[Quête] Par monts et par vaux

[Taliesin]

La jeune elfe garda longuement le silence, les traits froncés par la réflexion.
-De prime abord, aller trouver le juge d'une cité proche paraîtrait la meilleure solution. Pourtant... Montcerf est revenu depuis peu dans la région. Mais sa famille est ancienne, très ancienne, et les mariages l'ont liée à bien des nobles des environs... Son père, son grand-père avaient des amis qui n'hésiteront pas à protéger son rejeton. Ce serait donc risqué d'aller porter l'affaire devant les autorités locales. On pourrait vous débouter. Pire, il pourrait y avoir des représailles. Le plus sûr serait donc d'aller directement à Luménis. Le trajet est long, certes... Mais les hauts resopnsables de la cité ne sont en rien liés aux Montcerf. Je ne sais pas comment on peut les contacter, c'est sans doute long... Mais, vraiment, cela me paraît la solution la plus viable.

[Galathée]

Galathée resta muette de stupeur.
« Luménis ? Mais c’est à… à des dizaines de lieues ! Il n’y a aucune autre cité dotée d’un tant soit peu d’indépendance sur l’île ? Eredhùn ? »
Mais Valaellyn secoua la tête.
« Bon sang, Luménis… »
La rôdeuse releva les yeux, quêtant la réaction de Mathieu et de Taliesin.

[Taliesin]

Le barde s'était renfrogné, mais il ne dit rien. Quant au rôdeur, il finit par hocher la tête.
-On pourrait avoir une chance dans une cité côtière, mais... S'il faut recourir à la force pour abattre Montcerf, les juges locaux rechigneront, préféreront trouver un compromis... Compromis duquel le comte finira forcément vainqueur. Je crois malheureusement que Luménis est la seule solution. Cependant, rien ne vous oblige à y aller, Galathée. Je peu très bien m'en charger. Je ne connais personne là-bas, mais... On dit que le nouveau gouvernement est composé d'anciens résistants : si je précise que les soudards qui s'en sont pris à nous étaient d'anciens morféens, sans doute m'écoutera-t-on...

[Galathée]

« Je ne sais pas comme ça… Quelle poisse… » grommela-t-elle.
La rôdeuse se frotta le visage des paumes et poussa un bref soupir.
« Valaellyn, pouvez-vous aller jeter un coup d’œil sur notre prisonnier ? Sa blessure m’a l’air en voie de cicatrisation, mais un second avis serait sans doute opportun. »

[Taliesin]

-Bien sûr... fit-elle, avant d'ajouter : Quelle que soit la décision que vous preniez, je ne peux que vous conseiller d'attendre un peu : les soldats du comte sillonnent les routes et diffusent vos signalements. Bientôt, ils rentreront chez eux, comptant sur la délation... Quitter la zone d'influence de Montcerf sera toujours risqué, mais si vous restez à l'écart des villages, vous courrez moins le risque de faire de mauvaises rencontres.
Tandis qu'elle s'éloignait, les deux hommes demeurèrent pensifs. Mathieu finit par reprendre la parole :
-Je peux vraiment le faire, dit-il. Vous n'avez pas à vous imposer ça.

[Galathée]

Elle dévisagea le rôdeur, qui quelques jours plus tôt, refusait de se laisser embarquer dans cette histoire. Son revirement était pour le moins spectaculaire, mais elle savait que le mal fait à ses proches, même s’il avait voulu être hors de leurs vies, l’avait profondément affecté. Le laisser aller seul semblait une injustice criante. En même temps, elle ne pouvait pas abandonner Taliesin et Victor pendant de longues semaines, et leur imposer de rallier Luménis était inhumain.
Elle hésita cependant une seconde.
« Merci… Je vous fournirai le nom de quelques personnes que j’ai connues là-bas. Qui pourront vous introduire auprès des hautes instances, je l’espère. » dit-elle finalement.

[Taliesin]

-Très bien, fit le rôdeur. Alors je partirai cette nuit, si la prêtresse juge le prisonnier en état de se déplacer. J'ai bien entendu son avertissement, mais je ne compte pas passer par les routes. Je couperai par la forêt, en restant au sud des terres de Montcerf. Plus tôt nous aurons atteint Luménis, plus tôt les autorités pourront mettre un terme à ses méfaits.
Il s'en fut alors rassembler ses affaires. Il était fort probable qu'il puisse échapper aux soldats en suivant un itinéraire détournée. Mais Galathée eut l'impression que ce n'était pas là la seule raison de son départ précipité : peut-être, maintenant qu'il le savait hors de danger, avait-il envie de filer avant le réveil de son frère.
-Je suis désolé, je ne voulais pas t'influencer avec mes grimaces, dit finalement Taliesin, visiblement très conscient de la mine qu'il avait tirée lorsque Valaellyn avait rendu son verdict. C'est jsute qu'un tel voyage... Mais si tu avais décidé de le faire, j'aurais respecté ta décision.

