[Lieu] Loth Imarhil

[Galathée]

Située sur la rive est du Lac d’Argent, au bout de la rivière Pettyanen, Loth Imarhil est la capitale des cités elfes de la Lorien. Nichée dans de grands arbres millénaires, mais aussi directement sur les berges du Lac et même en partie dans celui-ci, elle abrite une vaste population d’elfes de la lune, d’elfes des bois et même une petite colonie d’elfes aquatiques. Son architecture spécifique rappelle la végétation alentours, les formes harmonieuses de la nature, et s’intègre parfaitement à son environnement enchanteur.

Le cœur de la ville est constitué d’un bosquet de trois arbres entourés par les temples de la Seldarine, lesquels forment une coupole magique qui protège ce sanctuaire des saisons. Il y fait toujours printanier, et c’est là que réside le Prince de Loth Imarhil ainsi que sa famille et quelques uns de ses favoris.

L’édifice le plus remarquable, hormis le palais suspendu du Prince, est le temple de Sehanine Archelune, déesse de la lune et patronne des elfes de l’astre nocturne. En marbre blanc, s’élevant vers le ciel comme une sorte de geyser de pierre, peu d’elfes en ont vu les couloirs intérieurs mais sa forme éthérée est visible de partout et ses prêtresses sont respectées par tous.

D’autres hauts lieux sont chantés par les bardes mais rarement contemplés par des yeux mortels : la Grande Bibliothèque des Six Erables, qui contiendrait une sagesse vieille comme Toril ; la Tour des Archimages de la Lune Rousse ; le Fort des Elfes de l’Eau d’Argent et le célèbre Théâtre du Chant de l’Avariel.

La cité elfique n’abrite que très peu de résidents non elfes, principalement des marchands et quelques ambassadeurs. Les voyageurs des autres races sont accueillis dans un petit village décentré, « Ettelèn Rindë », le cercle des étrangers, où se trouvent quelques pensions et négoces prêts à les servir, dont le célèbre « Rendez-Vous des Moins-Que-Rien », tenu par le demi-orque Borgporkniel.

[Galathée]

Quête : Les Squelettes du Placard.
Chapitre 5 : Les siens.

Ce qui marqua d’abord les voyageurs fut la lumière. Une poussière d’étoiles scintillante se répandait sur la rive gauche du lac, du sommet d’arbres gigantesques au sol, jusque dans l’eau-même. Mille lueurs révélant la vie alors que la nuit était tombée, mille signes du peuple qui résidait là, dans une cité elfique dont Victor ne voyait pas grand chose, dont Taliesin devinait les courbes et les arcs, les toits et les murs, même si ces mots ne renvoyaient pas vraiment à ce que les humains imaginaient, classiquement, en les prononçant. Une grande partie de la ville était intégrée directement aux arbres et s’enfonçait loin dans la Lorien, mais elle descendait en escaliers jusqu’à l’eau, les structures se désolidarisant du végétal comme elles touchaient le sol, puis s’enfonçaient dans les profondeurs.
Le barde réalisa que Loth Imarhil était beaucoup plus vaste qu’il ne l’avait imaginé.
Mais ils n’allèrent jamais jusque là. La barge bifurqua vers la rive à une centaine de mètres des premiers « bâtiments », une sorte de barrière touffue dont dépassaient d’étranges tourelles de troncs enchevêtrés, et aborda un quai plus vaste, illuminé lui aussi. Plus loin à l’intérieur des terres, tandis qu’ils s’arrimaient à la berge, Taliesin distingua alors la forme éclairée d’un petit village plus « humain » d’apparence, une dizaine de maisons disposées en cercle autour d’une petite place forestière.
Le batelier termina d’arrimer son bateau.
« Vous voici rendus. » dit Evaniel. « Je vous souhaite bonne route. »
Tandis que Temeris faisait descendre la mule, l’elfe de lune demeura sur la barge.

[Taliesin]

Taliesin lui sourit. Ils avaient atteint leur destination, oui. Et quelle destination ! Il n'aurait jamais cru qu'une telle communauté elfe, si vaste, si impressionnante, se cache dans les replis de la forêt. Mais malgré la beauté du paysage, les splendeur de la cité, esquissées dans l'étrange jeu d'ombres et de lumières de la nuit argentée, il n'avait pas l'intention de s'attarder au dehors. La fatigue l'avait peu à peu rattrapé, le froid s'était immiscé, avait-il l'impression, jusque dans ses os, et la seule chose qu'il désirait, pour l'heure, était de rejoindre un endroit où il ferait chaud. Où il pourrait dormir. Après, éventuellement, un bon repas.
-Merci, dit-il à Evaniel alors que Victor le rejoignait sur la berge. Et avant de vous souhaiter bonne route à mon tour, permettez-moi une dernière question : sommes nous censés nous arrêter quelque part en particulier ? Je ne voudrais pas commettre d'impair à peine arrivé...

