[Lieu] Au cÂœur des montagnes

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

La route menant vers l'est était moins fréquentée que celle menant à Evendum, à en juger par l'état de la chaussée. Ce n'était guère plus qu'un chemin rocailleux, parfois boueux, qui se dirigeait droit vers une barrière montagneuse. Au-delà, Kasumi le savait, se trouvait la mer. Et probablement un bateau en direction de Dorrandin... Si les hypothèses du rôdeur était justes...

Heureusement, il n'eut guère à attendre avant de trouver confirmation que son choix était le bon. A peine le hameau avait-il disparu derrière un repli du terrain que la louve signala à nouveau une trace olfactive. Et non loin de là, une portion de chemin boueuse laissait apparaître, outre les traces de roues et de sabots, des empreintes de pas nettement visible et nombreuses. Probablement entre 7 et 10 personnes se déplaçaient à pieds. Bien sûr, elles pouvaient appartenir à un autre groupe de personnes. Mais la vieille marchande n'avait signalé qu'un seul convoi en direction de l'est la veille. Et la louve percevait l'odeur d'Astrée...

Kasumi poursuivit donc son chemin, certain cette fois-ci d'être sur la bonne piste. La route montait en pente douce, contournant les montagnes en s'élevant petit à petit. Elle menait probablement au col qu'il apercevait à l'horizon, entre deux sommets, assez haut en altitude à en juger par la blancheur des cimes. Il l'atteindrait sans doute dans l'après-midi.
Le sol devenait de plus en plus rocailleux, et les traces moins visibles, mais la louve percevait toujours l'odeur de la rôdeuse. Ombrage, quant à lui, se ressentait de sa courte nuit, et avait tendance à ralentir le pas. Une bonne pause lui serait nécessaire à midi, voire peut-être avant...

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le rôdeur eut l’impression qu’on lui ôtait un poids des épaules lorsque la louve lui renvoya une pensée excitée. Elle avait enfin retrouvé la trace d’Astrée et fila ventre à terre sur la piste de ses sens. Le demi-elfe ne se laissa pas aller à l’euphorie, la route était encore longue et la course redémarrait pour rattraper le convoi passé la veille. S’il atteignait la côte et le bateau qui l’y attendait avant que le rôdeur l’ait rejoint, tout serait perdu. De même, les esclavagistes pouvaient à tout instant recevoir des renforts qui amoindriraient encore ses chances de libérer la rôdeuse et les autres prisonnières.

Pourtant, il ne pouvait pas trop pousser Ombrage qui puisait déjà dans ses réserves. Si elles venaient à s’épuiser, il n’aurait plus aucune possibilité de rattraper le convoi à temps. Il préféra donc faire une longue halte le temps de laisser l’animal se détendre avant de s’engager sur la dernière dénivellation de terrain avant la longue descente vers l’océan. S’il abordait cet obstacle avec une monture fatiguée, il ne gagnerait pas de temps sur les piétons et les carrioles et risquerait à chaque moment un faux pas fatal. Il démonta peu avant midi et examina les membres du hongre avec un air désolé avant de le laisser gambader à sa guise. Malgré son endurance, il ne tiendrait plus le rythme plus de quelques jours et encore tous les signes démontraient au rôdeur qu’il lui faudrait ralentir ses efforts, probablement en négociant à pied les passages les plus difficiles à venir.

Le rôdeur s’autorisa un petit feu pour reprendre lui-même des forces avec une nourriture chaude et un peu de thé. Tout avait un goût de cendre mais il savait que son organisme assimilerait les aliments, lui redonnant un peu de sa force perdue. Si un combat devait avoir lieu, il ne servirait à rien à Astrée qu’il le livre dans un état avancé d’épuisement et d’inanition.

Il se remit en route en début d'après-midi, bien trop tôt au goût d'Ombrage, mais pas au sien.

[Voyageuse]

Le chemin qu'il suivait s'élevait lentement, tout en courbes et en virages, à flanc de montagne. Ombrage, reposé, avançait d'un pas régulier mais assez lent, freiné par la pente qui s'accentuait.
La route, heureusement, était prévue pour le passage de convois, et était suffisamment large et bien entretenue pour que le rôdeur n'ait pas besoin de mettre pied à terre.

En milieu d'après-midi, il parvint enfin au col. La température était glaciale, et il trouva de nouveau quelques névés en bordure du chemin. Au-delà du col, la route s'aplanissait, dans un paysage vallonné et boisé. Plus loin s'élevaient encore quelques montagnes, moins hautes : les contreforts du massif. Ensuite, la mer...
Une vingtaine de minutes plus tard, il trouva Première Neige arrêtée en bordure de la route. Derrière elle se trouvait un terrain plat, idéal pour un bivouac. Et bien sûr on y voyait les traces d'un campement, tout récent. Quelques tentes, un grand feu. Quelques déchets abandonnés dans un coin. Rien de bien probant. Seul le flair de la louve permettait d'être certain qu'il s'agissait bien des esclavagistes. Il y avait des traces de pas un peu partout. Certaines semblaient se diriger vers le bois tout proche, parallèlement à la route.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi laissa sa monture pour inspecter les traces de plus près, peut être cachaient-elles un précieux indice ou une angoissante réponse. Dans tous les cas, il devait en avoir le cœur net même si la louve pouvait continuer à suivre la piste sans cela. Ne rien savoir de ses adversaires et fermer les yeux sur leurs sévices pouvait aussi vite le mener à l’échec que de choisir une mauvaise voie. Il réunit donc son courage pour remonter à la piste sur une centaine de mètres. Manifestement, il s’agissait d’une personne de faible poids, une femme ou peut être et qui courrait à en juger par l’espacement des empreintes et leur configuration. La fuyarde ne semblait pas avoir été suivie par le même chemin mais la piste ne s’éloignait pas suffisamment de la route pour qu’elle disparaisse totalement à la vue d’un éventuel poursuivant qui aurait emprunté la route, même en pleine nuit.

