[Guilde] Les Gardiens des Arcanes

[Althéa]

Au moment où Enya Velhan allait ouvrir la bouche, un bruit étrange se fit entendre. Comme des pieds nus marchant sur le carrelage. Une silhouette se dessina. Une silhouette étrange en tout cas. Une silhouette simiesque pour tout dire. Hé oui, il s'agissait bien d'un orang-outan vêtu d'une robe de mage qui arrivait en se dandinant dans la pièce.

Arrivé tout près des deux jeunes femmes, il se mit à bouger vaguement les bras. L'instant d'après, il changeait de forme. A sa place se tenait un jeune homme aux cheveux roux et à la peau pâle. Il resta immobile quelques instants, le temps de vérifier qu'il était bien entier et se leva d'un bond.

"Bonjour mesdames, dit-il après un petit salut, Ailyn, c'est un bon vent qui vous emmène. Quant à vous Enya, vous ne voulez toujours pas m'épouser ? Bon, je suppose que non."

Il eut un petit sourire.

[Ailyn]

Ailyn ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes, tétanisée par l'apparition de l'orang-outan.

"Mais que ce que c'est que ce truc ?!!!!" demanda-t-elle tandis que l'orang-outan devenait humain.

Elle resta stupéfaite en entendant les paroles du magicien. S'appuyant sur son bâton, le cœur battant, elle répondit du tac au tac en secouant ses boucles brunes :

"On peut savoir qui vous êtes ? et comment vous connaissez mon nom ?"

[Althéa]

Le jeune homme la regarda durant de longues minutes, les yeux écarquillés. Puis, il se gratta machinalement la tête et proféra un petit : "Ook", avant de se raviser.

"Houps, désolé. Je m'appelle Kieran ar Albrath. Mais vous n'êtes pas obligée de vous en souvenir. Appelez moi Kieran et je répondrai toujours. Je fais partie des gardiens des arcanes. Quant au fait que je connais votre prénom, hé bien ... C'est ce qu'on appelle de la magie"

Il s'arrêta, le temps de ménager son petit effet et reprit.

"En fait, je vous ai entendu discuter avec la belle et douce Enya. Mais la magie, la vraie, c'est avant tout se convaincre soit même et surtout convaincre les autres que nous disposons d'un potentiel magique. Le reste est une question d'entraînement."

Il sourit de nouveau et la jeune femme put voir dans ses yeux bruns un soupçon d'amusement.

[Ailyn]

Un sourire apparut sur le visage d'Ailyn.

"Bel effet. Toujours est-il que ce n'est pas si je menace de vous transformer en rat que vous aller y croire."

Elle marqua une pause, le dévisagea une dernière fois, avant de se tourner vers Enya.

"L'utilisation de la magie est à la fois périlleuse et subtile. Je voudrais apprendre, apprendre et comprendre tous ces flux de magie qui m'entourent. Ils vibrent tout autour de moi. Je voudrais être capable de les capter, de les maîtriser, de m'en servir..."

La jeune femme inclina la tête vers Kieran :

"... et pourquoi pas vous transformer en rat, si le cœur m'en dit !" ajouta-t-elle avec un nouveau sourire, espiègle cette fois-ci.

[Lothringen]

Enya était pour l'heure plongée dans la contemplation de la tapisserie qui faisait toile de fond derrière Ailyn et Kieran. Une représentation de l'archimage Karsus au moment où sa folie mégalomane entraîna la mort de Mystra et la chute de Néthéril. Déluge de magie chaotique et panique générale dans la cité volante en chute libre. Un avertissement pour tous les praticiens des Arcanes...

Les dernières paroles d'Ailyn la rappelèrent brutalement en ce monde. La présence de Kieran avait toujours eu le don mystérieux de la faire totalement décrocher de la réalité environnante. C'était ça ou le duel de magie à court terme. Ce qu'il pouvait être agaçant, collant, exaspérant...

