Quête : Le Poing Levé - Ailyn, Lekhtarin, Bellatrix - à proximité de Graëlon

[Lothringen]

Le groupe des mages était parcouru de rumeurs, il fallait s'y faire. Les devins adoraient répandre des informations plus ou moins improbables sur la nature de l'ennemi et les batailles à venir. Evidemment, dès que l'on comprit leur degré de sérieux, cela devint un jeu. "L'empereur de Melandis est l'avatar de Demogorgon en soquettes" ; "j'ai clairement vu Aghoralis s'envoler dans les airs comme une cité nétherisse !"; "les navires luméniens marchent à l'énergie solaire, poussés par Lathandre, c'est d'ailleurs pour ça qu'ils seront en retard" ; "la fin du monde est moins proche que le châtiment de celui qui m'a volé ma ration de midi. Mon informateur planaire a tout vu !"

Aussi, quand l'un des mages enseignants du groupe des devins annonça qu'on approchait de Graëlon et qu'on se battrait plus tôt que prévu, il y eut des sifflements persifleurs. Beaucoup de mages ne semblaient pas vraiment conscients du risque encouru, ni de la proximité d'un dénouement très sanglant à cette longue excursion champêtre. Certains se hâtaient déjà de demander si on camperait aux pieds de la cité, d'autres racontaient leurs souvenirs ou projetaient des visites guidées. Graëlon était le second plus grand port manostien après Manost ; on y fabriquait des navires militaires et marchands, et la cité assurait des liaisons transcontinentales régulières avec Féerune. Une bonne partie des immigrants avaient débarqué là-bas plutôt qu'à Manost même, et conservaient un souvenir ému de leur premier aperçu de Dorrandin.

On déchanta à peine quand le mage annonça que le campement ne serait pas dressé près de la ville, mais à plusieurs heures de celle-ci : on n'était plus à quelques heures de marche près, non ? Et la troupe se remit en marche.

[Bellatrix]

Journal, cher journal ou esprit de journal. Je te trouve un peu disparate. J'ai parcouru les rangs de mes amis en robes en mendiant un peu de papier. Chaque fois, j'ai dû préciser que non, ce n'était pas pour mon transit capricieux, que non je n'étais pas une espionne melandienne et que non, trois fois non ma grand mère ne me manquait pas tant que ça. Certaines de ces personnes ont de drôles d'idées. Au cas où tu ne le saurais pas, tu es constitué de trois feuilles de parchemin, de feuilles d'arbres divers, d'un tronc d'arbre, d'une roue de charriot - qu'il est difficile d'écrire quand il roule à part si l'on s'attache bien - d'un casque et du bras d'une personne endormie (j'espère qu'elle ne se réveillera pas trop vite.)

Partout où mes oreilles se posent, j'entends des rumeurs sur Melandis. Sais-tu qu'elle a changé de localisation ? On ne sait plus où elle se trouve. Nous trouvons cela vraiment inquiétant. Nous nous sentons suivis, épiés. Serait-elle là, derrière notre dos ? Ou dans le nez de l'un d'entre nous ? Dans cette fosse sceptique sur laquelle nous restons le moins souvent possible ?

Cette nuit, j'ai eu très peur. J'ai cru qu'un millier de petits mélandiens m'avaient grimpé dessus. J'ai hurlé : "à l'abordage". Ce n'était que le mage pervers qui, dans le noir avait trébuché sur un fil et était tombé sur notre tente. Il est parti en hurlant quand il m'a vu. Je me demande bien pourquoi. Notre ami le mage de la fin du monde a encore été retrouvé suspendu à un arbre, sans ses casseroles, cette fois. Il faut dire que même du haut de son chêne, il continuait à hululer tout en tapant ses ustensiles avec ses dents. Quelle opiniâtreté ! Je le trouve magnifique.

Aujourd'hui, quelqu'un m'a pris pour quelqu'un d'autre. J'ai reçu une boule de glaise sur la figure. Je n'étais pas vraiment contente, je l'avoue. Je ne sais pas vraiment pour qui j'ai été prise. Peut-être pour moi, en fin de compte.

Cher journal, je dois m'interrompre. Ma page se réveille et me crit après. Je te continuerai plus tard, sans doute, quand j'aurai trouvé un autre support.

Tiens, un lapin ...

