[Lieu] Un vallon dans les ténèbres...

[Galathée]

Quête : Un désir de crépuscule...

L’obscurité, enfin.
Avec elle, l’apaisement.
Un leurre.
Petit à petit, il sent l’espoir qui s’amenuise. L’espoir. La valeur unique. Le lendemain. Un autre jour. Il y croit de moins en moins. Qu’arrivera-t-il lorsqu’il aura capitulé ? Perdra-t-il le contact ténu qui existe encore entre son Dieu et son âme ? Que reste-t-il, déjà, de ce lien ? Peu de choses. Les certitudes sont mortes. Il aimerait retrouver la lumière, mais petit à petit, celle-ci commence à lui faire peur, à le révulser. Il pense à l’aube et son estomac se serre. Sans qu’il puisse s’en défendre, il rend le peu qu’il a mangé.
Mourir. C’est devenu une perspective des plus tentantes. En cela, il sait qu’il est en train de se rompre. Il était des choses sûres et elles trépassent peu à peu, sous les coups de l’adversaire. Il essaie de se convaincre que rien n’est perdu, mais l’impuissance a un goût amer. La souffrance suinte en lui comme une maladie sauvage, à la fois physique et mentale. Il n’a aucune idée de comment s’en défaire, ne sait pas par où commencer. Il est à leur merci là aussi, à la merci des soins qu’ils veulent bien lui prodiguer. Il se sent comme le damné de la fable, dont le foie éternel s’offre chaque jour aux serres de l’aigle.
Il sait qu’il les a déjà suppliés, mais ça ne le chagrine vraiment. Il n’a jamais été fier, n’a jamais estimé qu’il avait un amour propre à défendre. Ce qu’il sait, c’est que cela n’a évidemment servi à rien. Ils se délectent de ce qu’ils lui infligent. Ils observent sa transformation progressive, la mort lente de sa foi. Car il n’est question que de cela. Que de l’instant où il rejettera ce qu’il est depuis si longtemps pour accueillir les ténèbres. Ils ne le haïssent même pas. Ce n’est pas vraiment personnel. Il sait ce qui est frappé à travers lui, un principe divin qui se fiche complètement de ce qui lui arrive. Qui se fiche de cette ville depuis sa création. Qui ne mérite pas l’énergie et la confiance qu’on lui consacre chaque jour.
C’est exactement ce qu’ils veulent. Tu te rends.
Il respire, s’appuie à la pierre froide. Son dos l’élance mais ce n’est rien comparé à la douleur d’avant la nuit. Il essaie de conjurer des images positives, des raisons, un sens. Euryale est morte. Il avait espéré… A quoi bon. Là encore, on a soufflé la flamme de la bougie, brutalement, et l’ombre règne. Il ne peut pas s’empêcher de penser qu’ils l’ont meurtrie parce qu’elle l’aimait. Il n’imagine pas pouvoir vivre en abritant une telle déchirure. Il n’a pas envie de continuer, de savoir, de respirer quand chaque instant de conscience est tourment.
Ils ne le tueront pas. Il s’imagine vieillir en leur pouvoir et la terreur l’envahit comme une vague, lui bloquant un instant la poitrine.
Sa seule porte de sortie consiste à ne plus s’alimenter. Ce sera long et douloureux, mais avec la faiblesse, ses sensations s’amoindriront. Ils tenteront sans doute de le forcer. Ils y parviendront.
Je ne crois plus en rien, songe-t-il, et cette prise de conscience le bouleverse.
La résignation puis la haine. Il les sent qui rôdent autour de lui, prédateurs affamés qui lorgnent son âme, son être, qui attendent un moment de vide pour fondre sur lui et le métamorphoser. Pour l’heure, il résiste.
Mais pourquoi ? L’aube qui se lève, irrémédiablement, n’apporte que le sang.

[Galathée]

Arrivant de la Forêt Maudite, le groupe d'aventuriers était désormais sur des hauteurs, où le vent soufflait fort et l'épaisseur de neige ralentissait leur progression. Astrée reconnut bientôt les lieux : encore une butte, une piste, et ils arriveraient sur l’éperon rocheux qui surplombait le vallon. Dans le soir naissant, ils découvrirent alors, petites taches sur le manteau de neige, les silhouettes arrondies des tentes des paladins, jaunes et bleues, disposées selon un plan précis. Ils avaient bien choisi leur endroit, abrité du vent, et à l’abri des regards. Un rideau de petits arbres tordus bordait le campement par la gauche, et la montagne l’encerclait derrière et à droite.

Mais au fur et à mesure qu’ils approchaient, les voyageurs durent se rendre à l’évidence : il n’y avait là personne. Le silence y régnait, ainsi que les ténèbres. La nuit n’était pas encore tombée, mais il faisait déjà sombre, et pas le moindre feu n’éclairait la toile des abris. On n’entendait rien d’autre le vent, pas le moindre murmure, pas le moindre hennissement.