[Galathée]

« Ne t’inquiète pas. C’était la solution la plus raisonnable. La meilleure pour tout le monde. » fit-elle en posant la main sur son bras.
« Je vais aller écrire cette missive pour qu’il puisse partir dès qu’il le désire. Il faudrait trouver des arrangements pour que tout le monde puisse dormir plus ou moins confortablement. Je ne sais pas ce que nous pouvons imaginer… »

[Taliesin]

La petite maison était en effet surpeuplée, mais ils n'eurent guère de mal à trouver un arrangement. Guilhem avait été installé dans la chambre de Victor ; Galathée et Taliesin laissèrent la leur aux plus jeunes de ses fils et à sa fille. Quant aux aînés, ils devraient dormir dans la salle commune. Tous protestèrent, prétendirent que la grange suffirait, mais la rôdeuse et l'elfe sentirent qu'ils redoutaient d'être séparé et éliognés de leur père convalescent, et les Merlus, embarassés mais rassurés, finirent cependant par accepter.
Tandis que Taliesin et Victor - qui semblait persister à bouder la jeune femme - débattaient de l'endroit dans lequel il s'installeraient, Galathée gagna l'écurie. Valaellyn avait soigné le prisonnier avant de retourner au village, non sans avoir sermonné Mathieu sur les risques qu'il prenait. Quant à ce dernier, il avait déjà préparé deux chevaux et était en train d'aider Boris, toujours ligoté, à monter en selle.

[Galathée]

Galathée s’approcha du rôdeur et le prit à l’écart, lui remettant un pli.
« Portez ceci au Seigneur Artwin. Il habite dans le Quartier Sud, c’est la partie riche de Luménis. Il pourra vous aider, j’en suis persuadée. »
S’il est vivant, évidemment, songea-t-elle.
Mathieu fit mine de retourner à son cheval.
« Attendez… Y a-t-il… quelque chose que je puisse dire à votre frère ? De votre part ? »

[Taliesin]

Mathieu, gêné, demeura un moment silencieux.
-Dites-lui ce que vous voulez, souffla-t-il finalement; Je n'ai pas de message à lui transmettre.
Il regarda en direction de la maison.
-Empêchez-le juste de retourner voir la ferme, ou de se venger... si la fantaisie lui en vient. Et il se peut qu'elle lui vienne, surtout quand il apprendra ce qu'on subi les petits. Mais lui, les mômes et vous-même devez rester cachés. Ne pas aller au village. Vous serez en danger tant que Montcerf sera debout. Enfin, pardonnez-moi, vous savez tout cela, ce n'est pas à moi de vous donner des conseils... Je ferai aussi vite que je peux, en tout cas.

[Galathée]

Galathée acquiesça.
« Ne vous inquiétez pas. Je ne laisserai pas votre frère faire n’importe quoi. Il sait que les enfants ont besoin de lui. »
Elle recula tandis qu’il montait en selle. Elle jeta un regard embarrassé au prisonnier, mais ne lui dit rien. Mathieu était un rôdeur, il avait fatalement des principes sous ses dehors rustres.
« Prenez garde à vous. » ajouta-t-elle au moment où les voyageurs se mettaient en route.
Elle les regarda traverser le sous-bois, tonitruants dans le silence de la nuit, resta immobile jusqu’à ce qu’ils disparaissent, puis poussa un soupir phénoménal. Elle fit volte-face et détailla la silhouette endormie de leur petite maison, songea à ceux qui s’y entassaient, désormais en sécurité, puis à Victor et Taliesin, dont les ombres se dessinaient sur l’herbe rase, non loin de la lisière des bois. Elle avait imaginé des retrouvailles sous d’autres auspices, mais la vie était faite d’aléas. Il fallait louvoyer et composer, éternellement, cela n’avait rien de surprenant. Elle les rejoignit donc et les accompagna jusqu’à l’écurie, où ils se nichèrent dans la paille. Victor semblait buté, alors qu’elle était restée, pour lui, plutôt que d’accompagner le rôdeur. Elle le trouve compliqué et ingrat, se souvint qu’il n’était qu’un gosse, et se promit de lui parler dès le lendemain. Taliesin était tranquille, peut-être un peu mal à l’aise à cause de la tension entre l’enfant et la jeune femme, mais il accueillit Galathée avec sa douceur coutumière, et elle reposa bientôt contre lui. Le sommeil les gagna rapidement, salvateur après les émotions de la soirée.