"Une sorcière, donc ? Hé bien, la principale vocation de la guilde est bien le partage des connaissances magiques, cela va de soi. Nous proposons un certain nombre de cours magistraux, mais pour l'essentiel l'apprentissage se fait auprès d'un maître, comme vous savez, et ce jusqu'à haut niveau. Vous m'avez dit, je crois, avoir déjà certaines connaissances en alchimie... La plupart de nos mages ont une école de prédilection - divination, enchantements, illusions... Évidemment, pas de nécromancie par ici. Ou une activité favorite : botanique, création de potions, copie de parchemins, enchantement d'objets... Si vous pouviez me préciser un peu, hum... votre profil ? Que je voie auprès de qui nous pourrions vous affecter. "

Elle prit le temps de bien respirer avant d'ajouter.

"Nous avons assez peu de places disponibles, alors j'aimerais autant vous éviter les erreurs de casting. Certaines peuvent vous poursuivre longtemps."

Un temps.

"Je fournirai le chat."

[Ailyn]

Ailyn prit le temps de réfléchir à ce qui avait occupé sa vie jusqu'à présent, repensant aux innombrables tâches qu'elle avait réalisées pour son maître.

"hum... je pense que la préparation de potion est un domaine qui me conviendrait assez, et j'ai quelques connaissances en botaniques qui peuvent m'être utile. Non, je pense que la préparation de potion fera tout à fait l'affaire."

La jeune femme fut soudain traversée par un flot de souvenirs : Azemar penché sur ses mixtures dans son laboratoire... Son sourire, ses menaces lorsqu'elle rentrait trop tard, son ton enjoué lorsqu'elle parvenait enfin à jeter un sort...

Ses yeux la piquèrent violemment et elle les frotta vigoureusement d'un revers de manche. Pas question de se laisser aller. Il fallait être forte.

[Althéa]

Kieran s'était enfin tu et regardait Enya avec des grands yeux énamourés. Il était tombé amoureux d'elle le premier jour de son arrivée à la guilde des arcanes. Mais elle lui préférait ... la tapisserie ! Oui, chaque fois qu'il arrivait et lui parlait, elle se tournait pour admirer ce vilain bout de tissus qui faisait le bonheur des mites, servait de ramasse poussière et se ternissait avec le temps. Mais qu'avait-elle de plus que lui ? La douceur ? Qu'elle attende un peu qu'il se rase de frais et elle verrai qui était le plus doux.

Soudain, il vit des larmes briller aux yeux de la jeune Ailyn. De tristes souvenirs lui revinrent à l'esprit. Des larmes. Il en avait vu briller beaucoup, surtout du temps de ...

Ensuite, il avait essayé de fuir le monde, pour oublier. Pas mourir, juste changer de forme. Mais il s'était trompé d'un composant. Et voila que ...

Son nez se mit à le démanger irrésistiblement. Tout d'un coup, il éternua, passant du jeune rouquin qu'il était à un orang-outang. Bien sûr, cette fois, il aurait du mal à effectuer la transformation en sens inverse. Il devrait écouter les deux femmes sans broncher. Et tant qu'il y était, escalader la tapisserie pour l'abîmer un peu plus.

Vengeance.

[Lothringen]

"Va pour la préparation de potions..."commenta Enya avant que le mage ne leur offre un numéro grand-guignolesque de sa façon. Elle étouffa un soupir d'exaspération. Kieran ne savait décidément jamais quoi faire pour se rendre intéressant. Pour ne pas dire ridicule. Il allait faire une de ces impressions à leur nouvelle recrue !

L'orang-outang bondissait vers la tapisserie.

"Hum. Excusez-le. Voilà un bon exemple des mauvais effets de la magie, une fois gâchée par l'amateurisme..."

Elle se leva, un peu inquiète malgré tout. Quelquefois, Kieran oubliait tout à fait que son enveloppe simiesque n'était pas sa véritable nature, et les catastrophes s'accumulaient.

"Maître Leonard n'a pas d'apprenti en ce moment. C'est un maître des potions extrêmement doué, mais du genre sévère... Généralement il fait peur aux débutants. Mais comme vous ne l'êtes pas tout à fait et que vous semblez avoir un peu de répondant, cela devrait aller. Il a son laboratoire au deuxième étage, première porte à gauche. Les modalités de l'apprentissage sont à discuter directement avec lui."

[Ailyn]

Ailyn regardait Kieran sans rien dire, écoutant Enya d'une oreille un peu distraite. Elle avait remarqué quelque chose dans le regard du jeune homme avant sa transformation...
Elle le regarda bondir vers la tâpisserie, énorme et pataud... Elle ne savait pas trop quoi en penser. Evoluer dans cet endroit inconnu lui paraissait étrange, mais ce personnage lui faisait ressentir un montagne d'émotions contradictoires...

