[Lieu-dit] Le jardin de la Mélancolie

[Lothringen]

En entendant marcher dans les feuilles mortes, Lothringen avait mentalement relâché l'intensité de son sort d'invisibilité, si bien qu'à peine translucides de temps à autres ils pouvaient se voir sans difficultés.

"Rien. Mes doubles ont pris pour moi."

Il examinait l'allure de son compagnon. Ce dernier avait une blessure à la tempe, qui saignait un peu, sans gravité sans doute, et...

"Mais... tu boîtes?"

[Mornagest]

Il avait eu l'occasion de grimacer en rentrant vers le jardin. Son genou avait enflé, et il sentait qu'il forçait dessus, tout en sachant très bien qu'il le regretterait plus tard. Mais il n'avait pas eu le choix ; s'attarder eut pu s'avérer bien plus fatal...

"Je suis tombé, j'ai dû me réduire l'os en miettes. Ça fait mal, mais je ne pense pas que ce soit grave", estima-t-il en serrant les mâchoires. Pas une partie de plaisir... décidément, il avait le chic pour se blesser plus vite qu'à son tour, en ce moment.

"Je suppose qu'un prêtre pourra nous arranger ça. Reste à en trouver un qui soit suffisamment sûr... à moins que tu n'aies autre chose à faire avant d'y aller ?" Il se tenait en appui sur sa jambe droite, en équilibre, et agitait comiquement les bras pour ne pas tomber.

[Lothringen]

Lothringen attrapa l'une des mains au vol et la posa d'autorité sur sa propre épaule.

"Appuie-toi sur moi, au lieu de jouer les équilibristes", ajouta-t-il sur un sourire.

Il s'efforçait pendant ce temps de réfléchir à la suite des événements.

"Nous avons appris pas mal de choses, finalement, mais aucune ne requiert une contre-attaque immédiate. Je serais d'avis de rentrer à l'ambassade : il y a des prêtres de Helm dans la garde. Enfin, si tu peux tenir jusque là..."

[Mornagest]

Acceptant l'épaule secourable de Lothringen, le guerrier grimaça en détendant sa jambe. Il pourrait supporter le trajet, s'ils n'allaient trop vite.

"Tu vas devoir nous laisser invisibles... on risque de mettre un moment avant d'arriver. Ça ira quand même..."

Ils se mirent en route, lentement, non sans que le manostien ait augmenté l'intensité de son sortilège. La marche ne requiérait que peu de concentration, il pouvait en accorder suffisamment pour le sort.

Tandis qu'ils arpentaient un chemin de terre plongé dans la pénombre nocturne, Mornagest souffla :

"Cette espèce de salopard ne perd rien pour attendre. S'il me tombe sous la main, crois bien qu'il risque de regretter ses sales coups." Il parlait avec rage, qui l'avait quitté le temps de revenir au jardin, et qui revenait tel un retour de bâton. La colère n'était pas bonne conseillère, mais coutumière chez Mornagest. Cependant, le ton avec lequel il avait parlé laissait supposer qu'il aurait effectivement bien des choses à mettre au point avec le conseiller traître...

[Lothringen]

Lothringen comprenait d'autant mieux cet état d'esprit qu'il le partageait en tous points. Depuis qu'ils avaient reconnu en Terenas le responsable de tout ou bonne partie de leurs mésaventures, une colère sourde le rongeait de l'intérieur - pas parce qu'ils avaient été dupés comme d'autres par le faux indic, pas parce qu'ils avaient dansé sur une partition dont ils n'étaient pas les auteurs, et même pas à cause des dangers qu'ils avaient traversés : non, la véritable raison de la colère de Lothringen, et de la haine qu'il éprouvait à présent pour cet homme dont il savait si peu de choses, c'était sa peur, la peur panique qu'il avait ressentie à plusieurs reprises, lorsqu'il avait vu de si près sa mort ou pire, celle de son compagnon. Et tout ça pour... sauver le secret de petits trafics de bas étage, dont il n'était même pas dit que Mornagest les apprendrait ou prendrait le moindre intérêt à les dénoncer ? Qui dispose si légèrement de l'existence d'autrui s'expose à ce qu'on lui rende à intérêt sa politesse.

"Je partage ton sentiment, Mornagest. Reste à bien faire en sorte qu'il nous tombe sous la main, et pas l'inverse."

[Mornagest]

Tout en s'appuyant sur l'épaule de son compagnon, le guerrier hocha la tête. Ils marchaient à un rythme tranquille, laissant retomber la tension de la soirée, ainsi que la colère qui bouillonnait en eux, et qui ne demandait qu'à exploser le moment venu. Moment qui, Mornagest l'espérait, ne tarderait pas trop à venir.

"Il va encore falloir s'informer. Et cette fois, prendre le dessus, lui tomber dessus en conquérant, et plus en espion. Avec un maximum de précautions. Il sait que nous sommes en vie, il va se méfier au plus haut point... et qui sait, peut-être encore se déguiser en quelqu'un d'autre..."