[Voyageuse]

Tout ça n'était pas normal... Ce silence, cette absence de signe de vie. Elle tenta de se rassurer en se disant que peut-être les paladins s'étaient fait discrets pour éviter d'être repérés...
Elle mit pied à terre avant d'arriver au campement, et fit signe à ses compagnons, encore derrière, de s'approcher.
- Je ne sais pas ce que vous pensez de ce silence... Je vois trois explications possibles, pour ma part. Première possibilité, la plus pessimiste, ils se sont fait prendre par nos ennemis. J'espère que ce n'est pas le cas parce que s'ils sont venus à bout de dix paladins entraînés, on n'aura guère de chance de faire mieux... Deuxième possibilité, ils sont quelque part en reconnaissance ou en observation, mais il serait surprenant qu'ils n'aient laissé personne pour garder le camp. Troisième possibilité : ce camp n'est qu'un leurre destiné à tromper d'éventuels ennemis sur leur piste. Mais dans ce cas je me demande où ils sont... On peut aussi imaginer qu'ils sont là, très silencieux, mais à moins qu'ils n'aient appris à leurs chevaux à se taire, cela me semble peu probable.
Elle soupira, et se tourna vers ses compagnons.
- Bref, que fait-on ? De toute façon, il nous faut descendre là-bas pour trouver d'éventuelles pistes...

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Kasumi se rapprocha d’Astrée et huma l’air en quête d’indices olfactifs. Si loin du campement, il était vain de chercher une trace des paladins mais il n’était pas utile de risquer tout le groupe dans ce qui pouvait fort bien être un piège des Sharites.

- Astrée a raison mais nous devons nous montrer prudents à partir de là. Je propose qu’elle et moi nous y rendions pour relever les traces. Nous devrions être capables à nous deux de déterminer si ce camp a été occupé récemment et depuis quand il ne l’est pas si c’est bien le cas.

[Arya Du Varden]

Une tension inhabituelle se faisait dans l’esprit d’Arya alors que son regard se posait sur le campement des paladins. Le silence profond et glacial qui émanait de l’absence de vie lançait en son âme un avertissement que venaient renforcer les ténèbres qui étaient si présentes qu’elle les ressentait comme un préambule aux rudes combats qui s’annonçaient contre les ombres de la nuit.

Malgré son ressentit, la peur n’étreignait pas son âme face aux imprévisibles heures à venir. Les paladins étaient peut-être partis en reconnaissance, peut-être prisonniers, voire déjà trépasser sous le joug des ennemis, mais rien ne l’empêcherait d’aller jusqu’au bout de la mission qu’elle avait acceptée.

Il m’est d’avis que nous serons seuls pour libérer le conseiller. Les paladins ne se sont pas volatilisés, mais dans leur courage, ils nous ont ouverts la route. Nous ne sommes probablement pas attendus, nos rangs ne peuvent que paraître inoffensifs à ceux qui nous ont certainement déjà repérés. Alors faisons comme si nous étions de voyageurs ou des aventuriers … ou tout simplement des rôdeurs curieux de savoir ce qu’est ce campement abandonné, ravis d’emporter quelques couvertures et provisions. Faisons mine d’être ravis de l’aubaine d’un campement abandonné tout en nous préparant à combattre.

[Taliesin]

Taliesin ne fut pas surpris par le tour que prenaient les événements. En réalité, il n'avait jamais compté sur le soutien des paladins. Cette promesse d'aide était hypothétique, irréelle. Il avait toujours pensé, sans réellement en être conscient, qu'ils ne seraient que cinq à combattre les Sharites. S'il éprouva un instant de découragement, il balaya le sentiment fugace pour se concentrer sur l'instant présent. Rien n'avait changé. Cinq ils avaient été, cinq ils restaient. Et puis... Les paladins avaient peut-être causé des dégâts à leurs adversaires...
-Kasumi, Arya, je pense que vos deux plans peuent se combiner. Nous pouvons tenter de préserver les apparences tout en nous montrant prudents : il n'y aurait rien d'étonnant à ce qu'une bande d'aventuriers envoient des éclaireurs pour tâter le terrain et s'assurer de la sécurité des lieux. Pour ma part, je suis tout à ait prêt à couvrir vos arrières. Ou, le cas échéant, à me rendre invisible pour partir en avant.

[Voyageuse]

Astrée réfléchissait aux différentes suggestions.

- L'idée d'Arya n'est pas mauvaise, a priori... Mais je partage l'avis de Kasumi et de Taliesin : il n'est pas forcément nécessaire de tous nous rendre sur place. Pas tout de suite en tout cas. Dans le pire des cas, il peut s'agir d'un piège et mieux vaut que certains d'entre nous restent en arrière, non loin, prêts à intervenir si besoin, avec des arcs par exemple. Et s'il n'y a pas de piège, vous aurez tôt fait de nous rejoindre. Dans tous les cas, nous aurons rapidement déterminé ce qu'il en est réellement. Je propose donc de descendre avec Kasumi.

[Galathée]

Belenn, qui n’avait encore rien dit, écoutait ses compagnons les bras croisés, la mine sombre. Il regardait les formes des tentes, les yeux plissés, et il soupira brièvement.
« A votre guise. » dit-il simplement, en haussant les épaules.

