[Lieu] Mersant

[Taliesin]

L'elfe avait pris la précaution de marquer leur passage par des points de repère, afin d'éviter qu'ils ne se fourvoient dans ce dédale : il avait déjà beaucoup cheminé dans les entrailles de l'île, mais il demeurait un être de la surface, et ne pourrait jamais acquérir les compétences de Martin en matière d'exploration souterraine. Dès lors, mieux valait ne pas prendre de risques.
C'est cette même préoccupation qui lui fit bientôt donner le signal du retour. Ils étaient partis sans matériel, sans vivres ; une secousse pouvait se produire à tout instant. Inutile de tenter les diables, dans ces conditions. Et de toute façon, l'important était acquis : c'était bien un réseau relativement dégagé que Victor et Jehan avaient découvert.

[Galathée]

Ils firent demi-tour, remontèrent la piste que Taliesin avait tracée, et regagnèrent sans difficulté leur caverne. Jehan était cependant fatigué, tout comme l'elfe, qui ne s'était pas ménagé dans les dernières heures. Seule Griselda semblait encore fraîche. Lorsqu'ils arrivèrent dans leur repaire, ils trouvèrent Martin et Victor installés sur un lit, lisant ensemble l'un des opus de Katja. Ils se levèrent pour venir à leur rencontre et écouter le récit de leur périple. Le barde put constater, au passage, que le courtisan s'était quand même lavé...

[Taliesin]

Bah, il ne l'emportera pas au paradis... songea-t-il par devers lui.
Il ne dit rien là-dessus, cependant, préférant de loin les actes aux menaces. Il entreprit donc de décrire à leurs deux compagnons les tunnels qu'ils avaient longés, les embranchements, les éboulis... Il doutait que Martin soit capable de localiser, par ces vagues indications, la partie du réseau récemment mise au jour. Il ne s'en efforça pas moins d'être le plus exhaustif possible.

[Galathée]

Comme il l'avait craint, le courtisan ne put rien en dire. Il écouta cependant avec attention son récit et promit d'accompagner l'expédition du lendemain. Comme l'indiquait la couleur des murs, le soir était tombé, la nuit ne tarderait plus. Martin proposa d'aller préparer le repas, dont ils auraient bien besoin. Il ne dit rien de leur projet de combat aquatique.

[Taliesin]

Le barde n'en dit rien lui non plus.
D'abord, il était fatigué : la concentration dont il avait fait preuve pour apprivoiser le bâton de mage, les exercices martiaux avec Griselda puis Martin, l'exploration, enfin, avaient sévèrement pioché dans ses réserves d'énergie.
Ensuite, s'il remettait le sujet sur le tapis alors que personne d'autre n'en parlait, il aurait eu l'impression d'être encore plus gamin que les deux gamins du groupe. Pas très indiqué, pour quelqu'un à qui on attribuait le statut de chef, même s'il n'en voulait pas.
En bref, il se tint coi. Néanmoins, tandis que le courtisan prenait la direction de leur réserve, lui-même prit celle du bassin. Renoncer à l'affrontement était une chose ; renoncer à se délasser tranquillement dans les eaux agréablement chaudes dont était agrémentée la caverne, une autre.

[Galathée]

Taliesin fut le seul à profiter de l'eau tiède. Griselda et Jehan s'installèrent autour de la table tandis que Victor aidait Martin à leur mitonner quelque chose. Le petit Merlu semblait sur le point de s'endormir, mais la jeune femme lui fit la conversation - sur quel sujet, mystère - pour le garder éveillé. Quand Taliesin rejoignit le groupe, la soupe était prête. Elle était même accompagnée de galettes de blé fraîches que les cuistots avaient préparées plus tôt dans la journée. Un plat bien roboratif pour les marcheurs des ténèbres. Ils mangèrent sans grand discours, cependant, car la journée avait été bien chargée. C'est seulement en fin de repas que Taliesin fut à nouveau replacé face à ses prérogatives.
" Alors, quel est le plan, maintenant, chef ?" demanda Griselda.