La magie avait ses bons côtés, sauf quand c'étaient les ennemis qui l'employaient. C'était, sans doute, une des raisons qui poussaient le guerrier à s'en méfier comme de la peste. Il gardait un amer souvenir de leurs mésaventures dans le bosquet des druides, quand Lothringen, les yeux pétillants de haine à son encontre, le menaçait de ses haches, et n'aurait eu de cesse qu'après avoir exposé ses tripes au grand air...

Non, décidément, la magie, ce ne serait jamais son truc.

[Lothringen]

Lothringen réfléchissait. S'informer, oui, mais comment ?

"Maintenant que j'ai vu son vrai visage, je peux tenter une scrutation, et ce n'est pas un simple déguisement qui l'en garantira. Sinon, les recherches de nos services d'espionnage auront peut-être donné quelque chose... "

Il soupira.

"Comme toujours, nous manquons cruellement de sources."

Le semi-drow resongea alors à ce qu'il avait entendu, dans l'alcôve.

"Sais-tu au juste qui sont les appuis qui lui ont permis de se hisser au conseil ? Pas le parti de De Vir, manifestement. "

[Mornagest]

Ils mettraient presque une heure avant d'arriver à bon port, mais ils arriveraient. Au moins quelque chose de sûr, ça ne faisait pas de mal. Les incertitudes minaient l'espoir, et ces derniers temps, ils n'avaient pas besoin de cela.

Grimaçant à chacun des pas qu'il franchissait, Mornagest essaya de n'en rien laisser paraître dans sa voix.

"J'ai eu très peu de temps avant de me mettre au parfum. Je n'ai pas eu l'occasion d'en apprendre beaucoup quant à ses fonctions précises, ni ses appuis. Il n'était pas conseiller avant que je parte à Lumenis, et dès mon retour, j'ai été mandaté à Manost. La suite, tu la connais. Mais si je devais deviner, je pense que c'est grâce à ses petits trafics qu'il s'est taillé une place au sein du conseil. Plutôt que de combattre les revendeurs de lotus noir, le conseil a dû préféré faire main basse dessus, tout en gardant un oeil sur Terenas lui-même. Je pense qu'ils ont dû s'apercevoir qu'il est dangereux..."

Son ton était amer. Comment une fripouille de ce genre avait-elle pu en arriver là, la question était légitime. Mais elle valait également pour lui, au fond. Le sang de combien d'hommes avait-il sur les mains ? Plus qu'il n'en pouvait se souvenir...

[Lothringen]

Lothringen raconta alors dans le détail ce qu'il avait entendu, durant sa clairaudience. Sur le moment, il n'avait su qu'en penser, mais les événements avaient tôt fait de clarifier les points les plus confus des conversations qu'il avait pu surprendre. Terenas avait manifestement tenté de duper un peu trop de monde à la fois : il n'aurait pas beaucoup d'alliés pour amortir sa chute. Un bon point, somme toute...

"Il est probable que je ne sois pas tout à fait étranger à tout ceci... Les accords commerciaux t'ont créé des ennemis puissants."

En prononçant ces mots, il pensait à voix haute plus qu'il n'attendait de réponse. S'en rendant compte, il ajouta :

"Je te sens peser de plus en plus lourdement sur mon épaule. Il ne faudra pas être épuisés quand nous arriverons à l'ambassade, car on nous attendra peut-être... Reposons-nous quelques instants."

[Mornagest]

Le guerrier accueillit cette pause sans protester. Il sentait son genou enflé lui tirer de plus en plus, et il était désormais obligé de s'appuyer complètement sur Lothringen pour ne plus poser le pied au sol.

"C'est idiot, j'ai trébuché sur un pavé... enfin, nous y arriverons bien. Hum, oui, je pense que Terenas a dû voir en moi un empêcheur de trafiquer en rond. Non qu'il se trompait, remarque. Mais il risque bien de se retrouver rapidement six pieds sous terre. Il sait que nous sommes en vie, il n'a pas d'allié véritable au sein du conseil... ça ne m'étonnerait pas qu'il se cache désormais, y compris des autres conseillers. Si j'avertissais Devir, il le décapiterait sur-le-champ, je pense."

Il détendait les muscles de son épaule, fatiguée de s'appuyer sur celle du manostien. Ce dernier devait d'ailleurs sentir le poids de Mornagest, plutôt imposant...

"Ça ira ?"

[Lothringen]

Lothringen força un sourire. Il avait l'épaule en capilotade, mais inutile d'en rajouter.

"Bien sûr. Ce n'est pas moi qui suis blessé."

Ces blessures à répétition de Mornagest avaient du reste le don de le rendre particulièrement nerveux. Pourquoi n'était-il pas prêtre, au lieu de devoir toujours s'en remettre à la bonne volonté de clercs de diverses allégeances, toujours susceptibles de les trahir et de leur insuffler la mort plutôt que la guérison ? Sans compter que ces blessures n'étaient pas sans laisser des traces sur le moral de son compagnon, et ils n'avaient vraiment pas besoin de cela.