[Taliesin]

Taliesin s’éveilla à l’aube. Serré contre la rôdeuse, il avait dormi d’une traite, et, autant qu’il puisse s’en souvenir, sans faire de cauchemars.
Troublé, il l’était pourtant : les dernières lettres de la rôdeuse lui avaient laissé soupçonner que quelque chose de grave était en train de se produire, et le fait qu’elle eut gardé dans ses courriers ce quelque chose sous silence, même si c’était pour le préserver, n’avait fait qu’empirer son inquiétude. La venue des Merlu et l’horreur émanant des bribes de récit qu’il avait pu entendre le lui avait cruellement confirmé, réveillant en lui le souvenir, guère éteint à vrai dire, de certaines atrocités qu’il aurait préféré évanouies à tout jamais.
Cependant, Galathée était de retour. Bien vivante. Et cela seul lui paraissait compter. Le monde et ses drames continueraenit sans qu’ils y puissent rien faire. Mais elle était là, et cela suffisait à éloigner quelque peu ses démons intérieurs. Le rôdeur et le prisonnier étaient partis pour Luménis, les Merlus, hors de danger, de surcroît. Peut-être les choses s’arrangeraient-elles… Peut-être la jeune femme serait-elle libérée, en fin de compte, de la culpabilité qui semblait la miner. S’il pouvait faire quoi que ce soit pour l’apaiser, il comptait bien ne pas ménager ses efforts.
Il était encore tôt, cependant, et il ne fit pas un mouvement pour se lever, se serrant au contraire davantage contre la rôdeuse. Elle dormait encore, de même que Victor, et demeurer près d’eux, dans cette aube paisible, encore vierge des soucis que le jour apporterait, lui semblait une bien douce perspective.

[Galathée]

Le gazouillis des oiseaux éveilla Galathée plus tard dans la matinée. Un peu désorientée, elle se redressa dans la pénombre tiède de l’écurie, et nota que ses deux compagnons s’étaient éclipsés. Se frottant les yeux, elle gagna l’air libre, constata avec surprise que le soleil était déjà haut dans le ciel, et chemina, tranquille, vers la maison d’où s’échappait un vacarme bon enfant. Elle déboucha au milieu d’un petit déjeuner désordonné, et la détente perceptible qui régnait autour de la table ne pouvait vouloir dire qu’une chose : Guillhem avait dû reprendre conscience. Elle en eut la confirmation lorsqu’un des petits Merlus vint le lui annoncer avec un sourire timide, avant de retourner à ses agapes. En réalité, le repas était frugal, mais Taliesin avait puisé sans compter dans leurs réserves, en hôte consciencieux. Seul Victor décocha un regard noir à la rôdeuse lorsqu’elle balaya la pièce du regard, et elle se promit de remédier à ce malheureux désaccord dès qu’ils auraient fini de manger. Mais elle voulait d’abord s’entretenir avec le fermier, qui avait dû être relativement déstabilisé en découvrant l’endroit où il se trouvait. Elle se glissa donc jusqu’à l’elfe, qui contemplait la maisonnée avec un air vaguement effaré, lui toucha doucement la main, le gratifia d’un sourire reconnaissant, puis disparut dans la chambre où reposait Guillhem. Repousser ne servait à rien.

[Taliesin]

Le fermier était assis au bord du lit, tout habillé, et si son teint pale et ses traits tirés attestaient son état de convalescent, il était évident que les soins de Valaellyn avaient fait des miracles. Du moins au plan physique. Pour le reste, Galathée n'eut qu'a lui jeter un regard pour le trouver troublé, inquiet.
Il adressa cependant un sourire chaleureux à la jeune femme, et, spontanément, lui prit la main.
-Mathilde m'a dit ce qu'il s'est passé, fit-il, la voix altérée. Je... Merci d'être intervenue. Merci de les avoir protégés et amenés en sécurité...

[Galathée]

La jeune femme sourit douloureusement.
« Vous ne devriez pas me remercier. Vous devriez me maudire. C’est tout ce que je mérite. » murmura-t-elle. « Si je n’avais pas été là, rien de tout cela ne serait arrivé. Et c’est à Mathieu que vos enfants doivent la vie. Et c’est encore à lui que nous devons nous en remettre pour que les choses s’améliorent. »
Elle jeta un coup d'oeil vers la fenêtre.
" Je suis désolée pour la ruine que j'ai apportée sur votre famille. Je ne me le serais pas pardonné si l'un d'entre vous avait dû... Je n'ai fait que tenter, maladroitement, de limiter les torts..."

[Taliesin]

Le fermier soupira.
-Ce n'est pas vous qui avez apporté la ruine... Vous n'avez pas tué mes bêtes, pas frappé mes enfants... Vous avez juste tenté d'enquêter ce qui se passait. Ce qui s'est passé... ce serait sans doute produit, de toute façon. Les soldats devaient garder visage honorable encore un peu, le temps d'assoir le pouvoir de leur maître. Mais ils avaient du mal, et j'ai vu leurs regards... Une fois la région soumise, ils ne se seraient pas gênés... Si cela n'était arrivé aux miens, ce serait arrivé, tôt ou tard, à d'autres. Vous n'êtes pas responsable de ce qui s'est produit, Vous et Mathieu avez empêché le pire : tout le monde est vivant. De cela, je vous suis redevable.
Il observa un instant la porte entrebâillée par laquelle filtraient, animées, les discussions de ses enfants en train d'achever leur petit déjeuner.
-Il faudra cependant que nous songions à trouver un endroit où nous cacher. Nous ne pouvons pas, décemment, nous imposer chez vous... Vous avez déjà pris trop de risques en nous accueillant.

