[SCSA] Sans Chaleur, Sans Avenir

[Mornagest]

"Piotr a peut-être raison... si on passe à Benny quelques trucs, on pourra gagner pas mal de temps. Et éviter d'aller en haut, là où le monstre dont vous parlez nous attend sûrement..."

Il avait lui-même un pull et un t-shirt, il pourrait toujours lui passer un des deux. Et ses chaussettes : pieds nus dans ses chaussures, ça irait. Et si Benny récupérait deux paires de chaussettes, ce serait tout de même possible de marcher dehors sans trop avoir mal aux pieds. Christophe proposa d'agir de la sorte.

[Kasumi]

Benny sourit chaleureusement à ses amis, ravi que ses amis se proposent ainsi de l’aider. Leurs offres étaient généreuses et il leur fit savoir avec enthousiasme :

- Oui, je crois qu’avec deux paires de chaussettes, et peut être un T-shirt, ça irait bien mieux. En plus j’ai déjà le manteau que m’a prêté Piotr ! On peut s’en tenir à ça. Le car n’est pas si loin après tout. Mais il nous faut trouver un moyen d’échapper aux corbeaux : nous n’aurons aucune chance de les distancer à la course et je crois que Grincevoix m’en veux un peu.

[Taliesin]

-Y a pas qu'aux corbeaux qu'on devra échapper, intervint Pierre. Y a aussi les chiens, dans le jardin, et ils ont pas l'air commodes...

Il s'interrompit, pensif, puis se fendit d'un sourire amusé.

-On a qu'à prendre la voiture de monsieur Larouge ! Je suis sûr que Christophe il pourrait la démarrer même sans les clefs. Comme dans les films avec des bandits, en fait ! Ensuite, un de nous pourra tenir le volant et un autre appuyer sur les pédales. Bon, d'accord, on sait pas conduire, mais... C'est peut-être pas si compliqué que ça !

Il se rembrunit.

-J'espère juste qu'on trouvera le sac de madame Pougon dans le car. Sinon, je vois pas où ils pourraient être, les papiers qu'on doit modifier pour partir des Limbes.

[Mornagest]

"La voiture ?" fit-il, peu emballé à cette idée. Il savait comment démarrer une voiture, mais sans la clef de contact, ça devenait difficile... sans parler de la conduire, en effet. Là, il n'avait aucune idée précise de la façon dont il fallait s'y prendre.

"Je sais même pas si monsieur Larouge a une voiture, en fait..." Il n'avait rien vu de tel en arrivant au domaine, mais peut-être s'était-il focalisé sur d'autres choses. "Puis, je sais pas conduire du tout, ça, c'est sûr", ajouta-t-il, dépité.

[Manfred]

Un bruit de porte coupa court à la discussion. Cela venait de la gauche, du fond des prisons. Puis, un bruit de pas qui n’était pas sans rappeler ceux... du maître des lieux. Il n’y avait que Vincent Larouge pour marcher ainsi, imposant, décidé. Bien sûr, il pouvait aussi s’agir d’un autre protagoniste encore inconnu. Quoi qu’il en soit, qui que ce soit, il atteindrait l’intersection dans un rien de temps. Il fallait agir... ou alors faire face.

[Kasumi]

Benoît était terrorisé : ils avaient trop tergiversé alors que leur première décision de ne pas remonter dans les chambres était prise. L’urgence maintenant était de trouver une meilleure cachette que cet endroit trop exposé et encore trop proche du labyrinthe, de sa salle blanche et des horreurs qui s’y tapissaient dans l’ombre ou dans la lumière. Et voilà que l’urgence et la précarité de leur situation leur était rappelée douloureusement. Le garçon chercha frénétiquement une issue pour s'enfuir et leur ferait si possible éviter la personne qui venait à leur rencontre. Si ce n’était pas possible sans redescendre l’escalier, il faudrait peut-être se cacher dans l’ombre bien que cette perspective soit des plus déplaisantes.