Elle remercia vivement Enya et s'engagea lentement dans l'escalier, pas très sûre de la conduite à adopter, observant Kieran du coin de l'œil. Il disparut après la première volée de marches, et elle accéléra le pas pour monter plus vite.

Arrivée au deuxième étage, c'est dans un silence de mort qu'elle se dirigea vers la première porte à gauche.

Au bout de plusieurs secondes de rélfexion, elle s'élança d'un coup et frappa trois coups sonores sur la lourde porte de bois cloutée.

[Lothringen]

Elle allait frapper un quatrième coup quand la porte s'ouvrit brusquement sur un visage à peine visible dans le contrejour. Un homme, la trentaine, cheveux noirs volumineux, longs et bouclés. Robe brune. Joues pleines. Large d'épaules et le regard aussi sévère qu'Enya l'avait annoncé.

"Bon sang ! Je ne suis pas encore sourd."

Il la toisa de haut en bas avant de reprendre d'une voix plus posée.

"Je suis Leonard Zebiggus, maître des potions de cette guilde. Si toutefois vous ne vous êtes pas tout simplement trompée de porte, vous pouvez entrer."

Il se recula assez pour libérer le passage, se retournant vers son établi. Un rat y grignotait dans une assiette de graminées. Avant que la visiteuse n'ait eu le temps de se demander s'il s'agissait de son familier, le mage le saupoudra de quelque poussière scintillante grattée au fond d'un mortier. L'animal devint rose par intermittences et se mit à émettre une musique bizarre, tapageuse et métallique. Cela ne dura que quelques secondes toutefois. Heureusement.

Leonard Zebiggus soupirait.

"Voici à quel genre de servilités nous contraint la nécessité de trouver des financements... Mais vous alliez vous présenter ? Je vous en prie..."

[Ailyn]

Les yeux grands comme des soucoupes, Ailyn n'arrivait pas à y croire.

"Ce type là est au moins aussi fou que moi..." pensa-t-elle en observant le rat. "Voilà qui risque fort d'être... intéressant."

Elle se redressa et chassa une mèche devant son visage.

"Je m'appelle Ailyn et j'ai été jusqu'à récemment le disciple de maître Azemar, alchimiste notoire de mon village. Je suis venue à Manost dans l'espoir d'apprendre à maîtriser un peu mon don pour la magie (elle ponctua son discours avec un grimace) et comme je me débrouille pas trop mal avec des fioles et un chaudron..."

La jeune femme s'arrêta quelques instants, passant sa main dans ses longs cheveux noirs.

"Je me demandais si vous accepteriez de m'apprendre ce que je ne sais pas encore."

[Lothringen]

Il la dévisagea une nouvelle fois, comme s'il tentait de la jauger d'un seul regard. Une manie malheureusement assez fréquente chez les mages, dont la modestie n'était pas le défaut le plus commun... Apparemment elle avait passé avec succès cette première épreuve éliminatoire, car il poursuivit :

"Je suis effectivement à la recherche d'un apprenti. Le dernier nous a quitté il y a six mois pour demander son entrée au Cœur Radieux... Ce qui est toujours mieux que le précédent, qui s'est fait cuisinier. J'espère que vous avez la vocation bien accrochée ? Encore qu'avec les mages-nés, les défections soient naturellement moins nombreuses..."

Il haussa les épaules. Il régnait une sorte de jalousie millénaire entre les mages qui ne maîtrisaient leur art qu'à force de fastidieuses études et les sorciers, qui pour leur part bénéficiaient d'un don inné pour la manipulation de la Toile. Les uns avaient plus de facilités, mais les autres allaient plus loin, apprenaient plus de sorts, et finalement, devenaient souvent plus puissants...

"Je ne demande en échange que les menus services d'usage dans ce genre de transactions : courses et manipulations basiques comme la préparation des baumes et réactifs les plus usuels. La guilde fournit des chambres et un réfectoire. Les journées sont longues et je manque de patience."

Il s'interrompit là, paraissant attendre une réponse. Au moins, il ne dorait pas la pilule...