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

Au bout d'une bonne centaine de mètres, la piste s'arrêta net. Le, ou plutôt la propriétaitre des empreintes, était maintenant visible...
Le corps d'une jeune adolescente se trouvait là, dans une position obscène, grotesque, qui avait probablement été voulue. Plusieurs traces de pas étaient visible, provenant de la route toute proche et y retournant.

En s'approchant plus près, Kasumi put voir les traits du visage tordus en une expression d'indicible souffrance. La jeune fille était vêtue d'une simple tunique rouge, longue, sous laquelle elle ne portait apparemment rien. La tunique était déchirée, et ses mains encore crispées sur certains lambeaux montraient qu'elle les avait arrachés elle-même.
Sa peau présentait à certains endroits une coloration bleue qui évoquait sans aucun doute possible l'effet d'un poison.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi fut horrifié par sa découverte macabre mais une petite part de lui se trouvait soulagée de ne pas découvrir le corps d’Astrée. Il éprouva immédiatement une vague de dégoût à cette pensée et ne put réprimer plus longtemps un haut le cœur. La façon atroce sont la jeune fille avait finie ses jours était des plus horribles. Il était évident qu’elle avait souffert avant la fin et on l’avait laissée là, comme sinistre exemple peut être ou plus simplement comme quantité négligeable ne méritant aucun égard même dans la mort. Comme un morceau de viande avarié mis au rebus. Comment des hommes pouvaient être ainsi dénués de morale ? La façon dont était vêtue la jeune fille donnait du poids aux rumeurs rapportées par Eleina sur les conditions d’indignité imposées aux captives… Le demi-elfe avait traversé quantité de champs de bataille mais la vue de cette enfant morte dépassait en tout point l’horreur de ce qu’un guerrier pouvait infliger à un autre. La pauvre n’avait eu aucun moyen de se défendre. Le poison qui avait provoqué sa fin était un autre mystère angoissant. Une punition pour méconduite ou rébellion ? Un accident ? Un suicide ?

Le demi-elfe sentait une urgence de plus en plus pressante à retrouver sa compagne. Qu’est ce que des monstres capables de brutaliser à mort une adolescente qui avait un semblant de valeur à leurs yeux pouvaient infliger à une femme dont ils pouvaient aisément se passer ? Le demi-elfe ferma son esprit à ses cauchemars qui le tenaient éveillé la nuit et ne cessaient de le tourmenter le jour. Il ne put se résoudre à laisser en l’état le cadavre de la frêle jeune fille. Il entassa donc les branchages les plus secs de résineux qu’il put trouver puis déposa le corps avec délicatesse sur le bucher improvisé. Il le recouvrit avec l’une de ses couvertures en trop pour lui apporter un peu de dignité dans la mort. Celle qui lui avait été brutalement refusée pendant ses derniers jours. Il adressa une prière fervente à Lathandre et à Mielikki avant de passer son chemin, laissant les flammèches léchait puis embraser le corps de la victime de ceux qu’il s’apprêtait à tuer. Il ne put s'empêcher de songer à la peine que ressentait les proches de la martyre anonyme qui ne sauraient probablement jamsi ce qui lui été arrivée. Son sort était pet être plus clément que celui qui attendiat les autres prisonnières et Kasumi talonna Ombrage pour rattraper le temps perdu.

[Voyageuse]

Le reste de la journée se déroula sans incident. La route descendait lentement à travers les bois. Le sol était trop rocailleux pour qu'on y distingue les traces mais la louve était là.

Petit à petit, comme le soir approchait, le sol devint plus humide, plus caillouteux, sablonneux. Les traces réapparurent. Toujours deux chariots. Toujours quelques chevaux, cinq d'après le petit Clément. Une petite dizaine de piétons.
Première Neige, sentant que le rôdeur n'avait plus réellement besoin de son aide, s'autorisa une petite escapade dans les fourrés, à la recherche sans doute de quelque gibier.

La nuit tomba alors qu'il sortait enfin de la zone boisée. La route longeait maintenant une rivière, permettant à Ombrage de se désaltérer. Il était au cœur des contreforts du massif, un paysage de montagnes trapues aux pentes douces, herbeuses, parsemées de bosquets. Il n'aurait aucun mal à trouver un endroit accueillant pour passer la nuit. Et il était temps : Ombrage était épuisé, et lui ne valait guère mieux.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Peu après que Première Neige lui ait faussé compagnie pour pourvoir à ses besoins, le rôdeur jugea la luminosité trop faible pour continuer sans danger avec un cheval affaibli. Il installa donc son bivouac, cette fois-ci dépourvu de feu pour éviter qu’il ne se voit dans la nuit plus bas sur la pente. Il commença par s’occuper d’Ombrage dont l’état se dégradait quoique moins nettement que la veille. La fatigue accumulée et les privations commençaient à se faire sentir et il devenait de plus en plus rétif. Seul un complet repos de plusieurs jours le remettrait sur pied, un luxe que le rôdeur ne pouvait guère lui accorder pour le moment. Réduire encore l’allure était un risque qu’il n’était pas non plus prêt à courir. Il ne tenait pas à découvrir le corps d’une autre jeune fille ou pire, celui de son aimée. Même dans les pires de ses cauchemars, il n’avait jamais été jusqu’à imaginer qu’elle put être morte. Il savait que cela lui ferait perdre sa raison si cela devait arriver.

Le souvenir de la jeune fille en train de se consumer et de l’odeur de chair brûlée qui l’avait accompagné lui ôtait de fait toute velléité pour manger l’une de ses dernières rations de viande de brebis. Il se força néanmoins à avaler des légumes séchés et quelques tranches de viande boucanée à la consistance élastique et sans goût sinon celle du sel utilisé pour la conserver. Il tenta ensuite de trouver le sommeil, peuplé des même ombres qui le hantaient nuit et jour depuis la révélation d’Eleina.

Une fois de plus, il se réveilla avant l’aube, rythmé par l’habitude et l’angoisse d’un esprit qui ignorait les besoins de son métabolisme. Tôt ou tard il le paierait par de nombreuses heures de sommeil, il espérait simplement qu’il puisse se permettre ce luxe quand son corps réclamerait enfin son du avec les intérêts. Il se remit en route presque aussitôt, la louve reprenant la tête sur les traces d’Astrée. Le demi-elfe savait qu'il regretterait bientôt cette monotonie et tâchait d'accumuler du repos dans ces moments où il pouvait laisser retomber sa vigilance. Mais jamais tout à fait... L'insouciance ne lui était pas permise.

