[Quête] La demeure de Cuivrechaire

[Elzen]

Certains nobles mélandiens avaient des noms mystérieux ; d'autres en avaient qui décrivaient très bien leur situation. De Cuivrechaire avait bel et bien acquis la place qu'il occupait désormais par un métal qui n'était certainement pas le fer des armes, même s'il s'agissait sans doute plus d'or que de cuivre. Sa renommée n'était pas particulièrement grande en comparaison de celle des autres familles, mais il faisait son possible pour y remédier.

Sa demeure se composait de deux parties : un bâtiment semblant âgé de plusieurs dizaines d'années qui tenait pour l'essentiel, contenant sans doute chambres, salons, bureaux, et autres pièces de vie courante ; et, par devant, s'ouvrant sur des jardins de faible taille, mais très bien entretenus, une extension qui paraissait beaucoup plus récente. Peut-être même n'avait-elle été finie que quelques semaines plus tôt. Elle comprenait essentiellement une grande salle de bal, ainsi que les arrières-salles nécessaires à son service.

Ce jour-là, justement, l'une de ces fêtes était en préparation, qui durerait toute la soirée, et sans doute une bonne partie de la nuit. Les invités n'étaient pas encore présents, mais les serviteurs s'affairaient à placer les décorations et à préparer l'immense buffet. Plusieurs chariots étaient stationnés dans la cour, attendant que l'on finisse de les décharger, et les allées et venues étaient nombreuses. Une personne d'apparence humaine ou elfe, habillée comme les autres domestiques – c'est-à-dire, portant un loup argentée, une petite coiffe blanche et une tenue brune et blanche qui semblait destinée à mettre en valeur les formes tant des hommes que des femmes – pourrait sans doute se glisser sans difficulté dans cette agitation et pénétrer dans le manoir sans que quiconque ne le remarque…

[Echo]

Cela n'avait pas été facile de passer la moitié de la route le nez en l'air, à la recherche du maudit corbeau qui était censé lui montrer le chemin, et cela n'avait pas non plus été de tout repos d'arpenter les rues avec un vêtement qui entravait ses mouvements -une robe, en l'occurrence- mais elle était finalement parvenue à sa destination sans encombre. A quelques mètres du domaine Cuivrechair, Chance s'immobilisa, retira sa cape et la fourra dans le petit sac qui pendant à sa ceinture, sous sa robe. Elle avait réussi à retarder ce moment fatidique mais elle n'avait maintenant plus le choix, aussi en sortit-elle également le loup argenté qu'elle s'empressa de nouer derrière sa tête.

Bien, il ne lui restait plus qu'à se fondre dans le décor, ce qui ne serait pas vraiment difficile au vu de toute l'agitation qui régnait dans le domaine. De tous les côtés s'affairaient les domestiques qui ne prêtèrent pas attention à la tieffeline maintenant aussi humaine que possible. Il fallait qu'elle trouve rapidement de quoi s'occuper, afin de ne pas trop attirer l'attention. Peut-être que si elle se contentait de balader de la décoration un peu partout dans la maison personne ne remarquerait rien, et elle en profiterait pour repérer les lieux. Pour l'heure, elle cherchait du regard la personne mandatée pour coordonner les domestiques. Une personne à l'air revêche donc, certainement en train de menacer les pauvres servants avec un rouleau à pâtisserie ou quelque chose du genre. C'était plus ou moins l'idée qu'elle s'en faisait en tout cas.

[Elzen]

Pas l'ombre d'un rouleau à patisserie à l'horizon – ils étaient, sans doute, trop occupés en cuisine à accomplir leur véritable vocation pour se préoccuper de hanter les domestiques en train de décorer – mais, si personne ne sembla prêter attention à la présence de la tieffeline, celle-ci eut tout loisir de remarquer, légèrement à l'écart et semblant surveiller du coin de l'œil le manège depuis un coin ombragé du jardin, un homme ressemblant à un nobliau accompagné de deux comparses, qui ne portaient pas la tenue des serviteurs : il s'agissait, sans doute, du maître des lieux ou d'un membre de sa famille, accompagné de ses hommes de mains, et qui présidait les préparatifs pour sa fête… ou plutôt, qui passait le temps en regardant ses domestiques trimer, dérangé de temps à autres dans sa rêverie par l'un des porteurs de loups venu, sans doute, lui demander des précisions sur ce qu'il attendait.