[Taliesin]

Taliesin leva les yeux au ciel... puis prit le parti d'en rire.
-D'abord, quitte à me donner un titre, il faut utiliser celui de général, répondit-il d'un air outrageusement pompeux. C'est le seul à même de refléter - quoi qu'imparfaitement - mes immenses capacités de commandement. Ensuite, pour le plan, et bien...
Il se frotta le menton.
-Avant de nous coucher, nous essaierons de contacter Guéric et son groupe, et nous aviserons en fonction de leur avancement sur le bateau. S'ils ont presque terminé, nous plierons bagages et tenterons de les rejoindre. S'il leur faut encore un peu de temps, nous nous lancerons dans une exploration approfondie. Quoi qu'en prenant le nécessaire pour notre survie, en cas de nouvelle secousse. Évidemment, dans les deux cas, nous partirons tous ensemble. Sans quoi, nous risquerions d'être séparés. Ce qui ne serait pas très recommandé.

[Galathée]

Martin grimaça et fut le premier à prendre la parole.
" Tu sais qu'il est possible... probable... que ces tunnels ne nous mènent jamais à la grotte marine ? Nous pourrions errer des jours et des jours sans jamais retrouver sa trace. Sous terre, nos possibilités de nous orienter sont nulles. Je ne saurais même pas dans quelle direction commencer à chercher..."
Il leva les mains pour prévenir toute protestation.
" Je ne conteste pas la nécessité... peut-être... de quitter cet endroit, mais... D'accord."
Il se tut et croisa les bras.
" Tu vas dire : le pipeau, le pipeau, le pipeau. Oubliez ce que je viens de dire."

[Taliesin]

Le barde le dévisagea de longues secondes, la mine pensive.
Ce n'était pas la première fois que Martin manifestait son manque d'enthousiasme - c'était un euphémisme - à l'idée de quitter la grotte, et Taliesin se demandait ce qui motivait une telle position. Il ne pouvait croire que la perspective de rester à jamais enfermé ici le réjouisse. Pouvait-il s'agir, alors, de la crainte qu'ils ne soient capturés par les pirates ? Ceux-ci pouvaient pourtant venir les dénicher dans leur refuge, maintenant qu'une voie d'accès vers les tunnels était ouverte...
Scruter le courtisan ne lui apporterait malheureusement pas la réponse. Il faudrait qu'il lui en touche un mot, au plus tôt. Le faire en public, toutefois, semblait peu indiqué.
-Il pourrait nous aider, oui, répondit-il doucement. Mais il n'est pas dit que nous en ayons besoin : si nous empruntons les passages qui montent, nous finirons bien par découvrir une ouverture, même minuscule, sur la surface ou la mer, ce qui nous aidera à nous repérer. Enfin, si tu juges cela trop hasardeux... Je jouerai de l'instrument, effectivement.

[Galathée]

" Jouer de l'instrument me semble tout aussi hasardeux que d'errer au petit bonheur la chance dans les couloirs de cette île... Mais je suivrai le mouvement, ne t'inquiète pas." fit-il avec un sourire. " Bon, j'imagine que je ferais mieux d'aller chercher un de ces cailloux bleus, histoire que nous sachions où en sont les autres... J'espère que nous parviendrons à le faire fonctionner aussi bien qu'eux."
Il joignit le geste à la parole, alla prendre l'un des cailloux et revint le déposer sur la table.

[Taliesin]

Le barde se trouva bien bête.
Il avait imaginé que le caillou avait fonctionné par hasard, sans que Guéric, Goran ou les autres aient tenté de lui trouver une utilité particulière. Après tout, lorsqu'il avait entendu leurs voix, ils parlaient d'autre chose... S'il en avait été autrement, il leur aurait évidemment demandé comment ils s'y étaient pris.
C'était trop tard, désormais. Il fallait donc improviser.
Le barde prit la petite pierre dans sa main. La fixa avec intensité, concentrant sa pensée sur les membres du groupe installé dans la grotte marine.
-Quelqu'un m'entend ? demanda-t-il enfin.

[Galathée]

Le caillou s'était mis à luire, signe que quelque chose se passait. Cependant, aucune voix ne répondit à Taliesin, tout juste le silence. Ou plutôt un murmure. Un va et viens régulier, doux, presque hypnotique.
" C'est la mer." murmura Jehan.
Mais personne ne répondait.
" Ils sont sans doute loin du caillou, simplement." fit Victor.