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

La route descendait petit à petit vers le fond du vallon. Ombrage, bien reposé, progressait sans difficulté sur ce terrain dégagé. Les traces étaient toujours nettement visibles, et l'odeur d'Astrée, datant de la veille, était facile à suivre pour la louve.
On voyait quelques maisons dans les pâturages, ou plutôt des cabanons de bergers. Plusieurs sentiers débouchaient sur la route. Des traces de sabots et des empreintes de pas venaient se mêler à celles qu'il suivait. Il abordait une zone un peu plus peuplée, et la route était plus large et mieux entretenue.

En fin de matinée, à nouveau, l'odeur disparut. Aucune trace sur les bas-côtés. Mais, comme la veille, le rôdeur s'aperçut que les empreintes de pas étaient nettement moins nombreuses, et les sillons laissés par les roues plus profonds – s’il s'agissait bien des chariots qu'il suivait. Un peu plus loin, la route traversait un petit hameau, qui était pour l'heure désert. Heureusement, il n’y avait pas d’embranchement, et la direction à suivre semblait toute tracée.

Au bout d’un temps qui lui parut infini, la louve, partie en reconnaissance, lui signala qu’elle avait retrouvé l’odeur, assez loin en aval. Avant de la rejoindre, il traversa encore un hameau, croisant quelques paysans, un berger et ses chèvres, une femme puisant de l’eau, des enfants. A un détour du chemin, il aperçut au loin un village, plus important que les petits hameaux qu’il avait traversés. Il crut même deviner un imposant bâtiment, peut-être un temple. S’il maintenait son rythme, il lui faudrait encore une demi-heure de chevauchée pour y parvenir.

Enfin, il rejoignit Première Neige. La louve avait retrouvé la trace olfactive alors que la route traversait un petit bois, dans une zone un peu plus escarpée où on n’apercevait aucune habitation ni âme qui vive.
Après seulement quelques dizaines de mètres, la louve bifurqua soudain sur la gauche et quitta la route, la truffe au ras du sol, montant la pente raide qui bordait le chemin. Pourtant, les traces de roues et de sabots continuaient tout droit, à moins que ce ne soit celles d’un autre convoi ? La route était trop fréquentée pour avoir la moindre certitude à ce sujet. Les empreintes de pas étaient trop nombreuses pour pouvoir être comptées, et celles de la veille avaient été recouvertes par d’autres, plus récentes. Une seule chose était sûre : aucune trace de cheval ne partait vers la gauche, et encore moins de chariots. Si la louve ne le lui avait pas signalé, jamais il n’aurait deviné qu’Astrée avait bifurqué.
On ne voyait aucune empreinte sur le sol jonché de feuilles mortes des bas-côtés. Tout juste devinait-on quelques branches cassées dans les taillis qui bordaient la route. Le passage s’était comme refermé derrière Astrée – et ses éventuels compagnons. La végétation était dense à cet endroit-là, et il lui faudrait mettre pied à terre et se frayer un chemin à travers les taillis. Ombrage, lui, aurait bien du mal tant la pente était raide. Il passerait, sans doute.... A condition d'être prudents.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi ne fit pas mine de faire halte dans les villages que traversait la route. Les esclavagistes avaient certainement progressé sous l’apparence d’un banal convoi marchand et tant qu’il pouvait se fier au flair de sa louve, il n’avait aucune raison d’y perdre du temps. Il aurait été naïf de chercher à alerter une quelconque milice dans ces environs. Même s’il en trouvait une disposée à écouter sa plainte, il était plus que probable qu’elle ne dispose pas d’hommes pouvant être immédiatement distraits de leurs obligations. Il revit le visage et le corps marqué par la souffrance de la jeune fille trouvée la veille. Les trafiquants Mélandiens opéraient en toute impunité dans ces terres où l’autorité affaiblie des grandes cités ne pouvait les en empêcher efficacement. La chose devrait changer… Il ne savait pas comment il s’y prendrait ni même s’il en aurait l’occasion. Il puisait une certaine force dans cette résolution. Il commencerait par sauver Astrée et celles qui l’accompagnaient…

Il n’hésita guère longtemps à suivre la piste indiquée par sa louve. Jusqu’ici, son flair ne lui avait pas fait défaut et elle s’engagea sans équivoque sur le chemin que l’odeur d’Astrée marquait. Convaincre Ombrage était une toute autre affaire. Le sol raide était glissant et instable sans parler des buissons de ronces qui parsemaient le sous-bois. Les esclavagistes avaient semble-t-il abandonné les chariots pour mener leurs captives à travers bois. Fallait-il y voir une mesure de protection contre les poursuites éventuelles ou un arrangement prévu ? Le rôdeur espérait ne pas découvrir la réponse à ses dépens alors qu’il menait son cheval par la bride en dégageant au mieux le terrain devant lui. Il ouvrait également grand les yeux à la recherche d’un indice laissé par une des prisonnières ou l’un de leurs gardes. La progression était lente et nerveusement éprouvante et le rôdeur esparait bientôt bénéficier d'un terrain plus favorable pour rattraper les piétons.

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

Il suivit la louve sans remarquer quasiment aucune trace durant une trentaine de mètres, avant de trouver enfin des empreintes plus probantes : plusieurs personnes étaient passées par là. Il n’aurait su dire exactement combien. Une bonne dizaine ? Apparemment, on avait soigneusement dissimulé les traces jusqu’ici, sans doute pour éviter que leur passage soit visible de la route.
Ils étaient maintenant bien cachés au milieu du bois. Nul ne pouvait les voir, ni depuis les hameaux qu’ils venaient de traverser, ni depuis le village qu’il avait aperçu. Le terrain était escarpé, rendant la progression difficile. Ombrage peinait à suivre. Le rôdeur devait le guider à la longe, lentement, et le rassurer sans cesse. Ils n’avançaient pas vite, certainement moins vite que les esclaves avant eux…
Au bout d’un moment, Kasumi devina qu’ils ne faisaient que contourner le village, à distance. Mais peut-être allaient-ils rejoindre une autre route ? Son choix de suivre la piste, même s’il le ralentissait énormément, restait préférable au risque de perdre la trace.