[Galathée]

« Il n’en est pas question. » dit la rôdeuse. « Nous avons de quoi vous accueillir ici, nous ne risquons rien, je connais la forêt… Vous et vos enfants ne manquerez de rien. Et je suis persuadée que Mathieu reviendra avec de bonnes nouvelles. Vous ne devez pas vous inquiéter. »
Elle toucha le front du fermier pour prendre sa température. Il avait encore un peu de fièvre, mais plus autant que la veille. Le cauchemar allait s’effacer, peu à peu. Et même si les semaines à venir seraient rudes, avec un peu de chance, Mathieu reparaîtrait avant que le temps se gâte.

[Taliesin]

Guilhem la dévisagea un instant, hésitant, puis se rendit à l'évidence : partir serait faire courir un trop grand risque à sa famille.
-Bien, fit-il, à la fois résigné et soulagé. Nous resterons... Merci encore pour tout ce que vous avez fait... Mais ne comptez pas que mes gosses et moi restions bras croisés pendant que vous trimiez. Mon frère ne sera pas de retour avant peut-être deux mois. Il va falloir nous organiser, pour la nourriture et le reste, mais... Je pense qu'on s'en sortira.
Il sourit puis se leva. Il tangua un instant, s'appuya contre le mur, puis reprit son équilibre.
-Je crois... que je ne serait pas contre manger un peu, dit-il. Et comme, à les entendre, vous avez régalé les petits...

[Galathée]

Malgré les inquiétudes de Guillhem, les Merlus s’intégrèrent aisément dans le quotidien de Taliesin, Galathée et Victor. Le temps était clément, la nature luxuriante, et les réfugiés comme leurs hôtes tablaient sur deux mois de cohabitation. C’était évidemment un bouleversement important, particulièrement pour ceux qui avaient espéré panser leurs plaies en solitaire. En même temps, les nouveaux arrivés étaient serviables et respectueux, ne cherchant pas à s’imposer dans l’intimité du petit trio luménien. Après bien des réflexions complexes, il fut convenu que les Merlus occuperaient l’écurie. C’était un bâtiment de bonne taille, qui s’étendait sur deux étages, et la toiture était saine. Avec la chaleur, les animaux n’avaient pas besoin d’y trouver refuge et les arbres leur offraient suffisamment d’ombre pour qu’ils n’en manquent pas aux heures où le soleil tapait dur. Les premiers jours de cohabitation servirent donc à aménager la bâtisse pour qu’elle offre un semblant de confort, et tout le monde participa à cette tâche, à l’exception de Guillhem, qui n’en avait pas encore la force.

Galathée prit le temps de renouer avec Victor, déployant des trésors de patience pour rassurer l’enfant. Louvoyant entre promesses et vérité, elle avait l’impression de se métamorphoser en équilibriste, oscillant sur le fil ténu de la santé mentale du petit garçon, désireuse de ne pas lui mentir, de ne pas le tromper, mais de ne pas le terroriser. Elle-même ne savait pas bien ce qu’elle espérait encore du monde, mais à nouveau, elle se retrouvait au milieu d’un champ de bataille, où les blessés réclamaient l’attention de ceux qui tenaient encore debout. Il fallait faire face et elle puisait en elle-même sans compter, réalisant peu à peu qu’elle était dotée d’une force imprévue.
Elle prit bien sûr le temps de retrouver Taliesin. Plus timidement sans doute, car les oreilles s’étaient multipliées autour d’eux, mais l’élan était irrésistible. Peu à peu, ils osèrent exprimer leur affection plus spontanément, mais toujours avec pudeur, ignorant au juste quelle histoire se trouvait derrière la solitude d’un père et ses sept enfants. Mais ils ne ressentirent jamais d’hostilité ou de jalousie, et leur relation fut bientôt connue et acceptée de tous. La rôdeuse hésitait à poser des questions à Guillhem, peut-être lui offrir une opportunité de parler, mais elle ne voulait pas être intrusive et savait qu’épancher les tourments de son âme n’était pas la panacée en matière de soulagement. Elle se tâcha donc d’être disponible, mais ne força rien, jamais. Guillhem restait gêné de s’imposer à eux, elle le sentait, et elle ne voulait pas l’embarrasser davantage.

