[Lieu] Dans la forêt maudite

[Galathée]

La question audacieuse du rôdeur laissa le clerc sans voix.
« Heu… et bien… » commença-t-il. « D’abord, j’ai des principes. Donc je ne fuis jamais personne. Mais c’est vrai que c’est plus facile de se lever à l’aube quand on ne va pas se coucher du tout, j’en conviens. Cela dit, j’aurais pu opter pour Sunie ou Sharess, si ma seule intention était de jouir en bonne… d’une bonne compagnie. Et je ne vais pas me justifier devant les dames, quelle manque de bienséance… En tout cas, vous avez ruiné toutes mes chances ! J’imagine pour favoriser les vôtres, traître ! »

[Taliesin]

Taliesin se racla ostensiblement la gorge.
-Messieurs, cela suffit ! dit-il d'un ton sévère. Songez-vous au spectacle que vous donnez ? On dirait des adolescents en train de comparer qui a la plus longue... expérience ! C'est puérile, vain, et cela risque de choquer gravement les deux innocentes damoiselles qui partagent notre dortoir ! Alors, je vous prie d'arrêter dans l'instant ! De toute manière, je suis le seul à être en couple, ce qui est une preuve indéniable de mes qualités et clot le débat sans qu'il soit besoin d'y rien ajouter.

[Voyageuse]

Astrée avait peine à contenir un début de fou-rire. La discussion tournait à la plaisanterie et c'était tant mieux.
Elle ne put se retenir d'ajouter :
- Et bien, messieurs, ne comptez pas sur moi pour vous départager.... Ni au sujet des délicates odeurs de chaussettes, pour lesquelles hélas vous vous valez tous, ni sur d'autres sujets... quels qu'ils soient! Précisons toutefois que le fait d'être en couple ne prouve absolument rien... dans quelque domaine que ce soit.

Elle riait sous cape, absolument pas gênée par les allusions de ses compagnons, bien au contraire : il y avait une éternité qu'elle n'avait pas plaisanté ainsi.

- Et au fait, Taliesin, si tu crois que ce prétexte de champignons va te dispenser de faire la popotte demain, tu te trompes! Quant à toi, Kasumi, tu as peut-être joué les rôdeurs à la retraite ces derniers jours, mais j'espère que tu ne comptes pas au retour laisser Arya faire seule tout le travail? Arya, surtout, ne te laisse pas faire! D'ailleurs, je reviendrai exprès vous voir à Luménis pour savoir ce qu'il en a été... Si jamais Arya m'apprend que tu as passé le retour à te tourner les pouces, je m'arrangerai pour que toutes les filles de Luménis sachent ce qu'il en est vraiment de ta réputation de galanterie!

[Arya Du Varden]

La conversation légère lancée par Belenn allégea les esprits et Arya se mit à rire et vu l’enchaînement, elle répondit en riant franchement. Elle tenta de donner au ton de sa voix toute la difficulté qu’elle avait face aux odeurs peu amènent qu’ils se trimbalaient par la force des choses et qui parfois l’insupportaient, surtout celles qui imprégnaient ses vêtements et qui même après la toilette faite chez les demi-elfes étaient venues rapidement imprégner à nouveau son corps.

Nous devrions faire un concours d’odeurs corporelles, je crains qu’il soit difficile de nous départager et cela explique que les demi-elfes n’ont pas eu de peine à nous sentir arriver.

Elle sembla réfléchir et répondit sur un ton particulièrement amusé.

Ne t’inquiète pas Astrée, pour le retour je ferai la seule activité que je connaisse vraiment en dehors de l’université. Elle éclata de rire. Je me laisserai vivre comme une princesse, Kasumi s’occupant des chevaux, Belenn et Taliesin s’occupant à tour de rôle l’un du feu, l’autre des repas. Après les repas, Taliesin nous fera un petit spectacle. Je me régale déjà rien que d’y penser, peut-être devrais-tu nous accompagner.