(... le journal s'est interrompu, son auteure étant occupé à courir après un lièvre. En espérant qu'elle ne le suive pas dans son terrier).

[Lekhtarin]

Le drowconien s'était amusé à répandre diverses rumeurs à son tour dans le camp, peut-être pouvait-il commencer à mettre son plan en oeuvre, mais il en doutait fort, il allait devoir repérer les mages susceptibles de céder à une proposition très alléchante.

[Ailyn]

L'impatience grandissait de jour en jour, d'heure en heure chez Ailyn. L'insouciance générale qui habitait les mages ne la calmait pas... Elle était souvent sujette à des crises d'angoisse, en particulier au milieu de la nuit...

D'ailleurs, la nuit, il se passait parfois de drôle de choses... L'un des magiciens avait trébuché sur la tente qu'elle partageait avec Bellatrix et non seulement il était parti en courant, mais avait fui de plus en plus vite quand Ailyn, sous l'effet d'une rage qu'elle ne se connaissait pas, s'était lancée à sa poursuite, pieds nus, rouge comme une pivoine, et prête à distribuer force coups de pieds au derrière. Au moins, elle avait pu se rendormir l'esprit tranquille, une fois la tente remise debout...

Ailyn ne savait plus si elle serait capable ou non de se battre. Elle n'avait jamais eu l'ambition de nuire à qui ce soit, et n'avait jamais tué de ses propres mains... Qu'allait-il advenir pendant les combats ? Allait-elle savoir se protéger, aider ses camarades ? Elle ne savait pas, et elle éprouvait une peur qu'elle ne savait plus exprimer... en tous cas plus avec des mots.

Elle ne savait pas si Bellatrix comprenait, mais elle l'espérait de tout coeur.

[Bellatrix]

Bellatrix sentait l'angoisse d'Ailyn qui l'angoissait aussi. Quand la jeune femme se réveillait au milieu de la nuit, peut-être victime d'un cauchemar, elle se mettait à genoux et se mettait à hurler à la mort. Heureusement, dans le groupe des mages aux lubies et tares diverses, ses cris s'entendaient à peine. Puis elle prenait son amie dans ses bras et la berçait jusqu'au matin en lui parlant des soupières. Elle ne savait pas vraiment quoi faire d'autre.

Elle se sentait un peu fatiguée d'écrire dans son journal, même si elle savait que c'était une lubie salutaire et distrayante qui la changeait du quotidien. Au bout du compte, elle trouvait la guerre moins drôle qu'elle se l'était imaginée.

[Lekhtarin]

De ce trio, seul Lekhtarin semblait s'amuser. Il avait une fascination perverse pour le chaos.

[Lothringen]

Certes le groupe des mages était pour le moins... bizarre... mais il existe néanmoins divers degrés de bizarre. Tout au long du voyage, Ailyn et Bellatrix avaient fait bande à part. Personne ne voulait partager leur tente, et ceux qui leur adressaient une fois la parole évitaient de renouveler l'expérience. Difficile de dire ce qui les faisait fuir le plus sûrement, des propos incohérents de Bellatrix ou de l'air de connivence que prenait Ailyn en discutant avec elle de leur futur élevage de soupières.

Aussi furent-elles pour le moins surprises de voir un mage, durant la marche, se rapprocher d'elles en faisant mine de vouloir lier connaissance. Plus personne n'avait commis une telle erreur depuis plusieurs jours de marche.

L'homme s'appelait, disait-il, Elvis. Brun, de belle taille, d'un abord avenant, il se présenta comme un membre de l'école de transmutation.

"Mais, je ne viens pas vous voir simplement pour parler de nos études. En fait, je dors dans la tente voisine de la vôtre. Hier, enfin cette nuit, j'ai entendu hurler..."

Il laissa la phrase en suspens, et avec elle sa question implicite.

[Ailyn]

"On peut hurler pour des tas de raisons ! répondit immédiatement Ailyn, mal à l'aise. Tenez, par exemple, l'autre nuit, un pervers est venu nous visiter tard dans la nuit... Vous n'auriez pas eu peur, vous ?"

Ailyn n'avait pas très envie de parler de ses cauchemars. Elle n'avait pas envie de parler du sang. Il faisait jour, il faisait bon. Elle n'était pas prête à se livrer à quelqu'un qu'elle connaissait si peu. Mais elle était touchée par sa sollicitude.

"Mais c'est très gentil à vous de vous en inquiéter, Elvis."