Les enfants, de leur côté, se relâchèrent plus rapidement. Certains gardaient des angoisses imprévisibles, en témoignaient les cris et les draps mouillés qui s’échappaient souvent des écuries, mais ils présentaient dans l’ensemble un front stoïque. Au fil des semaines, cependant, devant la bienveillance de leurs compagnons, ils finirent par desserrer leur ensemble, et s’ouvrir davantage à l’inconnu. Galathée nota qu’ils assignaient des rôles précis à chaque adulte dans leur entourage, processus naturel et non réfléchi, reflet d’une organisation nécessaire dans leur univers bouleversé.
Bien sûr, Guillhem restait leur père, autorité bienveillante mais sévère, et les enfants l’aimaient sans retenue. Ils quêtaient son approbation, obéissaient à son verbe et veillaient jalousement sur sa convalescence, comme une bande de petits chats sauvages. Mathilde assumait une position hybride, à la fois mère et grande sœur, et Galathée devinait que la situation devait être inconfortable pour la jeune fille. Mais elle s’en acquittait avec le sourire, efficace et solide, peut-être résignée, la rôdeuse ne voulait pas extrapoler. En la voyant trimer sans compter, Galathée s’en voulut cependant d’avoir eu des envies de liberté, prenant conscience des barreaux bien plus solides qui retenaient d’autres âmes. Petit à petit, cependant, Mathilde en vint à se reposer sur la rôdeuse, discrètement, timidement, sans vraiment jamais rien exiger. Mais Galathée était la seule femme adulte à disposition, quelqu’un avec qui on peut partager des choses qui ne s’échangent qu’entre demoiselles. Elle fut impressionnée par la force de caractère de la jeune fille et s’y lia sans arrière pensée. Elles n’étaient pas trop de deux pour faire face à la folie furieuse qui saisissait parfois le groupe des garçons (et auquel, il faut bien l’avouer, Taliesin et même parfois Guillhem se joignaient).

Victor fut incorporé dans la dynamique des plus jeunes Merlus sans même un sursaut. Malgré sa timidité et son manque d’assurance, il se retrouva même meneur improvisé de plus d’une escapade : il était après tout le petit maître des lieux. Comme Galathée l’avait toujours supposé, le contact avec des enfants de son âge lui fit un bien fou, et son humeur s’en trouva fortement améliorée. Bien sûr, il lui restait des affres nocturnes insondables, des moments où ses yeux s’embuaient brutalement, au détour d’une conversation, sans prévenir, des colères improbables sur des sujets triviaux, mais dans l’ensemble, la diversion des réfugiés était une aubaine. Il retrouvait son enfance, la touchait, l’embrassait, la vivait avec cacophonie et énergie. La jeune femme ne préférait pas songer à ce qu’il se produirait lorsque les Merlus regagneraient leurs pénates. Toute bonne chose avait ses mauvais côtés.

Taliesin connut une ascension fulgurante dans le cœur des enfants. D’abord étrange étranger aux oreilles pointues, créature de mythe, inconnue et imprévisible, il s’improvisa rapidement au carrefour d’un frère aîné complice et d’un grand père malicieux. Il parvenait à se mettre au niveau des petits, partageant leurs aventures et leur en suggérant de nouvelles, gardant leurs secrets, répondant à leurs questions les plus fantasques, invoquant trésors, dragons et chevaliers d’un geste ou d’un mot. Lorsqu’il y avait des étoiles dans le regard d’un Antoine ou d’un Mathieu, il était souvent responsable. Lorsqu’une effroyable bêtise était commise, il était souvent responsable aussi (indirectement parfois). Il était souvent épuisé à la nuit, signe qu’il dépensait une énergie folle pour présenter ce visage à leurs invités, mais Galathée lui en était immensément reconnaissante, chose qu’elle essayait de lui prouver continuellement. Il semblait y trouver son compte, lui aussi, mine de rien, en dépit des ombres qui l’observaient encore quand l’obscurité s’étendait sur la clairière.

Galathée se retrouva tout à la fois juge, médecin et confesseur. Elle attirait le conflit, qu’on lui confiait pour le résoudre, qu’il soit interpersonnel, physique ou privé. Un peu décontenancée par cette position presque rigide, elle s’y trouva cependant bien. On comptait sur son impartialité et sa compréhension, sur sa bienveillance aussi, sans la charger d’un poids plus émotionnel dont elle n’aurait su que faire. Elle comprit peu à peu qu’elle avait craint de se substituer à la mère des enfants et que par son attitude, elle avait glissé une distance entre eux, distance qui lui permettait d’être au cœur du groupe sans jamais s’y imposer, garante d’une certaine harmonie.

Le dernier personnage à intégrer leur nouvelle dynamique fut évidemment la belle Valaellyn, qui ne manquait pas une occasion de leur rendre visite, toujours chargée de cadeaux. Elle pensa à une chèvre supplémentaire, ainsi qu’à quelques poules, leur dénicha des vêtements, de quoi confectionner des matelas supplémentaires, et leur apportait toujours des victuailles difficiles à trouver lorsqu’elle se glissait jusqu’à leur chaumière, protégée par les charmes de sa déesse. Son arrivée dans la clairière était toujours synonyme de fête.

