mais les portes de l’arène étaient fermement closes et les murs à pic et sans prise. La seule voie de sortie était le ciel. Il regretta de n’être pas devenu druide pour se transformer à volonté en oiseau comme on le lui avait parfois suggéré. Mais druide faisait vraiment ringard et aucun druide n’était invité en société. En général, ils n’osaient même pas sortir des bois, sans doute par peur du ridicule s’était toujours dit Kasumi. Quoiqu’il en soit, alors que Taliesin était presque sur lui, le fil de sa pensée accrocha enfin une idée exploitable. Il allait frapper là où ça faisait mal ! Ça oui ! Il savait le goût du barde elfe pour les apparences, il savait que seul le ciel pouvait le sauver maintenant. Il savait que le village des jeux était en bordure de mer, proche des zones de nidification des mouettes. Tous ces éléments disparates donnèrent lieu à un plan machiavélique dans l’esprit retors du rôdeur qui tendit son esprit vers les cieux. L’effet fut presque immédiat. La lumière de l’après-midi déclina subitement. Un vrombissement lancinant se fit entendre et passa au-dessus d’eux avant de s’en aller à tire d’aile et d’effectuer un second passage. Lorsque le soleil reprit ses droits sur l’arène, les seuls signes de l’attaque furent quelques plumes virevoltantes et un barde recouvert de fientes d’oiseaux.
- Ha ha ! Ton meilleur rôle : celui de l’épouvantail !
Le public retint son souffle : le coup était d'une vilénie indicible, d'une fourberie inimaginable, d'une imprévisibilité imprévisible, et chacun guettait, le cœur battant, la gorge sèche, la réaction du malheureux barde. Durant de longues secondes, celui-ci demeura parfaitement immobile, les yeux écarquillés, un rictus indéfinissable figé sur les traits. Puis il parla. -Mes cheveux... gémit-il
Doucement, ses doigts s'écartèrent. Son épée tombant sur le sable produisit un son étouffé qui se répercuta pourtant, glas terrible, sur les murs de l'arène. -Mes cheveux... Mes doux cheveux... Si brillants, si soyeux... Baignés chaque matin dans la rosée et les rayons du soleil levant... Il y avait dans sa voix toute la détresse du monde, et plus d'un spectateur en fut ébranlé. -Et mes vêtements... Faits par les meilleurs tailleurs de tout Hélonna... Des semaines, des mois de travail... Le fleuron de ma garde-robe... Un sanglot monta de sa gorge. Ses yeux se révulsèrent et, sans crier gare, il s'effondra, inconscient, terrassé par l'innommable sacrilège que Kasumi venait de lui infliger. -Nooooooooooooon !hurla Victor, brisant de son cri le silence de mort qui pesait sur les lieux. Fou de douleur, inconsolable, le petit garçon se jeta dans l'arène, La chance - ou peut-être sa dextérité hors paire - voulut qu'il tombât droit sur les épaules de Kasumi. S'y arrimant de toutes ses forces, il se mit à attaquer sa victime à coups de griffes et de crocs, véritable tornade vengeresse.
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Kasumi n’eut pas le temps de savourer la victoire à laquelle il songeait jour et nuits depuis des lustres. Le public, loin de le soutenir avait pris fait et cause pour le séduisant elfe. Estomaqué par cette discrimination aveugle qui réduisait à néant ses efforts, le rôdeur poussa un soupir de dépit. C’était l’histoire de toute sa vie : quelle que soit l’astuce et l’adresse dont il faisait preuve, toujours un homme ou un elfe emportait le cœur des foules.
Le rôdeur sentit un choc sur sa nuque, il crut d’abord à un projectile lancé contre lui, manifestation fruitière débordante des spectateurs… mais le projectile, non content de tenter de l’humilier, se démenait et mordait ! Les épaules du rôdeur se voûtèrent. A l’heure de sa plus grande victoire, les vivats de la foule qui auraient du le porter aux nues l’accablaient. Il voûta les épaules et se sentit démoralisé. A quoi bon poursuivre ce combat qui le verrait perdant même s’il brillait au combat ?
Pour le moment, il n’avait pas le dessus sur Victor, au propre comme au figuré. Le petit était aiguillonné par la rage et frappait sournoisement le rôdeur qui du se rouler sur le sol pour tenter de se débarrasser du petit enragé.
A la troisième roulade, Kasumi parvint à se débarrasser de son agresseur qui fut violemment propulsé au sol. Victor glissa sur plusieurs mètres, laissant derrière lui une profonde trace dans le sable, et il aurait continué longtemps sa course si le mur de l'arène, brutal, ne l'avait interrompue.
Le rôdeur se crut débarrassé du petit démon qu'il pensait assommé pour le compte. Après tout, si le mur s'était fissuré, il y avait des chances qu'il en allât de même avec le crâne de l'importun. Il en fut pour ses frais. Après à peine une demie seconde d'immobilité, Victor bondit sur ses pieds, poussa un cri qui se voulait impressionnant - mais qui ressemblait bien plus, somme toute, au couinement d'un lionceau qu'au rugissement d'un lion - et, les poings serrés, tête baissée, courut sus à son ennemi.