[Taliesin]

Taliesin éclata de rire.
-Ah ça, Arya, il n'en est pas question ! Vous vous faites de grandes illusions sur notre voyage de retour, je le crains. Il sera joyeux, à n'en pas douter. Joyeux, mais instructif ! Pas de voyage de vilégiature pour vous ! A l'aller, vous avez commencé votre formation accélérée de rôdeuse. Il n'est pas envisageable de s'arrêter en si bon chemin. Ainsi, tandis que nous regagnerons Luménis, outre continuer à vous occuper des chevaux, vous pourrez débuter votre apprentissage de barde, et ce sera à l'occasion de nous divertir par vos récits et vos chansons. De plus, et je gage que Belenn sera d'accord, vous entamerez également votre carrière de clerc en nous gratifiant, à l'aube, de théologiques oraisons ! Et vous direz les grâces à tous les repas.

[Arya Du Varden]

En écoutant Taliesin, l’elfe prit un fou rire qu’elle eut de la peine à réfréner tant elle s’imaginait les trois hommes la regarder accomplir les nombreuses tâches que le barde venait d’énumérer, peinant à s’occuper des chevaux, les amusants à tenter d’imiter le barde et surtout voyant déjà Belenn l’instruire de la théologie lathandrite par un résumé et surtout les oraisons à l’aube naissante après leur avoir servit un thé imbuvable faute de savoir doser, des œufs brouillés entremêles à des fragments de coquille et du lard un peu trop grillé ou pas assez comme dans le pire des estaminets, bien que le Barde n'eut pas mentionné cette tâche. D’une voix à peine audible, en deux éclats rire, elle murmura.

Où avais-je la tête, tout cela me semble bien normal, j'avais essayé avec un peu d'espoir que vous seriez magnanime à défaut d'être galants. Toutefois j'ai un sérieux doute sur une de mes capacités méconnues, pour être clerc il me manque un attribut qui leur est précieux pour être à l'heure pour les oraisons et qui fait donc partie intégrante de la fonction. Mais rassurez-vous, je serai humble et je compenserai en vous faisant la cuisine, vous ne la connaissez pas encore et vous ne pourrez que regretter de ne pas me l'avoir laissé faire avant. J'entends déjà vos compliments gratifiants à chaque bouchée.

Arya finit dans un grand éclat de rire.

[Galathée]

Le clerc ne put s’empêcher de rire à la remarque d’Arya.
« Je ne sais pas de quel attribut vous parlez, chère Arya, je ne suis pas certain de vouloir le savoir. » fit-il, faussement embarrassé. « Mais on ne peut pas dire que j’ai été très prosélyte pendant ce trajet. Vous pouvez me reprocher beaucoup de choses, d’entraîner les plus intègres d’entre nous sur des pentes glissantes, de tomber de cheval, de disparaître à la nuit noire, d’attirer les flèches et d’arriver quand les combats sont terminés, mais pas de vous avoir obligés à la moindre prière… »
Il se tut brusquement.
« Croire en Lathandre, pour le bien que ça a fait à ceux qui le vivaient... » grommela-t-il finalement à mi-voix.
Puis il se retourna dans son lit et poussa un bref soupir.

[Arya Du Varden]

Arya aurait voulu rire à la réponse du clerc, mais sa dernière remarque lui frappa l’esprit. Il est vrai que jamais, il n’avait même proposé la moindre prière, certainement par respect pour les diverses appartenances de la petite troupe et elle fut un instant presque à le regretter de n’avoir finalement pas fait plus connaissance avec Lathandre qui lui était presque inconnu.

La dernière remarque de Belenn et son soupir qui accompagna le bruit de son corps se retournant aussi pesant que son âme en cet instant laissèrent Arya triste de le sentir tout à coup si affligé rendant presque responsable le dieu qu’il vénérait des événements qui les avaient amenés jusqu’ici.

Le destin est une chose impalpable et insondable. Il a voulu que tous les cinq nous fassions connaissance et que l'un de nous soit vous Belenn, alors puisque vous le proposez si gentillement, j'accepte bien volontiers de partager une prière avec vous. Le fait que je ne vénère pas Lathandre ne m’empêche pas de le respecter et mon dieu n'en prendra pas ombrage et continuera à guider mes pas.