[Taliesin]

Les jours succédèrent au jours dans la clairière, et l'été vint bientôt à s'alanguir. Ses ombres s'allongèrent, ses nuits fraîchirent insensiblement, puis certains des rameaux verdoyants qui paraient les arbres alentours virent à prendre d'infimes teintes d'or ou de roux. Autant de signes rendant indéniables l'approche de l'automne ; autant d'indices affirmant l'indiscutable verdict : les deux mois étaient passés, et Mathieu n'était toujours pas revenu.
Si la petite communauté n'avait pas été exempte d'inquiétude jusqu'ici, elle avait néanmoins réussi à préserver une certaine quiétude : le trajet jusqu'à Luménis était long, les négociations avec les autorités le seraient sans doute autant. Mais il en alla autrement lorsque le délai putatif eut expiré. Guilhem, le premier, fut gagné par l'angoisse, et bien qu'il fit de gros efforts pour la dissimulé, Galathée, Taliesin et les plus vieux des enfants s'en rendirent compte et en vinrent insidisusement à la partager. Les plus jeunes, eux-aussi, bien que plongés dans leurs jeux incessants, ne tardèrent guère à percevoir le changement d'atmosphère. Peu à peu, la tension alla croissante, et des disputes éclatèrent entre ces derniers,, rares mais violentes, ne brisant que pour peu de temps l'unité du groupe mais témoignant s'il en était besoin de la rude réalité qui reprenait lentement ses droits.
L'attente, heureusement, ne se prolongea pas outre mesure. Par un beau soir ensoleillé, l'on entendit le pas de chevaux dans le sous bois. Valaellyn en émergea bientôt, suivie de près par un Mathieu amaigri, au visage marqué de cernes, à la mise couverte de la poussière des chemins. Ils sourirent vaillamment à la petite troupe qui se porta aussitôt à leur rencontre, mais cela ne trompa personne : quelque chose s'était mal passé.
Le rôdeur et la prêtresse aurait sans doute voulu parler en privé aux adultes, mais ils comprirent bien vite que s'isoler ne servirait à rien, que les plus petits n'accepteraient pas d'être tenus à l'écart. L'homme prit donc le taureau par les cornes et se lança sitôt descendu de monture.
-Montcerf a été capturé, et son armée défaite, dit-il d'une voix marquée par la fatigue. Malheureusement, il a brûlé la ferme. Il n'en reste rien.
Plus tard, lorsque les Merlus eurent accusé le coup, lorsque lui-même se fut quelque peu reposé, il raconta en détail son périple. Grâce à la recommandation de Galathée, le seigneur Artwin l'avait reçu dès son arrivé à Luménis et accepté de l'aider sitôt entendu son récit. Il avait plaidé la cause des habitants de la région auprès des plus hautes autorités qui, convaincues à leur tour, avaient dépêché deux cent hommes pour mettre à bas le hoberau tyrannique. Mathieu les avaient conduits jusqu'à Montcerf en empruntant des chemins de traverse. Leur arrivée fut donc une surprise totale, et la brève bataille qui s'ensuivit, une victoire absolue. Le comte avait été abandonné par la majorité de ses troupes, les civils engagés à grand renfort de promesses s'étaient rendus presque immédiatement, les soudards ramenés de la capitale carapatés dès que toute résistance leur fût apparue comme inutile. Ce qui n'avait pas empêché nombre d'entre eux d'être capturés.
-Le capitaine commandant nos forces avait prévu d'installer une commission dans le bourg et de dédomager les victimes de Montcerf en puisant dans ses richesses. Malheureusement, les coffres de ce bougre sont complètement vides : il a dépensé jusqu'à son dernier sol pour payer son armée personnelle. L'officier luménien m'a dit qu'il plaiderait pour que Luménis paye elle-même les dédomagements... Mais cela prendra du temps, et rien n'est assuré, les finances de la cité de Lathandre étant déjà grévées par l'effort de reconstruction.
Il posa un regard sincèrement navré sur son frère, sa nièce, ses neuveux qui, tous, semblaient effondrés. Puis, soupirant, il sortit un rouleau de parchemin de son sac.
-Galathée... Le seigneur Artwin m'a donné cette lettre pour vous...
La jeune femme ne put la lire qu'au milieu de la nuit, une fois les Merlus retirés dans l'étable, une fois Mathieu et Valaellyn sortis s'installer près de la rivière. Quant à Victor et Taliesin, profondément affectés par la détresse de la famille avec laquelle ils s'étaient profondément liés au cours des deux mois précédents, ils n'avaient encore pu se résoudre a aller se coucher.

