Quête : Le Poing Levé - Angèle et Chandara - à proximité de Graëlon

[Althéa]

Angèle hésita quelques minutes avant de se décider. Son genou lui faisait férocement mal et elle n'aspirait qu'au repos. Un renoncement de plus. Elle s'appuya doucement sur Chandara pour ne pas trop lui peser. Elle se sentait épuisée.

"Merci", parvint-elle à souffler.

Elle se sentait piteuse. Bien loin que la guérisseuse que les helmites avaient mobilisée pour soulager leurs maux, bien loin du lieutenant du Coeur Radieux auquel elle avait voué sa vie. Bien loin aussi son jumeau ... Elle devait lui écrire. Elle savait qu'il lirait bien au delà des mots.

[Chandara]

C’est donc ainsi que les deux paladines, honteuses et un peu mélancoliques, retournèrent au ralenti et enlacées vers les tentes. Et dire que ces entraînements étaient censés contribuer au moral des troupes et former leur esprit de corps. Une grande réussite ! Presqu’aussi marquée que la fuite de Chandara face à la détresse de Pandora quelques minutes plus tôt. La jeune paladine s’en voulait toujours de sa maladresse : elle n’aurait trop quoi su lui dire pour la rasséréner et c’était toujours le cas d’ailleurs. Mais elle appréhendait maintenant de la retrouver, de lui adresser la parole ou de supporter ses regards de reproche bien légitimes. Elle pourrait tenter de fuir à nouveau en s’occupant d’Angèle mais cela ne serait pas honnête encore une fois. Elle se devait de faire preuve de davantage de maturité, de lutter contre ses insuffisances. C’était la vocation de toute paladine, son devoir. Et il n’aurait pas dû tant lui peser.

[Lothringen]

A leur arrivée à la tente, elles trouvèrent Lise et Pandora à peu près dans la même position que précédemment. Sans doute avaient-elles passé tout le temps de l'entraînement à discuter. Pandora était moins sinistre que lors de leur départ, et ses yeux semblaient moins rougis. Elle les écarquilla en les voyant revenir clopin clopant.

"Hé ! Mais que vous est-il arrivé ?"

"Laissez-moi deviner... Don n'a pas d'humour ?"

[Chandara]

Chandara se rendit compte qu’elle avait parfaitement oublié Don. Elle se sentit soudain plutôt bête de ne pas lui avoir adressé la parole à la fin de l’entraînement. Il la jugerait certainement soit trop timide, soit misanthrope, ce qui n’était guère flatteur, dans un cas comme dans l’autre pour une paladine. Décidément, les événements ne lui donnaient guère d’occasions de prendre confiance en elle et ses aptitudes. L’interrogation sur la blessure d’Angèle la prit au dépourvu : elles n’avaient même pas pensé à s’accorder sur ce qu’elles diraient à leurs colocataires une fois de retour à la tente. Indécise sur ce qu’elle pouvait révéler et honteuse pour avoir été à l’origine de l’état de sa compagne, Chandara se tourna vers cette dernière, rougissante, pour lui laisser l’occasion de répondre. Oui, Angèle serait plus douée pour improviser qu’elle-même.

[Althéa]

Angèle après avoir remercié Chandara s'assit lentement, étendant avec précaution sa jambe meurtrie. Si elle n'avait pas spécialement envie de plaisanter, la boutade de Lise la fit cependant sourire.

"Vous aimeriez savoir ... En fait non ... Vous ne voulez pas savoir."

Elle se tourna vers son amie, lui adressa un clin d'oeil. Simplement pour lui dire qu'elle ne lui en voulait pas. Elle se sentait fatiguée. Comme si cet entraînement avait été celui de trop. Et qu'elle avait atteint ses limites.

"J'ai glissé c'est tout. Et vous, comment allez-vous ?"

[Chandara]

Chandara était à la fois admirative de la capacité d’improvisation de sa compagne et reconnaissante qu’elle ait tu sa responsabilité dans l’incident. Elle se fit attentive à la réponse des deux autres femmes comme si elle cherchait à se rattraper de sa précédente défection. Ce faisant, elle se mit tout de même à fouiller dans son sac à la recherche d’un baume qui pourrait apaiser la douleur au genou d’Angèle. Elle était certaine d’en avoir emporté un peu pour apaiser les effets des cavalcades trop prolongées ou ce genre de situations embarrassantes. Elle lui avait fait une promesse à ce sujet ou, à tout le moins, elle se considérait redevable envers la paladine.

- Il va falloir que tu retires tes chausses pour que je regarde ça.