[Taliesin]

-Et puis, enchaîna Taliesin, ne soyez pas trop dur avec votre divinité tutélaire, Belenn. Elle a réalisé des miracles... Sans parler de la survie de Luménis malgré tous les maux qu'elle a subi, Lathandre a, comme le disait Arya, poussé sur la route cinq individus qui ne semblaient pas tous destinés à semblable mission mais qui sont fermement décidés à la mener à bien. Et si je prends mon cas personnel, je crois qu'on peut sans se tromper parler de prodige. Le Seigneur de l'Aube a convaincu le conseil, dont ma chère amie dame Lathiriel, d'impliquer un renégat soupçonné et surveillé dans une affaire d'Etat de la plus haute importance. Il a réalisé l'exploit de me tirer d'une demeure que je n'aurais jamais voulu quitter. Et sans que je lui en veuille, en plus ! Enfin... Je crois que Galathée le loue sans relâche pour m'avoir tiré de ses pattes, et que Victor lui adresse des prières enjouées en songeant à toutes les leçons d'écriture auxquelles il a échappé. Non, vraiment, Belenn, ne blâmez pas Lathandre.
Il eut un demi sourire.
-Et si mes propos paraissent tenir de la simple boutade ou de l'ironie, je vous prie de croire qu'il n'en est rien. Ce n'est pas anodin que nous soyons tous sur les traces du conseiller Albérich.

[Galathée]

Belenn bougea à nouveau.
« Vous avez peut-être raison… Et vous êtes gentille, Arya, je retiens votre proposition. Mais nous en parlerons au retour, lorsque nous aurons fait ce pourquoi nous sommes venus. Pour l’heure, avec tout le respect que je dois à Lathandre, évidemment… Je ne le ressens pas comme ça. Je pense que ce qui nous a mis sur la route, et ce qui a fait survivre Luménis, tient davantage à la résilience de l’esprit humain, et elfique, à sa capacité d’abnégation, au pouvoir des idéaux que chacun d’entre nous parvient à se construire… Pas tellement à l’intervention d’un dieu qui, jusqu’ici, n’a été que trop négligent. »
Il rit doucement, un peu amer.
« Mais j’imagine que Lathandre a droit, comme nous tous, à une seconde chance. A de meilleurs lendemains. D’autres occasions de prouver, de se rattraper. Demain est un autre jour et nous ferions mieux de dormir. »

[Taliesin]

Taliesin poussa un désir théâtral.
-Voilà, je le savais ! Les clercs sont, fondamentalement, d'ascétiques rabats-joie ! Vous n'auriez pas pu proposer une bataille de polochons, un bain de minuit dans la rivière voisine, la construction d'une forteresse de neige. Non ! Tout ce qui vous vient à l'esprit, c'est dormir ! Ah, je vous jure, vous n'êtes pas drôle.

[Arya Du Varden]

Il y avait trop d’amertume dans les mots du clerc, la magicienne était attristée autant pour lui que pour Lathandre. Pourtant, elle ne le comprenait pas, elle n’en voulait pas à Corellon de l’avoir ainsi forcée à vivre parmi des non-elfes. De devoir tenter de comprendre ceux qui par son éducation lui étaient indéniablement inférieurs et de tenter de s’adapter à ces différences.

N’en veuillez pas à Lathandre Belenn, j’aurai toute les raisons d’en vouloir à Corellon de m’avoir jetée seule et amnésique parmi les non-humains à poursuivre les ombres les plus noires. Pourtant il n’en est rien. Je sais ne pas être la seule d’entre-nous comme l’a dit Taliesin et pour ma part, ce n’est pas de l’abnégation, il y a tant de richesses qui me sont apportées … rien que durant ces derniers jours …. Mais vous avez raison, laissons le sommeil nous gagner, demain sera vite là. Quoique ...


Il faisait chaud dans la pièce, dès que le barde eut parler de bataille de polochon, Arya s'était sentie l'âme joueuse pour sortir le clerc de ses tristes pensées, elle s'était consciencieusement mise à faire une boule avec l'une de ses couvertures ... et une couverture vola prenant l'idée de Taliesin au pied de la lettre ...