Il marcha deux ou trois heures ainsi, à travers bois, prenant à peine le temps de grignoter pour apaiser son estomac qui criait famine. Juste avant de rejoindre enfin la route qu’il avait entraperçue quelques instants, il trouva à nouveau les traces d’un bivouac, bien dissimulé dans la forêt. Le sol était rocailleux, masquant les empreintes de sabots et de roues qui devaient provenir de la route. L’endroit était invisible de la route pourtant toute proche, et nul n’aurait pu soupçonner qu’un convoi l’avait quittée pour se cacher ici.
Kasumi ne fit cette fois-ci aucune découverte macabre. On distinguait seulement les traces de quelques tentes, l’emplacement des chevaux près d’un petit ruisseau, un foyer éteint, et quelques déchets, parmi lesquels le rôdeur découvrit des lambeaux de tissus tâchés de sang, ayant vraisemblablement servi de compresse. Et également, dans un coin, un fouet oublié, tâché de sang.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi ne s’attarda pas sur la découverte qui ne lui inspira que du dégoût et une haine grandissante de ceux qu’il poursuivait. Non content de s’en prendre à plus faibles qu’eux, les esclavagistes employaient tous les moyens à leur disposition pour briser et déshumaniser leurs victimes. Sans doute cela tenait-il autant de la joie sadique que de l’efficacité. Kasumi pensa une nouvelle fois à la jeune femme souriante et facétieuse dont il était éperdument tombé amoureux. L’imaginer à la merci de ces monstres menaçait de plus ne plus de le rendre fou. Après avoir laissé Ombrage délier ses membres sur le chemin redevenu plat et praticable, il le poussa à un galop régulier sur la route, ralentissant parfois lorsqu’il donnait des signes de fatigue. Ils progressèrent ainsi tout l’après-midi sans vraiment marquer de pause. La louve trottinait toujours un peu en avant de sa démarche souple qui donnait l’impression que se pattes n’étaient jamais en contact avec le sol. La piste quitta rapidement la route principale pour emprunter des chemins de traverses beaucoup moins fréquentés et risqués pour ceux dont qui privilégiaient la discrétion à la célérité.

Le rôdeur avait craint que les esclavagistes aient tenté de dissimuler leur piste car ils se savaient suivis mais peut être n’était-ce qu’une précaution dictée par l’habitude. Les piétons avaient coupé à travers bois pour gagner du temps par rapport au tracé de la route que devaient emprunter bêtes et chariots. Dans la poussière du chemin qu’il suivait maintenant, il distinguait nettement que le convoi s’était reformé. La façon dont se chevauchaient les traces indiquait que les chariots avaient repris la tête et certains chevaux la queue de la marche. La louve disparut une nouvelle fois dans les fourrés à l’approche de la nuit, sentant que son compagnon n’avait plus besoin de ses sens pour suivre la piste évidente. Autant pour ne pas risquer de perdre la trace à la faveur d’un nouveau détour que pour ménager Ombrage qui suait à grosse goutte malgré le froid piquant de l’air, Kasumi décida enfin de s’arrêter en bordure de la piste. Il choisit le lieu de campement pour sa discrétion plus que pour son confort qui se résumait à un ru qui dégouttait lentement et que le hongre eu tôt fait d’investir. Le rôdeur le laissa boire tout son saoul avant de le bouchonner et de le couvrir d’une couverture sèche. Il en fit autant de lui-même après un repas qui réduisit à mal ses provisions. Il n’en aurait probablement plus que pour quelques jours, en se rationnant. Ensuite, il devrait se résoudre à chasser s’il ne croisait pas un village sur sa route où il pourrait se réapprovisionner rapidement.

[Voyageuse]

La nuit était calme et silencieuse. On entendait quelque part le hululement d’un hibou. Une chauve-souris passa juste au-dessus de Kasumi. Il devinait quelques grattements, des rongeurs nocturnes sans doute.
Il venait de s’installer pour dormir quand il les entendit. Un hurlement, dans le lointain… mais pas si loin que ça. Puis un autre. Des loups. Une meute, probablement.

Première Neige dressa la tête. Elle écoutait les cris de ses congénères, visiblement tiraillée par l’envie d’aller à leur rencontre… Elle hésita, regarda le rôdeur. Avec dans le regard comme une lueur d’excuse… Puis, d’un bond, elle disparut dans les fourrés. Kasumi la devina qui s’éloignait, à la fois impatiente et hésitante, vers l’appel de ceux de sa race.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi ressentit un curieux mélange de trahison et de compréhension devant la défection inattendue de son animal de lien. Il se réjouissait que Première Neige ait surmonté en partie le traumatisme de la perte de sa meute et recherche à nouveau le contact avec ses semblables. Pourtant, il devait bien s’avouer qu’il craignait que la louve ne décide de le quitter alors que sa présence lui faciliterait considérablement la traque du lendemain et le combat inéluctable qui s’ensuivrait.

Il pensa en termes différents au lien qu’il avait tissé avec la créature sauvage. C’est elle qui avait choisi de communiquer avec lui et de le suivre. Le rôdeur s’était habitué à ce qu’elle ne soit jamais loin en esprit comme physiquement. Elle avait malgré tout conservé la liberté de se rendre où elle le souhaitait. Le demi-elfe ne voulait pas l’en priver, il n’avait rien à voir avec ceux qu’il traquait et qui n’hésitaient pas à priver leur captive de leur humanité et de leurs proches.