Kasumi et Astrée finirent donc par se couler vers le campement, profitant des ombres de la fin de journée pour se faire discrets, tandis qu’Arya et Taliesin avaient sorti leurs arcs et avançaient plus lentement, en renfort possible. Belenn resta avec les chevaux.
Mais les rôdeurs ne trouvèrent rien ni personne dans les petites tentes désertes. Elles étaient abandonnées mais pas factices : le couchage des paladins s’y trouvait encore, ainsi que leur matériel basique de voyage : cantine, ustensiles, outils… L’âtre était glacé, n’ayant probablement pas servi depuis des jours. Les armes et les armures étaient invisibles, comme les harnachements des chevaux. Des animaux sauvages avaient pillé les provisions. Il n’y avait aucun signe de lutte ou de violence, mais aucun signe des paladins non plus.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Les rôdeurs examinèrent attentivement les indices à leur disposition et lorsque Kasumi jugea qu’il n’y avait nul danger, il fit signe aux autres de se rapprocher avec les montures.

- Les paladins s’il s’agit bien d’eux ont déserté ce camp il y a au moins deux jours. Je pense pouvoir dire qu’ils avaient l’intention de revenir étant donné ce qu’ils ont laissé en arrière mais il est difficile de faire plus que des conjectures.

Le demi-elfe craignait maintenant le pire. Que les paladins aient donné l’assaut en vain las d’attendre des renforts qui tardaient à venir. Si c’était le cas, cela réduisait considérablement les chances de défaire leurs ennemis sans parler de retrouver le conseiller vivant.

- La nuit approche et je crains que nous soyons exposés ici. Il est trop tard pour tenter une attaque avant la nuit et si les ténèbres peuvent nous dissimuler, elles sont le domaine de nos adversaires. Nous devons décider quoi faire. Astrée, où se trouve la tour du vallon ?

[Voyageuse]

Astrée observait, la mine sombre, le peu d'indices à leur disposition. Il semblait que les paladins se soient équipés et aient pris les montures pour partir en mission, sans doute en éclaireurs... et n'en soient pas revenus. Elle frissonna en songeant à tout ce que cela pouvait impliquer. Et dire qu'ils avaient promis de ne surtout rien tenter avant l'arrivée des renforts... Elle souhaita, égoïstement, qu'Alice soit déjà partie rejoindre les siens, comme prévu, et n'ait pas fait partie de l'expédition.

Interpelée par Kasumi, elle répondit :
- La tour est à l'autre bout du vallon. A plus d'une lieue à vol d'oiseau. Il nous faudra attendre demain pour nous y rendre... Mais tu as raison, cet endroit n'est peut-être pas très sûr pour passer la nuit. Je pense qu'il faut que nous montions notre camp un peu plus loin. Je pourrais vous guider jusqu'à mon abri, mais il est à deux bonnes heures de marche. Sans doute une bonne heure et demie à cheval. Nous serions en sécurité, mais beaucoup trop loin du vallon.

[Taliesin]

Taliesin secoua la tête puis intervint.
-Pardonnez-moi, mais... Je ne vois pas l'intérêt de quitter cet endroit. A mon sens, nous n'y sommes pas du tout exposés. Au contraire, nos alliés l'ont particulièrement bien choisi : la montagne nous protège sur deux côtés, les arbres sur un troisième. Nous n'y ressentons quasiment pas le vent et... D'après ce que vous nous dites, le campement n'a pas été attaqué, ni même pillé, en dehors des intrusions de petits animaux. Alors, nous déplacer, ce serait simplement prendre le risque de nous faire repérer. Je suis pour rester ici et profiter des installations que nous ont laissées les paladins. Nous ne trouverons pas de meilleur endroit où dormir. Et la journée fut rude : il nous faut du repos.

[Galathée]

« Je suis d’accord avec Taliesin. » intervint Belenn. « Le vallon est hors de vue et les Sharites ne sont pas venus jusqu'ici. Avec la couche de neige présente sur le sol, monter un campement va nous prendre des heures, et pas mal d’énergie. Sans parler de l’obscurité. Nous déplacer serait suicidaire. Les chevaux n’y voient rien, le roc est plus glissant que l’humus d’une forêt. Nous devrions profiter de ces installations, leur positionnement est idéal et nous gagnerions un temps précieux. Nous en avons déjà beaucoup perdu. »

[Arya Du Varden]

La magicienne rejoignait l'avis de Belenn et de Taliesin, ils seraient hors de portée de vue et moins ils se déplaceraient, moins ils laisseraient de traces ou risqueraient d'être aperçu par une sentinelle.

Je suis aussi d'avis que nous restions ici, pour les mêmes raisons qui ont été évoquées et également pour rester plus discret. Les Sharites ne sont pas venus jusqu'ici, alors inutile de nous éloigné de notre but en laissant des traces en nous déplaçant. Ils sont sûrs d'eux et restent sur leurs positions, alors nous aurons peut-être même la chance de passer une nuit tranquille.

[Voyageuse]

Astrée savait, au fond d'elle-même que Belenn et Taliesin avaient raison. Il était logique de camper ici, le lieu était bien choisi, il était trop tard pour trouver autre chose. Mais elle devait bien s'avouer que dormir dans ce campement déserté la mettait mal à l'aise. Contrairement à ses compagnons, elle avait vu les hommes qui y avaient dormi, ce n'était pas de simples inconnus ayant déserté leurs tentes : ils avaient pour elle une existence tangible. Et dormir dans leur campement en songeant à ce qui avait pu leur arriver.... Et bien elle n'était pas sûre de passer une nuit paisible dans ces conditions.