[Althéa]

Angèle grimaça et secoua la tête. Elle n'avait pas spécialement envie de se retrouver en braies devant les autres. Mais déjà, se débarrasser des pesantes jambières de l'armure lui ferait le plus grand bien. Ce qu'elle fit sans attendre après s'être relevée péniblement.

"Je te promets que ça va, merci. Demain, je m'en tirerai sans doute avec une simple ecchymose et cela ne méritera pas d'être mentionné."

La sollicitude de Chandara la gênait, l'indisposait presque. Elle n'en voulait plus.

[Chandara]

Chandara avait bien compris le message cette fois-ci : Angèle avait envie de reléguer l’incident et le lui rappeler constamment la dérangeait. La jeune paladine abandonna ses recherches et se releva avant de se diriger vers la sortie de la tente :

- Si tu le penses. Mais n’hésites pas à m’appeler si tu as besoin d’aide. J’attendrai dehors avec Lise et Pandora. Mais avant ça je vais chercher un peu d’eau à la rivière pour notre toilette. L’heure de dîner ne devrait plus trop tarder.

[Lothringen]

Pandora demeura très évasive sur son état, mais sa décision semblait prise ; elle voulait passer outre la volonté parentale, et ce n'était pas qu'une question de "consommation", comme disait Angèle. Il était surtout question de ne pas mourir avant d'avoir vécu. Néanmoins, elle déclina l'offre de leur réserver la tente, tout en la remerciant - ils auraient moyen de se retrouver sans déranger personne. Elle avait juste besoin... d'un peu de calme et de repos, et ces deux jours de pause dans la marche à la guerre tombaient bien. La cérémonie aurait sans doute lieu dans deux ou trois jours. Afin de mettre le moins de personnes possible dans la confidence, elle s'était résolue à demander à Lise d'officier. Cette dernière en avait été profondément flattée, même si elle n'en disait rien. On la prenait si rarement au sérieux...

La soirée se poursuivit comme à l'ordinaire - le dîner sur le pouce, la veillée. Les esprits commençaient de s'échauffer, car on avait appris que les luméniens débarqueraient à Graëlon le lendemain matin.

[Chandara]

Chandara s’était mise à rougir sans pouvoir se contrôler en comprenant la proposition qu’Angèle avait faite à Pandora. Pourtant, elle ne pouvait que l’approuver tant il était évident que le couple était fait l’un pour l’autre. Elle fut néanmoins soulagée de constater qu’elle pourrait jouir de sa tente pour cette nuit.

Une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, elle fut excitée d’apprendre que l’attente de leurs alliés allait enfin prendre fin. Le débarquement des troupes luméniennes vaudrait assurément le détour. Dommage qu’elle ne soit pas censée quitter le campement pour y assister. Quoique finalement… Non ma grande, ce ne serait pas raisonnable !

[Althéa]

L'agitation due à l'arrivée imminente des luméniens se poursuivit jusque tard dans la nuit. Chacun spéculait sur l'arrivée de ces troupes providentielles. Combien de navires ? Combien de soldats ? Les plus folles rumeurs circulaient. Certains avaient même prétendu que les navires avaient des ailes. La nuit, quant à elle parut bien courte à tous.

Le lendemain matin, dans le campement des helmites, d'ordinaire si disciplinés, l'agitation battait aussi son comble. On tendait le cou, tentant d'apercevoir une ombre de voile. On retenait son souffle dans l'espoir que le vent apporte avec lui quelques nouvelles des insulaires. En vain. Le gros du spectacle se déroulait loin d'eux.

Chandara fut tirée du sommeil par quelqu'un lui pinçant le pied de façon peu amène pendant qu'une voix - une jeune femme sans doute - l'houspillait doucement :

"Excusez-moi, mais là, j'ai pas toute la journée. C'est bien gentil de dormir mais y en a qui travaillent."

[Chandara]

La fin de la nuit de Chandara avait été animée d’un cauchemar étrange : une petite chatte noire au nom improbable s’évertuait à l’empêcher de dormir en déployant des trésors d’imagination. Sa dernière trouvaille avait été de commencer à lui attaquer les pieds et à lui mordiller les talons. Son cauchemar se fondit parfaitement dans son réveil brutal et elle se redressa brusquement en poussant un cri. Etait-elle attaquée ? :

- Dégage vilain chat ! Euh… Q..Qui va là !?

[Althéa]

Elle avait à peine parlé que quelqu'un l'attrapa par le pied et la tira hors de la tente sans ménagement. Et la même voix lui cria dans les oreilles.

"Allez, on se réveille. C'est la guerre. Ils sont tous partis sans vous attendre. Vite, vite, dépêchez vous. Déjà, on ouvre ses petits yeux."

Elle la secoua encore.