"Mais nous n'allons pas avertir De Vir, n'est-ce pas ? Pas encore. Une décapitation... Je trouve cela beaucoup trop impersonnel. Beaucoup trop propre."

Son regard s'était durci et lançait des éclairs de haine. Il avait du sang drow, somme toute...

[Mornagest]

Il secoua la tête en signe de dénégation.

"Le risque n'est pas nul qu'il soit lui-même trempé dans l'affaire. Je n'y crois pas, mais rien n'est moins sûr..." Ils en avaient suffisamment fait les frais, ces derniers jours. Les suppositions, les alliances plus ou moins établies qui s'effondraient à la moindre occasion... tout cela ne rendait les deux aventuriers que plus paranoïaques.

"Nous devons régler cela nous-mêmes. De plus, rien ne me ferait plus plaisir que traiter directement avec Terenas."

Ses yeux reflétaient, eux aussi, la colère qu'il ressentait à nouveau en songeant à ce qui s'était passé, aux risques mortels qu'ils avaient affrontés à cause de lui. La vengeance était un plat qui se mangeait froid... dans la plupart des cas.

[Lothringen]

En l'occurrence, Lothringen l'aurait volontiers mangée tiède, de crainte que l'occasion ne leur en échappe pour de bon. Il était en tout cas particulièrement satisfait de voir que Mornagest partageait ses intentions. Oh, s'ils pouvaient en finir une bonne fois avec tous ces mensonges, tous ces complots, de manière bien nette, bien sanglante... Quel plaisir ce serait. Éphémère, peut-être... mais ô combien intense. Depuis le début de cette affaire, ils passaient leur temps à tomber dans des pièges, à fuir, à tâtonner. Ils avaient enfin l'occasion de reprendre l'avantage, et il ne faudrait pas la laisser passer.

Ils demeurèrent encore quelques temps sur le chemin, à récupérer des forces. Puis reprirent la route... Ils n'auraient plus pour très longtemps désormais.

En route vers

[Lothringen]

Ils marchaient d'un bon pas, en plein jour, avec leur petite troupe derrière eux. Etaient-ils assez ? Deux hommes de plus, c'était un peu léger pour faire la différence. Mais ils avaient eu trop peu de temps pour les rassembler, et n'avaient cette fois le choix ni de l'heure, ni du lieu : une occasion comme celle-là risquait trop de ne pas se reproduire.

Contrairement aux autres, Lothringen n'avait rien eu à préparer. Ses sortilèges étaient à leur place dans sa mémoire, ses haches dans leurs gaines à sa ceinture. Et quand on lance ses sorts trop tôt, on les gâche... L'inquiétude montait un peu à mesure qu'ils traversaient la ville en direction du jardin. Une fois de plus, ils risquaient gros. Mais il préférait ne pas s'attarder sur cette idée, et songer à une stratégie pour la confrontation à venir - leurs mésaventures dans les cryptes et leur débandade devant l'auberge lui avaient laissé un goût amer en bouche. Cette fois au moins, le nombre serait pour eux. Enfin... sauf mauvaise surprise de plus.

Une fois parvenu à l'entrée du parc, Lothringen marqua une pause. Si Terenas était aussi bien renseigné que cela, il devait être dans la fausse ruine, à relever d'éventuelles empreintes de pas. Quelle approche adopter ? Une invisibilité ne durerait guère avant dissipation, mais s'ils s'éparpillaient un peu, elle permettrait à une bonne partie des combattants de porter le premier coup dans des conditions optimales. Ce qui n'était pas négligeable...


Lothringen ne s'embarrassait pas de code de l'honneur avec ceux qui n'en avaient pas, et il n'eut aucun scrupule à proposer cette option à Mornagest. Son seul regret, c'était de n'avoir personne à même de jouer les éclaireurs. Son regard balayait en vain les pelouses, à la recherche de leur ennemi...

[Mornagest]

Le guerrier partageait l'opinion de Lothringen : pas de pitié ou de commisération pour celui qui avait tenté par deux fois de les tuer, et ce, de la façon la plus lâche qui soit... attaquer par plusieurs côtés pouvaient leur faciliter grandement la tâche.

"D'autant qu'il n'est pas à un coup bas près... méfiance", conclut-il sombrement. La perspective du combat le titillait furieusement, mais il redoutait un nouveau traquenard sinistrement ouvragé. La personnalité de Terenas était pour le moins effrayante, et il pouvait tout aussi bien avoir fomenté quelque chose de vicieux...

Ils arrivaient en vue des pans de murs délabrés où ils avaient décidé, quelques jours plus tôt, d'y établir leur boîte aux lettres morte. La dispersion devait avoir lieu maintenant, sinon elle n'aurait aucun intérêt. Personne en vue, pour l'instant...