Ailyn mettait un point d'honneur à essayer de retenir les prénoms... mais dans ce contexte, ce n'était pas une mince affaire.

[Bellatrix]

Bellatrix regarda le bonhomme. Bizarrement, il ressemblait à quelqu'un qui n'était pas vraiment mort, mais cela, elle ne savait pas vraiment comment se l'expliquer. Non, il ne ressemblait pas à un zombie. Ce n'était pas exactement cela. Et puis, il y avait son prénom qui lui donnait envie de danser. Cela non plus, elle ne se l'expliquait pas.

"Elvis, Elvis, Elvis ... Hier soir, nous avons été attaqués par un troupeau de petits mélandiens. Ils sont tous petits, mais voraces. D'ailleurs, ils ont essayé de me mordre."

Elle s'interrompit.

"Enfin, ça, je l'ai peut-être rêvé. J'espère que l'on ne t'a pas réveillé, Elvis."

[Lothringen]

Un pervers ? Un troupeau de petits mélandiens affamés ? Parlait-elle d'insectes ? ? Décidément ce duo méritait sa réputation, et ses propos étaient sans queue ni tête... Il crut néanmoins déceler une gêne assez patente chez Ailyn, qui, selon ses souvenirs, devait être apprentie à la guilde. En tout cas, il l'avait déjà croisée, sûrement. Ils ne l'auraient pas gardée si elle était folle ? Il répondit avec un sourire d'excuse.

"Oh, désolé, je ne voulais pas vous embarrasser. Je... J'aurais pu difficilement ne pas entendre, un cri pareil au beau milieu de la nuit. A vrai dire, une bonne dizaine de tentes a dû être alertée comme moi... On est sortis des tentes dague au point, et on n'a rien vu d'agressif... Moi ça ne m'a pas réveillé, j'ai des insomnies en ce moment, la nervosité sans doute... Mais, disons, hem... A la prochaine invasion de mélandiens... n'hésitez pas à nous appeler en renforts... de façon moins stridente..."

Quoi qu'il se soit passé, Elvis avait compris qu'il ne le saurait pas. Mais sa sollicitude était en partie intéressée : entendre ce genre de choses au beau milieu de la nuit, c'était à vous glacer le sang. Plus efficace encore que la dernière rumeur, qui avait lâché un loup-garou vorace au milieu des tentes...

[Ailyn]

C'était au tour d'Ailyn d'être embarrassée. Elle ne voulait pas déranger tout le monde comme ça... C'était fou ce que, malgré sa petite taille, elle prenait de la place, même sans le vouloir, dans la vie du camp...

"Oh, je suis désolée... Vous savez, je ne l'ai pas tellement fait exprès... Je vais essayer de faire en sorte que ça ne se produise plus, vous savez... C'est euh... très... euh... Pas simple de gérer l'attente hein ? Je ne sais pas trop... ce que vous en pensez, mais euh... on s'expose quand même à de sacrés dangers en allant au front, mine de rien et... je... euh, je n'y suis jamais allée, vous voyez ?"

Ailyn devint rouge comme une pivoine. Décidément, ce n'était pas son jour...

[Lothringen]

"Ah, c'est cela..." En un sens, cet aveu rassurait Elvis. Même si cette révélation n'était pas du genre à remonter le moral des troupes, elle avait le mérite de fournir une explication rationnelle et vraisemblable à un phénomène irrationnel et flippant. "Vous savez, la plupart d'entre nous n'y sont jamais allés. Nous sommes trop jeunes pour avoir connu les précédentes campagnes militaires, et les mages plus âgés n'en parlent pas volontiers. Quelquefois, j'ai l'impression que nos camarades n'ont pas conscience de ce vers quoi ils marchent. C'est vrai, la marche à pied nous aura pris beaucoup plus de temps que les combats eux-mêmes, quoi qu'il advienne, mais tout de même... C'est comme si tout cela était complètement abstrait."Il haussa les épaules, tout en poursuivant le fil de sa réflexion. "J'imagine que cette impression d'irréalité se dissipera aux premiers morts... Tout compte fait, je ne suis pas pressé d'y être. Je n'ai pas trouvé de solution miracle, pour ma part. Je passe beaucoup de temps à révâsser, à préserver un joli jardin imaginaire où il ne pousse que de belles fleurs et où la paix est immuable... Si vous avez plus efficace, je prends !"