Mais elle se rangea à l'avis du groupe.
- D'accord. Alors il ne nous reste plus qu'à nous mettre au travail. Cette tente, la plus grande, peut sans doute nous servir de salle commune pour manger et discuter. Il ne nous reste plus qu'à y faire un bon feu... Je vais m'occuper d'installer les montures là-bas, ajouta-t-elle en désignant un espace qui avait visiblement été déjà utilisé par les chevaux des paladins.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Kasumi fit la moue. Outre la sensation de malaise qu’il éprouvait malgré la disposition idéale de l’endroit, il répugnait à relâcher sa vigilance en s’installant dans cet endroit trop évident, presque préparé à leur intention. Il n’était plus le chasseur, lé défection des paladins changeait la donne et placer le groupe dans le rôle de la proie. Leur ennemi se tapissait, prêt à fondre sur eux.

- Nous sommes tous épuisés surtout les montures mais il nous faut redoubler de vigilance. Les paladins ont peut être été repérés en laissant le temps à nos ennemis de se préparer à les recevoir. Ne commettons pas la même erreur. Il nous faudra limiter la taille de notre feu et l'enterrer ce soir. Je suggère de partager la même tente pour nous tenir chaud. Je prendrai le premier tour de garde si cela vous convient.

Sans un mot de plus, le rôdeur s’éloigna du reste du groupe pour inspecter la zone.

[Galathée]

Tandis qu’Astrée s’occupait des chevaux, accompagnée d'Arya, et que Kasumi inspectait les tentes voisines, les deux derniers voyageurs investirent la tente désignée par la rôdeuse, commencèrent à allumer le feu et déballer leurs affaires.

Le petit enclos qu’avaient érigé les paladins était solide et les chevaux y trouvèrent la place de s’y ébattre. Il restait même du fourrage dans un coin, lequel provoqua quelques disputes de dominance, remportées par Furet et Ombrage qui furent les premiers à se servir. Astrée les débarrassa de leur harnachement, qu’Arya l’aida à transporter à l’intérieur de la tente, puis elles les couvrirent chacun d’une épaisse couverture. Un examen rapide indiqua à la rôdeuse qu’ils étaient dans un état général relativement bon, même Moïse, mais il faudrait être vigilant et les réexaminer souvent. Le froid était piquant et s’ils étaient tous solides, ils n’étaient pas à l’abri d’un refroidissement ou d’engelures.

Kasumi eut rapidement fait le tour du campement. Il avait été solidement monté, par des hommes qui avaient l’habitude d’une stricte discipline militaire, et qui disposaient d’un matériel de bonne qualité. Les tentes étaient toutes en bon état, il n’y avait aucune trace de départ précipité ou de quoi que ce soit d’inquiétant. Chacun des hommes, ils étaient dix, avait rangé ses affaires et sa paillasse avant de partir, soigneusement. Il ne trouva cependant pas de traces d’une éventuelle présence de la naine qui les avait, selon Astrée, guidés jusque là. C’était peut-être une bonne nouvelle à relayer à la jeune femme. Les alentours du campement étaient déserts et ne portaient pas la moindre trace d’un passage récent, hormis le leur. Il put déterminer que les paladins étaient partis vers le sud-est, dans la direction approximative où devait se trouver le vallon ténébreux qu’ils iraient repérer le lendemain.

A l’intérieur de la tente centrale, Belenn interdit à Taliesin d’approcher ses chaussettes de la marmite avant de consentir à le laisser cuisiner, mais en le surveillant. En fouinant dans les réserves oubliées des paladins, ils avaient pu sauver quelques denrées que les animaux avaient épargnées : trois topinambours bosselés, une citrouille orange vif, une douzaine d’oignons odorants et du poisson salé que le clerc avait regardé avec une grimace éloquente avant de les tendre théâtralement au barde, en déclarant que ça ne pouvait pas être pire que ces champignons elfiques. Ils avaient également déniché un petit tonnelet de bière sombre qui n’attendait que des gosiers assoiffés et transis.

[Arya Du Varden]

Le travail auprès de montures terminés, les deux jeunes femmes revinrent près des hommes. Dans la marmite, bouillonnait le repas qui offrait déjà un délicieuse odeur malgré le peu d'ingrédients, le barde avait su concocté un met qui semblait délicieux.

Ce n'est peut-être qu'une impression, mais de me trouver dans un campement solidement monté par des professionnels me donne un sentiment de sécurité. Mais ce n'est pas pour autant que nous devons baisser notre vigilance. Il serait bon de faire les tours de garde à deux comme l'autre nuit.

Elle sourit d'aise en humant au-dessus de la marmite.

Enfin en attentant, je vois que notre cuisinier attitré ne faillit pas à sa réputation. De jouer les rôdeurs donne faim je peux vous le garantir.