"On les encercle ?" demanda alors Mornagest. Il n'était probablement pas le plus à même de décider ; après tout, c'étaient des manostiens, ceux qui les accompagnaient, et il ne se voyait pas leur donner d'ordre.

[Lothringen]

"On les encercle", acquiesça sobrement Lothringen. Il peinait à détacher son regard de la petite butte, où aucune activité n'était pour l'heure visible de là où ils étaient. Mille scénarios se disputaient son esprit. Terenas avait-il changé d'avis, était-il déjà reparti, bredouille ? Allaient-ils découvrir que tout un bataillon de gardes impériaux les prenait à revers, heureux d'avoir réussi à les faire sortir de leur refuge ? Il fallait tout envisager... et le manostien ne se sentirait réellement apaisé que lorsque leur adversaire serait mort. Encore y repasserait-il plusieurs fois sa lame, pour s'en assurer.

Rapidement, il distribua ses ordres, afin que chacun sache quelle position adopter, et qu'ils ne se retrouvent pas trop proches les uns des autres simplement parce qu'ils se seraient perdus dans l'invisibilité. Il recommanda aux gardes de ralentir l'allure quand ils arriveraient au niveau des mélandiens, si toutefois ils les trouvaient là où ils les attendaient. De se placer non loin de leur cible et d'attendre son signal...

Il échangea un dernier regard avec Mornagest. L'heure et le lieu se prêtaient mal aux effusions, mais...

Incapable de rien trouver à dire, il incanta rapidement.

Lothringen = = > invisibilité de groupe = = > petite groupe de combattants

"Que la Dame nous assiste... Allons-y."

[Mornagest]

Bénéficiant d'une invisibilité des plus avantageuses pour le début du combat, les soldats commencèrent à se disperser tout autour des vestiges rocailleuses sises quelque vingt mètres plus loin. À huit, ils pouvaient bloquer toutes les entrées vers le parterre de végétation entremêlée de pierres, qui était accessible par trois sentiers en terre battue.

Un rapide coup d'œil de Mornagest lui permit de confirmer : Terenas se tenait avec ses cinq mercenaires, en train de fouiller activement les lieux. La moindre fissure, le moindre joint de mortier manquant était examiné attentivement, à la recherche d'un éventuel indice permettant de mener aux deux fuyards. Malheureusement pour eux, ils n'avaient laissé de message pour l'instant...

Par signes, le mélandien indiqua que leurs ennemis se trouvaient bel et bien là. L'offensive allait débuter. Ils se rapprochèrent le plus silencieusement possible, mais Terenas avait dû lancer quelque sortilège permettant d'améliorer son acuité auditive ; il lança un cri d'alerte et ses hommes furent aussitôt sur le qui-vive.

Terenas ---> détection de l'invisibilité ---> alentours des rocailles

Le sortilège de Lothringen fut immédiatement dissipé, laissant apparaître les combattants à quelques mètres seulement des mélandiens, en train de charger ces derniers.

"Pas de chance pour vous... votre scrutation n'était pas très discrète", laissa tomber le conseiller d'une voix glaciale, tandis que, lames tirées au clair, les combattants des deux camps faisaient crisser acier contre acier. Chacun avait un adversaire face à lui, sauf un des mercenaires de Terenas qui dut en affronter deux en même temps.

Mornagest croisait le fer avec un rude gaillard à la mine antipathique, et dont les gestes rapides le déconcertaient quelque peu ; il devait avoir appris à se battre dans les rues, et conservait certains de ses coups bas. Il tenta de désarmer le chancelier en lui agrippant le poignet et le lui tordant, mais Mornagest tint bon et repoussa son adversaire d'un bon pas, tout en renforçant son emprise sur sa garde.

[Lothringen]

C'est à peine si le semi-drow prit le temps de laisser échapper un soupir d'exaspération lasse. Depuis le début de cette affaire, toutes ses initiatives semblaient vouées à l'échec, par décret spécial de Cynosure : ainsi de la scrutation, ainsi de l'attaque sournoise. Le plus suspect, finalement, c'était que Terenas n'ait pas ficelé davantage son traquenard, si vraiment il les attendait. A moins qu'il n'ait été assez sot pour espérer qu'ils viendraient en sous-effectifs, ce que le manostien ne croyait guère...

Les combats s'engageaient, lame contre lame. N'ayant pas d'adversaire au corps à corps, Lothringen entendait profiter de l'avantage. Mais il se défiait du mage, et il préféra s'occuper de lui en premier.

Lothringen = = > flèche acide de Melf = = > Terenas

Cadeau. Voilà qui devrait le dissuader d'incanter pour quelques temps. Espérons...

Il aurait pu tenter d'enchaîner sur des sorts de soutien pour son groupe, mais il préféra d'abord lever l'hypothèque de quelque mauvaise surprise cachée. Son prochain sort serait une détection de la magie...

