[Everaska] Quête: Racines

[Kasumi]

Ils avaient donc rendez-vous dès le matin et leur grand-mère serait là même quand ils se rendraient au bureau des douanes… La perspective d’avoir un chaperon n’était pas tout à fait réjouissante mais il fallait reconnaître que la présence d’une personnalité reconnue en ville pourrait éventuellement faciliter et raccourcir les formalités, leur laissant un peu plus de temps libre ensuite pour visiter le marché des portes, le plus exotique et ouvert de la cité. Le demi-elfe se doutait que ce n’était pas tout à fait le moment pour aborder cette question et se contenta de répondre à sa grand-mère à propos de l’entrevue :

- J’imagine que ce n’est pas une requête très habituelle mais nous tenterons de faire valoir nos arguments : le rôle des gardes ailés a toujours été de défendre les citoyens contre les ennemis extérieurs. Et c’est bien ce dont il s’agit : il s’agit de défendre un haut fonctionnaire contre les asabis après tout. Mais je vous laisserai parler : les arguments d’un demi-elfe risquent de ne pas faire grand effet auprès du commandant… Et je ne suis ni une habile négociatrice reconnue comme vous ni un maître des mots comme Tilmandil.

Après une hésitation et un sourire doux à Sylvia, il ajouta :

- Pouvons-nous partir à l'aube demain ? J'aurais aimé montrer le marché étranger à Sylvia. Enfin, si ça te dit, bien sûr...

[Voyageuse]

Sylvia hocha la tête, un brin de curiosité dans les yeux. Mais ce qui dominait, indubitablement, c'était de l'anxiété, et elle paraissait d'humeur plutôt morne à l'idée de la séparation à venir.
- Vous avez largement le temps d'aller au marché avant toutes ces démarches, effectivement. J'imagine que vous préférez y aller seuls, du reste. J'ai quelques courses à faire, également. Il suffit que nous nous donnions deux heures, chacun de notre côté, avant de se retrouver aux douanes. Enfin, ma présence n'est pas non plus indispensable là-bas, peut-être que tu préfères qu'on se rejoigne juste à la commanderie ? Riniel acceptera sûrement de raccompagner ta jeune amie ici, je sais qu'elle compte elle aussi aller dans le quartier rejoindre son... soupirant.
Tilmandil sourit de toutes ses dents.
- Oh, il faudrait vraiment qu'elle te le présente, son Romir...
- Voyons, tu sais bien à quel point elle est discrète et prudente dans ses relations amoureuses ! Il lui a fallu cinq ans pour l'amener à la maison ! Et je ne pense pas qu'elle le considère vraiment comme une relation durable, encore...

[Kasumi]

Le rôdeur échangea un sourire complice avec son demi-frère avant de répondre à sa grand-mère d’un ton décidé :

- Faisons ainsi ! Nous nous rejoindrons aux douanes après le marché : je ne suis pas très au fait de ces formalités et ça nous donnera l’occasion de passer un peu de temps ensemble. Quant à Riniel, eh bien… J’ai juste un peu peur de ce qu’elle pourrait raconter à mon sujet à dire vrai. Ou alors devrais-je me méfier de ce que Sylvia pourrait lui raconter en fait ! Mais il faut juste que je me prépare à cette idée j’imagine ! Riniel une personne discrète après tout et je crains que l’entrevue avec les gardes ailés ne s’éternise guère quand ils sauront pourquoi nous l’avons sollicitée.

Le rôdeur se tourna vers sa compagne et ajouta d’un ton qui se voulait rassurant :

- Riniel est ma tante. Je suis certain qu’elle va tout de suite t’adorer. Et ce ne sera de toute façon que pour une heure ou deux.

La nuit était déjà bien avancée et s’ils voulaient vraiment se rendre au marché à son ouverture, il ne faudrait plus guère tarder à aller prendre quelques heures de repos…

[Voyageuse]

Leur fatigue devait se lire sur leurs visages, car les deux elfes ne cherchèrent pas à prolonger davantage la discussion. La grand-mère rappela à Kasumi que le petit déjeuner serait servi dans le petit salon habituel et qu'on les réveillerait à temps pour qu'ils viennent à bout de leur programme matinal. Avec la petite clochette qu'il connaissait bien, celle qu'on avait toujours utilisé pour appeler toute la maisonnée à table.