[Echo]

Chance imita les autres domestiques qui entrèrent dans la demeure à grandes enjambées. Très vite, quelque chose attira son attention : une forme éthérée qui planait à quelques centimètres du sol dans le hall. Un fantôme, son fantôme. Alors que celui-ci avança vers elle, sourire aux lèvres, la tieffeline continua son petit manège comme si de rien n'était, notant même au passage tous les accès qui seraient susceptibles de lui servir.

- Ah ! Vous êtes mignonne dans cette tenue, j'ai bien failli ne pas vous reconnaître !

Étrangement, c'était toujours dans les moments où elle ne pouvait pas lui répondre qu'il faisait ce genre de réflexions. Il ne perdait vraiment rien pour attendre.

- J'avais peur que vous commenciez sans moi, mais je vois que j'arrive à point nommé. Bien, que faisons-nous alors ? Ah oui, vous ne pouvez pas répondre. Je vais aller fouiner un peu partout, et surtout à l'étage : l'objet que vous recherchez doit très certainement se trouver là-haut. J'imagine que ça va encore être à moi de vous mâcher le travail. Il soupira mais son regard pétillait de malice. Bien, ce n'est pas grave, ça ne fera qu'alourdir un peu plus votre dette. Vous devrez me rendre un service un jour Chance !

Ben voyons. Le seul service qu'elle était prête à lui rendre, c'était de le ressusciter pour le tuer une deuxième fois, juste après lui avoir fait mangé cette plume ridicule sur son chapeau. Augustin disparut et Chance resta un instant les bras ballants avant de se faire bousculer par un domestique affolé. Très vite, elle reprit ses esprit et continua d'imiter les autres.

[Elzen]

N'étant remarqué par personne et pas franchement retenu par les portes et autres joyeusetés de ce genre, Augustin put sans encombre pénétrer dans le bâtiment. Passée l'extension et son agitation s'ouvraient des couloirs calmes. Trois étages, en comptant le rez-de-chaussée, pour autant qu'il put en juger. Cela représentait, sans doute, un nombre conséquent de pièces à fouiller, aussi son passage serait-il certainement utile à la tieffeline. Pour l'heure, il n'y avait personne dans son champ de vision. Rien qui semblait indiquer une direction plutôt qu'une autre.

Chance, quant à elle, remarqua bien vite deux choses. La première était que les préparatifs étaient sans doute en retard par rapport à l'horaire prévu, et que cela pouvait être dû à un effectif moins important qu'il ne l'aurait fallu. La seconde était que, malgré cela, ou peut-être en partie en conséquence, nul ne semblait vraiment faire attention à ce que faisait les autres ; et qu'elle aurait pu, en prenant un air suffisamment affairé, aller à sa guise sans effectuer la moindre tâche, et sans que personne ne le remarque. Hélas ! Avant qu'elle ne puisse mettre cette idée en application, quelqu'un la remarqua.

« Toi, là-bas ! Tu peux aller voir si le dernier chargement de liqueurs est arrivé ? On en a besoin pour finir le dessert ! »

Celui qui venait de parler était sans conteste un employé des cuisines – il n'avait d'ailleurs pas la tenue des autres domestiques, mais arborait un tablier plus adapté à cette activité. Et, bien qu'elle puisse éventuellement tenter de faire semblant de n'avoir rien entendu, il était assez manifeste que c'était bien spécifiquement à elle qu'il s'était adressé.

[Echo]

Le corps éthéré du fantôme lui permit de traverser portes, murs et plafonds, ce qui lui fit gagner un temps considérable dans la recherche de l'artefact. Enfin, si toutefois il ne s'arrêtait pas constamment pour observer et commenter des détails de la décoration du domaine.

La tieffeline, quant à elle, s'était inclinée brièvement vers l'employé de cuisine et avait rebroussé chemin à la hâte en espérant ne pas se tromper de direction. Où diable était censé se trouver ce fameux chargement de liqueur ? Elle n'en savait rien, s'en moquait éperdument et n'avait pas vraiment l'intention de partir à sa recherche.

Elle n'eut aucun mal à calquer son pas sur celui des autres domestiques tout en prenant de grands airs tragiques, à croire qu'ils jouaient tous leurs vie dans la préparation de cette réception. Chance suivit les autres jusqu'au lieu où se tiendrait ladite réception, plus par curiosité qu'autre chose. Les choses sérieuses commenceraient véritablement lorsque les invités seraient là. Pour l'instant, elle pouvait se permettre de flâner. Peut-être même de s'entraîner un peu du côté du buffet. Ils étaient tous tellement concentrés sur leur tâche qu'ils ne remarqueraient probablement rien...