Madame,

J'espère que cette lettre vous trouvera en bonne santé et que la sinistre affaire dont m'a fait part M. Merlu aura pu être réglée dans les meilleures conditions possibles. Je suis désolé que le malheur ait fui notre Luménis pacifiée pour gagner les campagnes, et je vous prie de croire que j'ai fait mon possible pour que le comte de Montcerf ne puisse continuer plus longtemps ces agissements inqualifiables.
Si je me permets de vous écrire aujourd'hui, c'est que je devais vous faire part de certaines informations touchant au jeune Desmoulins dont vous avez fort généreusement accepté de vous occuper. En effet, notre gouvernement a décidé d'indemniser les victimes de la tyrannie morféenne, et le garçon n'a pas été oublié. Grâce aux sommes délobquées par l'Etat et aux donations de nos concitoyens - particulièrement importantes dans son cas, je dois le dire, son père étant considéré par beaucoup comme un héros - nous avons pu racheter la maison qu'occupaient ses parents dans le quartier ouest, ainsi que la ferme de son grand-père paternel, située non loin de la ville.
Les autorités m'ayant confié la tutelle des orphelins ayant séjourné dans mes murs, j'assure pour l'heure la gestion des biens du petit Desmoulins. Cependant, je me ferai un plaisir de vous la céder, pour peu que vous acceptiez de régulariser les liens qui vous unissent à l'enfant. En clair : si vous êtes d'accord pour l'adopter. Je suis parfaitement conscient que la vérité des sentiments n'a cure de paraphes en bas de parchemins, mais je me dois d'agir en suivant les règles. De plus, semblables procédures peuvent parfois faciliter les choses et éviter, pour l'avenir, des problèmes certes peu probables mais néanmoins existants. Rien ne presse, toutefois : je continuerai à m'occuper des biens du jeune Desmoulins autant que nécessaire.
Je profite également de la présente pour vous signaler que, en tant que membre active de la résistance au tyran, vous vous êtes vue accorder la citoyenneté d'honneur de Luménis. C'est bien peu de choses eut égard aux sacrifices que vous avez consentis et à l'aide que vous nous avez apportée, mais c'est le moins que la cité de Lathandre pouvait faire pour vous témoigner notre gratitude.

Je vous souhaite tout le bonheur possible, à vous et à l'enfant, pour les jours à venir. Et je prie pour qu'ils vous épargnent les turpitudes et les malheurs engendrés par la folie des hommes. Vous en avez eu plus que votre compte.

Bien à vous.

Artwin.

[Galathée]

Le message laissa Galathée sans voix.
Les nouvelles qu’avaient apportées Mathieu étaient douloureuses, mais finalement attendues. Ils avaient pleuré la ferme, mais elle était perdue depuis l’instant où ils avaient laissé filer un des soudards. Que Montcerf n’ait pas un sou vaillant, et ne puisse en rien dédommager ceux qu’il avait spoliés était évidemment bien plus dramatique. Cependant, il était tombé, ainsi que ses troupes sanguinaires, et la rôdeuse avait le sentiment confus que la vie prendrait le dessus. Ils avaient bien vécu, ces derniers mois, et l’automne était une des saisons les plus généreuses. S’ils s’organisaient, peut-être tiendraient-ils jusqu’à ce que les Luméniens trouvent de quoi les compenser. Mais la jeune femme avait vu la ville, les dégâts que les Morféens avaient causés dans le quartier ouest, notamment, et il lui semblait que six mois plus tard, les besoins devaient toujours être criants. D’autant que l’hiver ne tarderait pas à ensevelir les rues tranquilles sous son manteau meurtrier...
Mais il y avait ce courrier.
Elle releva les yeux et les posa sur Taliesin et Victor, qui semblaient ne pas savoir quoi faire d’eux-mêmes, et s'étaient assis devant l'âtre mourant, silencieux.
« Je dois vous parler. » fit-elle, d’une voix altérée, qu’elle éclaircit dans son poing. « Ces… informations vous concernent. »

[Taliesin]

Victor et Taliesin émergèrent aussitôt de la torpeur somnolente dans laquelle les avaient plongé la fatigue et les sinistres nouvelles apportées par Mathieu. Dans un même mouvement, ils se tournèrent vers la jeune femme et la dévisagèrent avec attention. L'enfant était visiblement anxieux ; l'elfe, lui, présentait une mine impassible. Mais Galathée ne s'y trompa pas : elles le connaissait assez, savait suffisamment déchiffrer l'expression de ses traits pour savoir qu'il se parait d'un masque détaché pour mieux cacher ses inquiétudes
-Qu'est-ce qu'il y a ? demanda finalement Victor, d'une voix aussi peu assurée que celle de la rôdeuse.