Tilmandil les conduisit dans la chambre verte, une vaste pièce aux couleur de la prairie, meublée confortablement et avec goût. Aux murs, des tableaux égayaient la pièce de leurs couleurs vives : bouquets de fleurs des champs ou paysages bucoliques, Tilmandil leur expliqua qu'ils avaient été peints par Riniel, comme toutes les oeuvres de la maison. Mais pour l'heure, c'était plutôt le lit, immense moelleux, qui attirait leurs regards.

[Kasumi]

Après le départ de Tilmandil qui referma doucement la porte derrière lui, le rôdeur se tourna timidement vers Sylvia, une légère rougeur aux joues. Il parla à voix basse et d’un ton doux :

- Tu dois être fatiguée. J’imagine que tu as hâte de te mettre au lit. Je me rends compte que ça fait beaucoup de nouveautés d’un coup… Pour moi aussi c’est un peu étrange je dois reconnaître. Pas du tout désagréable, au contraire. Mais étrange tout de même : c’était ma chambre préférée étant enfant. Et maintenant tu es là, avec moi.

Il lui dédia un nouveau sourire et glissa tendrement une main dans la sienne, un tout petit peu perdu par cette nouvelle situation peut être, le regard rêveur.

[Voyageuse]

Sylvia semblait en effet quelque peu assommée par la situation, par l'assaut de nouveautés, de nouvelles têtes. Le simple fait de se trouver dans une maison inconnue, au milieu d'une cité inconnue peuplée d'une race autre que la sienne, avait de quoi la déstabiliser.
- Elle est belle, ta chambre préférée, finit-elle par répondre en laissant son regard glisser sur les toiles accrochées au mur, sur les meubles, sur le lit. Et ton lit a l'air drôlement confortable. Bon sang, je suis moulue de fatigue... Tu sais, ça fait une éternité que je n'ai pas dormi dans un vrai lit. Peut-être bien vingt ans, en fait... je ne sais même pas si je vais réussir à m'endormir !
Elle semblait ne même pas oser faire un pas vers le lit en question.

[Kasumi]

Le demi-elfe sentait que sa compagne était encore bien plus perdue que lui et cela n’avait rien d’étonnant au fond. Il sut donc d’emblée quelle était la seule chose qu’il lui restait à faire. Alors, avec tout le naturel du monde, il la souleva dans ses bras et la mena vers le lit puis il déclara avec une grande spontanéité aux antipodes de la gravité ambiante :

- Il n’y a vraiment qu’un seul moyen de le savoir ma beauté ! Mais je dois tout de même t’avertir d’une coutume des elfes : nous retirons toujours nos bottes avant d’aller au lit. Ainsi que tout le reste de nos vêtements - d’ailleurs - maintenant que j’y pense. Et les elfes sont très regardant sur le respect des coutumes sous leur toit !

Comme pour lui montrer l’exemple, il défie les lacets de ses bottes tout en lui dédiant un clin d’œil taquin.

[Voyageuse]

Sa remarque arracha finalement un sourire amusé à la rôdeuse. Elle lui tira la langue, et le laissa lui ôter ses bottes sans la moindre résistance, s'allongeant de tout son long sur le lit.
- Je compte sur toi pour veiller au respect des traditions, en ce cas. Moi... je suis bien trop épuisée pour ça, et surtout, j'aurais bien trop peur de commettre un impair en ôtant de façon incorrecte ma tunique ! Mais je suis sûre que tu sauras parfaitement me déshabiller intégralement, je t'ai vu à l'oeuvre ces derniers jours...
Ses yeux brillaient d'amusement. Ou peut-être d'autre chose.