[Galathée]

Evaniel sourit.
" Tout ce village est réservé aux voyageurs étrangers. Vous y trouverez quatre auberges et autant de comptoirs, plus les services standards, je pense, qu'on peut espérer lorsqu'on a passé beaucoup de temps sur la route. Il y a même un temple humain, je crois. Je n'y suis plus descendue depuis longtemps. Reposez-vous. Je vais porter la nouvelle de votre venue au Seigneur Polfinn. Il vous fera certainement mander rapidement. Si ce n'était le cas, les portes de Loth Imarhil sont seulement à quelques centaines de mètres vers le nord, on vous les indiquera. Comme je vous l'ai dit, vous serez admis sans difficultés. Ensuite... Loth Imarhil est une cité comme une autre. Mais bienvenue, de toute façon."
Elle s'inclina légèrement, puis la barge s'écarta de la rive et reprit sa route vers la cité.

[Taliesin]

Le Seigneur Polfinn... De mieux en mieux ! Taliesin savait qu'il pouvait être dangereux de frayer avec de grands personnages. Surtout lorsqu'on vient leur annoncer de mauvaises nouvelles. Comme la mort d'un fils. Enfin, c'était déjà une chance : il ne devrait pas rencontrer le maître des lieux en personne.. Rien de tel qu'un courroux princier pour vous mettre dans de mauvais draps...
-Allez, en route, mauvaise troupe ! lança-t-il d'un ton dégagé à l'intention de Victor. Je ne sais pas ce que tu en penses, mais ça pourrait être une bonne diée d'aller s'assoir au coin d'un bon feu... Quatre auberges, on a de quoi faire ! Tu me diras celle qui t'inspire le plus...

[Galathée]

Victor et Taliesin cheminèrent donc jusqu'au centre du village miniature, découvrant les devantures des différents établissements. Des quatre auberges, une seule semblait ouverte, une grosse bâtisse cossue d'où s'échappaient rires et musiques, ainsi qu'une délicieuse odeur de nourriture. Elle portait le nom de " Rendez-vous des Moins-que-Rien", écrit en lettres noires sur une enseigne de bois peinte qui représentait les visages grotesques d'un humain, d'un nain et d'un orque.
" Je crois pas qu'on ait tant le choix." siffla Victor, sans réelle déception.
Après avoir noué la bride de la mule autour d'un piquet, il entraîna l'elfe par la manche, puis le poussa devant lui au moment de franchir la porte. Ils pénétrèrent ainsi dans la salle animée d'une auberge chaleureuse, relativement peuplée mais sans être bondée, où dînaient une vingtaine de convives, au son des rimailles enjouées d'un duo de bardes halfelins perchés sur de hauts tabourets. Il faisait bon, la flambée était de taille, et les fragrances étaient multiples et parfumées. Au moment où il entra, Taliesin se retrouva pratiquement face à face, ou plutôt face à poitrine, avec un gigantesque demi-orque aux traits pour le moins particuliers, plutôt fins, à la tignasse blonde nouée en une grande natte qui lui retombait sur l'épaule. A n'en pas douter, il s'agissait d'un hybride orque / elfe, comme le barde n'en avait jamais vu. Il posa son regard vairon sur l'elfe, perplexe.
" Messire, vous êtes sûr que..." commença-t-il, un peu embarrassé.
Puis ses yeux pairs tombèrent sur Victor.
" Oh, je vois..." continua-t-il plus détendu. " Installez-vous à la table là..."
Il désigna un coin de la pièce.
" Je suis à vous dans une minute."
Puis il repartit, transportant un plateau où trônaient six assiettes pleines comme s'il eut pesé trois plumes ou moins.

[Taliesin]

L'ambiance chaleureuse et la présence de tant de races mêlées - et celle du patron, étonnant, pour le moins - détendirent sensiblement Taliesin. Après tout, quel endroit plus familier qu'une auberge, pour un barde ? Il était dans son élément...
Il entraîna Victor jusqu'à la table et s'assit, observant les convives avec intérêt.
-Et bien, tu vois, ici, les rôles sont inversés... fit-il à l'enfant, souriant. Et tu y es mon laisser-passer. Le Rendez-vous des Moins-que-Rien... Le nom ne manque pas d'humour, et, franchement, je suis heureux d'en faire partie. Avec un peu de chance, nous pourrons faire toutes nos démarches sans quitter cet établissements...
Il n'y croyait pas vraiment. Mais on pouvait toujours espérer.