[Taliesin]

-Cuisiner coupe l'appétit, en revanche ! répartit Taliiesin d'un ton léger. Surtout quand des troubles-fête vous empêchent d'ajouter vos ingrédients secrets - il coula un regard faussement accusateur en direction du clerc - et lorsqu'on voit les vers, insectes et autres moisissures prospérant sur les aliments. Mais cela sera nourrissant, au moins.
Il plongea une cuiller dans la marmite et goûta la préparation.
-Hum, d'ailleurs, ça me paraît prêt, nous allons pouvoir passer à table... Ce sera l'occasion de parler des tours de garde : je rejoins votre avis, il nous faut faire preuve de prudence. Ce sera aussi l'occasion d'écouter Astrée, c'est elle qui connait les lieux... Et, enfin, de demander à Belenn ce que lui a appris le second Sharite que nous avions capturé, à Luménis. A cause de tous ces événements et de notre départ hâtif, nous n'avons jamais songé à lui demander comment c'était passé l'interrogatoire...

[Voyageuse]

Les voyageurs se répartirent les couverts et s'installèrent confortablement pour déguster le repas cuisiné par Taliesin.
Astrée se servit une bonne assiettée, et goûta quelques cuillerées, et sourit :
- Vous êtes un vrai cordon-bleu. Votre compagne a bien de la chance, elle doit se régaler tous les jours! Mais pour en revenir aux choses sérieuses... Concernant les tours de garde, je ne suis pas certaine qu'il soit nécessaire d'être deux. Il est important de pouvoir prendre suffisamment de repos avant la journée de demain, et à mon avis un seul guetteur suffit. Quant aux informations que je peux vous fournir sur le vallon, elle sont un peu minces, hélas. Je n'y suis allée qu'une fois ou deux, l'été passé..

Elle fouilla dans ses souvenirs.
- Si je me souviens bien, le vallon doit faire près de deux lieues de longueur, et à peine une de largeur. La seule voie d'accès, à ma connaissance, est un étroit défilé, juste en-dessous de l'éperon rocheux sur lequel nous nous trouvons. Il y pénètre par l'extrémité sud. J'étais à pied à l'époque, mais on doit pouvoir aussi le faire franchir à des chevaux, à condition de procéder lentement, un par un : le sentier est assez escarpé et rocailleux, donc difficilement praticable pour les montures. Et sur place... Je me souviens seulement que le paysage était boisé et qu'on y distinguait cette tour effilée, au nord. Je m'en suis approchée mais je ne l'ai pas explorée. Je suis désolée de ne pas pouvoir vous en dire plus...

[Arya Du Varden]

Le repas était délicieux est Arya comme ses compagnons se régalait. Elle était fort surprise que les hommes fussent capables de leur concocter avec trois fois rien de tels repas. Tout en savourant la cuillerée de soupe qu’elle venait de porter à sa bouche, elle fronça les sourcils aux paroles d’Astrée. Assurer la garde seul n’était pas de son avis justement parce qu’ils affichaient tous de la fatigue et l’attention était si vite détournée par les pensées ou les yeux pouvaient se fermer dans le silence profond qui s’installerait dès que les autres profiteraient de récupérer en vue de l'inconnu du lendemain.
Notre dernière étape ne sera pas de tout repos au peu que tu nous décris Astrée et laisse entrevoir que demain sera une journée ardue et risquée, je comprends parfaitement ton souhait que nous profitions au maximum de cette nuit, pourtant cela ne me semble pas souhaitable de monter la garde seul. Vous l’avez tous remarquer qu’une paire d’heures me suffit largement d’autant que ce temps peu être fractionné. Il suffirait que les gardes soient moins longues et que chacun exprime celui qu’il préférerait. Je prends sans problème plusieurs tour de garde, mais être seul comprend trop de risques d’inattention même si nous estimons être en sécurité. N’échanger que quelques paroles lorsque l’on sent la fatigue prendre le dessus ou simplement de se sentir accompagné permet de rester plus vigilant face à la nuit et au silence. D'autant qu'à part Taliesin et moi-même vous n'y verrez guère et si nos ennemis venaient à attaquer ils ne vous apparaîtraient que bien tard.

[Kasumi]

Kasumi entra à cet instant et prit place à table tout en se joignant à la conversation. Dehors l’air était piquant et la chaleur de cuisson était un bien agréable changement.

- J’y vois aussi bien que vous dans le noir mais même sans cela, il n’est pas utile de voir bien loin. Si le seul accès au vallon et le chemin dont parle Astrée, c’est avant tout vers là qu’il nous faudra surveiller. Les paladins ont bien choisi l’emplacement de leur campement. Celui-ci était destiné à durer en attendant les renforts mais quelque chose a du les précipiter à moins qu’ils ne se soient lassés d’attendre. Il nous faudra faire une partie du chemin à pieds demain. Nous approcherons autant qu’il sera prudent avec nos montures de selle. A l’approche de la tour, il nous faudra nous montrer plus discret. Nous sommes inférieurs en nombre et le terrain ne se prête guère à combattre ou nous déplacer à cheval. Astrée, je n’ai trouvé aucune trace que votre amie ait séjourné ici. Elle n’a laissé aucune affaire derrière elle en tous cas.