[Elzen]

Des commentaires, Augustin en avait probablement à faire : les pièces étaient arrangées avec un certain goût, mais qui n'était pas universel. Pour autant qu'il pouvait en juger, le premier étage se composait essentiellement de chambres à coucher, dont peu semblaient réellement occupées. Sans doute, les autres avaient-elles été préparées spécifiquement pour ceux des invités qui souhaiteraient dormir sur place. Hélas, si son corps éthéré lui permettait de passer facilement d'une pièce à l'autre, il ne l'aidait pas à fouiller les tiroirs…

Chance, de son côté, n'avait pas manqué de réaliser qu'effectivement, ses véritables activités passaient totalement inaperçu au milieu de l'agitation. Sans doute pouvait-elle laisser courir ses doigts à sa guise : après tout, si quelque chose disparaissait, qui pourrait juré qu'il n'avait pas simplement pas encore été amené ? Le buffet était, en effet, une cible de choix : il était bien garni en nourriture comme en boisson, et le couvert qui s'y trouvait disposé semblaient d'une assez grande valeur. Ça et là étaient disposés quelques objets décoratifs qui se revendraient sans doute assez bien eux aussi. Il lui fallait se hâter, cependant : les lieux prenaient forme à vue d'œil, et il ne s'écoulerait sans doute plus guère de temps avant que la pièce soit fin prête pour accueillir les invités.

[Echo]

Voler de la vaisselle – même de grande valeur - au nez et à la barbe des autres domestiques, voilà qui était risqué. Un risque que Chance n'était pas prête à prendre car elle savait qu'elle trouverait probablement bien d'autres objets de valeur à l'étage, comme des bijoux par exemple.

Cela dit, le risque était un peu le charme du métier... et un ou deux de ces petits fours ne manqueraient à personne ; aussi nombreux soient-ils, les invités ne pourraient tout de même pas avaler autant de nourriture en une seule soirée, si ? Et puis zut, ce n'était pas tous les jours qu'elle cambriolait une demeure comme celle-ci, il fallait en profiter un peu. Avec la dextérité de ceux qui maîtrisent l'art de chaparder toutes sortes de choses, Chance s'empara d'un petit four et le cacha... dans sa bouche. Elle tenta de mâcher aussi discrètement que possible alors que ses joues commençaient à rosir légèrement, pas de honte mais plutôt de plaisir. Le petit four était délicieux, bien sûr, mais peut-être que c'était davantage l'idée du méfait accompli qui lui donnait cette saveur si particulière.

[Elzen]

Comme la tieffeline l'avait supposé, l'agitation locale était telle que personne ne remarqua son larcin ; et elle parvint à dissimuler plutôt efficacement ses mastications. Ce ne fut en revanche peut-être pas le cas du rosissement : dans son champ de vision se tenait un domestique, plutôt jeune et sans doute assez beau garçon, pour peu que l'on puisse en juger sous son masque, et qui sembla rougir quelque peu en réponse. Avait-il cru qu'il était la cause de la coloration des joues de la voleuse ? Quoiqu'il en soit, il disparut rapidement dans l'incessant ballet des préparatifs.

Chance, quant à elle, eut peut-être le temps de s'emparer d'un autre petit four, mais guère plus : assez rapidement, les très rares serviteurs qui ne portaient point encore le loup argenté s'empressèrent de le nouer ; et la plus grande partie des occupants de la pièce s'en furent soit vers les arrières-salles, soit vers l'extérieur. Un signe qui ne trompait pas : les invités commençaient à arriver, et l'on s'efforçait de les accueillir comme il se devait.