[Ailyn]

Ailyn dévisagea le mage avec intensité. Elle se doutait bien qu'il ne la considérait pas aussi bien que si elle avait été mage elle-même. Sa condition de sorcière ne l'aidait probablement par pour l'estime de ce personnage arrogant, cependant, cela pour peut être l'encourager à la former...

Lorsqu'elle comprit qu'elle avait gagné son sésame, elle faillit sauter de joie. Elle se retint cependant, mais ne parvint pas à effacer le radieux sourire qui éclairait son visage.

"Je vous remercie beaucoup... maître, ajouta-t-elle au bout de quelques instants avec un sourire en coin. Je serai une élève attentive et je tâcherai de ne pas vous décevoir."

Ouf. Heureusement qu'elle n'avait promis ni d'être sage ni d'être silencieuse...

[Lothringen]

Il hocha la tête et l'invita aussitôt à le rejoindre sur la préparation en cours. Il voulait qu'elle réduise en poudre des feuilles séchées qu'il lui expliqua être des feuilles d'assonne, facilement reconnaissables à la forte odeur de cerise qu'elles dégageaient. Il lui fournit aussi des gants, car, disait-il, le contact de cette plante, en dépit de son parfum agréable, était hautement toxique. Hors de question ne serait-ce que d'effleurer la poudre ainsi créée.

A l'aide d'un pilon et d'une mortier, Ailyn n'eut aucune peine à s'acquitter de cette tâche cependant fastidieuse, car le tas de feuilles sèches était conséquent. Pendant ce temps, maître Leonard s'affairait à l'énième étape d'une potion de métamorphose, le genre de potions qui vous prend un bon mois de préparation et une quinzaine d'ingrédients. La préparation les conduisit ainsi jusqu'au soir, où, les petits pots de poudre blanche bien alignés sur l'étagère, le maître donna congé à son élève un peu plus tôt qu'elle ne l'avait redouté, peut-être pour pouvoir finir à l'aise certains de ses travaux.

Avant qu'elle ne se retire, il lui remit une lettre et une bourse pansue.


"Demain, je vous demanderai de partir pour une course urgente. Les instructions sont dans ce pli. J'ai un petit peu corsé l'affaire, histoire de vérifier que vous ne misez pas tout sur le charisme. Les membres de la guilde pourront vous renseigner sur la région si la destination vous est inconnue."

Sur ces mots, il la salua, et elle n'eut d'autre choix que de se retirer à son tour. Par curiosité, dès qu'elle fut dans le couloir, elle ouvrit aussitôt le pli :


"GOLNVVOW AO PJTTKPSOP LU YOSNOP XO QPJNUOY X' MOVVODKPO


UKNPO FLO GKLY GKLY TPKHLPOPOW JLTPOY XO V' MOPDKPNYSO XO VJ


HMJVKLTO OHMKLOO.


AJNSPO VOKUJPX WODNQQLY. "

[Ailyn]

Ailyn resta interdite, le parchemin à la main. Comment ? Qu'est ce c'était que ce charabia ?
Elle pinça les lèvres, inquiète de la tournure que prenaient les évènements.
"Mais comment je vais m'en sortir ?"

Elle descendit au réfectoire avec lenteur, la bourse sous le bras et les yeux rivés sur le parchemin.
Elle ne fit pas tellement attention à ce qui se passait, ni lorsqu'elle pénétra dans le réfectoire, ni lorsqu'on lui remit une belle assiette de ragoût, ni quand elle s'installa au hasard à une table, ni quand elle commença à manger.

Le parchemin et son mystérieux code l'hypnotisaient. Elle n'aurait de cesser de cherche à décrypter tout ça tant qu'elle n'aurait pas trouvé la solution.

Lorsqu'elle commença à comprendre à et chercher les lettres récurentes, les pluriels et à reconnaître de petits mots, elle s'empara d'une plume et d'un encrier et se mit à couvrir toute la surface du parchemin de ses essais plus ou moins fructueux.

Enfin, elle arriva au résultat escompté :

VEUILLEZ ME RAPPORTER UN SETIER DE GRAINES D'HELLEBORE

NOIRE QUE VOUS VOUS PROCUREREZ AUPRES DE L'HERBORISTE DE LA

CHALOUPE ECHOUEE.

MAITRE LEONARD ZEBIGGUS.