[Kasumi]

Comme elle pouvait s’y attendre et malgré sa propre fatigue, le rôdeur se prit aussitôt au jeu, délassant avec habileté ses bottes avant de les lui ôter délicatement. Il lui massa les pieds pendant une minute tout en déclarant d’un ton parfaitement sérieux, un peu trop pour vraiment être crédible :

- Tu as raison ! Il y a bien des codes à respecter scrupuleusement chez les elfes. Mais on pardonnera toutes les petites entorses que pourrait commettre une femme dotée d’un aussi charmant sourire que le tien. Le plus important à retenir pour l’instant est que les elfes aiment procéder en toute chose avec lenteur et grand soin.

Le demi-elfe laissa ses mains remonter le long de ses jambes en les effleurant à peine avant de s’intéresser de près à la tunique de la rôdeuse, caressant tendrement son ventre plat puis les rondeurs si sensuelles de sa poitrine tout en la dégageant progressivement de ses vêtements par des gestes doux et attentionnés. Après avoir fait passer la tunique par-dessus ses épaules et l’avoir soigneusement pliée sur une chaise, il ôta aussi la sienne avec bien plus d’empressement et revint auprès d’elle pour l’embrasser tendrement sur la bouche. La rôdeuse perçut une nouvelle lueur amusée dans son regard et probablement bien d’autres émotions quand il déclara :

- Oh que je suis distrait ! J’allais oublier la moitié !

Et ses mains se remirent aussitôt à l’œuvre avec assurance pour défaire les chausses de la jeune-femme et les faire glisser au sol avant de remonter pour s’attarder sur ses cuisses, ses hanches et son bas ventre. Kasumi ne semblait plus décidé à se relever pour ranger le vêtement. Il avait bien d’autres préoccupations plus pressantes en tête à présent. Sans doute son côté elfique avait-il cédé le pas à sa seconde moitié. Ou n'avait-il jamais cessé de s'exprimer.

[Voyageuse]

Ils s'endormirent décidément fort tard ce soir-là, lovés dans les bras l'un de l'autre, sous les couvertures chaudes et moelleuses. Leur première étreinte dans un vrai lit... Décidément, tout n'était que premières fois. et Sylvia semblait avoir complètement oublié son soi-disant épuisement.

Une petite clochette tintinnabulante les réveilla alors qu'ils venaient juste de s'endormir, ce fut du moins leur impression. Les premiers rayons du soleil, pourtant, se glissaient entre deux rideaux, illuminant l'atmosphère de dégradés de jaunes rosés. Sylvia paraissait avoir encore plus de mal que lui à émerger. La clochette tinta, une seconde fois. Il entendit des pas dans le couloir, sans doute Tilmandil qui descendait.

[Kasumi]

Le rôdeur avait du mal à ouvrir les yeux et surtout à la garder ouverts mais il sourit dès qu'il aperçut Sylvia lovée contre lui. Ecoutant les pas dans le couloir, il l'associa immédiatement et sans qu'il puisse bien dire pourquoi à l'attitude pleine d'enthousiasme de son demi-frère. Il caressa l'épaule nue de sa compagne en espérant adoucir son rude réveil et chuchota à son oreille :

- Je resterai bien au lit à paresser un peu mais notre réputation serait faite ! Il va falloir se lever mon amour. Je suis sûr qu'il y aura des boissons revigorantes si on ne rate pas le petit-déjeuner. Veux-tu que je t'amène tes vêtements ?

[Voyageuse]

- Hum... Que tu me les amènes, que tu me les enfiles après un léger massage, et que tu ajustes bien mon petit bustier, juste... là, fit-elle, mutine, en saisissant ses mains pour les placer sur sa poitrine.
Puis, avec un sourire taquin, elle se redressa.
- Je plaisante... Si je te laisse faire ça, on ne sera jamais descendus dans les temps, et je ne voudrais pas faire mauvaise impression dès le premier jour... Non, je vais m'habiller toute seule, comme une grande !
Elle déposa un léger baiser sur ses lèvres et se dirigea vers le tas de vêtement déposé sur la chaise, s'habillant... peut-être, tout de même, avec des gestes un peu trop sensuels. Juste une impression sans doute....