[Echo]

[JUSTIFIER]Pourquoi la regardait-il ainsi, celui-là ? L'avait-il surpris en train d'avaler goulûment ce petit four ? Elle fronça les sourcils un instant et essuya sa bouche d'un revers de main, pensant avoir été trahie par quelques miettes sur le coin de ses lèvres. Le jeune homme disparut à la hâte avec presque l'ensemble des autres domestiques et la tieffeline se retrouva donc seule à côté du buffet. C'était très probablement un signe ça... Les invités allaient faire leur entrée et elle réalisa soudain qu'elle était plantée comme une idiote au milieu de la grande salle de réception. Chance, qui à cet instant devait passer pour une servante passablement étourdie, s'empressa de rejoindre les autres vers les arrières salles. Elle resta cependant sur le pas de la porte, jetant quelques regards curieux en espérant apercevoir les invités qui ne tardèrent pas à arriver.[/JUSTIFIER]

[Elzen]

Chance sentit quelques regards posés sur elle lors de sa retraite précipitée, mais aucune remarque désobligeante ne s'éleva. Ça aurait sans doute été le cas si elle était restée sur place quelques instants de plus, cependant, car les premiers invités survinrent très peu de temps après son départ. C'étaient, semblait-il, des membres de la petite noblesse de Melandis, persuadés de leur haute importance mais qui étaient très certainement les seuls à l'être. Le maître des lieux, ou supposé tel, que la tieffeline avait aperçu dehors en arrivant, ouvrait la marche, et leur première destination fut, sans surprise, le buffet et ses alcools. La soirée promettait d'être palpitante…

Aux côtés de la voleuse, une autre domestique observait la scène. Humaine, ou peut-être demi-elfe, elle était semblait avoir à peu près le même âge que Chance, et malgré le masque, son regard exprimait assez bien la curiosité mêlée de dédain envers les nouveaux arrivants. Lorsqu'elle avisa que sa voisine avait tourné les yeux vers elle, elle sourit d'un air plein de malice.

« Dis, t'as failli restée planté là ! C'est Pierrot qui t'a fait cet effet-là ? »

Chance comprit qu'elle parlait sans doute du garçon qu'elle avait aperçu quelques instants plus tôt, lors de son larcin.

[Echo]

L'expression de curiosité teintée de mépris de la domestique à ses côtés reflétait assez bien ce qu'elle ressentait elle-même sans pour autant le laisser voir. Il n'y avait pas la moindre trace de mépris sur le visage de Chance, à demi masqué par le loup argenté, seulement une fascination toute feinte ainsi qu'une grande excitation. Jusqu'à maintenant, elle n'avait pas vraiment eu l'occasion de s'inviter dans une soirée de ce genre, pas sans attirer l'attention, et encore moins sans finir jetée dans le caniveau par la garde.

Elle fronça légèrement les sourcils à la mention de Pierrot, sans savoir de quoi l'autre servante lui parlait. Puis elle comprit et faillit répliquer très honnêtement que le jeune servant lui faisait le même effet qu'un coquillage de mer, c'est à dire aucun. Mais elle se ravisa. Jouer la carte de la petite domestique amourachée lui donnait une bonne excuse pour se montrer tête en l'air à l'avenir, que ce soit volontaire ou non. Alors elle baissa les yeux sur ses doigts qu'elle se mit à triturer nerveusement tout en bredouillant un :

- Que... qui ? Non ! Non... enfin non je...

Et elle se demanda un instant si elle était crédible une seconde dans le rôle de la jeune fille timide. La seule chose qu'elle n'arrivait pas à déclencher sur commande, c'était le rosissement de ses joues. Mais bon, ce n'était pas non plus la peine d'en faire trop...

[Elzen]

« Hihi ! Remarque, t'as eu l'air de l'impressionner aussi. »

La domestique regarda autour d'elle, puis s'approcha légèrement et baissa la voix.

« Il est de service à la réserve. Ça veut dire qu'il sera tout seul dans une salle à l'écart, et vu tout ce qu'on a déjà sorti, il risque de ne pas recevoir beaucoup de visites avant un moment. »

Elle accompagna le dernier mot d'un clin d'œil, avant de reporter son attention sur la pièce. Pour l'instant, seule les nobliaux en train de prendre leurs aises n'étaient qu'une demi-douzaine, et les quelques domestiques qui les avaient accompagnés depuis l'extérieur suffisaient amplement à leur service ; mais bientôt, sans doute, ils se feraient plus nombreux, et la horde d'individus masqués dissimulés dans les arrières-salles ressortirait sans doute. Chance avait, sans doute, le choix entre rester ici pour être du nombre, ou tenter de s'éclipser avant que la soirée de commence véritablement.

[Echo]

Chance préférait ne pas savoir ce qu'impliquait d'être seule dans une réserve avec le dénommé Pierrot. Non, elle ne voulait pas savoir, et pourtant son esprit commença à faire le tour de tous les scénarios possibles entre un homme et une femme seuls dans une réserve et elle ne put réprimer un frisson d'effroi. Elle avait donc le choix entre attendre qu'on ait besoin d'elle pour servir en salle ou se retrouver seul à seul avec l'humain ? Quelle alternative réjouissante...