[Voyageuse]

Astrée avait écouté d'un air songeur les paroles de Belenn, qui trouvaient d'étranges échos en elle : il y avait bien longtemps qu'elle n'attendait plus rien des dieux, quels qu'ils soient... Mais il était surprenant et inhabituel d'entendre ces paroles de la bouche d'un clerc...
Elle ne voulut pas s'étendre sur le sujet, trop grave et encore douloureux pour elle. Et préféra donner suite à l'idée de Taliesin, beaucoup plus amusante... Et propre à dérider même un clerc maussade.

Sans s'être concertée avec Arya, elle fit elle aussi une boule d'une couverture, et la lança dans les airs dans la direction approximative où elle savait être couchés Taliesin, Kasumi et Belenn. Espérant bien que le premier la prenne en pleine tête...
- Taliesin, si c'est tout ce qui peut vous faire plaisir... Vous allez être servi!

[Taliesin]

Deux "Aïe !" sonores suivirent la déclaration d'Astrée, prouvant aux deux demoiselles qu'elles avaient atteint leur cible.
Puis ce fut le silence.
Et, tout à coup, un sanglot résonna, net, déchirant.
-Mon nez ! gémit l'elfe, pitoyable. Vous m'avez brisé le nez... Et les dents ! Je crois que j'en ai au moins trois de cassées;.. Vous... Vous avez à jamais ravagé ma plastique superbe ! Ma vie est fichue...
Un hoquet douloureux, puis il reprit, sur le même ton larmoyant.
-Votre... Votre attitude est inqualifiable ! Même mon gosse, et les dieux savent qu'il est déluré, serait plus adulte que vous !
Il y eut un bruit de couvertures dans les ténèbres. Puis un projectile vola en direction de la magicienne. Un second suivit presque immédiatement à destination de la rôdeuse.
-Vengeance ! clama le barde d'une voix soudain bien plus assurée.
Tu es un vrai gamin...songea-t-il par devers lui.
Et alors ? Après tout, il n'avait pas 130 ans...

[Voyageuse]

Astrée éclata de rire en entendant les déclarations du barde, toujours aussi bon comédien, même dans les moments de rigolade...
Elle reçut la couverture de Taliesin à l'épaule, et le roula immédiatement en boule, qu'elle envoya... en direction de Kasumi. Après tout, il l'avait bien cherché au vu de ses déclarations précédentes.
Elle lança à l'adresse de Taliesin :
- Et bien, Taliesin, si vous visez aussi mal en combat, on est mal partis! De toute façon, vous n'avez aucune chance, tout le monde sait que les filles sont bien meilleures au lancer de polochon. Qu'en dis-tu, Kasumi?

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Le projectile d’Astrée venait de heurter de plein fouet le principal intéressé totalement pris au dépourvu par cette tournure enfantine de la conversation. Il se reprit néanmoins bien vite et riposta en direction de son homologue féminine. Il ponctua son attaque polochonesque d’une déclamation virulente :

- La fourberie féminine m’aura coûté le premier sang mais tout le monde sait que la vengeance des hommes est des plus tenaces. A moi Taliesin, A moi Belenn, nous avons notre honneur à défendre dans ce combat titanesque.

Son discours lui valut une seconde attaque à laquelle il se fit un plaisir de riposter. Bientôt le chaos de leur combat amical envahit la petite cahute.

[Galathée]

C’était une chance que le mobilier de la petite maison ait été soigneusement rangé dans un coin, une chance aussi que les belligérants aient su viser malgré la pénombre. Une couverture dans l’âtre aurait été du plus mauvais effet. Mais la table et les chaises survécurent, ainsi que les cinq voyageurs. Ils finirent par déclarer le match nul et essayèrent de retrouver chacun leur couverture avant de se coucher.

Au milieu de la nuit, Arya, qui veillait comme à l’accoutumée, entendit Belenn qui se levait et sortait. Il rentra plus d’une heure plus tard, alors que l’elfe était plongée dans sa transe. Puis, dans une aube grise, ils émergèrent de leur sommeil et furent invités à partager le petit déjeuner des bergers. Le ciel était gris mais vide, et ils s’occupèrent tous ensemble des chevaux avant de remonter en selle et de se rassembler derrière Astrée. Ils avaient quitté la forêt mais l’ascension jusqu’au vallon ténébreux promettait d’être rude pour leurs animaux, du moins dans sa seconde partie.