- Vite, faut qu’on file ! On verra plus tard pour les vêtements !

HRP : post 666, la classe ! J'ai droit à un bonus ?

[Althéa]

Tout en courant, Bellatrix parla. Elle était un peu ennuyée d'avouer ça, mais bon ... ça pourrait peut-être servir.

"Moi, je sais un peu comment on conduit. Mon papa m'a montré au cas où un jour il serait poursuivi par des policiers qui veulent l'arrêter parce qu'il est en robe ou au cas où ma maman aurait trop acheté de choses et que le banquier vient frapper à notre porte ... Enfin ... Je sais appuyer sur les pédales. Et c'est mon frère qui tournait le volant quand il n'essayait pas de se tuer avec son arnica ou de sauter par la fenêtre du rez de chaussée."

[Manfred]

Ils s’étaient mis à courir, retournant dans la cave sombre mais d’aspect classique. Déjà l’escalier ramenant au rez-de-chaussée apparaissait à la lueur agitée des lampes électriques. Encore quelques mètres et le groupe aurait franchi la fameuse porte qui avait limité leur toute première exploration du château, cette porte que Christophe avait évoqué imprudemment devant l’ex femme de M. Larouge. Derrière eux, les pas n’avaient pas accéléré alors qu’il était évident que la personne pouvait les entendre fuir. Alors elle se laissait distancer. Mais voilà qu’une voix rattrapes les enfants, celle de Vincent c’était sûr. Seul le ton morne ne lui était pas coutumier.

« Attendez. »

Un ordre ? Une demande ? Un peu des deux sans doute. Mais fallait-il y souscrire ? L’escalier était là, tout près.

[Mornagest]

Il avait suivi ses camarades, certain que leur salut dépendait maintenant de leur rapidité. Mais lorsqu'il entendit monsieur Larouge... sa voix avait l'air si triste, en comparaison de son ton enjoué qui lui était coutumier. Il ne semblait pas en colère, n'avait pas une voix de monstre affreux désireux de les déchiqueter avant de les manger avec de la sauce à la menthe.

Sans savoir pourquoi, sans y réfléchir, il s'arrêta. Tourna la tête vers Vincent.

[Taliesin]

En constatant ce qu'avait fait Christophe, Pierre pila net. Non parce qu'il en avait envie : s'il s'était écouté, il aurait au contraire fui le plus loin possible de cet homme qui savait parfaitement ce qui se passait sous son toit et n'avait rien fait pour les protéger. Non, s'il s'était arrêté, c'était pour que son copain ne soit pas laissé en arrière : ils ne devaient surtout pas se séparer à nouveau et encore moins abandonner l'un d'entre eux seul face au maître des lieux ou aux autres horreurs de ce château.

-On peut l'écouter si tu veux, mais s'il s'approche trop, on fonce en haut et on essaie de l'enfermer ici, souffla-t-il.

[Kasumi]

Benoît sursauta au point de manquer un pas dans sa course quand Vincent leur demanda – oui, leur demanda – d’arrêter. Consacrant tous ses efforts à maintenir le rythme de ses aînés, il eut du mal à freiner sa course en constatant que deux d’entre eux obéirent à l’injonction. Lui-même avait été envahi d’un doute : Monsieur Larouge ne leur avait jamais fait de mal mais n’avait pas plus cherché à les aider à s’en aller. Savait-il ce qui les attendait s’ils quittaient la maison sans leur âme ? Mais comment alors ne pourrait-il pas savoir le reste ? Et que leur voulait-il à présent ? Les retarder ou les conseiller ? Il n’y avait plus qu’un moyen de le savoir : l’écouter. Instinctivement, il se plaça juste un pas devant Bellatrix, lui-même ne sachant pas pourquoi… Avait-il le temps de dessiner un symbole ? Non, sans doute que non.

- Que voulez-vous ?