- Peut-être... peut-être que j'irai faire un tour à la réserve alors.

Oui, mieux valait dire cela plutôt que « Peut-être que j'irai voir ce que je peux cambrioler à l'étage. ». Ce Pierrot était décidément une excuse toute trouvée pour justifier absolument tout et n'importe quoi. La tieffeline chercha un instant son reflet dans l'argenterie qui trônait sur la table et s'assura qu'elle avait toujours une apparence humaine. Elle en profita même pour faire mine d'arranger ses cheveux. Voilà, il n'y avait plus qu'à attendre d'être appelée en salle, elle aurait tout le loisir de s'éclipser ensuite dès que le rôle de servante commencerait à l'ennuyer.

[Elzen]

Les invités arrivaient au compte goutte, et les domestiques présent dans la salle suffisaient pour l'instant à répondre à leurs besoins – qui consistaient essentiellement à se faire servir en boissons. Au bout de quelques instants, jugeant la fréquentation suffisante, la domestique qui se trouvait à côté de Chance, après avoir gratifié celle-ci d'un sourire complice, se saisit d'un plateau et commença à faire le tour de la pièce, laissant la tieffeline seule. Celle-ci pouvait choisir de l'imiter, ou bien profiter que personne ne semblait se trouver aux alentours pour explorer un peu plus les lieux.

[Echo]

Chance ne tarda pas à imiter sa comparse et se saisit d'un plateau avant de faire son entrée en salle. Elle arbora un sourire poli mais complétement figé lorsqu'elle s'approcha des invités, comme si elle s'attendait à recevoir un coup sur le crane d'un instant à l'autre. Mais rien. C'était assez déconcertant d'être au milieu de tant nobles sans qu'ils ne se mettent à crier au loup, ou « À la tieffeline ! », en l'occurrence. A vrai dire, ces derniers ne semblaient même pas remarquer sa présence, lui accordant à peine un regard alors qu'elle naviguait entre eux, son plateau à la main. C'était presque vexant.

Sans en avoir l'air, elle tendit un peu l'oreille alors qu'elle passait près d'eux, curieuse de savoir de quoi on parlait dans ce genre de soirée mondaine et parfaitement ennuyeuse.

[Elzen]

Dans l'immédiat, les conversations n'avaient rien de franchement palpitant. Essentiellement des prises de nouvelles, et quelques commentaires sur les échos arrivant de la guerre – bien évidemment, rien qui ne semble concerner un certain tieffelin.
Chance ne sembla effectivement être remarquée que de deux nobles qui lui prirent chacun une coupe d'alcool sans grande politesse ; pour le reste, si l'on exceptait quelques regards sur ses formes, appuyés mais heureusement peu instants, elle semblait presque invisible. Les personnes actuellement présentes n'avaient manifestement aucune espèce de considération pour les domestiques qui les servaient.
Si peu, en fait, qu'il serait sans doute très facile à une voleuse aussi habile qu'elle de faire les poches de certains d'entre eux, si cela la tentait.

[Echo]

Chance avisa les coupes d'alcool sur son plateau et se demanda comment tournerait la soirée si elle y ajoutait quelques gouttes de drogue. Est-ce que cela rendrait les invités plus polis ? Ou plus intéressants ? Rien n'était moins sûr mais il fallait avouer que l'idée était tentante. Elle se surprit parfois à tendre davantage l'oreille lorsque certains faisaient mention de la guerre - pour une raison connue d'elle seule - mais dans l'ensemble, rien de ce qu'ils avaient à dire n'avait vraiment d'intérêt pour elle. Finalement, elle se serait peut-être bien plus amusée dans la réserve.

- Un peu snobs, non ? souffla-elle à la domestique de tout à l'heure lorsqu'elle passa près d'elle.

[Elzen]

« C'est plus intéressant quand ils ont un peu trop bu. »

lui souffla la domestique en réponse, avant de se hâter dans la direction d'une dame lui ayant fait signe.

Entre temps, la salle s'était remplie bien davantage : il devait maintenant y avoir une cinquantaine de nobles ; et, dans un murmure d'approbation de la part de ceux-ci, un groupe de domestique était sorti des arrières-salles pour venir prendre position à l'orchestre. Bientôt, les premières notes d'une symphonie commençaient à résonner. Les conversations se firent plus discrètes, et tous se regroupèrent instinctivement sur les bords de la pièce, pour dégager une piste de danse au centre.