[Voyageuse]

Les traces laissées par les paladins étaient visibles, et Astrée n'avait aucun mal à les suivre. Elle savait que le trajet serait de plus en plus accidenté, et se disait que c'était une chance qu'Alice soit passée par là auparavant en éclaireuse.
L'itinéraire était d'ailleurs légèrement différent de celui qu'elle avait suivi à l'aller, les paladins ayant été contraints à quelques détours. La neige rendait le chemin difficilement praticable, et assez rapidement, sur une corniche un peu étroite, ils durent mettre pied à terre et guider leurs montures par la longe. La journée promettait d'être longue à ce rythme...

Comme ils se remettaient en selle, Astrée se tourna vers Kasumi :
- Veux-tu que nous nous relayions pour guider le groupe? Je connais la région, c'est vrai, mais tu es autant capable que moi de suivre les traces, du moins tant que l'itinéraire des paladins est praticable... Simplement, la neige s'est accumulée depuis leur passage, donc si nous arrivons sur une portion non accessible, fais-moi signe et je reprendrai la tête pour vous faire prendre un autre chemin. A moins que tu ne préfères rester au milieu du groupe... C'est comme tu veux.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Le voyage depuis le hameau des bergers s’était déroulé sans heurt ce qui ne parvenait pas à endormir la méfiance de Kasumi . Les conditions climatiques n’étaient qu’une gêne supplémentaire en comparaison de l’adversité qui les attendait à la fin de leur périple. L’humeur du rôdeur s’était considérablement par rapport à la veille au soir.

- Tu t’en sors très bien mais nous avons autant resté ensemble. Tu pourrais en profiter pour nous parler de la configuration qui nous attend plus loin. Je ne voudrais surtout pas me faire surprendre une nouvelle fois. La dernière fois, cela a failli nous coûter cher mais cette fois-ci, il n’y aura aucune chance que nos agresseurs nous offrent l’hospitalité de leur logis. J’assurerai l’arrière garde plus tard si tu le veux bien.

[Voyageuse]

Le chemin était étroit et ne permettait pas de chevaucher longtemps à deux de front. Difficile dans ces conditions de se concerter. Mais Astrée fit de son mieux pour informer son homologue de ce qui les attendait.
- On va descendre petit à petit vers le sud - sud-est, et le terrain sera de plus en plus accidenté, comme tu peux t'en douter en voyant le paysage dans cette direction. Heureusement, on ne pénètrera pas vraiment dans la montagne, ce sont simplement les contreforts. Donc des rochers, des falaises, des sentiers étroits parfois en corniche.

Le passage s'élargissait, et elle ralentit pour laisser le rôdeur parvenir à sa hauteur.
- On a peu de risques d'être attaqués sur la plus grande partie du chemin, il faudra simplement se méfier, peut-être, lors d'un ou deux passages où nous serons dans le creux de vallées. Et honnêtement, à mon avis, on ne risque pas grand-chose : la région est déserte, à l'exception des sharites, et il y a peu de chances qu'ils nous attendent. Sauf si les paladins ont été repérés, mais ils avaient promis de rester très discrets.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Le rôdeur ne pût retenir un ricanement à la pensée de paladin faisant des efforts de discrétion mais il se reprit bien vite et tourna son regard vers la rôdeuse :

- Je me fie à tes indications mais nous ne pourrons de toute manière en savoir plus que lorsque nous arriverons en vue du vallon. Les Sharites manigancent dans l’ombre et il est difficile de savoir ce qu’elle cache avant qu’ils ne se manifestent. Je vais veiller à l’arrière garde. N’hésite pas à faire appel à moi mais je sais que tu n’en auras pas besoin.

Le rôdeur se glissa à l’arrière de la colonne après un sourire franc à la rôdeuse. Il salua ses autres compagnons au passage et échangea quelques mots avec eux avant de gagner sa position et observer le chemin derrière et autour du groupe.

[Voyageuse]

Le groupe continua à cheminer ainsi, Astrée en tête et Kasumi à l'arrière-garde.
Au fur et à mesure de leur avancée, elle reconnaissait des secteurs qu'elle avait explorés durant l'été. Le paysage se transformait petit à petit. La forêt avait fait place à une alternance de vallons boisés surmontés de falaises rocailleuses, la végétation oscillant entre zones de garrigue, petits bosquets, rocaille, pâturages.