Il était tard et la salle de réfectoire était presque vide. Lorsqu'elle eut fini, Ailyn poussa un petit cri de victoire qui fit sursauter les derniers visiteurs. Prenant soudain à nouveau conscience du monde qui l'entourait, elle regarda autour d'elle mesurant sa chance et la nouvelle vie qui s'offrait à elle. C'était tellement différent de tout ce qu'elle avait connu jusqu'ici ! Tellement étrange... Ici tout était codifié, réglé au millimètre près... Alors qu'autrefois, la vie d'Ailyn était rarement rythmée par la rigueur et l'organisation. Il allait probablement falloir qu'elle s'y fasse. Mais elle ne perdrait pas ses bonnes habitudes comme ça...

Effrayée par l'heure qui commençait à se faire tardive et son absence d'information quant au lieu indiqué sur le parchemin, la jeune femme remonta dans la hall d'accueil, à la recherche de quelqu'un qui pourrait lui indiquer les chambres et peut être la renseigner sur la Chaloupe Echouée...

[Althéa]

De nouveau, elle entendit le petit bruit de pas marchant à ses cotés. Puis, une main vaguement poilue attrapa pacifiquement son bras. En se penchant un peu, elle découvrit les grands yeux de l'orang-outang qui la fixaient. Apparemment, l'anthropoïde voulait qu'elle attende. Il la lâcha et esquissa de nouveau ce qui sembla être des pas de danse.

Et Kieran se retransforma. Ses yeux de chien battu, ou d'orang-outang perplexe se posèrent sur la jeune femme.

"Désolé, je suis vraiment désolé. Je sais, ça surprend, mais je ne sais pas quoi faire d'autre. Enya me fait perdre tous mes moyens. Au fait, j'ai su pour les potions. Bravo ! Et ils veulent que je vous accompagne. Vous avez touché le gros lot, comme qui dirait, heu ... enfin ..."

Il rougit jusqu'aux oreilles.

"Enfin bref. Maintenant que vous savez où aller. Et là, vous avez besoin de quelque chose ? Je suis votre obligé. Et ne mésestimez pas les pouvoir des anthropoïdes."

[Ailyn]

Ailyn lui sourit. Kieran était décidément bien sympathique.

"En fait, j'ai réussi à décoder le message... Je dois me rendre à la Chaloupe Echouée demain... Alors vous m'accompagnerez ? Quelle joie !"

Elle éclata d'un petit rire sonore qui emplit la hall désespérément vide.

"Je vous avouerai que je suis à la recherche des dortoirs... ajouta-t-elle sur le ton de la confidence. Si vous aviez un tuyau à me donner pour les trouver, ce sera un acte des plus sympathiques..."

[Althéa]

Kieran réfléchit. La guilde bénéficiait d'un petit dortoir sous les combles pour les novices dans leurs premières années d'apprentissage. Les plus talentueux d'entre eux ainsi que les professeurs avaient droit à des chambres. Ce qui n'était bien sûr pas le cas d'Ailyn. Le dortoir donc ...

"Hé bien oui. Vous prenez les premiers escaliers que vous rencontrerez, vous montez, montez, montez jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'escalier. Vous levez les bras en hurlant et en faisant trois tours sur vous même. Et vous ouvrez la première porte que vous trouverez. Maintenant, quelqu'un a sûrement installé des draps propres et des couvertures sur un lit à votre attention. Rendez-vous demain matin à l'aube."

[Ailyn]

Ailyn remercia chaleureusement Kieran et lui souhaita une bonne nuit avant de s'engager dans le monstrueux escalier.
Et elle monta, monta, monta... Tant et si bien qu'elle finit enfin par parvenir à un pallier où il n'était plus possible de grimper.

Se gardant bien de hurler, elle fit trois tours sur elle-même et ouvrit doucement la première porte qu'elle rencontra. La jeune femme pénétra alors dans une vaste pièce où figuraient plusieurs lits séparés par des paravents. Elle s'engagea doucement dans la pièce, souhait un "Bonsoir" aux différents novices qu'elle croisait : la plupart étaient déjà allongés et lisaient des piles de parchemins ou encore de lourds grimoires qu'ils peinaient à faire tenir sur leurs genoux.

Elle trouva un lit vide avec un petit mot sur le coussin : "à l'attention de la nouvelle".