[Galathée]

Le demi-orque reparut peu après et s'installa à leur table, sans faire de manières. Il leur glissa d'autorité un verre à chacun, à l'odeur capiteuse et dont s'échappait une petite fumée sombre.
" C'est du vin chaud. Avec beaucoup de vin dans celui-ci, peu dans celui-là, mais suffisamment pour vous revigorer un homme... ou un elfe, c'est certain..." annonça-t-il de sa voix rocailleuse. " C'est sur le compte de la maison."
Il sortit ensuite un calepin de la poche de son tablier, tira un crayon de derrière son oreille verte et pointue.
" Alors, j'imagine que vous voudrez dormir. Ce n'est pas un souci. On m'a dit qu'il y avait une mule dehors, ce n'est pas un souci non plus. Ce qui est un souci, c'est ce que vous allez manger. Il me reste du foie de cerf braisé au jambon cru façon grand-mère Grondetonnerre, ça veut dire avec des airelles et des pommes sautées... De la truite arc-en-ciel aux algues des profondeurs, sauce au safran et riz sauvage... très exotique, les épices viennent de Kara-Tur, rien que ça... Du lièvre en croûte de sel et sarrasin, coulis de mûres à la bière naine, émincé de poireau sauvage... Et..."
Il plissa les yeux.
" Désolé, mais mon cuisinier a une écriture de kobold... Du... Hein... Ah oui, suis-je bête, la croustade de fromage de chèvre aux champignons des bois, poudre féérique, marinés au sang de dragon rouge, ça arrache, et copeaux de perdrix rôtis."
Il releva les yeux.
" Et ne vous inquiétez pas des noms ronflants, c'est copieux et c'est pas cher."

[Taliesin]

Taliesin ne s'offusqua pas de l'attitude du demi-orque, bien au contraire : il savait déjà que ses manières simples lui manqueraient sitôt qu'il aurait goûté à celles, affectées et pincées, de ses congénères. En revanche, il ne s'était pas attendu à un tel choix et se retrouva face à un cruel dilemme, d'autant que deux des plats le tentaient particulièrement.
Quant à l'argent, il ne se faisait pas de souci : ils avaient celui récupéré chez Ada et, si le séjour venait à se prolonger et les fonds à manquer, il pourrait toujours offrir ses services de barde...
-Va pour la croustade de fromage de chèvre, dit-il d'un ton joyeux. La poudre de fée et le sang de dragon m'inspirent... Et toi, Victor, pour quoi optes-tu ?

[Galathée]

" Heu..." fit Victor.
" Besoin d'un conseil, mon garçon ?" demanda le demi-orque.
" J'veux bien..."
" Alors, opte pour la truite. Le reste, tu trouveras tôt ou tard, dans une auberge ici ou là-bas, mais du safran, du riz sauvage... Tu verras, c'est rare, ça te restera dans le palais. Je sens bien que tu aurais bien aimé tester le dragon, là, mais entre nous..."
Il baissa la voix.
" Je suis certain que ton ami te laissera goûter."
Il se redressa.
" Qu'est-ce que tu en dis ?"
" D'accord, la truite."
" Parfait. Ce sera prêt dans un quart d'heure. Mettez-vous à l'aise. Ne lancez rien sur les bardes. Ils sont parfois drôles, parfois nuls, mais plus souvent drôles que nuls."
Puis, sur un sourire qui dévoilait ses dents aiguisées dans son visage pourtant élégant, il s'esquiva.

[Taliesin]

-Lancer des choses sur des bardes, quelle idée... fit Taliesin, faussement outré. Un barde, c'est sacré, les dieux interdisent formellement d'y toucher !
Il se cala contre le dossier de sa chaise, entreprit de siroter son vin chaud. Il était plutôt corsé, et il sentit bientôt la tête commencer à lui tourner. Fatigué, à jeun, il devait faire attention à ne pas trop boire d'alcool...
-Alors, tes premières impressions ? demanda-t-il à Victor. Rien que cette auberge vaut le détour, à mon sens. On y sera bien, je crois.

[Galathée]

Victor sourit.
" Je trouve ça chouette, oui..." murmura-t-il en laissant courir son regard sur la salle.
Les bardes étaient un peu trop loin pour qu'ils puissent entendre ce qu'ils racontaient, mais les clients les plus proches semblaient engagés dans une discussion endiablée avec l'un d'entre eux, lequel leur répondait avec un sourire malicieux.
" Tu es le seul elfe de toute l'assemblée." dit Victor au bout d'un moment. " J'espère qu'ils ne sont pas tous remontés contre l'interdiction d'entrer en ville... qu'ils ne t'en voudront pas, ou quoi."
Mais personne ne semblait leur prêter attention. Et si les convives avaient vraiment été fâchés avec les elfes, sans doute ne se seraient-ils pas trouvés là. Le demi-orque reparut avec un plateau, déposa deux assiettes impressionnantes devant ses clients, ainsi qu'un pichet d'eau et un autre de vin.
" Bon, les quantités sont prévues pour des gars un peu plus épais que vous. Même si je sais qu'il ne faut pas juger le mangeur à sa mine." fit-il. " J'ai mis du vin rouge de Solarcis, pour les champignons, et toi mon gars... c'est de l'eau, j'en ai bien peur. Mais ici d'dans, tu trouveras du sirop au gingembre. C'est un truc un peu particulier, tu verras, mais si tu doses bien ton mélange, tes papilles apprécieront."
Il leur sourit.
" Au moindre souci, vous m'appelez. Ah oui..."
Il posa une clef sur la table.
" Chambre 11. J'vous ai mis à côté des gnomes, ils ronflent moins fort que les nains, mais je peux pas faire de miracle. Surtout en hiver, c'est festival des végétations, si vous voyez ce que je veux dire."
Il eut un sourire désolé.
" Bon appétit et d'avance, bonne nuit, si je ne vous recroise pas !"
Puis à nouveau, il fila.