Un léger sourire était apparu sur le visage d'Astrée. Elle était de retour chez elle, dans cette région qu'elle avait appris à aimer. Elle se sentait le coeur léger, et refusait de penser à ce qui les attendait au bout du périple. Il serait bien temps d'y songer ce soir... Néanmoins, elle s'efforçait de garder ses sens en alerte, observant attentivement le chemin devant elle, à l'écoute des moindre bruits, entrant fréquemment en contact avec les animaux qu'elle croisait pour vérifier qu'il n'y avait rien d'anormal. L'embuscade de la veille, même si elle s'était bien terminée, lui avait laissé une certaine méfiance.

La neige s'était remise à tomber, et les voyageurs purent constater, à l'épaisseur du manteau neigeux, qu'ils avaient pris un peu d'altitude. Les chevaux peinaient à avancer, et il leur fallut parfois mettre pied à terre pour les soulager et les guider sur le sol devenu glissant.
Sentant la fatigue gagner les bêtes comme les hommes, et son propre estomac gargouiller, Astrée proposa enfin une halte à l'abri d'un éperon rocheux.

[Taliesin]

Taliesin, pas mécontent de mettre pied à terre, fit quelques pas dans la neige, autant pour se dégourdir les jambes que pour tenter de se réchauffer. Mais il savait que la halte serait brève : il leur fallait encore de la route avant d'atteindre leur destination... Il s'empressa donc de sortir quelques rations de nourriture qu'il distribua à ses compagnons.
-Courage, Arya ! dit-il en tendant sa part à la magicienne. Il ne vous faudra plus très longtemps prendre votre mal en patience : dès que nous serons sur le chemin du retour, les repas vous incomberont. Et vous devrez les préparer... en chanson !
Il tira ensuite une flasque des fontes de Vive. Cette fois, il ne fit rien pour la cacher;
-Pour ceux qui ont envie d'un peu de chaleur... c'est un codrial elfique que j'ai trouvé dans une boutique du port, et, ma fois, il n'est pas mauvais du tout... Mais rassurez-vous : mon intention n'est pas de vous enivrer pour vous faire faire des bêtises. C'est juste... pour nous redonner un peu de coeur au ventre, histoire de tenir bon jusqu'au vallon !

[Arya Du Varden]

Arya avait posé pied à terre avec bonheur, elle avait besoin de se dégourdir, voire de simplement bouger pour se réchauffer. Une chose était certaine, le barde semblait bien plus enclin à participer, voire à distraire la petite troupe et la magicienne s'en réjouissait de le voir ainsi moins morose et plongé dans ses tristes pensées, ellese mit à rire à ses vues de pacha futur pour leur retour.

Tu ne sais pas ce qui vous attend. Et bien chanter, tu sais que cela ne me pose pas problème et même pour toi cela sera acceptable, quant au repas ...

Elle finit par un éclat de rire, le barde ne devait pas savoir qu'elle n'avait jamais cuisiné de sa vie et que rien que pour faire son premier thé toute seule, elle avait eu droit au regard amusé du rôdeur. Mais la proposition de quelques gouttes de chaleur brûlante dans la gorge ne la rebuta pas.

Je resterai raisonnable, mais j'accepte bien volontiers ton offre, je n'y suis pas habituée, mais Furet n'ayant qu'à suivre et vu qu'il sera sobre, je n'ai pas de crainte à avoir.

L'elfe n'en but que peu, mais cela lui suffisait pour sentir le feu du breuvage, préférant garder les idées claires et n'ayant que peu l'habitude des boissons fortement alcoolisée.

[Voyageuse]

Astrée mangea lentement le petit en-cas qu'avait sortit Taliesin. Elle était soulagée de pouvoir se dégourdir un peu les jambes et ainsi se réchauffer.
Quand le barde sortit son eau-de-vie, elle hésita à accepter. Elle avait besoin de toute sa vigilance pour guider le groupe, et n'avait pas eu l'occasion de boire de l'alcool fort depuis bien longtemps. Elle savait qu'il lui en faudrait très peu pour lui tourner la tête.