Personne, cependant, ne semblait se décider à occuper cette piste : la tradition voulait de laisser le premier pas de danse au maître des lieux ; or, celui-ci était encore en train d'attendre, près du buffet, que les nouveaux arrivants ne viennent le saluer.

[Echo]

Alors elle espérait que ces nobles aient une bonne descente, sans quoi elle risquait de manquer le spectacle.

Lorsque la musique retentit, Chance s'écarta de la piste et se félicita d'être du côté des domestiques durant cette soirée : une démonstration de ses talents de danseuse aurait été le pire des scénarios possibles.

De son côté, Augustin avait fait le tour du premier étage et n'avait pas découvert quoi que ce soit susceptible d'intéresser la tieffeline ; aussi se dirigea t-il à présent au deuxième étage de la demeure.

[Elzen]

Ledit second étage semblait plus intéressant : les premières pièces que le fantôme y croisèrent furent un bureau et une bibliothèque. Bien sûr, la plupart des objets intéressants devaient être enfermés dans les multiples tiroirs et autres meubles clos, auquel il n'avait pas accès. Même les livres de la bibliothèque étaient pour la plupart enfermés – derrière des vitrines, cependant, ce qui permit au moins au fantôme d'en consulter les titres.

Dans un coin de la bibliothèque, presque caché entre deux meubles, Augustin remarqua cependant un petit escalier qui, curieusement, semblait monter. Cependant, l'on était assez proche du toit : si troisième étage il y avait, il était sans doute de dimension réduite, et assez charpenté. Peut-être une sorte de grenier ?


Plus bas, Chance n'eût, heureusement pour elle, pas à faire montre de ses talents de danseuse. Pour l'heure, les domestiques étaient encore les seuls à traverser la piste, pour aller d'un groupe d'invités à l'autre et proposer leurs plateaux garnis – depuis que nombre d'entre eux s'étaient éloignés du buffet, les plateaux ne contenaient plus seulement des verres, mais également des petits fours et autres aliments plus solides.

Comme elle arrivait à proximité du maître des lieux – les serviteurs ne s'attardaient jamais bien longtemps auprès du même groupe une fois qu'ils avaient été servis, la voleuse remarqua qu'il parlait moins fort que la plupart des autres nobles. On aurait dit qu'il traitait avec son interlocuteur du moment de sujets qu'il préférait ne pas voir s'ébruiter…

[Echo]

A défaut de pouvoir fouiller dans tous les tiroirs du deuxième étage, Augustin monta jusque dans le grenier pour voir ce qu'il s'y cachait.

De son côté, Chance profita du fait que personne ne daigne accorder trop d'attention aux domestiques pour se rapprocher du maître des lieux afin d'espionner sa conversation ; quoi que ce fût, cela avait l'air drôlement important – et drôlement confidentiel d'ailleurs. Bien sûr, elle n'était pas payée pour rassembler des informations sensibles sur la famille Cuivrechaire, mais sa curiosité maladive pourrait la pousser à faire un geste commercial.

[Elzen]

Le costume de servante ne la rendait cependant pas si invisible que cela. Sitôt qu'elle s'approcha, la conversation s'interrompit, et le maître des lieux se tourna vers elle, un sourire presque aimable dissimulant sans doute une légère gêne de n'être plus hors de portée d'oreilles.

« Tiens, voilà un regard qui ne me dit rien… vous n'êtes pas de mon service habituel, si ? »

En même temps qu'il posait la question d'un air détaché, il posa sa coupe vide sur le plateau et s'en saisit d'une nouvelle, pleine, celle-la. Chance avait tout intérêt à lui répondre en évitant de provoquer un incident diplomatique, même s'il était évident que la question était stupide : plus de la moitié des domestiques présents ne faisaient pas partie dudit service habituel.

…intérieurement, la tieffeline était tout de même parvenue à reconstituer les derniers mots entendus : l'interlocuteur demandait au maître des lieux à quel endroit quelque chose était caché.



De son côté, Augustin découvrit que l'étage ressemblait à une sorte de dortoir. Il n'y avait la place de se tenir debout presque que pour atteindre les différents lits, mais ceux-ci semblaient assez confortables pour palier au manque de place. L'on ne devait, de toute façon, pas se rendre ici souvent pour autre chose que pour dormir : lorsqu'ils étaient éveillés, les quelques serviteurs qui logeaient ici, car il semblait que l'endroit était conçu pour eux, avaient sans doute d'autres points de rendez-vous.