[Kasumi]

Kasumi était resté longuement immobile, subjugué par la beauté de sa compagne et son jeu sensuel. Alors qu'elle avait presque fini de s'habiller, il parvint à retrouver un semblant de contrôle sur son corps et à enfin quitter le lit. Il dut s'y reprendre à deux fois pour enfiler sa tunique, se mortifiant d'avoir essayé de l'enfiler à l'envers la première fois. Et pour couronner le tout, tout ce qu'il fut capable de répondre à ces ignobles provocations fut un timide mais néanmoins sincère :

- Tu es resplendissante, tu ne peux pas faire mauvaise impression.

La fatigue n'y était pas pour rien. C'est ce dont il cherchait à se convaincre en offrant tout de même son bras à la jeune femme en quittant la chambre.

[Voyageuse]

Sa compagne ne parut pas remarquer ses maladresses. Peut-être était-elle trop fatiguée, ou trop stressée, pour cela.
La table du petit déjeuner était prête, offrant un éventail de victuailles, simples mais en abondance : pain frais, oeufs, fruits, confitures et miel, accompagnés de thé ou de lait chaud. Tilmandil était déjà installé, et leur grand-mère fit son apparition juste derrière eux.
- Avez-vous bien dormi ?
- Comme un loir, répondit Tilmandil dont la mine réjouie indiquait clairement le plaisir qu'il avait eu à retrouver un vrai lit.
Sa grand-mère se tourna vers Sylvia avec un sourire amical.
- Normalement, c'est presque aussi calme que dans la nature... Enfin, ça l'est même davantage, puisqu'il n'y a pas les mille et un petits bruits qu'aiment tant les hommes et femmes des bois...
- Oui, c'était très calme, confirma Sylvia, un peu timidement, se tournant vers Kasumi pour quêter son assentiment.

[Kasumi]

Le rôdeur se sentit rougir en songeant malgré lui que la première partie de nuit n'avait pas été aussi calme que semblait le suggérer Sylvia. Mais il se contrôla en se concentrant sur le plantureux petit-déjeuner qui leur avait été préparé. Il perçut - avec retard - que la question de sa grand-mère s'adressait aussi à lui quand il croisa le regard de sa compagne. Conscient d'être observé et pas seulement de la rôdeuse il répondit - un peu précipitamment peut-être :

- Oh oui, la chambre était parfaite. Comme dans mes souvenirs ! C'est gentil de t'être souvenu que c'était ma préférée autrefois.

Le rôdeur s'empara d'un fruit après avoir adressé un sourire tranquille à sa compagne. Il cherchait maintenant distraitement des yeux la présence d'une boisson chaude et tonique qui pourrait contribuer à le faire émerger de son demi-sommeil. Par contraste et contrairement aux derniers jours, Tilmandil paraissait frais comme une rose et le demi-elfe ne put s'empêcher de lui demander ingénument :

- J'imagine que tu as manqué à pas mal de.. monde en ville. Tu sais déjà ce que tu vas faire de ta matinée ?

[Voyageuse]

- Me promener, au gré du hasard et des rencontres, flâner dans les rues, humer le doux parfum de ma cité, sourire à quelques belles elfes... mais rassure-toi, je serai à onze heures tapantes devant l'entrée de la commanderie de la garde ailée. Promis ! Aucune merveilleuse et séduisante jeune fille ne m'en détournera !
Il sourit de toutes ses dents. Il était difficile de savoir s'il était vraiment sérieux.
- Je sais que tu préfères être seul avec ta compagne pour lui faire découvrir le marché... Souhaites-tu que je vous accompagne à la douane pour les formalités, ou préfères-tu qu'on se donne rendez-vous simplement à onze heures ? C'est vraiment comme tu préfères... De toute façon, je dois rendre visite, ce matin, à une vieille amie, je peux passer aux douanes avant.
- Il vaut mieux que tu commences par les douanes, en effet. glissa Tilmandil. On ne sait jamais, s'il y a un contrôle, que tous vos papiers ne sont pas en règle...