[Taliesin]

Le barde se servit un demi verre de vin, puis avala une première bouchée de son plat. Et fit la grimace. Oui, ça "arrachait", c'était le moins qu'on puisse dire. Mais nul doute qu'une fois habitué, il apprécierait le met : la cuisine avait l'air plutôt recherchée... Et ce n'était pas la première fois, loin s'en fallait, qu'il mangeait quelque chose d'épicé...
-Pour ce que tu me disais tout à l'heure... fit-il, à mi voix. Je ne pense pas qu'il y ait de risques : tu as bien vu l'aubergiste. Dès qu'il t'as repéré, il a compris. Un elfe accompagné d'un enfant humain, ça ne court pas les routes, surtout, j'imagine, dans les parages de Loth Imarhil... Ce n'est pas très elfique, et, avec de la chance, les clients me considèreront un peu comme l'un des leurs...
Il lorgna la clef déposée sur la table avant de l'empocher.
-Pauvres gnomes... soupira-t-il, l'air désolé. J'aurais dû dire au patron que tu ronflais plus fort à toi tout seul qu'une demi-douzaine d'ogres enrhumés...

[Galathée]

Victor avait attaqué son plat avec énergie, et il se contenta de tirer une langue passablement chargée à son interlocuteur. Il avait l'air mort de faim, et il manqua saucer son assiette avant même que Taliesin n'ait atteint la moitié de la sienne. Cependant, le petit garçon avait toujours l'intention de goûter au sang de dragon et il préserva donc une partie de sa truite pour la troquer avec l'elfe. Le mets de ce dernier, s'il restait piquant, avait déployé ses saveurs subtiles, et le barde était forcé de reconnaître qu'il avait rarement mangé une cuisine aussi fine, laquelle semblait particulièrement improbable dans le cadre présent.
Victor ne se laissa le temps de parler que lorsqu'il eut enfin terminé. Il se renversa sur sa chaise, sirotant son gingembre à l'eau, et sourit de satisfaction.
" J'avais faim." commenta-t-il, comme s'il demeurait un mystère en la matière.
Puis son regard s'attarda à nouveau sur la salle.
" Tu avais déjà vu ça, toi ? Un orque demi-elfe ? Je savais même pas que ça existait."

[Taliesin]

Taliesin, à qui il faudrait encore quelques bouchées avant de terminer son repas, haussa les épaules à l'adresse de l'enfant.
-Non, je n'avais jamais croisé quelqu'un comme notre hôte... fit-il après avoir bu une gorgée de vin. M'aurait-on posé la question jusqu'ici que j'aurais imaginé la chose possible, mais... pour le moins improbable.
Un demi-elfe demi orque... Oui, croisement fort peu courant, sinon presque unique. Les elfes méprisaient pour la plupart les humains. Inutile, dès lors, d'évoquer leur opinion quant aux orques... Le tenancier n'était sans doute pas issu d'une union volontaire. Même s'il demeurait étonnant que sa mère ait décidé de le garder...
Sauf si c'était elle l'orque.
Autant de conjectures qui resteraient sans réponse. Le barde se voyait mal poser d'emblée la question au propriétaire des lieux. Mais peut-être son histoire était-elle connue, faisait-elle partie des légendes locales. Auquel cas, il lui suffirait de tendre l'oreille pour en être informé.

[Galathée]