[Mornagest]

La flèche vint mollement frapper le bras de sa cible, lui arrachant une grimace de douleur. L'acide mordait la chair, brûlait, empêchait d'incanter correctement la plupart des sortilèges nécessitant des gestes particuliers. Terenas avait probablement méjugé les capacités de ses opposants... vu sa mégalomanie, ce n'était pas impossible. C'est tout du moins ce que songeait Mornagest, tout en poursuivant son duel contre son adversaire. Il venait d'esquiver un assaut qui aurait pu lui découper le bras sans problème, s'il n'avait pas glissé de côté au dernier instant. Refaisant face à l'homme, il tenta une attaque sur le flanc gauche, rencontra la lame de son adversaire qui dévia le coup et contrattaqua brutalement. Et un filet de sang courait désormais le long de la cuisse de Mornagest, brûlant et piquant.

Autour, les manostiens tantôt parvenaient à prendre le dessus sur leur adversaire, tantôt se faisaient blesser de manière plus ou moins grave. Il restait trois mercenaires de Terenas en état de combattre, et quatre manostiens pour leur donner la réplique. Le combat semblait prendre une bonne tournure.

[Lothringen]

Trop beau pour être vrai. Lothringen tendait l'oreille, jetait des coups d'œil de droite et de gauche. Etaient-ils bien seuls, n'y avait-il pas de renforts ennemis embusqués ? Celui qu'ils avaient sous les yeux était-il bien Terenas, du reste, ou un de ses hommes auquel il aurait conféré sa propre apparence ? Au point où il en était, rien ne l'aurait surpris davantage que l'absence de piège. Le semi-drow ne changea donc rien à son programme, et voulut vérifier qu'il était bien le seul à jouer avec les sortilèges.

Lothringen = = > détection de la magie = = > Lothringen

Il se mit alors à examiner tantôt les alentours, tantôt les combattants.

[Mornagest]

Une fois le sortilège lancé, l'air crépita un instant sur le petit champ de bataille, et une fraction de seconde, les combattants furent distraits dans leurs actions. Ensuite, les choses se poursuivirent, sans qu'aucun effet particulier ne se produisît. Soupçonneux, Lothringen devint franchement inquiet. Se pouvait-il que Terenas fut d'une compétence largement supérieure à la sienne, et puisse renforcer suffisamment ses illusions afin de rendre sa dissipation inefficace ?

Pendant ce temps-là, l'intéressé semblait s'être remis de sa flèche acide, et pouvait, avec quelque difficulté, certes, mais sans interruption, recommencer à lancer ses incantations arcaniques.

Terenas ---> convocation d'animal V ---> Lothringen

Le conseiller avait bien conscience que le semi-drow était dangereux, par ses sorts, mais son aspect fatigué laissait supposer qu'il ne prendrait pas part au combat physique... dans l'immédiat. Un tigre infernal surgit à un petit mètre de Lothringen, grondant sourdement et s'apprêtant à bondir sur sa cible.

[Lothringen]

Le guerrier-mage aurait bien aimé avoir la solution miracle sous la main, mais non. S'il avait connaissance du sortilège de renvoi, ce n'était pas pour autant qu'il l'avait présentement en mémoire ; ce contresort, comme tout autre sortilège, du reste, aurait nécessité un peu de temps pour l'incanter, et pour ce qui était du temps, Lothringen ne disposait que de celui nécessaire à la préparation d'une protection minimale...

Lothringen = = > image miroir = = > Lothringen

Tirant alors ses haches par réflexe, il regarda bondir vers lui le félin enragé. L'animal était rapide, tellement rapide. Une faille dans sa double parade et il retrouverait ses crocs plantés dans sa gorge.

Une feinte, et le tigre agrippa son poignet gauche, où il s'accrocha impitoyablement en lui arrachant un cri de douleur. Seul un balayage de la Dextre parvint à le déloger. Encore Lothringen eut-il vaguement l'impression que le tranchant de la hache s'était enfoncé dans la fourrure du flanc sans y causer le moindre réel dégât, tandis que son propre poignet saignait douloureusement. Puis le ballet de feinte, d'esquive et de parade reprit de plus belle. Il fatiguait déjà.

En temps ordinaire, Lothringen n'aurait pu espérer vaincre qu'à grand renfort de sorts de soutien. Alors, dans cet état de lassitude généralisé qui était le sien, il savait ne pouvoir tenir longtemps... Son seul espoir était que ses compagnons d'arme en finissent suffisamment vite avec les autres pour pouvoir lui porter secours à temps. D'ici là, il comptait parvenir à occuper le monstre. Peut-être.

"NE LE LAISSEZ PLUS INCANTER", cria-t-il à l'attention de Mornagest et des manostiens, qui affrontaient leurs propres corps à corps, là-bas, hors de portée de son regard.

Encore un sort comme celui-là, et il reverrait Tymora plus tôt que prévu.