[Echo]

[JUSTIFIER]Chance offrit au maître des lieux son plus beau sourire. L'effet était d'habitude gâché par ses yeux de serpents mais ce n'était pas le cas ce soir. Non, ce soir elle était une humaine tout à fait ordinaire, du moins aux yeux du reste du monde.

- Non, en effet monsieur, répondit-elle calmement. Puis-je faire autre chose pour vous ?

C'était assez déconcertant de voir que quelques détails en moins pouvaient changer radicalement la façon dont on la traitait. Finalement, ce n'était peut-être pas tant son aura que son aspect qui dérangeait les gens ; Elzen en avait été le parfait exemple. Contrairement à elle, il n'était pas handicapé par une apparence de succube venue tout droit des enfers et avait su masquer astucieusement son ascendance démoniaque. Si elle avait longtemps cru que rien ne pourrait jamais masquer ou même atténuer le malaise que ressentaient les autres en sa présence, elle n'en était plus si sûre. Le tout était d'avoir un mage sous le coude pour réitérer l'expérience...[/JUSTIFIER]

[Elzen]

Pour tout dire, l'aura chaotique de la tieffeline était loin d'avoir disparue ; simplement, la plupart des gens, sans les indices visuels que représentaient des yeux jaunes luisants ou une paire de cornes, étaient tout bonnement incapables de comprendre que cette impression déstabilisante qu'ils ressentaient était due à la personne en face d'eux ; ni souvent même qu'ils étaient soumis à un tel effet extérieur. Et les gens dans cette pièce, domestiques ou nobles, avaient un point commun : éviter de dire que quelque chose n'allaient pas s'ils étaient incapables d'en accuser qui que ce soit. Telle était l'explication du phénomène ; mais ce qui primait était sans doute l'impression qu'en ressentait Chance.

Quoiqu'il en soit, le maître des lieux jaugea la jeune femme d'un regard qui fit craindre à celle-ci une réponse à sa question qui n'aurait guère respecté les convenances. Mais, peut-être grâce à la présence du deuxième homme, Cuivrechaire se contenta d'une remarque polie :

« Eh bien, si vous cherchez une place dans un futur proche, il est possible que mon intendant en ait une pour vous. Mais pour l'heure, nous n'avons besoin de rien, vous pouvez disposer. »

La dernière phrase, quant à elle, sous-entendait clairement qu'il espérait que Chance s'éloigne vite hors de portée d'oreille, pour reprendre sa conversation privée.

[Echo]

Visiblement, il n'avait pas l'intention de reprendre la conversation là où elle s'était arrêtée. Soit, écouter les sombres secrets de Cuivrechaire ne faisait pas vraiment parti de son contrat, aussi s'inclina t-elle respectueusement avant de repartir vers les cuisines afin de se débarrasser des coupes vides sur son plateau.

Mais plutôt que de revenir dans la grande salle, Chance préféra s'aventurer dans l'autre aile du domaine, espérant que la fête monopoliserait l'attention de tous les domestiques et qu'elle ne ferait aucune mauvaise rencontre - même si elle avait déjà une excuse toute prête si quelqu'un la voyait errer ainsi dans les couloirs.

Où diable était passé Augustin ? Il devait très certainement s'extasier devant d'horribles tableaux d'artistes méconnus. Ou alors il l'espionnait discrètement pour voir comment elle s'en tirait. Comme s'il avait lu dans ses pensées, il surgit devant elle, tombant littéralement du plafond, et fit sursauter la tieffeline.

- Bon sang, ne refaites jamais ça, chuchota t-elle. Alors, vous avez trouvé quelque chose ?
- Des chambres, des chambres, beaucoup trop de chambres. Oh, il y a aussi une magnifique bibliothèque en haut !
- Je voulais parler de l'objet que je cherche. Pas de signe d'Ernest ?
- Qui est Ernest ?
- Le corbeau.
- Le corbeau s'appelle... Ernest ?
- Oui, c'est vrai, ce n'est pas vraiment un nom de corbeau. Des suggestions ?
- Pourquoi pas Tirlititi ?
- Bon, j'imagine que je vais devoir le faire entrer, soupira la tieffeline. En espérant qu'il saura se tenir.