Lorsque la louve s’approcha des siens, elle ferma son esprit au rôdeur qui put mesurer la teneur de son isolement. A l’aube du combat le plus personnel de sa vie, il se retrouvait seul. Les Luméniens auraient fini par se libérer de l’oppression même sans lui, ses compagnons seraient probablement parvenu à sauver Albérich s’il avait du échouer personnellement mais dans ce combat, il s’agissait d’Astrée. Personne d’autre que lui ne saurait la sauver à temps, du reste, il ne ferait confiance à personne d’autre que lui-même pour l’exécuter. Il s’agissait de sa vie, de tout ce qu’il comptait de plus cher. Il ne pouvait échouer et il devait pouvoir compter sur toutes ses forces pour réussir. Il espérait donc que la louve referait son apparition au matin où il devrait poursuivre seul.

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi fut réveillé par les premiers chants d'oiseaux alors que l'aube pointait à peine à l'horizon. Un merle semblait avoir élu domicile dans l'arbre au-dessous duquel il s'était installé pour la nuit, et son chant lui vrillait les tympans.

La première chose qu'il fit, instinctivement, fut de chercher du regard, puis mentalement, la présence de Première Neige. Mais il n'obtint qu'un grand vide. Il eut vaguement l'impression que sa louve était loin, trop loin pour pouvoir communiquer avec lui. Mais peut-être avait-elle simplement fermé son esprit au sien.
Comble de malchance, quelques gouttes d'eau commençaient à tomber, risquant de masquer les empreintes. Il lui fallait faire vite...

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le rôdeur se redressa brusquement, chassant les dernières bribes de sommeil de son corps mais pas sa lassitude. Sa louve n’était pas reparue comme il l’avait craint sans vraiment l’envisager et ce fut un rude coup porté à son moral. Il ne pouvait cependant guère s’attarder sur ce revers imprévu. La louve l’avait habituée à ses disparitions et ses escapades solitaires et le rôdeur décida de ne pas s’en inquiéter. Elle reviendrait lorsqu’elle le jugerait opportun. Astrée, celle sui comptait le plus dans sa vie n’avait pas le luxe de ce choix. Il devait faire avec les armes que le destin voulait bien lui laisser.

Avec son efficacité coutumière, il réunit ses quelques affaires qui trouvèrent rapidement place dans les fontes d’Ombrage avant d’enfourcher le hongre avant que la pluie ne rende la poursuite impossible. Par bonheur, les traces étaient encore suffisamment fraîches et profondes pour qu’il puisse les suivre sans aide, pour le moment…

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

Les nuages lourds s'amoncelaient au-dessus de la tête de Kasumi, annonciateurs de mauvais temps pour la journée. Mais pour l'instant, seules des gouttes éparses tombaient et les traces restaient parfaitement visibles.
Le chemin que suivait le rôdeur était toujours aussi mal entretenu, toujours aussi désert. Il se trouvait dans une zone de montagnes moyennes, de moins en moins hautes au fur et à mesure qu'il avançait vers l'est. Il atteindrait sans doute la plaine côtière en début d'après-midi.
Il traversa un hameau au bout d'une heure environ, y croisa quelques bergers qui menaient paître leurs troupeaux, une femme bêchant son jardin, deux agriculteurs et leur charrue dans un champ. Comme les jours précédents, Kasumi vit disparaître la plupart des empreintes de piétons, les ornières creusées par les roues se firent plus profondes. Puis plus loin, les traces reprirent leur aspect habituel.

La route serpentait à fond de vallée, et sur ce terrain dégagé Ombrage progressait rapidement. En milieu de matinée, il trouva le bivouac des esclavagistes. Les traces étaient toutes fraiches. Il calcula qu'il avait moins de trois heures de retard sur eux. Il les rattraperait avant la nuit...
Le coeur gonflé d'optimisme, il accéléra encore l'allure, suivant sans difficulté les traces clairement marquées. Il déjeuna à midi d'un repas frugal pour ne pas perdre de temps : la pluie s'était accentuée et les traces s'effaçaient peu à peu. Heureusement pour lui, la route présentait peu d'embranchements significatifs.

C'est sous une pluie battante qu'il quitta la zone de montagne, se trouvant soudain face à la plaine côtière. Le terrain devint plat, la route mieux entretenue, puis pavée, et rien ne freinait sa progression... sauf l'absence de traces fiables. Les empreintes sur ce type de sol sont toujours rares, et les quelques traces existantes étaient effacées par les pluies diluviennes. La route filait tout droit en direction de l'est, et il ne croisa aucune intersection. Il continua donc à la suivre encore un moment, examinant régulièrement les bas-côtés au cas où les esclaves aient quitté la route.
Puis, en milieu d'après-midi, il arriva à un carrefour. Tout droit, la route continuait en direction de l'est. Mais peut-être les esclavagistes avaient-ils pris à gauche ? Ou à droite ? Il n'avait aucun moyen de le savoir....

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

La chance l’abandonna soudain lorsqu’il fut mis face à un choix des plus difficiles. Sans la louve, il n’avait plus aucune certitude que la voie qu’il emprunterait serait encore la bonne. Jusqu’ici, malgré la pluie et la disparition de Première Neige, il s’était efforcé de faire confiance à ses sens et à son observation des bas côtés qu’il avait scrutés à la recherche du moindre indice. Mais il en était maintenant réduit à se fier au hasard, à jouer la vie d’Astrée sur une décision qui pourrait s’avérer désastreuse. Si les chariots avaient tourné à l’un des embranchements, il n’avait aucun moyen de le savoir comme lui révéla un examen attentif de la route.

Sans espoir, il tenta à nouveau de contacter la louve et réussit cette fois-ci à attirer son attention. Malheureusement, le lien était ténu, marqué par une grande distance. Il ne pouvait se permettre d’attendre la louve et de perdre toute son avance. La mort dans l’âme et après avoir demandé à Première Neige de rejoindre le carrefour pour retrouver la piste, il talonna Ombrage en direction de l’est. S’il ne trouvait aucun signe des esclavagistes, il devrait se résoudre à rebrousser chemin, abandonnant la rôdeuse à son sort une nuit encore. Y songer réussissait presque à le faire vomir.