[Mornagest]

Les manostiens étaient parvenus à prendre l'ascendant sur la plupart des mercenaires, qui blessé, qui mort. Seuls deux d'entre eux persistaient à se défendre contre l'étau qui se resserrait davantage à chaque instant sur eux. Terenas, quant à lui, tenta une nouvelle incantation qui fut interrompue lorsqu'un des gardes manostiens lui décocha un coup de pommeau dans les côtes, jetant son projet d'invisibilité dans les orties.

La partie était terminée. Terenas avait joué, pris des risques, et allait payer le prix fort pour ses ignominies. Il le savait, à en juger par le regard haineux qu'il darda au plus proche de ses adversaires. Hurlant, il plongea promptement la main dans une poche de sa tunique, et en extirpa une fiole rougeâtre. Avant que personne ne réagît, il était trop tard. Lancée au sol avec la force emplie de rage qui l'habitait, le conseiller déchu fit usage de sa potion d'explosion, provoquant instantanément sa mort, ainsi que celle de plusieurs des combattants présents dans son entourage proche.

Les flammes se propagèrent jusqu'à cinq mètres du point d'impact, ravageant tout sur leur passage. Les vêtements des guerriers prirent feu, et ils furent nombreux à se rouler au sol afin de l'éteindre. Mornagest fut également touché, et il arracha sa tunique des mains, aidé par les coutures à moitié craquées par les flammes. Il fut brûlé à plusieurs endroits, et sa chevelure en prit également un coup.

Seuls restèrent debout... Lothringen et son tigre adverse, dont les assauts n'avaient cessé qu'un instant, déstabilisé par le bruit de l'inflammation soudaine.

[Lothringen]

Il y avait eu une explosion si violente que le sol avait un instant tremblé sous ses pieds ; des flammes dévorantes s'étaient alors élevées à l'endroit où se tenaient groupés Terenas et la majeure partie des combattants. Il y avait eu des hurlements, des corps projetés au sol par le souffle puissant de l'explosion, puis rapidement, plus grand chose. Un peu de fumée. Des flammèches dans l'herbe. Des corps carbonisés. A moitié recouvert par un cadavre, un survivant geignait faiblement. A peine Lothringen avait-il eu le temps d'apercevoir le corps immobile de Mornagest, à demi-nu, les cheveux calcinés, que le tigre profitait de ce moment d'inattention pour l'attaquer. Réagissant enfin, le semi-drow en fut quitte pour une estafilade à l'avant bras. Il ne s'en souciait pas. Son cœur battait trop fort.

Ils sont morts. Tous morts. Même lui. Et moi... Qu'ai-je donc à faire d'une telle victoire ? Je le faisais pour lui.
Tu t'emballes. Ils sont peut-être juste sonnés, il y a peut-être des survivants...
Non. Seulement ce geignard qui couine, et ce n'est pas Mornagest. Et je dois encore me défendre de ce monstre qui n'a même pas eu la bonne idée de repartir avec son invocateur. Mais que m'importe de vivre.
Tu sais ce qu'en penserait ta déesse.
Ma déesse, ah oui ! Parlons-en. Qui ne nous a laissés survivre à tant d'attentats que pour la cruauté de ce dénouement. S'est-elle bien jouée de mes efforts... J'aurais dû le deviner, depuis le début, elle me désavouait, elle n'attendait que le moment décisif pour me faire connaître sa sentence, pour me réprouver, comme Seina avant moi. Et pourtant, en quoi me suis-je égaré, en quoi ai-je méfait ?
Tu le sais très bien.
Non ! Arracher un innocent à ceux qui sont assez lâches pour le tirer comme un lapin du milieu d'une foule, est-ce que ce n'est pas cela, la justice ? Et ce dénouement-là, qu'a-t-il de juste ou d'honorable, dont on ne doive rougir dans les Plans ?
Concentre-toi sur ton combat. Ce tigre n'a pas tant de doutes...
Que m'importe ce tigre. Que m'importe de vivre. Et que me chaut ta prétendue sagesse...

L'espace de quelques instants, Lothringen reporta de nouveau son attention sur la créature qui avait fini de détruire ses doubles. Il sentait que ses gestes se faisaient plus lents, son bras plus lourd. L'épuisement physique et nerveux.

Alors, une petite voix se fit entendre, sournoise et douce, qu'il n'avait plus entendue depuis longtemps...

Tu parais doué pour détruire. Ne veux-tu pas recommencer ?

Il frissonna, tout en se fendant en vain vers la créature, qui esquiva une fois de plus.

Ne soyez pas stupide. Ils sont tous morts. Il n'y a plus rien à détruire ici, que ce monstre sans intérêt.

Mais si. Toi...