[Galathée]

Le clerc avait savouré le repas concocté par Taliesin avec le même bonheur que les autres, mais en silence, l’esprit un peu ailleurs. Il écouta cependant avec attention ce que ses compagnons exposèrent chacun à leur tour. Il faisait bon dans la tente, chauffée par le feu et protégée du vent.
« Je pense que nous devrions considérer que notre assaut est lancé dès que nous pénétrons dans le vallon. » intervint-il finalement. « Y voyager comme si nous nous rendions à la tour me semble peu réaliste. Je ne suis pas sûr qu’il soit sage de tous emprunter la même route, et de tous avoir les mêmes objectifs. Nous n’aurons plus l’opportunité d’aviser sur place. Nos ennemis seront prévenus de notre présence dès que nous rentrerons dans les ténèbres, et ils ont un otage. Nous devons penser à notre stratégie globale, maintenant. D’autre part, comme l’a dit Taliesin, j’ai eu l’opportunité de réinterroger le Sharite et il m’a donné pas mal d’informations sur le groupe que nous aurons à affronter, notamment le profil des quatre clercs les plus expérimentés. Je peux les partager avec vous quand cela vous semblera opportun. »

[Kasumi]

Quête : un désir de crépusscule

Le repas terminé, il était temps de s’occuper de leur mission qui s’exposait dans toute sa réalité au travers des paroles de Belenn. Le rôdeur croisa le regard des autres avant de prendre la parole :

- Tu parles avec sagesse. Je ne m’étonne pas que le temple t’ait choisi. Nous devons garder de vue que notre principale mission consiste à récupérer Albérich et non à éradiquer le mal ici et à exterminer tous les Sharites et leurs suppôts. Sans les paladins, nos chances en attaquant de front sont inexistantes. Un groupe au moins devra s’introduire dans la tour car c’est là que le conseiller doit être gardé. Il faudra trouver le moyen de s’en assurer bien sûr et ce ne sera pas chose aisée. Si les paladins sont retenus prisonniers, et je ne nourris guère d’espoir à ce sujet, la priorité sera de les libérer pour les rallier à nous. Avez-vous des idées qui pourraient constituer une diversion pour faciliter l’accès à la tour ?

[Voyageuse]

Astrée avait adressé un sourire reconnaissant à Kasumi lorsqu'il mentionna l'absence de traces d'Alice. Elle devait bien s'avouer que cela lui ôtait un grand poids sur le coeur : elle n'aurait jamais eu la force de se rendre dans sa famille pour leur annoncer la disparition de la naine.
- Mon idée de départ était de partir en éclaireurs avec Kasumi, à pied, puisque nous sommes tous deux capables de nous déplacer sans nous faire repérer, contrairement aux paladins... Je pense qu'ils ont voulu, pour une raison ou une autre, aller voir ce qui se tramait là-dessous, et ont été repérés. Cela me surprend car ils semblaient vraiment décidés à attendre les renforts, je suppose qu'ils n'ont pas agi sans une bonne raison... Mais d'après ce que vous dites, Belenn... j'ai l'impression que vous soupçonnez qu'ils aient un moyen magique de détecter la présence de toute personne entrant dans le vallon. Et dans ce cas mon plan ne tient pas la route, même Kasumi et moi serions repérés... Ton idée de diversion n'est pas mauvaise, je pense qu'il faut la creuser, ajouta-t-elle en se tournant vers Kasumi.

Elle soupira.
- Je crois qu'il est inutile d'essayer d'établir un plan tant que nous n'en saurons pas plus sur nos adversaires. Il est temps que vous nous en disiez plus sur ce que vous avez appris, fit-elle en se tournant vers le clerc.

[Galathée]

« Très bien. » fit le clerc. « Les Sharites étaient effectivement onze au départ. Ils sont venus du continent, sans but clair, sinon celui de semer le trouble. C’est ce que recommande leur déesse. Malheureusement, celui que nous avons pris était un clerc encore jeune, et ils obéissent à un ordre extrêmement hiérarchisé et despotique. Il n’a donc pas de réelle idée des objectifs derrière leur action. Sinon cette nécessité de répandre l’obscurité. Bref. Ils ne sont plus que dix, désormais, mais ont avec eux, probablement, cette jeune luménienne dont nous a parlé l’autre prisonnier. Parmi eux, comme l’a dit Euryale, quatre sont plus dangereux car plus aguerris. Les six autres devraient nous poser moins de problèmes. Leur chef s’appelle Calme Péril, c’est un homme dans la quarantaine. Il est très puissant et expert dans le maniement de l’obscurité. D’après ce que j’ai compris, son mode de combat s’apparente à celui d’un assassin, c’est à dire qu’il fait le noir, il se déplace, il frappe, il disparaît. Il est épaulé par une femme qui est plutôt spécialisée dans le soutien et la guérison, qui ne monte donc pas au corps à corps, mais qui galvanise les troupes. Le troisième est un ancien adepte de Loviatar, un expert de la ruine et de la douleur. Sa méthode s’appuie plutôt sur affaiblir et dévaster. Le dernier est un guerrier de corps à corps. »
Il croisa les bras.
« Ce que ces informations m’apprennent, c’est que l’aura de ténèbres qui noie le vallon n’émane d’aucun d’eux. Elle doit être causée par un artefact. Ma proposition est de me rendre seul jusqu’à cet objet et le neutraliser. Je suis capable de dissimuler mon aura, d’affronter des morts-vivants et de localiser la source des ténèbres. Quand celles-ci auront disparu, l’infiltration ne posera plus de problèmes, et la diversion sera faite. Pendant qu’ils chercheront à comprendre où est passée la nuit, vous pourrez foncer jusqu’à la tour et délivrer ceux qui s’y trouvent. »