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

A quelques centaines de mètre de l’embranchement s’étendait un bois. Une forêt dense, obscure. Un peu… inquiétante. On y ressentait un sentiment d'oppression, de malveillance. Le rôdeur se sentit ramené quelques mois en arrière, lorsqu'il avait traversé la forêt maudite. C'était la même sensation, la même impression d'être observé par des esprits malveillants, de ne pas être le bienvenu ici, un intrus tout juste toléré.
Non, cette forêt n'était pas accueillante pour l'homme. Il le ressentait par tous les pores de sa peau. D'ailleurs, la route y était nettement moins bien entretenue. Les pavés étaient de plus en plus disjoints, jusqu'à disparaître presque au fur et à mesure de sa progression.

La végétation était extrêmement touffue. Et comme le rôdeur s'en aperçut rapidement, c'était un énorme avantage dans sa situation : les gouttes atteignaient le sol avec douceur, freinées par des mètres et des mètres de feuillages denses, et ne masquaient pas entièrement les traces. Bien sûr, les feuilles mortes jonchant le sol ne l'aidaient guère, et certains pavés subsistaient, mais il finit par reconnaître des empreintes de sangliers traversant la route, de chevreuils.
Cependant, il ne vit nulle trace du convoi qu'il poursuivait. Nulle trace de chevaux, de charriots, de la dizaine de piétons. Il finit par acquérir la certitude qu'il s'était trompé de route.

Alors qu'il venait de faire demi-tour, il entendit soudain, sur sa droite, un cri de terreur, puis un appel désespéré :
- Au secours !
Le cri fut suivi d'un bruit de cavalcade, et une jeune fille déboucha soudain, traversant la route quelques mètres devant lui, fuyant comme si elle avait la mort aux trousses. Ce qui n'était pas loin d'être le cas : il devina entre les troncs une forme presque humaine qui se déplaçait deux fois plus vite que la normale. Il reconnut instantanément une créature qu'il avait déjà combattue, l'hiver passé, dans la forêt maudite, ce qui avait failli lui coûter la vie... Un vampire.
Et il lui sembla vaguement deviner une autre forme mouvante, plus loin, beaucoup plus lente.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le rôdeur maudissait déjà sa mauvaise inspiration et s’apprêtait à rebrousser chemin au plus vite lorsqu’il interrompit la volte de son cheval. Après les heures du calme surnaturel du à son isolement total, il faillit sursauter en entendant le son d’une course venant droit sur lui. Une jeune fille avait crié au secours mais lorsqu’il la vit, il comprit immédiatement qu’elle ne cherchait pas à échapper à ceux qu’il poursuivait. Elle ne ressemblait en rien à la captive marquée par les privations dont il avait incinéré la dépouille. Seule la terreur qu’il lu dans ses yeux présentait des similitudes avec l’esclave qui avait trouvé la liberté au prix de sa mort.

Ses réflexes devancèrent ses réflexions et il plaça rapidement Ombrage entre la proie et le chasseur. L’aura d’épouvante de la créature d’outre-tombe le fit frémir, il se sentit transporté à cette nuit de terreur, où, entouré d’émis, il avait malgré tout failli succomber. Le hongre se déroba et il préféra mettre pied à terre, sachant qu’il ne distancerait pas pareil monstre à la course, surtout alourdi du poids de l’inconnue.

Il tira Etincelles de son fourreau, puisant un certain courage à tenir l’épée magique entre ses mains. Le vampire sembla hésiter un instant avant de poursuivre sa progression vers le demi-elfe et celle qu’il tentait de protéger. Kasumi lui fit signe de rester en arrière et fit un pas dans la direction de la créature en un geste de défi. La pierre du pommeau s’illumina à l’approche du vampire et lorsque le rôdeur évoqua le souvenir de Belenn. Toute la force de la fristration et de la colère accumulée ces derniers jours sembla se cristalliser en une ramure protectrice contre le monstre de cauchemar.

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

La forêt était si dense, et la couche de nuage si épaisse, qu'on se serait cru au crépuscule de la journée. Cela expliquait sans doute la présence d'un mort-vivant en plein après-midi... Chose qui ne devait pas être si rare que cela tant cette forêt paraissait emplie d'une sombre malveillance.

Kasumi s'était placé entre le vampire et la jeune fille qui avait appelé à l'aide, et le mort-vivant n'eût pas d'autre choix que d'attaquer le rôdeur. Il hésita un instant devant l'épée brandie, ressentant peut-être l'enchantement dont elle était porteuse. Puis, furieux de voir sa proie lui échapper, il se précipita soudain vers Kasumi.
Il entama alors une espèce de danse autour du rôdeur, esquissant quelques coups rapides mais peu précis. Sa stratégie semblait claire : obliger le plus possible le rôdeur à rester sur la défensive, et attendre que ses réflexes se relâchent pour pouvoir enfin porter un coup décisif, le blesser, et, qui sait, parvenir à lui bondir dessus...

La jeune fille qui avait déboulé devant Kasumi avait cessé sa course folle. Comme hébétée, elle observait le ballet qui se jouait devant elle. C'était une demi-elfe toute jeunette, sans doute à peine sortie de l'adolescence, avec des vêtements de couleur vert sombre parfaitement adaptés à la vie en forêt. Elle paraissait avoir complètement oublié qu'elle portait un arc et un carquois sur le dos..

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Kasumi n’avait d’autre choix que d’entrer dans la danse. Comme de tous ses congénères, il émanait du vampire une aura de doucereuse séduction teintée d’épouvante. La créature mêlait l’attirance d’une douce fragrance entêtante à l’odeur nauséabonde d’un charnier. Ses mouvements fluides étaient hypnotiques, sa peau translucide avait l’aspect maladif d’une charogne mais il était difficile d’en détourner le regard.

L’orée des bois n’était qu’à quelques centaines de mètres mais le demi-elfe savait que s’il perdait des yeux la créature, elle pourrait le surprendre. Il n’avait pas encore cherché à attaquer la créature, préférant la jauger avant de se livrer à découvert. Il tira sa seconde lame pour se défendre de ses assauts faussement maladroits, gardant en réserve l’épée qui blesserait réellement le monstre. Lorsqu’il détecta une ouverture dans sa garde, il invoqua le pouvoir de la pierre qui émit une vive lumière. L’effet n’était pas de nature à engendrer des dommages mais à détourner le regard mort de l’abomination. Il chercha à presser son avantage en plaçant une botte destiné à toucher l’avant bras de son adversaire.