Pour un peu, on l'aurait pu pour un taureau décidé à abattre un toréador honni.
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Kasumi resta immobile devant la charge aveugle de la petite furie mais effectua un pas de côté au dernier moment. Victor qui avait bondit, doigts mains en avant, s’affala sur le sol peu dignement. Le rôdeur s’esclaffa et le pointa d’un doigt moqueur :
- Retourne à l’école, petit ! Ton père ne t’a pas confié à Galathée pour que tu te roules dans la fange comme une bête. Cesse de te rendre aussi ridicule que le barde que tu défends. Il est fini. Pars avec moi.
Le rôdeur s’approcha nonchalamment du corps encore secoué de sanglots de Taliesin.
- Tu as perdu. N’entraînes pas le gamin dans ta chute !
Le barde, dont l'esprit, coquille de noix minuscule, voguant dans un marasme trouble et agité entre conscience, inconscience, folie furieuse et mort cérébrale de niveau 45, ne répondit rien; Peut-être n'avait-il rien entendu, d'ailleurs.
Mais le gamin, lui, avait entendu. Il poussa un nouveau cri qui, cette fois, ressemblait à celui d'une belette naine miniature des abysses - folle furieuse, la belette, mais une belette tout de même - et bondit à la gorge de son adversaires, crocs découverts. Celui-ci tendit le bras pour se protéger. Un instant plus tard, Victor y était fermement accroché, ses dents enfoncées dans la chair de son ennemi. Et il serrait de plus en plus, le bougre ! S'il continuait ainsi, il n'allait pas tarder à atteindre l'os...
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Kasumi hurla de douleur alors que les petites dents rongeaient furieusement son avant bras. Il du secouer frénétiquement celui-ci pour faire lâcher prise au garçon fou furieux. Décidément, l’éducation laxiste dispensée par le barde avait le plus mauvais effet sur l’enfant. Le rôdeur décida de le reprendre en main. Et dans un cas aussi extrême, il n’y avait qu’une seule chose à faire pour le remettre sur le droit chemin. Le demi-elfe attrapa le garçon alors qu’il se précipitait une nouvelle fois à l’assaut. Il le tint à bout de bras pour le laisser s’épuiser à l’abri de ses dents avant de le faire basculer sur son genou et de lui administrer une fessée monumentale devant le public qui ne manquait pas une miette de l’étrange tournure du combat.
- Si tu continues, tu seras privé de dessert et Galathée te forcera à prendre un bain !
Victor était devenu cramoisi et ses yeux s'étaient embués. Sur son visage chiffonné, une kyrielle de sentiments purent se lire successivement, comme les dessins expressifs d'un livre d'images : de la colère, de l'indignation, de l'humiliation. Et, surtout, de la terreur face aux derniers propos de son bourreau. Il jeta un regard suppliant à Taliesin : mais si l'elfe s'était finalement redressé et lorgnait, hagard, le chaos marécageux qu'était devenue la lice, il paraissait encore incapable de lui venir en aide.
L'enfant songea à abandonner la lutte. Et il se serait sans doute rendu aux arguments imparables de Kasumi si un événement inattendu n'était venu entraver la marche des choses. Au moment où il ouvrait la bouche pour demander grâce, les portes de l'arène s'ouvrirent et, à pas décidés, entrèrent une escouade d'hommes en armure portant sur le torse un écusson à la devise explicite : "SÉCURITÉ".
Les organisateurs du concours avaient en effet décidé d'agir : cela ne faisait que trop longtemps que ces trois énergumènes perturbaient le spectacle. Ils avaient largement dépassé le temps qui leur était imparti, retardant les autres combats prévus. Et encore, s'ils avaient lutté de manière normale ! Mais non : depuis qu'ils étaient là, c'était du grand n'importe quoi, du délire, un inadmissible et insupportable torrent de débilité absurde ! Il fallait y mettre un terme ! Les spectateurs méritaient mieux que ça !
La douzaine de gardes s'approchaient donc, la mine féroce, l'arme au poing. Les trois Luméniens se retrouvaient dès lors face à une alternative simple et définitive. Soit courber l'échine et se faire virer comme des malpropres, soit résister. Lutter. Faire front. Se dresser face à l'arbitraire bien pensant qui s'octroyait le droit de leur imposer une vision bien particulière de ce que devait être un combat d'arène. Défendre leurs convictions et leur droit à une martialité* différente, originale, neuve.
Qu'allaient-ils choisir ?
*Ce néologisme a été dûment déposé par le rédacteur auprès de la Société Internationale des Aberrations Linguistiques
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Kasumi jeta un regard peu amène aux nouveaux venus qui imposaient leur présence au sein d’affaires quasiment familiales. Connaissant la faculté mentale de tels énergumènes à changer d’opinion suite à une discussion dûment argumentée, le rôdeur se garda bien de se risquer dans pareille aventure. Il relâcha Victor et se dirigea vers l’elfe auquel il tendit la main.