Elle posa son sac sur le lit et s'y assis, poussant un long soupir. Elle était fatiguée, tellement qu'elle n'avait plus ni la tête à lire ni à quoi que ce soit : la journée avait été trop étourdissante pour qu'elle puisse là en faire un bilan constructif. Il s'était passé trop de choses et tout restait à faire.

Elle se prépara à se coucher, installant ses affaires dans la commode prêt de son lit, et glissant sa dague et la bourse remise par son maître sous son oreiller.

Bien que tenaillée par une angoisse qu'elle ne comprenait pas, elle s'endormit rapidement et fit des rêves auxquels elle ne comprit pas grand chose. Elle se réveilla bien avant l'aube, prête à bondir sur ses pieds. C'est en silence qu'elle descendit au réfectoire manger un morceau, puis, une fois qu'elle fut prête et rassasiée, elle se rendit dans le hall pour attendre Kieran.

[Althéa]

Kieran arriva sans trop de retard et sous sa forme humaine pour couronner le coup. Il était dans un bon jour, quoi qu'un peu fatigué. Il portait deux havresacs lourdement remplis à bout de bras. Il en tendit un à Ailyn avec un petit sourire.

"Voila, voila. Nous sommes prêts. Quelques pommes, de la viande salée, un peu de fromage, du pain. Je l'ai fait apparaître ... Avec l'aide de la cuisinière. Elle m'a à la bonne. Elle a toujours eu un faible pour les singes."

Il eut un petit sourire triste.

"Quelques couvertures aussi ... Si vous voulez, nous pouvons partir tout de suite."

[Ailyn]

"Et bien, je suis prête, allons y !" répondit Ailyn avec bonne humeur.

Elle se tourna vers la porte du hall et suivit Kieran d'un bon pas, heureuse d'enfin se changer les idées. Son voyage à Manost avait abouti, maintenant, ne restait plus qu'à suivre sa propre voie...

Ils quittèrent ainsi la citée dans les rayons roses du soleil levant, vers de nouvelles aventures...


Edit du castor : non non non, vous n'arrivez pas tout de suite à la Chaloupe Echouée, qui se trouve à plusieurs jours de voyage de Manost Je vous suggère de poster ici lorsque vous aurez quitté la ville :
http://www.baldursgateworld.fr/lacouron ... oubli.html

[Ailyn]

Venus d'ici

Ailyn pressa le pas durant tout le chemin qui les séparait de la Tour des Arcanes. Elle remarqua cependant les mines graves et peu amènes des gens alentours. La mort de Helm, la guerre... Tout cela ne présageait rien de bon. Mais la jeune femme voulait encore y croire. La mort d'un dieu pouvait aussi bien signifier l'apparition d'un autre... meilleur ?

Excitée par son retour (et la réussite de sa mission), Ailyn ne s'arrêtait plus. Kieran sur ses talons, elle entra dans la Tour comme une furie, et sans regarder qui se trouvait là, monta le plus vite qu'elle put au laboratoire de Léonard Zebiggus, brandissant devant elle le setier d'Hellebore.

Parvenue devant la porte du laboratoire, à bout de souffle, elle frappa comme une forcenée à la porte en s'exclamant joyeusement :

"Maître !!!! Maître !!! Mission Accomplie !!!!"

[Lothringen]

La porte s'ouvrit avec un peu de retard, et maître Léonard passa sa grosse tête dans l'entrebâillement.

"Décidément, vous avez un problème avec les portes, jeune fille... Voyons donc cette livraison."

Il prit dans ses mains le petit sac et examina quelques unes des graines en les versant dans sa paume.

"Pleines, bien formées, la cosse intacte... Takaya est décidément l'herboriste la mieux achalandée que je connaisse. J'ai essayé cent fois d'obtenir le nom de son fournisseur de la Cordillère, mais elle garde jalousement ses secrets. Ces graines-là, même la Vierge d'Argent n'aurait pas pu me les fournir... Merci bien pour la course."

IL alla verser les graines dans un pot qu'il rangea bien à part, sur le haut d'une étagère qu'il ferma par un sortilège. Quand il se retourna vers elle, il examina quelques fractions de secondes l'air interdit de son apprentie. Puis haussa le sourcil droit.