[Bellatrix]

Bellatrix avait bien une idée sur le sujet. Et puis, elle avait envie d'aider le pauvre Elvis qui semblait avoir si peur de la guerre. Elle ne savait toujours pas pourquoi mais elle commençait à se trémousser en battant la mesure.

"Quand les choses vont mal, j'imagine que je suis un arbre et rien d'autre qu'un arbre. Je reste immobile, les bras levés. Je sens la sève dans mes feuilles, le vent dans mes branches. Je bruisse de mille sons et les animaux grimpent sur mon tronc. C'est cosmique, magnifique, magique. Et je suis sure que ceux qui m'embêtent finiront par me prendre pour un végétal."

[Ailyn]

Ailyn aimait bien toutes ces conceptions végétales de la paix intérieure. Peut être était-ce en effet une solution viable que de tout à coup s'imaginer intouchable par les évènements extérieurs ?
Voilà qui risquait d'être complexe pour elle : elle s'était toujours sentie comme une éponge, à l'écoute directe du tumulte perpétuel du monde. Elle préférait espérer... Espérer, c'est tout ce qu'il lui restait. Et cela lui rappelait également une histoire racontée de temps en temps par le Vieux, avec un halfling, non deux, partis dans un pays noir et inconnu pour sauver leur monde... Il y avait peut être une histoire d'anneau avec ça, elle ne savait plus...
Garder espoir, oui, c'était le plus important.

"Elvis, vous savez si les troupes de Luménis doivent nous rejoindre ? J'ai entendu quelques rumeurs... Je n'ai pas pu obtenir de véritables informations sur la question..."

[Lothringen]

Elvis se gratta l'occiput. Il était très difficile de démêler le vrai du faux au milieu des rumeurs diverses de ses collègues mages, mais en se collant à un des enseignants, il avait pu dégotter une information relativement fiable. Pour autant que le mage en question n'était pas amateur de plaisanteries stupides. S'agissant de Leonard Zebiggus, c'était assez peu probable.

"J'ai entendu un des enseignants affirmer que la flotte luménienne allait débarquer à Graëlon, et que l'armée allait camper pour les attendre. Un jour ou deux si tout va bien. Aucune information sur les manoeuvres qui auront lieu ensuite, en revanche. En même temps, je n'ai rien appris sur les mouvements de troupe mélandiens. Sont-ils à Aghoralis ? Ont-ils poussé plus loin ? Vous le savez, vous ?"

C'est dans ce genre de moment que l'on regrettait le joyeux chaos qui régnait chez les mages, et l'absence tout aussi criante parmi eux de leader désigné. Les mages les plus puissants... ne faisaient pas le voyage avec la troupe : ils se téléporteraient le plus tard possible.

[Ailyn]

"On ne sait pas grand chose, répondit Ailyn avec circonspection. Les rumeurs les plus folles circulent, et je n'ai pas eu le courage d'aller demander à Maître Zebbiggus de quoi il retourne... Ce n'est pas qu'il a mauvais caractère, c'est juste qu'il est... tellement sérieux... que poser une question vous fait parfois ressembler au pire des bouffons."

Elle se racla la gorge. Elle aimait bien son maître, mais c'est vrai qu'il avait parfois tendance à être un peu trop exigent... Au moins, on savait où on mettait les pieds avec lui.

"Quoi qu'il en soit, il est bon de savoir que nous serons rejoints par des alliés. Je trouve qu'on se sent moins seul une fois riche de ce genre d'informations."

Ca n'allait pas calmer toutes les angoisses d'Ailyn, mais c'était rassurant. Oui, Elle se sentait tout à coup plus calme, plus posée, mieux disposée à réfléchir.

[Bellatrix]

Cher journal

Nous allons enfin avoir de la compagnie. Des luméniens. Mais qu'est ce que c'est que ce genre ? Masculin, féminin, luménien ? Non, vraiment, je ne connais pas. Mais comme on dit : plus on est de fous ...

Aujourd'hui, Elvis vient nous parler. Il a l'air gentil. Mais il me donne envie de me déhancher. C'est très gênant. On va finir par croire que j'ai envie de faire pipi.

Pour le moment, j'ai l'air sage et je me concentre sur la conversation. Cher journal, tu peux vraiment être fier de moi.