[Althéa]

Bellatrix se tourna à son tour. Assez rapidement pour faire face à celui qui venait de parler. Elle n'aimait pas ça du tout. Dans les films, c'était quand on croyait que les héros allaient s'en sortir qu'il se passait quelque chose et patatras ! D'autres se faisaient tuer à la dernière minutes. Et à la fin, un seul voir deux arrivaient au générique final.

Elle attrapa machinalement son carnet et son crayon et attendit ce que l'affreux bonhomme, le traître Vincent avait à dire.

[Manfred]

Il y eut un grincement sinistre. M. Larouge venait d’arriver à la porte des prisons et il la franchissait. Elle claqua derrière lui dans un bruit plus glaçant encore. Puis les sons de pas, réguliers, solennels. L’homme ne se pressait pas pour arriver. Bientôt, sa haute et droite silhouette apparut à la lueur des lampes. Il était drapé dans son long manteau, plus que jamais noble dans son apparence d’aristocrate. Il appartenait à un temps révolu, une époque où l’on savait être grandiose. Quand il fut possible de distinguer ses traits, ceux-ci suggérèrent une poignante mélancolie. L’individu avait comme perdu en couleurs, ternes, fatigué, vieillit et pourtant toujours digne. Sous le bras, il tenait un journal. A sa ceinture, il y avait un pistolet, une antiquité de belle facture. Vincent s’immobilisa sitôt qu’il pénétra dans la cave. Quelques mètres le séparaient encore des enfants. Son regard passa sur chacun d’entre eux. Sur Piotr, il s’attarda. Puis, de son même ton, il reprit.

« C’est toujours ainsi. Vous comprenez trop vite, vous partez trop vite. Et à nouveau, je serai seul dans ce château sans joie. Que n’aurais-je donné pour jouer avec vous, un temps oublier le prix de l’éternité... Que n’aurais-je donné pour vous garder avec moi jusqu’à la fin... »

Encore une fois, il fixa Pierre.

[Mornagest]

Ses paroles mirent instantanément Christophe mal à l'aise. Lorsqu'il vit le pistolet... et parla de les garder jusqu'à la fin... la fin de quoi ? Il n'osait se poser la question, tant la réponse lui paraissait évidente. Pourquoi s'était-il arrêté ? Ses amis en avaient fait de même, et maintenant, par sa faute, ils étaient tous en danger face à cet homme à la nature improbable et aux desseins bien sombres.

Il recula d'un pas, essayant de se préparer à courir. Mais il n'y parvint pas tout de suite. Pourquoi Vincent regardait-il ainsi Pierre ?

[Althéa]

Bellatrix leva les mains. Dans les films d'horreur, ils se mettaient plutôt à hurler. Mais quelque chose lui disait que cela risquait de rendre Monsieur Larouge très nerveux. Et on ne contrariait pas les fous qui avaient des pistolets à leur ceinture. Elle ne savait pas vraiment quoi lui dire. Peut-être fallait-il gagner un peu de temps.

"Mais qu'est-ce que vous nous voulez ? Et pourquoi vous faites ça."

[Kasumi]

La présence de Monsieur Larouge était… glaçante. Toutes les fibres de son être lui criaient de fuir la menace qu’ils représentaient mais Benoît craignait qu’à l’instant où il ferait le premier geste en ce sens, une tragédie se produirait. Et à voir la façon dont il ne quittait pas Piotr des yeux, il sentait que c’était son copain qui en pâtirait le premier. C’était inacceptable, odieux, cruel. Il ne pouvait en être ainsi :

- Vous n’avez pas le droit de nous garder. Même si vous détestez votre ancienne femme. Vous ne croyez pas vraiment qu’on s’amuserait avec vous, maintenant qu’on sait ? Il vaut mieux nous laisser partir maintenant…

Non, il n’avait pas du tout été convaincant. Une fois de plus, il aurait mieux fait de se taire et laisser les autres s’exprimer mais cette attente angoissante était trop difficile à gérer et le danger insoutenable. Il chuchota à ses camarades d’un air contrit ce qui pouvait fort bien être son dernier mot :

- Désolé…

[Taliesin]

Pierre comprenait fort bien la réaction de Benoit. En vérité, il avait failli parler de la même façon, ne s'en abstenant que par peur d'aggraver la situation. Son ami, lui, n'avait pu s'en empêcher et, désormais, il craignait que leur hôte ne brandisse son pistolet. Aussi choisit-il d'intervenir pour essayer de l'apaiser.