"Hé bien, aurais-je oublié quelque chose ?"

[Ailyn]

Ailyn le regarda d'un air interdit. Et merci, c'était peut être fait pour les chiens ou les dragonneaux ????
Elle se redressa un peu, gardant les épaules en arrière, tâchant d'arborer un air décontracté et sûr.

"Décidemment, il doit vraiment être trop vieux pour comprendre... trop strict, trop vieux... et pas très poli manifestement", " songea-t-elle avec à la fois un certain amusement et beaucoup d'agacement.

Elle scruta la pièce encore quelques secondes, pas fâchée de faire attendre son "Maître" quelques secondes de plus. Bah tiens, il ne l'avait pas volée celle là !

"Ouai bon, d'accord, la politesse ça vous dépasse, j'ai compris. Par contre, est ce que je peux aller me reposer et me décrasser ? Ou alors vous voulez qu'on se mette au travail tout de suite ?"

[Lothringen]

Maître Léonard ne parut nullement affecté de cette sortie. Le sourcil droit retomba à l'horizontale, pour retrouver sa place originelle. Un masque.

"Non, il faut des mains propres et un esprit clair pour manipuler des réactifs, ou l'on court à la catastrophe. Lavez-vous d'abord et reprenez vos esprits. Et que ce soit bien clair : mon rôle est de vous apprendre les bases de mon art, votre rôle est de m'assister dans mes travaux. Le côté affectif de la chose ne m'intéresse pas."

Sur ces mots, la porte se referma aussitôt, sans claquer, mais sans douceur non plus. Ailyn n'avait plus qu'à retrouver les dortoirs ; la salle d'eau était juste à côté, si l'on pouvait appeler ainsi une petite pièce à lucarne, sous les combles, où un baquet pas trop large et un savon pas trop neuf attendaient les courageux qui ne craignaient pas l'eau froide.

[Ailyn]

A ces mots, Ailyn vira au rouge vif. Très bien, puisqu'il le prenait comme ça, il allait voir ce qu'il allait voir, ce vieux dégénéré du cerveau. Elle tourna promptement les talons, sans le remercier, vu qu'il n'attachait aucune importance à la politesse, mais plutôt à sa manière de se servir des portes.

Elle monta jusqu'au dortoir où elle put enfin poser son sac de voyage et tout ce qu'elle avait transporté jusque là. Sa peau était noire par endroit, ses ongles cassés et ses muscles endoloris. Le bain n'allait pas se faire attendre bien longtemps.

Lorsqu'Ailyn pénétra dans la salle d'eau, elle ouvrit de grands yeux. Elle avait espéré un peu plus que ce misérable baquet et l'eau froide et ce savon décrépi... Mais son besoin de propreté fut plus fort. Elle se glissa dans le baquet en jurant, constatant son exiguïté.
"C'est tout l'avantage de faire partie des petits gabaris" pensa-t-elle en souriant.

Elle se sentit si fatiguée après le bain qu'elle ne prit même pas la peine de manger. Elle était trop fatiguée et trop en colère pour se poser des questions. La jeune femme se laissa lourdement choir dans les draps et s'endormit dans la seconde qui suivit.

Lorsqu'elle s'éveilla le lendemain, la tête lourde des rêves qu'elle avait fait cette nuit là, elle se sentait mieux. Bien mieux que la veille. Elle enfila une robe propre, toujours très colorée, et alla prendre un rapide petit déjeuner.

"Mains propres, tête clair. T'inquiète pas pour ça mon vieux, j'arrive !"

C'est très tôt qu'Ailyn se posta, droite comme un "i" devant la porte du laboratoire de son maître. Elle frappa la porte de seulement trois coups sourds, histoire de voir si il allait encore pouvoir se plaindre de ses manières.

[Lothringen]

"Entrez !"

Elle trouva son maître déjà à l'œuvre, courbé sur son établi, suivant du doigt un grimoire, de la main gauche, et touillant elle ne savait quoi de l'autre dans un large chaudron. A la façon dont il plissait les yeux, on devinait chez lui cette myopie trop commune qui frappait avec cruauté les érudits de tout poil, passés trente ans.