"Et si vous ne bougez pas, je peux être encore pire qu'un chat. Moi, je mords."

[Chandara]

Pour un réveil brutal, celui-ci était dans la bonne moyenne. Chandara avait eu la ferme intention de se rendormir après s’être fait réveillée par une attaque sournoise aux pieds. Mais maintenant cette douce perspective était hors de sa portée. Traînée hors de son couchage, à même le sol et avec seulement ses vêtements de corps pour la protéger, la paladine sauta plusieurs étapes d’un coup dans son long processus d’éveil. La remarque sur le fait qu’elle était la dernière à se réveiller lui fit un coup de fouet qui acheva de lui faire prendre conscience. Ouvrant les yeux, elle eut tout le loisir de contempler sa tortionnaire. Comprenant aussitôt la supercherie et fâchée de se retrouver dans une position aussi inconfortable : sans armes, à peine habillée et sans doute passablement dépeignée, Chandara laissa éclater sa colère :

- Non mais pour qui vous prenez-vous !? Et vous êtes qui d’abord ? Moi aussi je sais mordre, et même bien pire !

Son effet fut un peu gâché quand elle se frotta machinalement les yeux et étouffa de justesse un bâillement.

[Althéa]

"Et vous, vous vous prenez pour qui ? Moi, je travaille et vous menacez de me mordre. Vraiment, y en a qui manquent pas d'air. Et vous osez me menacer, en plus. Et puis, vous devriez aller vous habiller ou on risque de vous arrêter pour attentat à la pudeur sur ma personne."

Cheveux bruns et courts. Yeux noisette. Un air un tantinet espiègle.

"Vous pouvez aller vous habiller. Je vous parlerai en même temps. Ce n'est pas comme si je devais m'adresser à vous à travers un mur. D'ailleurs, ça ne doit pas être confortable, non ?"

Petit silence.

"J'ai un pli à vous remettre. J'espère que je ne me suis pas trompée de destinataire. Vous êtes bien Chandara ?"

[Chandara]

Le moins que l’on puisse dire c’est que la jeune messagère ne jouait pas à la perfection la carte de la diplomatie. Toutefois, Chandara soupçonnait qu’elle n’arriverait pas à se débarrasser de sa tourmenteuse si elle retournait simplement se coucher. De toute façon, elle n’avait plus sommeil à présent : le réveil avait été trop brutal pour avoir envie d’en vivre un second dans la même journée. La paladine retourna donc dans la tente pour y enfiler une tenue plus convenable, et son armure si on lui en laissait le temps. Eroeh avait été très strict sur ce dernier point.

- Bon, je vous écoute. Mais je dois vous prévenir que me traîner par les pieds après me les avoir *mordus*, n’est pas le moyen le plus sûr de me rendre patiente et bien intentionné à votre égard.

[Althéa]

Luna s'assit dans l'herbe non loin de la tente.

"Mon commanditaire a besoin de vous pour une mission spéciale. Il a entendu parler de votre participation à l'annihilation des morts vivants au village de Linceul. Il pense que vous pouvez nous apporter efficacement votre aide. Personnellement, je ne sais pas. Une paladine qui aime se promener toute nue ... Vous ne serez pas toute seule dans cette mission."

Elle se leva souplement.

"Bon, c'est pas tout ça, mais j'ai un de vos coéquipiers à aller chercher. On se retrouve à l'autre bout du campement. Pas du coté des latrines. D'accord ?"

Et elle partit sans attendre de réponse.

[Chandara]

QUOI !? Comment cette fille ose-t-elle insinuer des choses pareilles !? Chandara était scandalisée et le fit savoir à l’endroit où la messagère s’était tenue un instant plus tôt. Mince, tant pis : il faut que ça sorte quand même ! Elle s’époumona sans faire attention à ses voisins juste au cas où l’odieuse jeune fille soit encore à portée :

JE PORTE TOUJOURS DES TENUES PARFAITEMENT DECENTES DEHORS ! SAUF QUAND ON M’Y TRAINE PAR LES PIEDS AU BEAU MILIEU DE LA NUIT !

Oups, les voisins n’allaient sûrement pas apprécier. Bon, Lise et Pandora semblaient encore endormies. Mais où était passée Angèle ? Sûrement pas très loin aller se soulager le genou ou autre chose… En tous cas, vêtue parfaitement décemment et même protocolairement, il était temps de prendre la tangente. Et le premier endroit qui lui vint à l’esprit était celui où elle aurait le plus de chances de mettre les choses au point avec l’inconnue qui n’avait même pas jugé bon de se présenter. Et comment avait-elle entendue parler des événements de Linceul ? Tout le monde était au courant ou quoi ?