hrp : désolée, j'avais envie

Victor se retourna vers la salle, curieux, et demeura attentif, silencieux, quelques minutes. Soudain, il revint vivement à son assiette, mais c’était trop tard : le demi-orque arrivait dans leur direction et il s’appuya d’un bras musclé à leur table.
« Tu me reluques, mon garçon. Pose ta question. Je ne me vexe pas facilement. » déclara-t-il de but en blanc.
Victor bredouilla quelques mots à mi-voix avant de dévisager le tenancier.
« C’est juste… Je n’avais jamais vu quelqu’un comme vous avant… »
« Un demi-orque, demi-elfe, tu veux dire ? »
« Ben oui... »
« Et bien, mon garçon… »
L’aubergiste se glissa à table auprès de lui, le forçant à se tasser près du mur.
« Si tu as le temps, je vais te conter mon histoire. Juste pour lever un malentendu que je devine déjà dans ton regard… »
Victor se tourna vers Taliesin, revint au tenancier.
« J’ai le temps. »
« Parfait. Contrairement à ce que tu penses, je ne suis pas le fruit du viol sinistre d’une gentille petite elfe par un méchant orque cruel. L’elfe, c’était mon père, l’orque, ma mère. Ils se sont rencontrés pas très loin d’ici, dans une chaîne de montagnes qu’on appelle, très à propos, les Pics des Orcs. Mon père, Fildramin Ventelune, était explorateur pour le compte des princes de Loth Imharil, à la recherche de gisements précieux, notamment. Il a été capturé par la Tribu des Fend-l’Echine lors d’une de ses expéditions et ramené dans leurs grottes où il a vécu en esclavage pendant plusieurs années. C’était un freluquet d’elfe, tu imagines bien… »
Il décocha un clin d’œil à Taliesin.
« Donc ils ne l’utilisaient pas à des tâches physiques, non. Son travail était d’écrire, écrire et écrire encore, chose dont les Orques étaient incapables. Or, leur chef, Gargamül Fend-l’Echine, était une sorte d’exception parmi les siens : il voulait que les savoirs orques, leur culture, leurs façons, soient retranscrits et disséminés. Ne me demande pas pourquoi, ça remonte, et je ne l’ai jamais rencontré. Bref, Gargamül avait une fille, Véla, une demoiselle orque des plus charmantes, je suppose… puisqu’il arriva que Fildramin s’éprit d’elle, et inversement… Leurs amours furent illicites, à la lueur glauque d’une bougie, dans la cellule de mon père, et probablement de courte durée… Mais il leur vint un enfant. Véla comprit qu’on ne lui pardonnerait pas cet écart, que le môme serait tué, peut-être elle aussi. Elle décida donc de s’enfuir avec Fildramin, alors que l’accouchement approchait. Ils déguerpirent en plein hiver, dans la montagne, droit vers la Lorien, espérant y trouver refuge. Véla n’y parvint jamais : je naquis en cours de route et la privai de sa vie. Pourtant, je n’étais qu’un avorton, tu peux me croire, mais parfois la vie est cruelle, très cruelle, même avec les gens qui s’aiment sincèrement… »
Il croisa les bras et sourit.
« J’ai grandi à Loth Imharil, mon gars. Du bon côté des murs. Avec mon père, qui m’aimait. Mais je suis parti dès que j’en ai eu l’âge. Les elfes ne m’ont jamais vraiment accepté, et il est un moment où l’on est fatigué de se battre pour gagner des miettes de respect. J’ai gagné une cité humaine, Lunaros, et je me suis fait, crois-le ou pas, paladin de Tyr. Je l’ai été pendant près de trente ans. Mon faciès ne m’a jamais rendu les choses faciles, mais j’avais la foi et l’énergie, et la force, aussi, de me faire une place. »
« Pourquoi vous êtes aubergiste, alors ? » demanda Victor, que le récit avait suffisamment captivé pour le guérir de sa timidité.
« Un jour, j’ai reçu un pli émanant de Loth Imharil. Mon père était sur le point de prendre le chemin de la mort, c’est toute une affaire, chez les elfes, et il voulait me revoir avant de s’éteindre. Je suis donc rentré. J’étais las, moi aussi, d’avoir guerroyé comme un forcené, toutes ces années… J’ai dit adieu à mon père… Et puis j’ai eu envie de rester. Pas dans Loth Imharil. Loth Imharil n’est pas impénétrable, loin de là, mais les elfes… la plupart des elfes ont l’impression… ou la conscience… de leur supériorité. C’est très fatiguant, quand on n’en est pas. Alors je me suis posé ici, à Ettelèn Rindë. J’ai d’abord bossé pour le forgeron et le maréchal-ferrant, un peu pour le marchand d’armes et d’armures… J’avais un peu d’argent de côté, j’ai racheté cette maison et j’en ai fait l’auberge que voici. Avant… Je ne devrais pas m’en vanter mais… avant, Ettelèn Rindë était un bled plutôt sinistre… Les exclus de Loth Imharil s’y pressaient en maugréant… Chaque établissement était empli de leurs récriminations, de leur jalousie, de leur colère… C’était toxique, comme si l’air était empoisonné, tu vois… »
Il sourit, révélant ses dents pointues.
« J’avais envie de changer ça. De mettre un peu de lumière dans tout ce nuage noir. Parce que la meilleure attitude, quand on est exclu de la sorte, c’est de hausser les épaules. Aujourd’hui, parfois, des elfes sortent de Loth Imharil incognito pour venir faire la fête à Ettelèn Rindë. Je ne plaisante pas. Et mon établissement rivalise, point de vue cuisine, avec les deux meilleures tavernes de la cité. Je te jure. Ils pensent parfois à débaucher mon cuisinier, mais c’est un gnome loyal et coriace. Les murs tomberont avant qu’il ne me fasse faux bond. »
« Ça fait une bonne histoire. » dit alors Victor, en opinant du chef.
« Elle est à toi, alors, jeune barde. »