"Il était temps que vous rentriez. Nous allons avoir beaucoup de travail aujourd'hui et dans les jours qui viennent", expliqua Léonard sans s'encombrer de salutations, ni même lever le nez de son travail. "La guilde a été réquisitionnée pour l'effort de guerre, et je suis censé fournir des potions de force à destination de nos paladins et prêtres défaillants. Évidemment, vu leur nombre, c'est mission impossible. C'est pourquoi nous devrions nous y mettre tout de suite."

[Ailyn]

Ailyn n'eut qu'une fraction de seconde pour s'imprégner du discours de son maître. Une défaillance des prêtres ? La guerre ? Malgré ce qu'elle avait vu en arrivant, elle espérait vaguement que tout cela ne soit qu'une exagération de la part du gouvernement... Même si tout cela avait l'air particulièrement inquiétant.

Helm était donc réellement mort ? Elle avait du mal à y croire. Les dieux avaient toujours des histoires compliquées entre eux, mais de là à se tuer... Un dieu pouvait-il réellement mourir ??? Toutes ces questions se bousculèrent à l'intérieur de sa tête, et elle tâcha de reprendre au plus vite ses esprits.

Les réponses à ces questions devraient attendre, au moins une partie de la journée. Elle n'était pas certaine que maître Zebiggus soit particulièrement enclin à lui répondre immédiatement.

La jeune femme retroussa ses manches, attacha ses longs cheveux noirs et lança un vif et jovial :

"Et bien c'est parti ! On commence par quoi ?"

[Lothringen]

"Le chaudron que je suis en train de préparer sera prêt dans une ou deux heures. Tenez, prenez la spatule, c'est fatigant de tenir tout ça. "

Visiblement satisfait de s'être débarrassé de l'instrument de torture, maître Léonard s'assit sans grâce sur un tabouret et s'accorda quelques instants de repos.

"Il s'agit d'une potion de force simple, je laisse les potions de géant des collines, du feu, du froid ou des nuages aux commandes spéciales de dernière minute. Il reste encore quelques ingrédients à incorporer. Il y a plusieurs recettes, celle que j'ai sous les yeux - l'œuvre d'un archidruide célèbre aujourd'hui décédé du nom de Panoramix - comprend du homard, des fraises, du gui, des carottes, des navets, du céleri, du sel, des fleurs des bois, des trèfles à quatre feuilles, des merlans de la dernière marée et de l'huile de roche éventuellement remplaçable par du jus de betterave. Il est essentiel de bien mélanger, continuez, mais quoi qu'il en soit, il ne faut JAMAIS racler le fond de marmite. C'est comme cela que l'on produit des potions aux effets aléatoires et gênants. Surtout pour la réputation du fournisseur."

Il soupira, le temps de reprendre son souffle.

"J'ai pu rassembler tous les ingrédients pour ce premier chaudron, mais nous allons devoir repartir à la chasse pour le suivant. De même, il faudra demander au maître de guilde de nous donner toutes les fioles dont il dispose. L'atelier de potiers du port est prévenu, mais eux aussi sont submergés... Tenez", ajouta-t-il en jetant un oeil à un sablier en fin de course, "c'est le moment d'ajouter les fleurs des bois. Pétale par pétale, et on ne met pas les tiges, attention."

[Ailyn]

Ailyn s'empara de la spatule avec énergie, et commença à remuer à un rythme qu'elle souhaitait le plus proche de celui de Maître Zebiggus. Elle s'attacha à bien éviter de toucher le fond de la marmite, même si c'était un peu plus dur que d'éviter de toucher les bords du bol de lait quand on y mélange de la poudre parfumée...

Elle nota ainsi qu'il lui faudrait sûrement aller rechercher des ingrédients pour les potions, de rassembler aussi toutes les fioles disponibles...
Quand elle repensa à la diversité des ingrédients présents dans la potion, la jeune fronça le nez et s'imprégna de l'odeur qu'elle jugea suffisamment étrange pour être nauséabonde. Elle continua cependant à remuer son étrange mixture avec toute la délicatesse dont elle était capable.

Ailyn attrapa enfin la fleur des bois et jeta un par un chaque pétale, adoptant des gestes lents et précautionneux. Elle n'allait probablement pas aussi vite que l'aurait voulu son maître, mais elle avait rarement travaillé dans l'urgence. Dans son petit village, si urgence il y avait, c'était le Vieux qui s'en occupait...