Mais en un sens, Taliesin avait raison : il régnait un froid glacial, et, à défaut de feu, un peu de ce cordial la réchaufferait.
Elle accepta donc l'offre du barde, en prenant garde de n'en boire qu'une toute petite gorgée. Ce n'était pas le moment de se ridiculiser...
Elle sentit la chaleur du breuvage se répandre dans son gosier, puis son estomac, gagnant enfin tous ses membres. Ses joues avaient sans doute rougi sous l'effet de la brusque sensation de chaleur, mais ses compagnons attribueraient cela au froid.
Tout bien réfléchi, ça ne valait pas un bon feu. Mais c'était mieux que rien. Un peu ragaillardie, elle se mit en devoir de ranger le reste des provisions. Il serait bientôt temps de repartir.

[Taliesin]

Lorsqu'ils se furent sustentés et que les chevaux parurent avoir quelque peu récupéré, le petit groupe se remit en route. La nuit tombait vite, en cette saison, et lorsqu'elle les envelopperait, mieux vaudrait pour eux être proches du but. D'autant que le terrain se fit de plus en plus accidenté au fil de leur progression, les forçant plus souvent encore que le matin à démonter pour franchir les passages difficiles.
Sur sa jument, Taliesin faisait effort pour ne pas laisser divaguer ses pensées. Il se sentait encore d'attaque, renforcé par les bons moments passés et par la présence de Plume, sous son capuchon. Mais il savait qu'ils s'approchaient des ténèbres, tant celles de la nuit que de leurs adversaires. Et c'est quand ils les auraient atteintees que se jouerait le véritable défi. Il ne devrait pas flancher.
Et s'il ne flanchait pas... Alors tout serait possible.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Kasumi avait laissé Astrée les guider pendant l’essentiel du trajet, ne la rejoignant parfois que pour échanger avec elle du meilleur chemin pour faire passer les montures dans les chemins les plus escarpés. L’eau de vie du barde constituait un luxe qu’il ne dénigra pas un seul instant, s’autorisant quelques gorgées à l’heure du repas froid.

L’après-midi fut marqué par une progression laborieuse entrecoupée de passages difficiles qui forçait le groupe à faire passer les chevaux un à un avant de se reformer plus loin. Ils n’eurent heureusement aucun incident majeur à déplorer mais le soleil était bas sur l’horizon lorsque la souillure du vallon toucha le rôdeur. Elle se manifestait en une sorte de malaise comme une rumeur lointaine et agaçante ou une odeur frêle mais tenace. Il prit soin de rapprocher les chevaux en un groupe plus compact que la longue file qui avait éta leur formation la journée durant.

- Nous y sommes ou je me trompe fort. Notre première priorité est de faire la jonction avec nos alliés si cela s’avère possible. Ensemble nous serons moins exposés et pourrons définir un plan d’attaque.

Le rôdeur se refusait à dire tout haut la crainte qui avait la sienne durant tout le périple de se retrouver seul face aux Sharites à l’issu du voyage.

Et on va là :au vallon

[Voyageuse]

Quête : Les chemins de Luménis

C'était la fin du printemps, cette période de l'année où les journées se font chaudes et ensoleillées, annonçant l'été. Eldrina avait laissé derrière elle le petit village où elle avait grandi, en bordure de la forêt. Devant elle s'étendait un paysage au relief doux, contrefort des Montagnes de Fer dont elle pouvait apercevoir les sommets, vers l'est, derrière elle. Quelques champs cultivés témoignaient de la présence humaine toute proche, mais la forêt était encore omniprésente.
Tout là-bas, à plusieurs jours de marche vers le nord-ouest, se trouvait la plus grande ville de l'île d'Hélonna. Du moins, c'est ce qu'on lui avait dit... Elle n'était même pas certaine qu'un seul des villageois y soit jamais allé. Mais c'était sa destination. Il ne restait plus qu'à espérer qu'elle en trouverait le chemin.