[Taliesin]

HRP : Sois pas désolée ! T'as très bien fait

Taliesin avait écouté avec attention le récit de l'aubergiste, de plus en plus détendu au fur et à mesure de sa progression. Non, il ne faisait pas mystère de sa vie, la racontait au contraire sans fard, sans rien cacher des difficultés qu'il avait rencontrées. L'ancien forçat éprouva même de la gratitude à son égard : il ne doutait pas que le passé du demi-orque, et sa seule présence, puissent aider le petit garçon à faire face aux éventuelles vexations auxquelles il pourrait etre en butte tant qu'ils seraient dans les parages de Loth Imarhil.
-Je rejoins Victor : ça fait une bonne histoire... dit-il, souriant. Je l'aiderai à la mettre en musique, au besoin. Elle ne sera pas du goût des elfes, je le crains : pourtant, ils feraient bien d'y prêter l'oreille. Elle est pleine d'enseignements, surtout pour eux... enfin, pour nous.
Il vida son verre, le reposa sur la table.
-Et je confirme que votre auberge est une complète réussite : j'en ai fréquenté beaucoup, mais rares étaient celles à jouir d'une telle ambiance... et d'une telle cuisine. Je crois donc pouvoir affirmer, sans grand risque de me tromper, que nous serons vos clients tout au long de notre séjour.

[Galathée]

" Si vous demeurez au village, vous n'aurez pas le choix. Les autres établissements ferment en hiver : presque personne ne vient. Cela dit, vous pourriez aisément vous reloger dans les murs..."
Son regard tomba sur Victor.
" Mais toi... J'imagine que tu n'es pas exactement un noble otage ithilien, si ? Sinon, ça nous ferait un beau syndrome de Padhiver."
" C'est quoi un syndrome de Padhiver ?"
" C'est comme ça qu'on dit quand un otage finit par embrasser la cause de ses ravisseurs. Une longue histoire, pas très passionnante."
" Je ne suis pas un otage."
" C'est bien ce qui me semblait. Tu as un accent de l'ouest, si tu étais d'Ithilion, je le saurais."
Il releva les yeux sur le barde.
" Mais donc, vous êtes les bienvenus parmi nous jusqu'à ce que vous décidiez de reprendre la route. En cette saison, il n'est pas rare que certains voyageurs deviennent pratiquement des pensionnaires... Le plus gros de l'hiver est encore devant nous."
Il sourit.
" Mais j'ai cru comprendre que vous étiez barde... Nous pourrions trouver un terrain d'entente... Les halfelins sont charmants, mais leurs ritournelles sont en nombre limité, et ils nous amusent depuis plus de deux mois, maintenant... Si vous êtes en voix... Même un soir pourrait agrémenter l'ordinaire."

[Taliesin]

Taliesin lui adressa un sourire chaleureux.
-Notre séjour sera bref, je pense : nous avons juste quelques démarches à faire avant de reprendre la route. Mais je vous promets de faire un petit quelque chose l'un de ces soirs. Gracieusement. Cela fait longtemps que je n'ai pas eu l'occasion de jouer dans une auberge : ce serait un plaisir de pouvoir le faire à nouveau, même si je ne garantis pas la qualité de ma performance. Je dois être un peu rouillé.
Son enthousiasme était sincère : sa dernière soirée à la Bienveillance lui paraissait remonter à une éternité. S'adonner à nouveau à son métier le tentait beaucoup. Ce serait comme retrouver une part d'un passé enfui, d'une époque heureuse pour l'heure révolue.
-Quant à loger dans les murs... Pour être franc, cela ne me tente guère. J'ai vécu la majeure partie de ma vie parmi les humains ou les autres races, et leur société me convient bien plus que celle de mon peuple. De plus, j'ai rien moins qu'envie de laisser mon otage derrière moi !

[Galathée]

" Alors l'affaire est entendue." dit le demi-orque avec le sourire. " Vous nous jouerez quelque chose, et je m'occuperai de votre otage tant que vous serez parmi les elfes. J'ai des tas de choses passionnantes à lui faire faire."
" Du genre ?"
" Les lits."
" Faire les lits ?"
" Il n'y a pas de sotte tâche."
" Taliesin, je peux pas me déguiser en elfe, plutôt ?"
"*Ça ne marchera pas mon gars. Ils te débusqueront à l'odeur."
" A l'odeur ?!"
" Il te manque le petit parfum champignons des bois."
Victor sourit alors, ravi, et se tourna vers le barde.
" Tu vois ! Ah, tu voulais pas me croire !"
Tout en gloussant, le tenancier se remit debout.
" Bonne fin de soirée. Mes soiffards m'appellent."
D'un pouce, il désigna un groupe de voyageurs qui frappaient leurs chopes sur la table en cadence, et s'esquiva.