[Kasumi]

La sécurité en ville semblait s'être encore renforcée en ville ces dernières années si Tilmandil estimait qu'on risque de les contrôler, Sylvia et lui. Il était vrai qu'ils comptaient se promener au marché sans elfe citoyen avec eux pour justifier de leur bon droit mais c'était précisément ce qui lui avait fait choisir le marché des portes où les étrangers n'étaient pas une rareté, loin de là. Toutefois, il n'y avait pas de quoi assombrir la bonne humeur du demi-elfe suite au sourire charmeur de son demi-frère. il répondit d'un ton sans gravité :

- Autant nous occuper des formalités avant en effet. Comme ça rien ne viendra gâter notre petite balade en amoureux !

Pour ponctuer ses mots, Kasumi dédia un sourire à Sylvia qui n'avait pas grand chose à envier à celui du barde.

[Voyageuse]

Sylvia lui rendit son sourire, mais un peu plus timidement qu'elle n'en avait l'habitude. Elle semblait impressionnée de se retrouver entourée d'inconnus, de surcroît d'un autre type de civilisation que la sienne.
Riniel apparut à son tour, souriant de son air éternellement rêveur.
- Bonjour à tous... Contente de te revoir, Kasumi. Et je suppose que vous devez être Sylvia ? Tilmandil m'a parlé de vous. En bien, je vous rassure !
- Bien évidemment, voyons !
La rôdeuse rougit, bien entendu, ce qui se voyait décidément beaucoup trop sur son teint de rouquine.
- Tu es en retard... Je croyais que tu devais m'accompagner ?
- J'ai changé d'avis...
- Peux-tu, au moins, être à onze heures devant la Commanderie de la Garde Ailée ? il faudrait raccompagner cette jeune demoiselle ici pendant que nous discuterons. Ou attendre dehors avec elle, si tu préfères.
- Onze heures... Oui, ça me semble possible... Je vais essayer.
- Ne te contente pas d'essayer, répliqua la grand-mère d'un ton un peu cassant.
- D'accord, répondit l'elfe de son ton doux et rêveur, sans se formaliser le moins du monde.
- Pour ma part, je suis prête dans une vingtaine de minute. je vais vous accompagner à la douane, peut-être...

[Kasumi]

Le rôdeur avait suivi un peu distraitement l'échange mais salua tout de même sa tante avec chaleur. De tous les elfes de la maisonnée, Riniel était celle avec le caractère le plus doux et il était soulagé que ce soit elle qui tienne compagnie à Sylvia quand ils seraient à la caserne. La rôdeuse semblait aussi perdue que lui quand il avait découvert la cité de son père autrefois. Peut-être même davantage et c'était des personnalités comme celles de l'artiste qui lui avait permis d'en appréhender la beauté. Le rôdeur avait finalement réussi à mettre la main sur un thé suffisamment fort pour le réveiller un peu et il devait bien reconnaître que le petit déjeuner était succulent et copieux. De quoi le revigorer même si ça ne remplaçait pas tout à fait une nuit de sommeil.

- Nous serons prêts nous aussi. Juste le temps de prendre quelques affaires et de me coiffer convenablement ! Enfin, tu sais comment sont les hommes ! On se retrouve au jardin ?

[Voyageuse]

Ils se mirent en route un peu plus tard, sous un soleil timide. De gros nuages noirs, annonciateurs de pluie, marbraient l'horizon. La grand-mère marchait d'un bon pas malgré son âge et sa frêle silhouette.
Les douanes étaient situées tout près des portes de la ville et du marché où ils comptaient se rendre. La commanderie de la garde ailée se trouvait assez loin, en revanche, mais ils avaient du temps devant eux.
Sylvia jetait des regards ébahis autour d'eux, admirant l'architecture aérienne des bâtiments, la profusion d'arbres et de fleurs, les fontaines savamment sculptées. Elle s'extasia sur les passerelles de bois jetées entre les plus grands arbres, qui permettaient aux habitations situées en hauteur de communiquer entre elles. Elle s'émerveillait comme une enfant.
Ils croisaient des regards pour la plupart vaguement curieux, quelques-uns, assez rares heureusement plutôt hostile. Une hostilité dirigée presque davantage contre lui que contre sa compagne, bizarrement. Comme s'il était inconcevable qu'un enfant naisse d'une union inter-raciale, pour quelques-uns des citoyens d'Everaska.