A la plus grande surprise de l'animal, le semi-drow mit soudain fin à ce sautillement constant qui seul lui permettait de réagir assez vite pour esquiver ou parer ses fulgurantes attaques. Se campant désormais sur ses deux jambes, il laissa même tomber au sol sa hache de main droite. Son regard était devenu fixe. Il ne haletait plus, essoufflé par le combat. Même sa sueur semblait avoir changé d'odeur. Après un temps d'hésitation, le tigre lui sauta dessus, le renversant en arrière, près à lui labourer le ventre à coups de griffe. Le semi-drow se laissa projeter au sol, agrippa une patte de sa main libre, et de l'autre, envoya des coups de hache d'une puissance improbable dans le flanc du monstre. Pendant ce temps, il avait le torse déchiré. Il paraissait ne rien sentir.

Je détruirai ce monde qui m'a détruit. Toi d'abord, créature, puis quiconque se dressera devant moi. Ma rage me maintiendra en vie jusqu'à temps que j'aie accompli cette tâche...

HRP : cf. quête Manost Revenge, ici
http://www.baldursgateworld.fr/lacouron ... post133640

[Mornagest]

L'espèce de rage barbaresque qui s'était emparée du semi-drow lui avait presque décuplé les forces, qui, même si elles étaient amoindries par la fatigue du sortilège de scrutation, étaient devenues très puissantes. Aussi, les quelques rapides coups de hache qu'il envoya avec une fureur inconsciente dans le flan du tigre eurent pour effet de lui ouvrir littéralement la cage thoracique en deux, provoquant le trépas de la bête en quelques secondes. Le mammifère démoniaque s'affala au sol en grognant une dernière fois, tandis que ses griffes, restées plantées dans le bras de Lothringen, se rétractèrent et quittèrent la chair ébène du manostien toujours dans un état proche de la folie furieuse.

Il resta un moment ainsi, sans bouger, contemplant sans le voir le champ de bataille morbide qui s'étalait sous ses yeux vides d'expression. Il ne remarquait pas les survivants, il ne sentait pas la douleur, ni le sang s'écouler dangereusement de ses plaies à vif, ni ses tempes battre follement au rythme de son cœur emballé et proche de la fibrillation.

De leur côtés, les combattants tentaient maladroitement de se remettre d'aplomb, sur le dos ou le séant, parfois debout pour les moins grièvement blessés d'entre eux. Mornagest était de ceux-là ; hormis ses brûlures douloureuses, il avait évité les coups fatals que son adversaire s'était efforcé de tenter de lui porter, avant de périr sous les flammes meurtrières de son défunt chef.

"Oooh..." gémit le guerrier en se tenant la tête, qui le faisait souffrir le martyre. Dans ses oreilles résonnait encore la déflagration entendue quelques instants plus tôt, et il avait l'impression de ne rien entendre, ou d'avoir du coton dans les oreilles, la douleur en plus. Il ouvrit les yeux, et ne vit que du sang, partout autour de lui, et une silhouette vaguement familière, quelques mètres plus loin, se tenant debout, immobile.

"Lo...Lothringen ?" bredouilla-t-il, les muscles engourdis, y compris ceux de sa mâchoire.

[Lothringen]

Le semi-drow tourna la tête vers l'endroit d'où provenait la voix. Deux ou trois hommes s'étaient remis debout, branlant qui le chef, qui les jambes, mal assurés, débiles. Certains n'avaient même plus d'arme en main, et le guerrier-mage les considéra un moment, perplexe, avant de faire quelques pas en leur direction, sa hache nerveusement serrée dans la main gauche, sans mot dire.

Ils virent alors que son regard avait une fixité malsaine, celui d'un dément ou d'un homme sous l'emprise d'une domination. Alors que ceux qui le pouvaient encore se préparaient à prendre de prudentes distances, le semi-drow se mit à incanter. Un mage aurait reconnu les mots de pouvoir d'une peau de pierre. Mais il aurait aussi remarqué quelque chose de fébrile dans cette incantation, un chaos de magie à faire gémir la Toile...

[Mornagest]

La gestuelle et les paroles mystiques prononcées par Lothringen n'avaient pour les combattants présents aucune signification particulière. Pour eux, un sort était un sort. Comment auraient-ils pu se rendre compte que les composants du sortilèges n'étaient pas exactement ceux qu'on rencontrait classiquement dans les Royaumes ?

Mais peu importait l'exactitude du lancement du sort, à vrai dire. Les yeux déments du semi-drow et le fait qu'il incantait alors que tous les adversaires étaient au tapis suffirent aux guerriers à se mettre à reculer de plus en plus vivement... sauf un, qui, pris de panique, prétendit attaquer Lothringen, épée vaguement levée vers lui.

Mornagest contemplait la scène avec une fascination morbide et impuissante. Il aurait pu crier à l'homme de s'enfuir. Il aurait pu courir le pousser de côté et lui éviter ainsi une mort affreuse. Il aurait pu... mais ses jambes demeuraient clouées au sol, fébriles et paralysées par le spectacle.