[Galathée]

Elle les rejoignit, mais hésita au moment de s’asseoir, ne sachant pas où s’installer. Autrefois, elle se serait simplement insérée entre eux, aujourd’hui, c’était chose moins évidente. Mais Victor lui facilita la tâche en s’écartant spontanément, et elle lui sourit.
« Ce courrier émane du seigneur Artwin… » commença-t-elle.
Elle se tourna vers Taliesin.
« C’est un noble de Luménis, qui a ouvert ses portes aux réfugiés, pendant les troubles du quartier ouest… Victor et moi avons résidé sous son toit, jusqu’à notre départ… Un homme bon, et serviable, mais… ce n’est pas la question. »
Elle se tourna vers Victor, mais posa une main furtive sur le genou de l’elfe.
« Victor, apparemment… La cité a indemnisé les victimes des combats… D’après ce document, tu es désormais propriétaire de la maison de tes parents, et d’une ferme, celle de ton grand-père. »

[Taliesin]

Sous sa main, Galathée sentit Taliesin frémir, comme s'il pressentait déjà ce qu'impliquait ces révélations. Quant à Victor, il demeura un instant bouche bée, éberlué.
-Mais... Mais la maison, elle était pas à mes parents ! dit-il d'une petite voix. Ils la louaient à un monsieur... Et pis la ferme, ils l'avaient vendue quand mon grand-père est mort. Ils auraient voulu la garder, mais ils pouvaient pas, on avait pas assez d'argent...
Il réfléchit un moment, assimilant la nouvelle, puis une pensée lui traversa l'esprit, et son visage s'illumina.
-Si c'est à moi, maintenant, ça veut dire que je peux faire ce que j'en veux ? Que je peux...
Il s'interrompit, s'assombrit.
-Mais il y a autre chose dans la lettre, n'est-ce pas ? Sinon, tu ferais pas cette tête là...

[Galathée]

« Pas seulement, non, mais pas réellement non plus… Pour l’heure, comme tu es encore mineur, c’est le seigneur Artwin qui administre ces biens. Quand tu seras adulte, tu pourras aller réclamer ton dû et il te remettra ce qui t’appartient désormais. »
Elle passa la langue sur ses lèvres.
« Si tu désirais aller y résider dès aujourd’hui, je pense qu’il le comprendrait aussi, et que tu aurais accès à ces lieux. Il resterait le gestionnaire, bien sûr. »
La jeune femme hésita une seconde. Il lui semblait que la suite devait être réfléchie avant d’être prononcée, en même temps, pourquoi tergiverser ? Ces choses étaient faites, même si elles n’étaient pas entérinées. Un paraphe sur un parchemin, avait dit Artwin. Il avait raison.
« Le seigneur Artwin propose, si nous préférons nous passer de lui, que nous… officialisons les liens qui nous unissent désormais. Auquel cas, la gestion de tes biens passerait entre mes mains. »

[Taliesin]

Le gamin la dévisagea, perplexe.
-Que nous officialisons les... oh.
Il avait saisi l'euphémisme. Peut-être était-ce à cause de la fatigue, ou des récents soucis, mais ce que la chose impliquait paru l'impressionner, l'inquiéter aussi. Il se détourna, fixa un long moment les braises aux trois quart éteintes du feu, et réprima un léger tremblement.
De son côté, Taliesin ne dit rien, mais il frôla doucement la main de Galathée. Et le silence se prolongea, à peine troublé par les craquements infimes de la toiture.
-Que... Qu'est-ce que ça changerait, si... Si on faisait ça ? murmura enfin le petit garçon dans un souffle à peine audible, sans oser regarder la jeune femme.

[Galathée]

« Je… Cela changerait… qu’officiellement, au regard de la loi luménienne, je serais désormais… ta mère d’adoption, je suppose. Que tu serais mon fils. » fit-elle.
Elle se tut, n’osa pas toucher Victor.
« Mais je pense qu’entre nous, au delà de ça… Rien n’aurait à changer. Cela ne veut pas dire que je me substitue à tes parents. C’est juste… une manière de légitimer les choses. De les dire. De les marquer. Mais le Seigneur Artwin est certainement un excellent gestionnaire… Il n’y a pas de raison de faire ceci si tu ne le désires pas. Nous avons tous le temps. »

[Taliesin]

L'enfant ne répondit rien, ne la regarda toujours pas. Il retomba dans un mutisme profond, observant toujours le foyer quasiment éteint, à présent. Puis, tout à coup, il se leva.
-Je vais dormir... murmura-t-il, prenant soin de ne croiser le regard ni de la jeune femme, ni de l'elfe. Je... Je suis fatigué, je crois...
Et il se replia, d'un pas trop rapide, dans sa chambre. Lorsqu'il en eut refermé la porte, Taliesin soupira et passa un bras autour des épaules de Galathée. Il ne dit rien, cependant.

[Galathée]

La jeune femme sourit à l’elfe et s’appuya contre son épaule.
« Autre chose aurait été inquiétant, non ? » fit-elle doucement.
Elle secoua la tête.
« Tu ne peux pas rester silencieux, Taliesin. Je sais que tu voudrais, mais tu ne peux pas. »