[Taliesin]

Taliesin se para d'une mine ostensiblement offusquée.
-Tu me fais beaucoup de peine, Victor... souffla-t-il, des trémolos dans la voix. Tu es pourtant très bien placé pour ne pas cautionner ces allégations mensongères, ces médisances sans fondement. Les elfes ne sentent pas les champignons, mais les fleurs des bois. Ce qui est autrement plus agréable que vos remugles de pieds et de sueur rance.
Il secoua la tête.
-Hum, n'empêche, il faudra que nous commandions un bain. Et une grande lessive. sans quoi, celui qui viendra nous voir me prendra pour un humain et me fermera les portes de Loth Imarhil au nez. Bon, tout se règlera peut-être ici, il est possible que je n'ai pas à y mettre les pieds. Je l'espère. Mais tout de même ! Que dirait mon public s'il me voyait paraître dans cet état ? Que diraient mes futures admiratrices ? Je ne peux pas leur faire ça...

[Galathée]

Victor ricana dans son verre de gingembre à l'eau.
" Tu racontes vraiment n'importe quoi." fit-il, sur un soupir qui se métamorphosa en bâillement. " De toute façon, même pouilleux, tu séduiras les jeunes filles, tu sais bien ça. Regarde dans quel état tu étais quand tu as tapé dans l'oeil de Galathée. Certaines filles aiment bien le genre un peu débraillé... Tes soieries, tout ça, ça ne plaira qu'à des demoiselles bien trop raffinées pour toi."
Il sourit.
" Mais tu as raison. On devrait prendre un bain. Il est encore tôt, peut-être qu'on peut commander ça pour avant d'aller dormir. La lessive, tu peux me la laisser pour demain. Je préfère ça que faire des lits."

[Taliesin]

Taliesin acquiesça.
-Tu as raison : je vais commander ça tout de suite. On va avoir de vrais lits, des draps propres... Autant être propres nous-mêmes, sinon, on profitera moins de l'aubaine. Pour la lessive, on verra... La faire ne t'épargnera cependant pas de t'occuper des lits ou de la vaisselle, je le crains : ce sera de toute façon un bon apprentissage pour ton futur rôle dans notre auberge.
Sans attendre la réaction du gamin, l'elfe se leva. Il était fatigué et il avait la nette impression que s'il était demeuré assis encore quelques minutes, il se serait endormi sur place. La bonne chair commençait à faire son œuvre...
-Serait-il possible d'avoir de quoi prendre un bain, pour le petit et moi ? demanda-t-il lorsqu'il eut rejoint le tenancier. Le voyage n'a pas été propice à ce genre d'activité et... nous ne voudrions pas salit outrageusement vos lits. Bien sûr, s'il est trop tard, nous attendrons demain : je ne voudrais pas vous causer de dérangement... Ah, et... Il nous faudra sans doute faire une lessive. Nos frusques sont en aussi mauvais état que nous. Là encore, évidemment, cela peut attendre.

[Galathée]

Le demi-orque se fendit d'un sourire.
" Pas de soucis, je vais vous faire monter ça d'ici un quart d'heure. Croyez-moi, mieux vaut avoir un peu digéré avant de se plonger dans l'eau chaude. Surtout vous et votre sang de dragon, vous avez pris des couleurs, je ne vous dis que ça... Pour le linge sale, vous trouverez un sac en toile pendu dans l'armoire de votre chambre, avec son numéro écrit dessus. Fourrez-y ce qui doit être lavé et laissez-le dans le couloir, le blanchisseur passera le prendre dans la nuit."
Il se retourna et mit d'autorité un plateau dans les mains de Taliesin, sur lequel se trouvaient deux tasses fumantes, l'une de lait chaud, l'autre d'infusion.
" Il y a du rhum dans l'infusion, mais du miel dans le lait. A vous de faire votre choix." reprit-il. " Et ne vous en faites pas pour le gosse... Depuis le temps que nous devons occuper ceux qui ne parviennent pas à être introduit dans Loth Imharil, il ne s'ennuiera pas... et je ne l'exploiterai pas non plus."

[Taliesin]

-Merci, fit l'elfe. Et je ne me fais aucun souci pour Victor : je sais qu'il sera entre de bonnes mains.
Il regagna leur table, y déposa le plateau, puis tendit le bol de lait au petit garçon. Il avait d'emblée opté pour l'infusion : la seule idée de boire quelque chose agrémenté de miel le rendait malade. Pourtant, il ne se fit pas prier lorsque le gamin voulut goûter à sa boisson : ce ne serait pas son premier grog...
Il sirota lentement ce que Victor lui avait laissé. Mais il accéléra le rythme comme il se sentait dériver. La fatigue se faisait plus pesante à chaque instant, aidée par la tension qui retombait peu à peu. Taliesin se sentait bien, dans cette auberge. Dans son élément. Il ne pouvait se départir d'une certaine vigilance... Pourtant, il pensait ne rien avoir à craindre, ici.
-Allez, viens... dit-il finalement en se levant. Un bon bain, puis au lit. Si draps, matelas et couvertures sont du même acabit que la nourriture, je pense que nous ferons de beaux rêves...