[Voyageuse]

- Vous êtes fou !
Les paroles étaient sorties spontanément de la bouche d’Astrée.
Elle rougit un peu, soudain consciente que Belenn était sans doute un combattant plus expérimenté qu’elle, que de surcroît c’était un clerc et qu’il connaissait mieux qu’elle ce dont il parlait… Mais quand même… Aller là-bas seul…
- Votre plan, effectivement, permettrait d’obtenir une diversion idéale. Et si vous parveniez à venir à bout de cette obscurité, cela nous aiderait grandement pour parvenir à la tour. Mais… Vous croyez vraiment pouvoir y arriver seul ? Je veux dire… Je n’hésiterai pas à vous accompagner si vous pensez que mon aide peut vous être utile.

Elle prit conscience, à ce moment-là, qu’elle n’avait pas peur de mourir. Elle n’avait pas non plus envie de mourir, contrairement à ce qu’elle éprouvait quelque mois auparavant. Et elle ferait tout pour survivre à cette aventure. Mais au fond, mourir lui était presque indifférent… Etrange impression. Sans doute parce qu'elle n’avait plus personne au monde, personne qui puisse la regretter, contrairement à ses compagnons d’aventure. Si quelqu’un devait prendre des risques dans cette mission, c’était donc elle. Et probablement Belenn, qui combattait ici pour son dieu, et pour sauver son supérieur et sans doute ami.

Elle réfléchit ensuite à ce que Belenn venait de leur apprendre sur leurs adversaires. Ils auraient vraiment affaire à forte partie, et peut-être son aide serait-elle plus utile à la tour...
- D'un autre côté, il y aura sans doute des adversaires coriaces à la tour. Peut-être ne serons-nous pas trop de quatre. Mais je répugne à vous laisser prendre de tels risques seul.

[Kasumi]

Quête : un désir de crépuscule

Kasumi se leva et posa une main sur l’épaule d’Astrée avant de tourner son regard vers Belenn :

- Belenn sait ce qu’il fait. Je crains que nous lui soyons plus une gêne qu’une aide. Si l’un d’entre nous peut réussir cet exploit, c’est bien lui. Nous avons une tâche tout aussi importante en attaquant la tour.

Le rôdeur ne ressentait pas l’assurance qu’il avait essayé de communiquer au travers de ses paroles d’apaisement. Le clerc serait seul exposé à des dangers effrayants et de la réussite de sa mission dépendait beaucoup au-delà même de la sauvegarde de sa vie. Kasumi n’avait guère l’habitude de se fier ainsi à un autre mais il était prêt à placer sa confiance en Belenn.

[Arya Du Varden]

Arya était resté longtemps silencieuse écoutant l'avis de chacun. Belenn avait exposer un plan qui semblait pouvoir fonctionner, elle lui faisait entièrement confiance. Si il l’avait proposé c’est qu’il savait ce qui l’attendait et devait avoir compris que c’était leur seule chance de parvenir au moins jusqu’à la tour. Car, dans le cas contraire, ils seraient tous des cibles faciles et risquaient fort de ne même jamais fouler le sol de l’édifice.

Pourtant, un point avait retenu son attention, la manière dont les quatre clercs Sharites appréhendaient les combats. Il était illusoire de penser qu’ils se présenteraient sagement un par un et que fort probablement chacun se verrait affronter une réalité et si ce n’était pas la bonne, le groupe se verrait décimé en un rien de temps.

Un frisson parcouru la magicienne, elle allait certainement se trouver seule face à cet inconnu et craignait de perdre le contrôle comme cela lui était déjà arrivé. Elle se sentit faiblir, son regard changea, une étrange lueur le traversa alors qu’une voix lui parvenait laissant entrevoir des difficultés qu’ils n’avaient pas abordées, la drow silencieuse depuis les combats venaient de se manifester. Arya tenta de transmettre ce qui venait de lui être dit, enfin une partie, celle qui lancerait le débat.

Selon les connaissances que tu nous apportes Belenn, nous allons devoir confronter des forces qui risquent bien de nous affecter au premier contact si nous devons faire face à l’ennemi qui aura les moyens spécifiques de nous affaiblir. Peu importe qu’au premier contact, nous devions faire face à tous ou petit à petit, mais je doute que nous puissions les contrôler tous ensembles. Je n’ose imaginer Astrée ou moi-même face au guerrier, ni Taliesin à l’adepte de Loviatar, ils ne feraient qu’une bouchée de nous et réduiraient nos chances à néant si nous n'étions pas organiser avant.