-Monsieur... Moi je crois que vous êtes pas méchant. Vous nous avez pas fait de mal, vous nous avez conseillé les chouettes chambres... Je crois aussi que vous nous auriez ramenés au car, si vous aviez pu... J'aimerais vraiment que vous deviez plus rester tout seul, ici, mais... On peut plus vous aider, malheureusement. Si on reste, on meurt, et alors, on pourra plus jouer avec vous. Même si on devient des fantômes, on sera trop tristes pour ça... Alors, est-ce que vous pourriez pas... nous aider à partir ? Comme ça, même si on est plus avec vous, ben... On vous oubliera jamais. Parce qu'on saura que vous étiez vraiment gentil et que c'est grâce à vous qu'on a pas été attrapés par la Mort ou tués par les statues...

Il n'était pas tout à fait sincère, bien sûr. Mais tout ce qui comptait, c'est qu'il paraisse sincère, non ?

[Manfred]

Vincent observa un instant de silence dans sa rigide droiture. A nouveau, il passa de son morne regard les enfants en revue alors qu’ils s’exprimaient tour à tour. Son visage affligé demeurait figé. Peut-être eut-il un soupçon de réaction lorsque Pierre parla, rien de certain. Puis, il répondit du même ton.

« Jadis, j’ai fait un choix dont je ne mesurais pas l’ampleur. J’ai entrainé ma bien aimée dans cette déchéance impie. Il est légitime qu’elle me déteste désormais. Il est légitime que vous me détestiez tous. Ma fille à raison, ce n’est pas une vie... »

Le mot le fit sourire, un sourire sans joie.

« Vous n’avez pas à payer pour mes erreurs. Je ne vous retiendrai pas. Je n’ai jamais retenu personne. Chacun a eu sa chance. Saisissez la votre. »

Sur ce, M. Larouge écarta légèrement son bras. Le journal coincé dessous glissa, tomba. Il ne le ramassa pas. Au lieu de cela, de son pas décidé, il s’approcha du groupe que, finalement, il dépassa afin de monter les escaliers sans un regard en arrière. Avant de passer la porte, il ajouta :

« Prenez garde à mon ex femme. Elle exprime autrement sa peine. Adieux. »

Et il partit, son long manteau ondulant dans son sillage.

[Mornagest]

Il ne comprenait pas vraiment ce qui venait de se passer, mais il ne put s'empêcher de se sentir triste pour monsieur Larouge, qui paraissait réellement souffrir de sa situation, ce qui était compréhensible. Sa femme le détestait... ça devait être affreux, comme vie. Et il semblait coincé ici, sans qu'il sache pourquoi. Ses yeux de petit garçon l'empêchaient de voir certaines choses que seuls les adultes pouvaient comprendre. À l'inverse... bref.

Curieux, Christophe regarda le journal tombé par terre. Pourquoi le laisser là ? Peut-être qu'il parlait de l'accident de car ! Il y aurait peut-être des détails les concernant... il s'avança doucement vers la feuille de chou et se pencha pour la saisir.

[Manfred]

Le journal en question était le quotidien de Pont l’Espoir, daté du 22 Janvier 2013, soit le lendemain du départ en classe de neige. Le titre imprimé en gros sur la première page était évocateur. Il annonçait, sobrement : Tragique Accident de Car. L’article débutait ainsi :

La classe de neige des CE2 de notre école primaire s’achève avant même d’avoir débuté. Sur la départementale, le car conduisant les élèves a été percuté par un chauffard. Il a terminé sa tragique course hors de la route, stoppé par la végétation. Le bilan provisoire est de cinq morts, quatre élèves et le chauffard, mais il risque de s’alourdir encore dans les prochaines heures. On compte pas moins d’une dizaine de blessés graves dont le diagnostique vital est engagé. La ville n’avait pas connu pareille tragédie depuis l’affaire Jack Rivière...