Contrairement à Augustin, lui serait bien visible et bien audible, et les corbeaux n'étaient pas vraiment connus pour leur discrétion. Enfin, Reuel n'aurait pas envoyé cet oiseau avec elle s'il savait que cela risquait de la compromettre, si ? Elle devrait lui faire confiance. Pour l'heure, elle préférait attendre que les invités se soient assez enivrés pour entamer les choses sérieuses, mais plutôt que de continuer à jouer les servantes polies dans la grande salle, elle préféra continuer son exploration.

[Elzen]

De Cuivrechaire avait été assez pressé de reprendre la conversation, au point que Chance, dotée, peut-être, d'une meilleure oreille que ce qu'il pensait, avait pu entendre quelques mots de la conversation tout en s'éloignant. Guère plus que quelques mots, cependant, car s'arrêter aussi près d'eux aurait éveillé l'attention ; mais il lui semblait qu'il avait été question du tiroir d'un bureau. C'était déjà une indication…

En tout cas, personne n'avait prêté attention à sa conversation avec Augustin, et pour cause : cette partie du manoir semblait totalement déserte. Comme la voleuse s'y était attendue, tous les invités étaient groupés dans la salle de balle ; et les domestiques allaient et venaient entre celle-ci et les arrières-salles. Toutes les autres pièces semblaient pour l'instant désertes, et prête à être explorées…

En jetant un œil par une fenêtre, la tieffeline put avoir sa réponse concernant le corbeau : celui-ci était simplement posé sur une branche d'arbre, à l'extérieur, semblant attendre tranquillement qu'on lui ouvre une fenêtre.

[Echo]

Le nez presque collé contre la vitre, Chance ne pouvait s'empêcher de trouver le volatile particulièrement effrayant ; elle distinguait à peine ses sombres plumes dans la noirceur de la nuit, seuls l'éclat de ses yeux perçaient l'obscurité. Mais sa peur fut rapidement remplacée par... de la compassion. Il avait certainement la partie la moins agréable de cette opération : attendre là dehors que quelqu'un veuille bien lui ouvrir. Cela devait être particulièrement ennuyeux.

- Désolé Erny mais tu vas devoir encore attendre, chuchota t-elle tout en sachant que le corbeau ne l'entendait pas - et qu'il ne la comprendrait peut-être même pas si c'était le cas. Et que même s'il l'entendait et la comprenait, il ne comprendrait sûrement pas pourquoi elle l'appelle Erny.

Chance se mit donc à explorer les lieux et en profita pour subtiliser de la décoration par ci, par là, notamment les objets les plus brillants. Le sac sans fond de Reuel s'avéra d'ailleurs particulièrement pratique et lui aurait drôlement faciliter la vie si elle en avait eu un plus tôt. Il n'était pas impossible qu'elle le garde une fois cette histoire terminée...

[Elzen]

Dans l'immédiat, tout se déroulait plutôt bien : personne ne semblait se trouver dans cette aile du bâtiment, et aucune mauvaise surprise ne vint empêcher ses chapardages. La question était de savoir combien de temps cela durerait…

D'après la première exploration d'Augustin, les endroits les plus intéressants à fouiller étaient certainement les chambres du premier étage – du moins, les quelques unes qui lui avaient semblé réellement occuper ; il pouvait sans doute éviter à la tieffeline une visite dans les chambres vides n'ayant été préparées que pour accueillir des invités –, et le bureau, la bibliothèque, et peut-être aussi les autres pièces du second qu'il n'avait pas encore examiné.
C'était dans ces endroits que les objets les plus intéressant étaient sans doute entreposés… à Chance de choisir vers lequel elle se dirigeait en premier lieux, à moins qu'elle n'ait une autre idée en tête.

[Echo]

[JUSTIFIER]La tieffeline préféra éviter de s'attarder au rez-de-chausser, de peur de croiser l'un ou l'une de ses " collègues ", et décida de monter directement à l'étage. Elle doutait qu'il y ait quoi que ce soit à voler dans les chambres d'amis, à part quelques objets de décoration, aussi se dirigea t-elle directement vers la chambre du maître des lieux. Et peut-être irait-elle faire un tour du côté de cette fameuse bibliothèque dont Augustin lui rabâchait sans cesse les oreilles même si elle n'y trouverait sans doute que des livres poussiéreux. Poussiéreux et incompréhensibles. [/JUSTIFIER]