[Taliesin]

Le barde n'aimait pas ça. Il n'aimait pas ça du tout.
Mais il refusa, une fois n'est pas coutume, d'envisager le pire.
-Probablement. Ils ont pu, aussi, aller chercher George et Bellyra.
Sans emporter leurs affaires ? Ils auraient pu vouloir ne pas se charger, d'accord. Mais le caillou n'était pas exactement encombrant...
-De toute façon, nous serons fixés lorsque nous les rejoindrons, ajouta-t-il sur un ton plein d'optimisme.

[Galathée]

Martin croisa les bras. Il ne dit rien, mais le regard qu'il lança à Taliesin en disait long.
" Peut-être qu'ils dorment, simplement." dit Jehan.
" Ou alors ils sont partis en mer sur le radeau." ajouta Victor.
" Ou ils n'entendent pas."
" Ou alors on le fait pas marcher convenablement."
Ils semblaient parfaitement convaincus par leurs différentes propositions. Griselda se contenta d'un petit sourire contraint.
" Peut-être que ça ne marche qu'une seule fois." dit-elle finalement.
" Alors pourquoi on entendrait la mer ?"
" Peut-être n'entend-on pas la mer. Juste un son qui nous y fait penser." intervint Martin.
" Comme quand on met un coquillage sur son oreille."

[Taliesin]

Le barde haussa les épaules.
-Il y a effectivement des tas de raisons toutes simples pour expliquer qu'ils ne nous aient pas répondu. Nous réessaierons demain matin. Nous pourrons même utiliser une autre pierre : nous en avons plusieurs. Et sii nous ne les entendons toujours pas - ce qui, encore une fois, pourra s'expliquer fort aisément -, nous nous lancerons dans des expéditions de reconnaissance sans nous être concertés, voilà tout. Au final, cela ne change pas grand chose.
Il savait que Martin, même s'il n'en dirait rien, ne serait pas d'accord. Il savait, aussi, que le courtisan imaginait des raisons à ce silence, des raisons bien différentes de celles qu'ils avaient tous évoquées à voix haute.
Et les raisons tues, les pires, n'étaient pas non plus irrationnelles. Loin s'en fallait.
Pourtant, il était préférable de ne pas s'y arrêter. Car si le pire était advenu, sous une forme ou sous une autre, leur petit groupe était bien mal engagé.

[Galathée]

Personne ne contesta les dernières paroles de Taliesin. Aucun de ses compagnons semblait ne vouloir s'appesantir sur le silence renvoyé par la pierre bleue. Ils terminèrent donc leur repas sans grande conversation, se contentant d'échanger quelques mots pour demander de l'eau, des épices, une galette supplémentaire. Jehan baillait répétitivement, signe qu'il était épuisé. Griselda se leva pour leur préparer une infusion. Martin semblait tendu mais il ne se départit pas de son habituel sourire tranquille.

[Taliesin]

-J'ai l'impression que ce n'est pas encore ce soir que je vous raconterai une longue histoire ! constata l'elfe après les avoir dévisagés.
C'est tant mieux : il était fatigué, sentait qu'il ne mettrait guère de temps à s'endormir. Toutefois, il n'irait pas au lit sitôt son infusion bue.
Il voulait demander à Victor si, décidément, quelques soins ne lui feraient pas du bien., mais préférait ne pas le faire à table, afin de préservé la fierté du gamin qui avait, jusqu'ici, décliné son offre.
Il voulait aussi laisser l'opportunité à Martin de lui dire le fond de sa pensée. Peut-être l'y inviterait-il, peut-être se contenterait-il d'une ouverture silencieuse. Dans tous les cas, le courtisan resterait libre de se taire ou de parler.

[Galathée]

Jehan leva le camp le premier, s'excusant à mi-voix, déjà à moitié endormi. Griselda revint avec son infusion, servit les rescapés puis reprit place. Martin n'ouvrit pas la bouche, sirotant le breuvage brûlant en silence. Une douce quiétude de fin de journée commençait à accabler l'assemblée, les traînant vers la torpeur. Victor finit par se lever et leur souhaita bonne nuit avant de battre en retraite vers son lit.