[Galathée]

La chambre 11 était une petite pièce cossue, dans laquelle pétillait un âtre rougeoyant, pourvue d'une large fenêtre dont les volets avaient été fermés et de deux lits d'apparence confortable. On avait installé deux grands baquets devant le feu, et ils étaient déjà remplis aux trois-quarts d'eau fumante. Au moment où Taliesin et Victor entrèrent, un demi-orque plus conventionnel se glissa derrière eux et vint ajouter deux énormes seaux supplémentaires dans leurs bains, avant de se retirer.
Victor jeta son sac sur le sol, puis alla tester un des lits, s'y asseyant avec circonspection. Un sourire ravi étira son visage, indiquant à l'elfe que la couche semblait à son goût.
Il entreprit ensuite de se déshabiller rapidement et avant même que Taliesin n'ait retiré sa première botte, il était déjà immergé dans son baquet, satisfait.

[Taliesin]

Une fois dévêtu, Taliesin rassembla ses frusques, celles abandonnées par l'enfant, puis les fourra dans le sac destiné à cete effet, avec la majeure partie de ce que contenaient leurs sacs. Il ne garda à disposition que le strict nécessaire.
-T'endors pas, hein... fit-il en pénétrant enfin dans l'autre baquet.
Son conseil lui parut alors encore plus justifié. La tentation était grande de se laisser aller, de délasser ses muscles, sa carcasse moulue. De demeurer immobile dans la chaleur de l'eau, à rêvasser... Mais le résultat d'un tel abandon serait un réveil des heures plus tard, dans une pièce froide et obscure, avec un âtre éteint... et de l'eau glacée. Alors, avec un gros effort de volonté, se raccrochant à la perspective du bon lit qui l'attendait, il se mit en devoir de se savonner énergiquement. Les conditions étaient autrement plus favorables que dans une grotte ou une cabane branlante, avec pour seule aide un caquelon et une marmite...
Pour la première fois depuis des lustres, il entreprit de se laver les cheveux. Ils avaient repoussé depuis son évasion du pénitencier mais demeuraient beaucoup plus courts qu'à l'ordinaire. Seul avantage à cette situation : leur redonner un aspect présentable était bien plus aisé...

[Galathée]

Victor reprit également ses esprits et entreprit de se savonner avec énergie, des pieds à la tête. Ensuite, l’enfant s’extirpa de l’eau déjà refroidie et s’essuya dans l’une des serviettes que l’on avait manifestement déposées sur la table voisine, à leur intention.
« On se croirait dans une hostellerie de luxe. » musa-t-il. « Peut-être que toutes les économies de la sorcière vont y passer. »
Il haussa les épaules, et une fois sec, sauta entre les couvertures sans passer par la case tunique : il ne lui en restait aucune, et poussa un profond soupir.
« Si je ne me réveille pas demain, tant pis. » fit-il. « Et je prie Eldath de m’épargner pour cette nuit. »

[Taliesin]

-Oui, c'est une très bonne maison... dit le barde en achevant de se sécher. Mais ne te fais pas de souci pour l'argent : s'il en manque, je payerai en animant les soirées...
Il gagna son lit et s'y glissa sans rien enfiler : s'il avait gardé celles de ses frusques qui avaient le moins souffert du voyage, elles n'étaient pas exactement nettes, et le salirait sitôt qu'il les aurait passées. De plus, les draps n'étaient pas de ce genre rêche, râpeux, que l'on trouvait dans les mauvaises auberges...
-Je ne vois pas pourquoi Eldath ne t'exaucerait pas... reprit-il d'une voix déjà ensommeillée. Et, promis, je ne te réveillerai pas demain. Si tu ne me trouves pas quand tu émerges, ça voudra dire qu'on m'aura déjà convoqué en ville... Dans tous les cas, je tiens le patron au courant. Il te dira ce qu'il en est.

[Galathée]

La nuit fut des plus paisibles, et si les gnomes voisins ronflaient, ils ne les entendirent point. Au petit matin, Taliesin s’éveilla le premier, dans un pénombre nimbée des premiers rayons gris du soleil d’hiver, lesquels filtraient au travers des fentes des volets. Le feu s’était éteint et les baquets avaient disparu, mais il faisait encore tiède, les lits étaient confortables, peut-être un peu trop, et une odeur de pain chaud flottait dans l’air, embaumant leur chambre. Victor respirait tranquillement, assoupi, emberlificoté dans sa couverture, un pied en dépassant. On frappa à nouveau à la porte et l’elfe réalisa que c’était ce qui l’avait arraché à son sommeil.
« Messire, on vous demande en bas. » souffla une voix inconnue, sans doute une femme de chambre au hasard.