[Kasumi]

Benoît avait regardé le maître de maison s’éloigner avec un élan de tristesse et d’empathie pour lui. Mais cet homme les avait menacé un peu plus tôt ce qui ne plaidait pas vraiment en sa faveur. Du reste, il n’était pas bien certain d’avoir compris ses motivations. Elle lui paraissait même des plus confuses ce qui n’avait rien d’étonnant pour un gamin de son âge. Le journal qu’il avait laissé derrière lui était peut-être plus explicite aussi se précipita-t-il aux côtés de Christophe qui l’avait ramassé. Après avoir parcouru l’article faisant les gros titres par-dessus son épaule, sa stupeur se lu clairement sur son visage. Ses pires craintes étaient confirmées : ils étaient morts dans l’accident. Mais le journal se trompait puisqu’ils étaient là et avaient récupéré leurs âmes. Ou alors il mentait pour les empêcher de revenir. Il comprenait mieux la tristesse de la veille de sa maman au téléphone maintenant. Et le croyant mort, elle ne pourrait même pas chercher à les aider. D’une toute petite voix qui lui parut chevrotante dans les semis-ténèbres, il rompit le silence qui s’était installé :

- Je crois qu’on doit garder le journal aussi. Il faut peut-être le modifier lui aussi. Ou alors il pourra nous indiquer si on a réussi à inverser le destin. Comme dans les contes fantastiques !

[Althéa]

Bellatrix se demanda quelle sorte de monstre était Vincent. Pas un de ces personnages qui portaient des masques ou étaient atrocement défigurés et qui faisaient couler le sang. Il n'était pas une ignoble poupée. Non, il ressemblait aux personnages des films d'épouvante. Un de ceux que se serait arraché la Hammer. Un être sombre et sans limite capable d'inspirer la crainte par sa simple apparition. Un des monstres qu'elle affectionnait le plus.

Et eux, ils étaient morts ... Donc, théoriquement ils étaient des ... des fantômes ... Ou peut-être que comme dans les films, ils n'étaient pas morts pour de vrai. Ils pouvaient peut-être revenir, surprendre tout le monde ... Mais à ça, elle n'y croyait qu'à moitié. Dans les films, les morts restaient des morts, et rien de plus. Et elle, elle avait envie de pleurer.

[Taliesin]

Pierre avait aussi lu l'article. Et il ne pensait pas que c'était la vérité. Du moins, il pensait que ce serait la vérité uniquement s'ils échouaient. Car la mort était une chose définitive, dépourvue de toute échappatoire. Malheureusement, il était bien placé pour le savoir...

-J'crois que c'est le truc qui nous manquait ! dit-il non sans enthousiasme. Le truc qu'il faut modifier pour quitter les limbes. Avec l'article, plus besoin de chercher le sac de madame Pougon et les autorisations de sortie : suffit de modifier le texte, de barrer ce qui nous plait pas, d'écrire que l'accident a été évité... Et de retourner dans le car, bien sûr.

Aussi ambivalent que soit monsieur Larouge, il leur avait rendu un fier service en abandonnant le journal derrière lui...

[Mornagest]

En espérant que cela fonctionne, l'idée était bonne. Peut-être qu'il faudrait que ce soit une intervention extérieure pour que ça marche... mais il préféra ne pas y penser. D'ailleurs, il n'y pensa même pas, trop naïf pour se poser ce genre de questions, et trop avide d'enfin sortir de cet affreux cauchemar...

"Qui a un crayon ?" demanda-t-il à la ronde. Bellatrix devait avoir de quoi dessiner, à tout le moins...