[Taliesin]

Le barde prit le temps de terminer sa propre tasse et de dire à ses deux compagnons qu'il revenait sous peu avant de suivre le petit garçon.
- Ça va ? s'enquit-il à mi voix lorsqu'il l'eut rejoint. Tu te remets de ta chute ?
Il craignait plus qu'à demi de se faire envoyer balader. Mais il préférait tenter sa chance plutôt que de ne rien faire.

[Galathée]

" J'ai un peu mal au dos." fit Victor avec un léger sourire.
Il s'était déjà bien installé entre ses couvertures.
" Et j'aurai probablement le plus énorme bleu qu'on puisse imaginer."
Son sourire s'élargit.
" Mais ça va. Je crois que Griselda a mis quelque chose dans mon infusion. Je me sens déjà un peu dériver."

[Taliesin]

Le barde acquiesça.
-Mais ne penses-tu pas qu'en plus de cette infusion, une petite intervention de ma part pourrait être utile ? Parfois, la douleur est plus vive au lendemain d'une chute que le jour même... Et ça ne me poserait aucun problème d'incanter. Tu sais comment va la magie : après une nuit de sommeil, j'aurai récupéré mes sorts, et ceux dont je ne me serai pas servi avant d'aller au lit seront perdus.
Il hésita une seconde, puis sourit à son tour.
-Mais ne vas pas imaginer que je te propose ça parce que je te crois en sucre. Je sais que tu es solide ! Simplement, en bon général, j'ai besoin que tous les membres de mon équipe soient au mieux de leur forme. D'autant que la journée de demain sera fatigante.

[Galathée]

Victor porta la main à son visage parcheminé et le frôla un instant.
" Je pensais... qu'il n'était pas bon d'utiliser la magie pour soigner... que c'était... toujours mieux de laisser le corps se guérir de lui-même quand c'était possible ? Ici... J'ai juste un peu mal au dos, tu sais. Martin a peut-être raison : peut-être qu'on ne devrait pas abuser..."
Il haussa les épaules avec une petite moue incertaine.
" Si j'ai beaucoup plus mal demain, on en reparlera, d'accord ?"

[Taliesin]

Le barde fit la grimace.
-Tu sais, lorsque la prêtresse nous a expliqué ces choses, la situation était particulière. D'abord, il était question de magie divine. Ensuite, tu venais de recevoir beaucoup de cette magie, pour te soigner. C'est pour ça qu'elle a préféré qu'on attende un peu avant de faire disparaître tes brûlures. Quelques semaines, quelques mois, je ne me souviens plus... Aujourd'hui, la situation est différente : ma magie n'est pas divine, mais profane. Et cela fait un bon bout de temps que tu n'as pas été touché par un sort.
Il se tut, puis secoua la tête.
-Mais tu as peut-être raison. Faisons comme tu as dit : si demain ça ne va pas, je te guérirai.

[Galathée]

" Tu crois que la magie divine, c'est différent de la magie profane ? Moi je croyais que l'idée, c'était surtout de laisser faire le corps, qu'il savait mieux ce qui était mieux pour lui... Mais on verra."
Il sourit.
" C'est dommage que Jehan s'est endormi. Il avait envie de t'entendre raconter une histoire. Ce sera pour demain... Ça nous réchauffera quand on aura quitté la grotte, pas vrai ?"

[Taliesin]

Le barde hocha la tête.
-Oui. Et c'est justement à ça que servent les bardes : ils le font certes dans les tavernes ou les auberges, pour les clients qui y passent la nuit. Mais, au-delà du simple divertissement, ils ne sont vraiment utiles que dans un groupe, lors d'une expédition. Pour réchauffer, remonter le moral...
Son regard se fit plus lointain.
-C'est comme ça que j'imaginais vivre, autrefois. Je n'avais jamais pensé que je serai amené à jouer de l'épée plutôt que de ma harpe...
Il s'interrompit, se fendit d'un sourire coupable. Ce n'était pas le moment de s'égarer.
-Tout ça pour dire que tu peux compter sur moi, Victor. Je vous raconterai autant d'histoires que vous le voudrez.