Tiens, mais depuis quand est-ce que je te parle dans ma tête ? Cher journal, veux-tu bien ?

[Lothringen]

Elvis approuva. Qui disait renforts, disait meilleurs chances de l'emporter, sûrement.

"Oui ! On dit que les prêtres et paladins de Helm n'ont plus de sorts, sauf leur chef... on est sûrement plus forts avec nos alliés. J'espère que ça suffira pour repousser les mélandiens ! Enfin..."

Il parut mal à l'aise.

"Si je me souviens bien de ce que disait mon père, les Luméniens n'ont pas toujours été des alliés très fidèles. Ils nous ont déclaré la guerre il n'y a pas si longtemps que ça. C'est toujours un peu gênant de devoir s'en remettre à une aide extérieure. J'imagine que ce ne sera pas tout à fait gratuit."

Mais l'urgence était de repousser l'assaut ennemi. Les mélandiens, eux, n'hésiteraient pas à piller et massacrer. Sans se cacher. Sans faire semblant.

[Ailyn]

Ailyn le sentait, elle n'aimait pas ce qu'elle était en train de vivre, le chemin qu'elle avait, bon gré, mal gré, choisi. Elle avait besoin de changer de sujet, il ne fallait plus parler du fil des épées qui les attendaient. Il lui fallait parler de soupière, de tricot, de ragot, de pâtisserie... Bref, il fallait changer de thème, il fallait changer de sujet, pour ne pas penser à tous ces mélandiens qui ne brûlaient que de les estropier... voire pire...

Une guerre... Une autre guerre surtout ! le prétexte était trop beau...

"Une guerre entre Manost et Luménis ? Mais comment est-ce possible ?"

[Bellatrix]

Bellatrix n'aimait pas non plus entendre parler de guerre. Et puis, depuis qu'Elvis était là, les conversations avaient perdu de leur piquants. En même temps, la guerre se rapprochait. On l'entrevoyait gronder derrière les soupières. Et elle était effrayante. Par contre, elle n'avait jamais vu de luméniens.

"Ils sont comment les luméniens ? Vous en connnaissez, vous ? Est-ce qu'on peut les adopter ? Est-ce qu'ils sont bons en cuisine ? Est-ce qu'ils se mangent ?"

[Lothringen]

Elvis se mit à imaginer des luméniens ficelés comme des rôtis qu'on traînerait en laisse comme des jouets pour enfant, avant de les confronter à des pommes ou à un four. L'image avait quelque chose de dérangeant, de vaguement compromettant pour sa santé mentale, aussi la relégua-t-il au plus tôt dans le placard des accidents cérébraux.

"Euh... non je n'ai jamais rencontré de Luménien, enfin sauf s'il en est venu à Manost, mais en général ça se passe dans le sens inverse. Et je n'ai jamais été très assidu en cours, Ailyn, mais je crois qu'il y a quelques années il y a eu une guerre qu'on a appelée "la guerre de Shar", et où c'étaient nos ennemis. Il me semble même... que c'est la dernière guerre qu'on ait livrée avant celle-ci ! Evidemment, Manost n'était pas directement menacée, alors ça a moins marqué les esprits."

Sauf mon père, songea-t-il. C'était quand même curieux de se dire que leurs derniers adversaires n'avaient pas été les mélandiens, leurs ennemis intimes. L'histoire est un éternel recommencement...

[Ailyn]

Il y avait quelque chose d'étrange à se dire que Luménis était autrefois l'ennemie de Manost... Mais cela ne devrait probablement plus étonner Ailyn. Les relations entre Luménis et Manost avaient de toutes façons de quoi étonner n'importe quel néophyte.
Au fil de leur conversation, Ailyn devenait curieuse d'Elvis, qui était venu leur parler, même si cela paraissait lui coûter beaucoup.

"Vous avez une grande famille, Elvis ? Des frères, des soeurs ?"

[Lothringen]

Il soupira.

"Trois soeurs cadettes. Trois harpies démoniaques, je devrais dire... Disputes, critiques en tout genre, harcèlement moral et j'en passe. Il est certain que la perspective d'aller loger dans les dortoirs de la guilde n'est pas pour rien dans ma vocation pour la magie. J'en avais un peu assez de passer pour le raté de la bande..."

Il se gratta le crâne, ennuyé de ce seul souvenir. Elvis était intimement persuadé que les familles envahissantes avaient été à l'origine des plus grandes carrières d'aventuriers. On irait volontiers se jeter dans les Abysses quand on a connu l'enfer domestique.