[Althéa]

Bellatrix lui avait tendu son stylo sans hésiter. D'habitude, elle ne le prêtait pas. Jamais au grand jamais. Mais là, situation oblige ... Elle avait un peu peur que tout cela ne serve à rien. Qu'ils agissent en pure perte et qu'ils découvrent qu'ils étaient toujours morts. Des petits fantômes hantant une maison. Un ressort dramatique souvent employé ces derniers temps outre les enfants démons, les enfants fantômes et les enfants tout courts.

Elle fit effort pour ne pas se mettre à pleurer.

[Mornagest]

Il n'avait pas posé la question pour recevoir lui-même le crayon : il écrivait mal, et n'avait pas beaucoup d'imagination pour modifier le texte afin qu'il colle mieux à ce qu'ils voulaient. Il craignait que ses bêtises ne provoquent de nouvelles catastrophes, comme l'apparition de Godzilla, ou d'une armée de morts-vivants hurlant "Cerveaaaaux !" à tout bout de champ, non sans dégager une odeur putride autour d'eux, ce qui ferait quand même désordre.

"Euh... je mets quoi ?" fit-il, penaud.

[Kasumi]

Benoît relut l’article sans imaginer qu’il serait à même de faire mieux que ses aînés de toute façon. C’était une telle responsabilité qu’elle avait de quoi faire perdre tous ses moyens au garçon. Après un instant de réflexion, il crut bon de donner son avis pour rompre le silence pesant :

- A mon avis il faut modifier le moins de trucs possible pour que ça ait plus de chance de marcher. Si on s’approche de la vérité, il y aura moins de trucs à changer. Donc à mon avis, il ne faut pas rayer la mention de la classe de neige. Peut-être même pas de l’accident. Mais on pourrait modifier les conséquences : les quatre morts déjà. Mais il faut trouver quoi écrire à la place. Et si on disait que le bus a fait un arrêt à l’épicerie mais y a perdu 4 enfants, coincés dans les toilettes ! C’est arrivé plein de fois !

[Althéa]

"Oui, comme ça, on pourra dire que l'autre monsieur n'est pas mort non plus. D'accord, c'est lui qui a provoqué tout ça mais bon ... C'est pas rigolo non plus. Et puis, coincés dans les toilettes, ça peut-être rigolo non plus. On pourrait ajouter qu'on était dans un état semi-sauvage et qu'on attaquait les gens sur l'autoroute. Non ... Je plaisante"

Bellatrix se sentait un peu plus enthousiaste.

[Mornagest]

Il hésita. "Voyons... euh... je vais relire ça." Il relut la manchette du journal, puis refit une proposition à ses camarades, à voix haute.

"La classe de neige des CE2 de notre école primaire s’achève avant même d’avoir débuté. Sur la départementale, le car conduisant les élèves a été percuté par un chauffard. Il a terminé sa tragique course hors de la route, stoppé par la végétation. Heureusement, on ne compte aucun blessé grave dans l'accident. Les enfants en sont quittes pour une grosse frayeur et un séjour en montagne annulé.

Bon, j'aime pas trop les blessés, mais si on change trop de choses, ça peut coincer, si j'ai bien compris ?"

[Taliesin]

Pierre, qui avait écouté avec l'attention la suggestion de son copain, acquiesça avec enthousiasme :

-Ce serait super comme ça, Christophe ! Y aurait juste des p'tits bobos mais pas un seul mort, même pas le monsieur de la voiture... Et en plus, la classe de neige serait annulée. Je sais pas vous, mais moi, j'ai pas trop envie d'aller faire du ski. J'ai plutôt envie de retrouver mon grand-père...

Sa gorge se noua brutalement lorsqu'il songea à son aïeul. Mais il n'allait pas craquer alors que le but était si proche, quand même !

-Faudrait juste modifier le titre, aussi... reprit-il d'une voix un peu plus rauque qu'à la normale. On pourrai faire un truc du genre "Accident de car : plus de peur que de mal", ou "Un accident de car sans conséquences"...
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