Sitôt son incantation terminée, le semi-drow envoya une sorte de sphère verdâtre, de la taille d'une tête de chat. Elle fila à une vitesse fulgurante vers le menaçant combattant, et lui frappa la poitrine. Il poussa un cri de surprise, plus que de douleur. Et Mornagest vit. Il vit la chose se répandre sur l'ensemble du corps du malheureux. Il vit sa silhouette se réduire comme peau de chagrin. Il vit les restes cendreux de l'homme, qui furent balayés par la légère brise qui flottait sur le parc. Il vit également le sourire sadique de satisfaction qui orna les lèvres de son compagnon, en proie à une folie furieuse inextinguible. Il y vit sa propre mort.

De tétanisé, il passa à l'état de panique pure et simple, qui lui dictait de s'enfuir le plus rapidement possible afin de mettre une distance raisonnable entre eux deux. Il eut la présence d'esprit de hurler :

"Foutez le camp ! Foutez le camp, bordel !" avant de se mettre à courir dans la direction opposée du manostien, cherchant un abri derrière lequel se cacher. Il opta pour un pan de mur suffisamment grand pour le dissimuler, et suffisamment loin pour espérer que Lothringen ne marcherait pas jusque là.

[Lothringen]

Plutôt que de poursuivre les fuyards, Lothringen avait tourné son attention vers le tas de corps à ses pieds, où le même mourant que tout à l'heure continuait de geindre, inconscient de ce qu'il se passait. Sans se soucier de savoir à quel camp il appartenait, le semi-drow lui infligea le coup de grâce en lui tranchant la gorge d'un coup de bûcheron. Il inspecta alors les autres corps, en quête d'une dernière étincelle de vie à détruire, mais plus rien ne bougeait.

Les survivants s'étaient depuis longtemps mis hors de sa portée. N'ayant osé fuir tout à fait, les gardes s'étaient éloignés jusqu'à l'extrême limite de leur portée de vue, prêts à détaler si Lothringen faisait seulement mine de les poursuivre. Incapable cependant de porter son attention aussi loin, le guerrier-mage finit par s'immobiliser, faute de cible, aussi soudainement qu'il s'était mis à attaquer. Il demeura quelques temps ainsi, debout, inactif. Puis Mornagest le vit s'effondrer au sol, auprès des autres corps, d'un bloc, évanoui.

[Mornagest]

Rien. Il n'avait rien pu faire pour sauver le malheureux qui venait de se faire égorger sous leurs yeux, par un de ses propres alliés ! Le cynisme de la situation était sans limites. Le guerrier resta un moment à guetter une réaction de la part du semi-drow, mais celui-ci restait immobile, au sol. Prudemment, Mornagest sortit de sa cachette précaire et alla voir de quoi il en retournait. Cet accès de folie l'inquiétait, et il redoutait quelque sinistre magie noire là derrière.

Il arriva à la hauteur du corps de Lothringen, toujours apparemment inconscient, et s'empressa d'écarter les haches de sa portée de main. Un accident pouvait encore survenir...

Il lui toucha l'épaule de la main et le secoua doucement.

"Lothringen ?"

Lui-même se sentait faible. Ses brûlures lui avaient procuré une douleur intense qui l'avait exténué. Il ne tenait debout que parce qu'il s'inquiétait follement, sans quoi il se serait évanoui à côté de son compagnon.

Derrière, les autres hommes revenaient également, et ils n'étaient visiblement pas très contents...

"Ce type est dingue ! Faut le tuer avant qu'il ne remette ça. Il a buté Thorg !"

[Lothringen]

Le semi-drow tardait à reprendre conscience. En un premier temps, les secousses de Mornagest ne provoquèrent aucune réaction, et à la longue, n'arrachèrent d'abord que des gémissements sourds et des dodelinements de la tête. Puis, portant sa main à sa tête, Lothringen rouvrit des yeux fiévreux et las qui allèrent aussitôt se fixer sur le guerrier penché sur lui. Il força un sourire.

Tu es vivant, et il est mort.

Puis il fut rattrapé par la conscience des griffures qui lui balafraient le torse, de l'ecchymose qui saignait sur l'arrière de son crâne, de son total épuisement. Il n'avait qu'un souvenir assez confus de la bataille. Il était en train de se battre contre un tigre furieux, et une explosion était survenue. Personne n'avait plus bougé pendant un moment, au point qu'il avait pu tous les croire morts. Après... Plus rien.

Il se redressa péniblement sur son séant. Il gisait au milieu d'un amas de cadavres calcinés. Son regard fit le tour des survivants qui le dévisageaient. Mornagest semblait terrifié. L'avait-il cru plus sérieusement atteint ? Les deux gardes manostiens qui se tenaient debout non loin d'eux avaient un regard dur, mais Lothringen pensa que l'importance des pertes essuyées l'expliquait assez. Sa main gratta une plaie ouverte dans ses cheveux blancs, et en revint ensanglantée. Il s'était en effet légèrement ouvert en tombant à terre, mais il ne se souvenait de rien de tel. Avait-il été assommé ?

"Heureux de voir qu'il y a quelques survivants. Par la Dame, quel massacre... Comment ai-je perdu connaissance ?"