- Tu t’es bien battu pour un barde. Sans rancune ?
Alors que les agents de sécurité s’approchaient plus près pour les inciter à quitter promptement l’arène, le rôdeur fit éclater un petit sachet de poile à gratter qu’il avait obtenu en fouillant les paladins rencontré du côté de la tente des cartes merveilleuses. Le produit invisible à l’œil nu s’insinuerait bine vite sous leurs armures et provoqueraient une gêne atroce aux barbouzes tant qu’ils les porteraient.
Les gardes ne remarquèrent pas le manège du rôdeur : l'un d'entre eux saisissait déjà Victor à bras le corps. Le môme, trop choqué par ce qui venait de se produire, ne songea même pas à se défendre Les autres s'approchèrent des deux hommes, ceinturèrent un Taliesin apathique et un Kasumi faussement docile, et les conduisirent sans ménagement vers la sortie.
Mais, au bout de quelques instants, le tour du demi-elfe produisit ses premiers effets. Les gardes commencèrent à se tortiller, à se gratter discrètement, à grommeler... Et les choses allèrent en empirant. Bientôt, ils durent lâcher leurs proies et, le visage convulsé, les larmes aux yeux, ils se perdirent en frictions frénétiques. Certains, déjà, débouclaient leur armure pour pouvoir mieux tenter d'apaiser les terribles démangeaisons qui menaçaient de les rendre fous.
Cependant, ni Kasumi ni ses deux anciens adversaires n'étaient exempts du phénomène : à cause de la brise légère qui soufflait sur l'arène, ils avaient écopé de leur part de poudre, et ils avaient bien du mal à ne pas se mettre dans des états similaires à ceux des membres de la sécurité...
L'entrée des lices était proche, cependant. Peut-être pouvaient-ils fuir... Ou, s'ils agissaient avant que leurs démangeaisons n'empirent, partir avec les apparences de la dignité : certains spectateurs avaient vu ce qu'avait fait le rôdeur, et ils riaient déjà à gorge déployée, murmurant la chose à leurs voisins. De proche en proche, la rumeur se rependait...
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Kasumi faussa compagnie au garde qui venait de le lâcher pour se gratter frénétiquement la plante du pied gauche tout en essayant de se gratter l’arrière du coude droit ce qui provoqua comme on pouvait s’y attendre un grand fracas d’armure sur les pavés du couloir menant vers la sortie. Une sortie vers laquelle le rôdeur se dirigea d’un pas faussement nonchalant en sifflotant, fier de la réussite de son petit tour et pressé de trouver une grande mare de lait, seul remède vraiment efficace contre l’herbe spéciale qu’il avait employée. Le rôdeur fit signe aux deux autres Luméniens de le suivre comme pour clore définitivement l’incident du défi. Peut être la taverne offrirait-elle suffisamment de remède lacté pour eux trois mais la bière pourrait aussi faire l’affaire ce qui s’accordait plus aux consommations habituelles des Dorrandiens d’après les souvenirs de Kasumi.
Si Victor et Taliesin étaient parvenus à conserver une attitude digne alors qu'ils quittaient l'enceinte de l'arène, il ne demeurait à présent plus grand chose de celle-ci. Malgré tous leurs efforts, ils ne pouvaient faire autrement que se contorsionner afin soulager les plus virulentes de leur démangeaisons. Et, en plus de cela, le barde dut convaincre le gamin de ne pas arracher immédiatement ses vêtements imprégnés de poudre pour faire cesser la torture. Lui-même l'aurait bien fait, mais il avait encore assez de maîtrise pour vouloir d'abord trouver un endroit discret...
Lorsque Kasumi leur fit signe, ils le regardèrent avec méfiance. Ils ne comprenaient pas réellement à quoi avait servi son tour : certes, les gardes avait été vaincus... mais eux aussi étaient atteints ! Peut-être l'avait-il fait exprès ! Pour les tourmenter encore ! Le vil, l'affreux !
Enfin, peut-être pas, vu comme le rôdeur semblait souffrir également de son abominable poudre... Alors, il était possible qu'il connaisse un moyen d'en annuler les effets. Ce serait la moindre des choses ! Eux avaient songé à courir vers les falaises et à se jeter dans la mer... Mais si Kasumi avait un truc évitant le risque de s'écraser sur des rochers, cela valait peut-être le coup d'essayer...
Ils échangèrent un regard larmoyant, hésitèrent, puis lui emboîtèrent finalement le pas en direction de la taverne. Après tout, ils n'avaient pas grand chose à perdre.
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), c'est ici ! Pas de règles donc, jouez cela en sérieux ou délire selon votre goût, avec des dés ou à l'amiable ; les prêtres n'interviendront pas pour vous séparer, et les guérisseurs ne s'aventureront dans la lice qu'une fois le combat terminé. Une entente préalable entre joueurs est vivement conseillée.