"Mais, et vous ? Vous n'êtes pas à Manost depuis longtemps, je crois. Je vous aurais connue dans les cours de débutants."

[Bellatrix]

Je les regarde tous les deux discuter. J'ai toujours envie de danser. Moi, je n'ai jamais eu de soeurs ni de frères, du moins pas que je sache ou alors, on m'aurait menti. C'est quelque chose d'assez encombrant, apparemment. Peut-être que ça s'échange. En tout cas, ça a l'air traumatisant. Je suis heureuse de ne pas en avoir.

Ici, on est tous comme dans une grande famille. Il y a les bons à rien, les pervers, les fous - il y en a plus que l'on pense, je devrais me méfier, les devins et Elvis. Il est plutôt gentil, Elvis. Moi non plus, je ne l'ai jamais vu à Manost, je m'en serais souvenue.

[Ailyn]

Ailyn était mal à l'aise. C'était comme si sa présence était incongrue, grossière... Elle aurait voulu appartenir à une espèce de famille, un lieu connu, un chez soi qu'elle n'avait eu. Mais elle n'en avait pas, et peu importait ses espoirs, rien à faire, une famille n'allait pas pousser comme des champignons pour l'accueillir à bras ouverts.
La présence d'Elvis la touchait d'une certaine façon. L'intérêt qu'il semblait leur porter avait quelque chose d'étrange et de formidable également. C'était énorme, inconnu, et bien plus amusant que de marcher vers une mort probable.

"Je suis arrivée très récemment... Vous savez, j'ai été l'apprentie d'un magicien... de campagne, si je puis dire... Je n'ai pas eu beaucoup l'occasion de suivre les cours, et encore moins ceux des débutants. Sachez que c'est l'un de mes grands regrets. J'aurai vraiment voulu apprendre la magie de façon plus... académique."

[Lekhtarin]

C'est alors que Lekhtarin arriva lui aussi vers le groupe, il était caché sous sa capuche, de sorte à ce qu'Elvis ne put voir son visage, ni ses mains, ni quelque partie de son corps. Il portait une dague couleur acide dans la main et une fronde de même couleur.

"-Bonjour, Elvisss, c'est ça ? Qu'aimez-vous faire dans la vie ?"

[Bellatrix]

Bellatrix toute heureuse de revoir Lektharin battit des mains, toute heureuse de le revoir.

"Hé, mais voici notre monsieur Oeuf."

Par contre, sa dague d'acide et sa fronde l'inquiétèrent un peu.

"La guerre a déjà commencé ?", voulut-elle savoir.

[Lothringen]

L'arrivée de Lekhtarin fit sursauter le pauvre Elvis, qui avait déjà eu un peu de peine à s'habituer à l'étrange Bellatrix, et qui ne savait trop que penser d'un inconnu qui débarquait au beau milieu de la conversation, se comportait comme s'il l'avait écoutée et néanmoins ne se présentait pas. Et puis, ça voulait dire quoi cette façon de se cacher complètement le corps, au point qu'on ne voyait même pas son visage ni ses yeux ? Du coup, il trouva l'intervention de Bellatrix très opportune. Même si un peu mystérieuse, elle aussi.

"Monsieur Oeuf ? Euh... Enchanté. Vous avez un autre nom ?"

[Ailyn]

Amusée par Bellatrix, Ailyn se sentit tout à coup d'humeur joueuse. Rien de tel pour oublier... dans la joie et la bonne humeur.

"Ce brave monsieur s'appelle Leeeeekh taaaa riiiiinn ! lança la jeune femme en articulant exagérément, un sourire taquin flottant sur ses lèvres. C'est comme mandarine, mais avec moins de jus dedans !"

Elle fit un clin d'oeil à Bellatrix avant d'ajouter :

"... et plus de peau. Et moins coloré aussi."

[Bellatrix]

Bellatrix roula des yeux.

"Monsieur est un dracormyr ou quelque chose comme ça. Ou peut-être un drap brodé au Cormyr. Je ne me souviens plus. Il est tellement mystérieux, il me fait un peu peur. Oh, ne lui dites jamais, je ne veux pas qu'il entende. Oh, zut, il est là. Je ne me souvenais plus."

Elle alla se cacher derrière Elvis.