Avisant du coin de l’œil que la jeune fille restait tétanisée, il tenta de la ramener au présent et à l’arracher à l’attraction surnaturelle du prédateur :

- Par Lathandre et Mielikki, ne le regardez pas en face !

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

La lumière inonda subitement le sous-bois, et la créature se figea un instant, aveuglée, dans une crainte instinctive de la lumière du jour. Le coup de Kasumi l'atteignit de plein fouet à l'avant-bras, atteignant l'os et entaillant si profondément la chair que l'extrémité du bras sembla sur le point de se détacher du corps. Il ne tenait plus accroché que par un bout d'os et de muscle. Le rôdeur savait que, petit à petit, la blessure allait se refermer, la chair se régénérer. Mais, pour un moment, la créature ne pourrait plus se servir de sa main droite.

Le vampire poussa un hurlement de douleur, et, oubliant, toute prudence, plongea sur le rôdeur, qui avait à peine eu le temps de se remettre en garde et ne put qu'esquiver le coup. Avec une vitesse surnaturelle, le vampire se mit à tourner autour de lui, cherchant à contourner la barrière de ses lames, et parvint enfin à le frapper à l'épaule, entaillant la chair de ses griffes. Kasumi sentit une violente douleur irradier dans son épaule, et un froid glacial l'envahir. Mais contrairement à ce qui s'était passé dans la forêt maudite, il ne ressentit pas l'étrange malaise qui avait suivi l'attaque du vampire. Cette fois-ci, nulle part de son âme ne lui avait été arraché. La pierre offerte par Belenn était efficace.

La jeune demi-elfe, quant à elle, s'était reprise. Restant à une distance prudente, elle avait contourné les deux combattants pour dégager sa ligne de mire puis, saisissant son arc, s'était mis à arroser le vampire de flèches. Celui-ci grogna au premier impact, sans toutefois être véritablement blessé : Déjà, la chair se refermait. Les flèches n'étaient pas dénuées d'efficacité, mais elles ne suffiraient pas à en venir à bout.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le rôdeur grogna de douleur en sentant la vive déchirure de son épaule. Le sang chaud coula sur ses omoplates mais Kasumi était déjà trop pris dans la fièvre du combat pour laisser libre court à sa douleur. Le vampire avait en outre surestimé la portée de son coup. Il ne cherchait pas à occasionner des dégâts physiques et son coup fut plutôt superficiel. Il sembla surpris en comprenant que sa véritable attaque n’avait pas porté. La véritable force de ces créatures était de pouvoir se régénérer aux dépens de ses victimes. Le demi-elfe savait qu’en outre, les blessures infligées par son arme améliorée occasionnaient des dégâts au-delà des capacités naturelles de guérison du monstre. Il retourna donc la stratégie du monstre contre lui, multipliant les attaques superficielles pendant que la demi-elfe faisait pleuvoir les traits qui le distrayaient. Il se déporta lentement du côté du bras inutilisable du monstre, faisant siffler ses lames tout en restant hors de portée de son bras valide, guettant une ouverture décisive.

[Voyageuse]

Quête : rendez-vous manqué

La plupart des attaques répétées de Kasumi étaient esquivées par le monstre, qui se déplaçait avec une célérité impressionnante. Cependant, quelques coups atteignirent leur cible, taillant dans les bras, le torse, les jambes, causant des blessures peu profondes. La colère du vampire ne faisait que redoubler, le rendant agressif et imprudent. A nouveau, il tenta de contourner par surprise le rôdeur pour le frapper sur son côté droit, mais celui-ci devina la manoeuvre et profita de la faille pour frapper de toutes ses forces son adversaire au flanc droit. Le monstre s'écroula en hurlant, puis roula de côté pour se relever presque aussitôt. Fou de rage et de douleur, il surprit le rôdeur en plongeant au niveau de ses jambes, le déséquilibrant et entaillant profondément la chair au niveau de sa cuisse gauche. Le sang se mit à couler abondamment.
A nouveau, le vampire s'écarta, puis se prépara à bondir, prêt à profiter du déséquilibre temporaire de son adversaire blessé pour le plaquer au sol, planter ses dents dans sa gorge et ainsi se ressourcer.

La pluie de flèche avait cessé, mais le rôdeur n'y avait pas vraiment prêté attention. La jeune fille avait l'expression de quelqu'un qui vient de se rappeler quelque chose d'essentiel et qui se demande comment diable il a pu l'oublier. Saisissant soudain une fiole dans sa poche, elle la lança de toutes ses forces dans le dos du vampire. Le récipient l'atteignit à l'épaule gauche juste au moment où il allait attaquer à nouveau, et explosa sous le choc. Le monstre hurla sous la brûlure de l'eau bénite. Désorienté, grièvement blessé, comme assommé par la douleur, il recula d'un pas. Puis se précipita soudain vers la jeune fille, tournant le dos au rôdeur.


HRP : il est à toi !

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le monstre, guidé par la douleur et la colère dirigea son attention vers la cible la plus facile, espérant se ressourcer à la gorge chaude et accueillante de la jeune demi-elfe. Cette dernière avait observé un peu trop longuement les résultats de son attaque et se trouvait à sa portée. Il était trop tard pour qu’elle encoche une nouvelle flèche même si, tétanisée, elle avait eu la volonté de le faire. Un trait n’arrêterait plus le non-mort dans la seule chance de survie était de dévorer sa proie séance tenante.

Pourtant, la fuite de son énergie vitale avait considérablement ralenti le vampire. C’est en définitive ce qui sauva l’archère. Avant que le monstre ne lui saute à la gorge, Kasumi, boitillant à cause de sa blessure à la cuisse parvint à s’approcher suffisamment pour lui plonger la lame dans le dos. Autant par chance que par adresse, la lame plongea directement dans le cœur de la créature, son seul point vraiment vulnérable.