[Taliesin]

Taliesin, jusqu'ici, était demeuré silencieux, écoutant les arguments de chacun, tentant de trouver une stratégie propre à triompher ou à contourner les défenses de leurs adversaires. Mais l'intervention finale de Belenn coupa le fil de ses pensée, et il posa un long regard sur le clerc. Enfin, losque les trois autres se furent exprimé, il poussa un profond soupir et se lança.
-Belenn. Je suis contre votre proposition. Elle...
Il faillit dire qu'elle lui faisait désagréablement penser à un suicide. Oui, il avait des chances d'y parvenir. Mais aucune de s'en tirer vivant, aussi puissant soit-il. Et... C'était sans doute idiot, mais, compte tenu des propos amers qu'avait tenu l'homme la veille, on aurait dit que sa propre disparition lui importait peu. A moins, bien sûr, que son existence n'ait jamais pesé dans ses choix, dans son esprit de sacrifice. Dans la mission qu'il avait acceptée en devenant clerc.
C'était peut-être un peu de tout cela, mais Taliesin ne pouvait le dire ainsi. Il s'efforça donc de poursuivre sur une autre voie, tout aussi fondée, à son avis.
-Vous pourriez réussir, mais... Ne pas vous avoir à nos côtés déséquilibrerait trop les forces. Les Sharites ne se découvriront jamais totalement, ils sont trop malins pour ça. Or, vous êtes le seul à pouvoir nous soigner, éloigner les peurs de nos esprits, dissiper un peu les ténèbres... Et nous redonner la foi si nous vacillons. Je pourrais user de quelques chants de bardes, mais... Je ne pourrais guère combattre, pendant ce temps. Vous... Vous pourriez faire les deux. C'est pourquoi je crois que vous devez rester avec nous. Pour le bien de notre mission.
Il soupira à nouveau, chercha ses mots.
-Mais je crois que l'idée d'une diversion est bonne. Et nous n'avons pas forcément besoin de sacrifier l'un des nôtres pour y parvenir. Je peux... Je peux user de magie pour provoquer des illusions auditives assez poussée. Je peux faire accroire qu'une armée approche... Peut-être Astrée ou Kasumi pourraient-ils, de leur côté, pousser des annimaux à pénétrer dans le vallon... Si nos ennemis sont un tant soit peu troublés, nous pourrions allors charger droit vers la tour, à toute vitesse. Et les prendre par surprise avec nos forces au grand complet.
Il se massa un instant le front.
-Je peux m'infiltrer, aussi, si besoin. En me rendant invisible. Où... Descendre à pied le passage menant au vallon. Puis convoquer une monture fantôme qui filera comme le vent. Ainsi, je pourrais atteindre la tour beaucoup plus rapidement que vous si vous meniez vos montures dans la descente. Ou que si vous faisiez tout le trajet à pied. Et... Je dois pouvoir prendre quelqu'un avec moi, sur le coursier... Ce peut être une solution, aussi, si trouver l'artefact s'avère la seule solution viable.

[Voyageuse]

Astrée savait, au fond d'elle, que Kasumi avait raison, et que son aide serait plus utile à la tour. Mais elle ne pouvait s'empêcher de considérer le clerc avec dans le regard un mélange d'admiration et d'inquiétude, tout en écoutant attentivement les propositions de ses compagnons. Visiblement Taliesin partageait son avis.
- Vos idées sont bonnes, Taliesin. J'ignorais qu'on pouvait faire autant de choses avec la magie. Et moi aussi je préférerais que Belenn reste avec nous, nous serons démunis sans lui. En revanche, je pense qu'il nous faut absolument neutraliser l'artefact avant toute chose. Nous n'y verrons rien là-bas...

Elle se tourna ensuite vers Arya :
- Je comprends ce que tu veux dire, concernant nos adversaires... Mais malheureusement nous n'aurons sans doute guère le choix de l'adversaire à affronter, c'est le hasard qui décidera. Pour l'instant, l'objectif principal est d'arriver à la tour. Et j’espère qu’on ne devra pas se battre à un contre un mais qu’on pourra, le plus souvent, faire front à plusieurs. Sans quoi je ne donne pas cher de notre peau. Je pense que l'union de nos talents est notre meilleure force.

Elle soupira.
- Personnellement, d’ailleurs, s'il fallait se répartir nos adversaires, je vois mal lequel j'aurais le plus de chance de pouvoir vaincre… Je sais me battre en corps à corps, mais moins bien que Kasumi, et sûrement moins qu'un guerrier entraîné, d'autant que je n'ai qu'un bâton. Quant à l’adepte de Loviatar, j’ai du mal à imaginer quels moyens il va utiliser pour nous attaquer. Et surtout, je ne vois pas comment affronter leur chef qui peut disparaître à volonté dans l’obscurité : l’un de vous est-il capable de détecter sa présence ? La prêtresse semble l’adversaire le moins dangereux, peut-être que l’éliminer rapidement pourrait affaiblir les autres…

La fin de sa phrase fut comme étouffée.
« L’éliminer »… Etait-ce bien elle qui parlait froidement ainsi ? Elle se tut, soudain très pâle. Etait-elle réellement en train de planifier froidement une attaque, contre des adversaires qui, certes, feraient tout pour les tuer, elle et ses compagnons, mais qui n’en étaient pas moins des êtres humains ? Et elle parlait, comme si cela allait de soi, de se les répartir pour les tuer ?
Elle sentit un étrange malaise l’envahir. Bien sûr, elle n’avait pas le choix…. Mais à la pensée de devoir tuer ainsi un être humain, elle se sentit soudain au bord de la nausée. Blanche comme un linge, les yeux dans le vague, elle était incapable de suivre davantage le fil de la discussion…