Pour l'heure, le soleil commençait à chauffer l'atmosphère, semblant donner à tous les oiseaux de la forêt le signal d'un concert de trilles et pépiements. De la petite butte où elle se trouvait, Eldrina ne voyait que des bois, des rochers épars, quelques champs de plus en plus rares au fur et à mesure qu'on s'éloignait du village... et réapparaissant à nouveau, loin vers l'ouest, signalant sans doute une présence humaine. Un village, peut-être. Et apparemment le seul des environs à l'exception de celui qu'elle venait de quitter. Il était à presque d'une journée de marche, apparemment, et pas tout à fait dans la direction qu'elle s'était fixée, mais si elle choisissait d'y aller, cela ne la détournerait guère de son chemin et on pourrait sans doute lui indiquer plus précisément la direction de la ville. Bien sûr, elle pouvait aussi décider de l'éviter et de couper à travers la campagne...

[missElder]

La rôdeuse prit une grande inspiration. La chaleur des rayons du soleil, l’enveloppant, lui procurait une sensation diffuse de calme et de bonheur, et en ce moment, plus que jamais, elle se sentait profondément éprise de la nature. Pourtant, c’est vers un monde urbain qu’elle se dirigeait, un monde qu’elle n’avait jamais connu et qu’elle devinait très différent de ce à quoi elle s’était habituée.
Mais elle ne regrettait nullement sa décision. Derrière elle, elle ne laissait que des souvenirs, rien qui ne la retienne… Sa main effleura fugacement le pendentif métallique à son cou. Elle voulait découvrir de nouvelles terres, de nouvelles aventures, et surtout, de nouvelles personnes. Voir si le monde valait la peine qu’on l’arpente de long en large ; voir si ces grandes villes étaient aussi formidables qu’on le disait.

Elle jeta un regard anxieux vers le village à l’ouest. Lui aurait-on dit qu’il y avait des créatures étranges et des ruines inconnues à explorer, elle y aurait sans doute été, intriguée mais non effrayée ; mais le fait de savoir qu’il y aurait des êtres sociables à qui parler l’angoissait au plus haut point. Elle ne savait jamais quoi dire, comment, de quelle manière se comporter…
« Eldrina, ma chère, se dit-elle, si tu n’es même pas capable d’adresser la parole à quelqu’un sans paniquer, tu n’as plus qu’à faire vœu de silence et devenir nonne ! » Elle sourit soudain à cette idée et aux images incongrues qui se formaient dans son esprit.
« De toute façon, si ce n’est pas maintenant, ce sera plus tard, lorsque je serai arrivée à la grande ville. Et puis, je ne sais pas quelle direction exacte emprunter. Alors autant faire un petit détour par ce village ! » Et au pire, elle avait de quoi se défendre… Elle caressa la poignée de son épée pensivement.

Eldrina eut un sourire décidé, et se mit en marche vers l’ouest d’un pas assuré.

[Voyageuse]

Quête : Les chemins de Luménis

La végétation était dense dans le secteur qu'elle abordait. Nul sentier ne semblait mener en direction du village, la contraignant à couper à travers les broussailles. Bientôt, le village fut masqué à sa vue par le relief et les arbres, étonnamment hauts. Il devenait de plus en plus difficile de maintenir le cap, et vu tous les détours auxquels elle se trouvait contrainte, elle risquait fort de passer à une lieue du village sans même s'en apercevoir. A moins qu'elle ne trouve des indices d'une présence humaine, qui, pour l'instant, étaient invisibles...

Ce n'est qu'à midi passé qu'elle aperçut les premiers signes. Des indices très discrets, qui auraient certainement échappé à un regard non exercé. Des branches cassées. Mieux, quelques pierres empilées formant un cairn, comme si on voulait indiquer une piste. Laquelle piste, bien sûr, n'existait pas. On aurait dit que personne n'était jamais passé ici. Et pourtant, elle découvrit plus loin, par hasard, un second cairn, qui aurait presque pu être un empilement naturel. Ailleurs, assez loin, un signe de piste formé de branches brisées - presque naturelles, elles aussi. Mais les traces de passage entre ces signes restaient infimes : soit celui qui les avait faites savait se déplacer discrètement, soit on avait volontairement masqué les empreintes, comme si leur propriétaire ne voulait pas être suivi. Apparemment, la piste se dirigeait vaguement vers l'ouest.