La compréhension dut se lire sur les traits de l’abomination lorsqu’elle tenta de fuir la défaite en reprenant sa forme de brume. Un battement de cœur après que la lame s’enfonçât dans sa chair, le monstre s’embrassa. La pierre incrustée dans la garde d’Etincelles brilla d’une lueur éclatante avant de s’éteindre en même temps que la vie artificielle de son ennemi. Le combat était fini et le rôdeur put enfin détailler la demi-elfe du regard.

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

La demi-elfe qui lui faisait face était une ravissante jeune fille d'environ 18 ans, pas encore sortie de l'adolescence, grande et élancée. Elle avait de longs cheveux blond cendrés tombant dans son dos, et ses yeux d'un vert très pâle étaient dangereusement envoûtants. Elle observa d'un oeil incrédule le vampire s'embraser, se réduisant petit à un tas de cendres. Plus rien ne subsistait du monstre qui avait failli la détruire, la réduisant à son tour à l'état de non-mort. Juste trois pièces d'or qui avaient dû se trouver au fond de ses poches...

La jeune fille parut s'éveiller d'un cauchemar. Elle poussa un long soupir de soulagement, puis se précipita vers son congénère.
- Vous m'avez sauvé la vie ! Oh, merci...
Et avant que le rôdeur ait eu le temps de comprendre ce qui lui arrivait, elle jeta ses bras autour de son cou et plaqua ses lèvres sur les siennes en un fougueux baiser.

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Rien ne préparait Kasumi à une telle réaction de la part de la jeune demi-elfe et il demeura un instant stupéfait sous la chaleur de son baiser. Au bout d’un temps qu’il aurait été bien en peine de déterminer, il parvint à se libérer de l’attraction des lèvres pulpeuses et de l’étreinte fougueuse de la jeune femme. Il s’écarta alors vivement et s’efforça de ne pas croiser le regard envoûtant de la jeune beauté. Tout en elle laissait songeur quant à la femme époustouflante qu’elle deviendrait. En d’autres circonstances, Kasumi aurait peut être cédé au charme de la demi-elfe malgré leur différence d’âge et profité du baiser. Mais l’image d’Astrée enchaînée le ramena bien vite à la réalité. Malgré tout, il sentait la rougeur qui lui était monté aux joues et sentit sa voix un peu trop rauque lorsqu’il retrouva son souffle :

- Voyons mademoiselle ! Nous ne devrions pas rester ici, il pourrait en venir d’autres.

Se rendant soudain compte du sourire mutin de la jeune femme, le rôdeur rougit encore davantage, peut être ses paroles pouvaient passer pour une sorte d’invitation qu’il s’empressa de démentir maladroitement :

- La sortie de la forêt est par ici, je dois m’y rendre sans tarder.

[Voyageuse]

Quête : Rendez-vous manqué

Une expression fugace, indéchiffrable, passa sur le visage de la jeune femme. Et Kasumi eut l'impression qu'elle n'avait pas réellement pris en compte sa dernière suggestion.
- Oh, mais vous êtes blessé ! Vous saignez ! Je n'avais pas vu... Excusez-moi, j'ai dû vous faire mal en me jetant ainsi sur vous !

Elle sourit, d'un sourire plein d'innocence et de fraîcheur, et poursuivit de sa voix haut-perchée :
- Venez, je vais vous emmener voir mon père, il saura vous soigner. Et il voudra certainement rencontrer le héros qui m'a sauvé la vie. Et je suis sûre qu'il ne verra pas d'objection à ce que vous restiez un moment avec nous à la maison. On ne voit pas grand-monde, vous savez... Et comme ça je pourrai vous soigner ! Allez, venez avec moi, c'est par là... enfin...
Elle hésita un instant, cherchant à repérer l'emplacement approximatif du soleil à travers les arbres.
- Heu... On est le matin ou l'après-midi ? L'après-midi, c'est ça ?
Elle poursuivit sans attendre de réponse.
- Donc... donc je dois garder la lumière du soleil à ma droite pour sortir des bois du côté de chez moi. Suivez-moi !

Et sans autre formalité, elle prit la main de Kasumi pour l'entraîner à sa suite.
- Oh, mais vous boitez ! Vous pouvez vous appuyer sur moi si vous voulez, je vous soutiendrai !

[Kasumi]

Quête : Rendez-vous manqué

Le rôdeur était indécis, déchiré entre deux perspectives. D’un côté, il se disait qu’il avait déjà perdu de précieuses minutes sur les esclavagistes qui s’éloignaient de plus ne plus à mesure que le temps passait. Il avait déjà fait mauvaise route une fois et n’avait aucun moyen de s’assurer que la prochaine qu’il emprunterait ne serait pas la mauvaise. Il avait été si proche de les rattraper pourtant, plus que tout il ne voulait pas laisser Astrée entre leurs mains un soir de plus. Il avait un bien sombre pressentiment.

Mais d’un autre côté, il se savait grièvement blessé et si le père de celle qu’il avait sauvé pouvait lui administrer des soins rapides, le combat serait peut être moins à son désavantage. Il ne pouvait pas non plus laisser la jeune femme courir le risque de faire une nouvelle mauvaise rencontre. Elle semblait si insouciante à se promener le nez au vent dans une forêt manifestement emplie de créatures des plus dangereuses. Il hésitait cependant encore lorsqu’il prit la parole :

- Je m’appelle Kasumi, est-ce que vous habitez loin ? Votre offre est généreuse mais je n’ai hélas pas le loisir d’attendre. Il me faut rattraper au plus vite les criminels dont je suivais la piste lorsque je suis tombé sur vous. Nous allons prendre mon cheval.

Le rôdeur monta lestement en selle malgré sa jambe blessée. La jeune ingénue se précipita pour en faire de même et pour s’installer sur la croupe d’Ombrage en enserrant la taille du rôdeur d’une façon beaucoup trop familière pour sa tranquillité d’esprit. Il se rendit soudain compte qu’il avait inconsciemment omis de signaler à la jeune femme qu’il cherchait à retrouver Astrée. Il s’apprêtait à le faire lorsque cette dernière s'avança encore plus près qu'il ne l'aurait cru possible en diffusant la chaleur de son corps tout contre lui.