[Galathée]

Victor soupira et bâilla longuement.
" Je sais bien."
Il fronça les sourcils.
" Dis... C'est sans doute une bêtise mais... Non, c'est une bêtise."
Il remonta la couverture jusque sous son menton.
" Je vais dormir, maintenant. La journée de demain sera longue, hein..."

[Taliesin]

Taliesin croisa les bras.
-Et si je ne te laisse pas dormir ? Si je t'asticote jusqu'à ce que tu ailles au bout de ta pensée ? Tu en as trop dit, bonhomme ! Ma curiosité est piquée : voudrais-tu, en la laissant inasouvie, me priver de sommeil ?
Il se fit plus sérieux.
-Blague à part : je ne crois pas que, dans notre situation, il y ait des idées ou des questions qui soient des bêtises. Regarde : on a réussi à fabriquer un golem-mille-pattes. Qui l'aurait cru ? Et, dans les parois inébranlables, indestructibles de notre caverne, vous avez ouvert un passage... Quand Griselda a proposé que l'on mène de telles recherches, cela aurait pu sembler bête, vu ce à quoi notre refuge avait résisté sans dommage. Mais il n'en était rien : l'idée s'est avérée payante. Alors, vraiment, j'aimerais que tu me dises ce que tu avais en tête. Il n'est pas impossible que cela se révèle très important.

[Galathée]

" Ce n'était pas du tout quelque chose de ce registre..." murmura Victor avec une grimace, en baissant la voix.
Il jeta un coup d'oeil par-dessus l'épaule du barde, vers Martin et Griselda qui bavardaient autour des reliefs du repas.
" J'ai vu, tout à l'heure... Je te préviens, c'est une bêtise... Mais Martin... Je crois qu'il n'a pas vraiment les cheveux noirs, en vrai. J'ai vu que ça repoussait, et c'est beaucoup plus clair, maintenant. Ou alors tous les soucis lui donnent des cheveux blancs, je ne sais pas. Mais... je t'avais dit que c'était une bêtise. Mais j'ai trouvé ça bizarre. En même temps, le métier qu'il fait est... beurk... Pourquoi les gens font un métier comme ça ?"

[Taliesin]

Le barde avait senti un frisson courir le long de son échine.
Se pouvait-il que...
Ne pas envisager d'emblée le pire, se ressaisit-il. Il y avait beaucoup de raisons pour lesquelles Martin pouvait s'être teint les cheveux. Beaucoup. Et l'écrasante majorité n'avaient rien d'inquiétant.
Il n'empêche... L'infime minorité de ces raisons avait de quoi faire naître le soupçon...
Il fit cependant effort pour se concentrer sur la question du petit garçon. Elle était épineuse. Tant mieux.
-Et bien... Parfois, les gens n'ont pas le choix. Surtout à Mélandis : on leur demande rarement leur avis. Et même quand ils peuvent quitter la cité... Il n'est pas rare qu'ils continuent, puisque c'est ce qu'ils ont appris à faire, ce dont ils ont l'habitude. Après, il y a aussi des gens qui le font par choix. Pour gagner de l'argent... Ou par envie, qui sait ? Bon, évidemment, tu es encore un peu jeune pour le comprendre, mais... Je ne trouve pas que ce soit un métier honteux. C'est une façon de... distraire les autres. Ce qui est honteux, c'est d'imposer ce métier à ceux qui n'en ont pas envie.
Il se tut.
Tu parles prostitution avec un gosse de huit ans... se tança-t-il.
Certes. Mais ledit gosse avait posé la question. Et il en avait vu assez pour ne plus être "naïf" en ce domaine.

[Galathée]

Victor l'avait écouté religieusement, les doigts pliés sur sa couverture, le visage dépassant à peine. Il acquiesça les lèvres pincées.
" Je crois que je vais dormir, maintenant. Je t'avais dit que c'était une bête histoire."
Il haussa les épaules et sourit.
" Demain, grosse journée ! Bonne nuit."