[Kasumi]

Kasumi avait appris à ignorer ces regards et, en quelque sorte, à ne même plus s'en étonner ou leur donner trop d'importance. Toutes les civilisations comportaient son lot d'intolérants et les elfes n'en étaient pas préservés, bien au contraire. Mais tant qu'il n'y avait que des regards, il préférait plutôt s'attendrir en contemplant Sylvia qui s'émerveillait de milles découvertes qui rendaient bien plus justice aux elfes de lune que ces quelques ignorants aux vues limitées. Ils parvinrent presque trop vite aux portes et s'en échanger plus que des sourires quand la jeune femme lui désignait une réalisation magnifique dont il se souvenait brusquement. Lui aussi avait été un enfant pour qui tout avait été découvertes extraordinaires. Et d'une certaine façon, il revivait ce moment d'innocence au travers du regard neuf de la rôdeuse. Spontanément, les yeux brillant d'émotion, il lui glissa à l'oreille en un murmure destiné à elle seule :

- Est-ce que je t'ai déjà dit aujourd'hui combien je t'aime ?

[Voyageuse]

- Hum... Peut-être... Je ne m'en souviens pas, je dois avoir quelques problèmes de mémoire. Il faudra que tu me le dises souvent pour que je n'oublie pas.
Sylvia lui décocha un sourire malicieux avant de profiter de sa proximité pour lui voler un baiser. Puis, réalisant que peut-être cela ne se faisait pas dans une cité elfe, elle se mit à rougir, et reprit la marche. La grand-mère ne fit aucun commentaire.

Le garde de faction à l'entrée de la douane leva les yeux à leur arrivée. Les posant sur Sylvia, il hocha la tête.
- Bonjour. J'imagine que vous venez pour les formalités administratives d'accueil des visiteurs de passage dans nos murs ?
- Oui. Je suis Elvylith Dor, citoyenne d'Everaska, et nous venons inscrire sur les registres cette jeune demoiselle, la compagne de mon petit-fils Kasumi, que voici. Elle sera mon invitée pour quelques temps
- Pour combien de temps ?
La grand-mère leva un regard interrogateur vers Kasumi.

[Kasumi]

Kasumi n'avait plus lâché la main de sa compagne depuis qu'elle l'avait embrassé. Certes les villes elfes n'étaient pas forcément celles où on affichait le plus ses émotions mais Everaska n'était pas Manost où la rigueur devait se manifester dans chaque attitude publique. Et le demi-elfe n'avait cure des regards que tel ou tel pourrait leur adresser. Il aimait Sylvia et le lui montrer à chaque instant était bien plus important que la façon dont des inconnus pourraient le considérer. Quand le garde les salua et que sa grand-mère lui laissa tacitement la parole, le rôdeur fut bien en peine de donner une réponse précise et s'exprima avec une pointe d'incertitude :

- Nous ne savons pas encore hélas. Sylvia est venu pour m'aider à guérir mon père. Nous n'en aurons peut-être pas pour plus de quelques jours mais je ne sais pas exactement combien. Sera-t-il possible de préciser la durée quand nous en aurons appris davantage et d'obtenir une autorisation provisoire d'ici là ?

[Voyageuse]

- Ça risque d'être un peu plus de quelques jours, fit remarquer Sylvia. On ne sait pas pour combien de temps tu en auras, là-bas...
- Dans ce cas... je peux peut-être vous donner une autorisation de séjour d'une veille, que vous viendrez renouveler ensuite ?
- Ça me semble le plus simple, en effet, opina la grand-mère. Si cela ne pose pas de problème.
- Il faut simplement que vous me signez une attestation certifiant qu'elle réside chez vous.
Le garde se tourna vers Sylvia.
- Nous allons établir un titre de séjour provisoire qui mentionne l'adresse où vous résidez, qui devra être tamponné aux frontières à chaque fois que vous sortirez ou rentrerez sur le territoire. Il faudra aussi signaler, lorsque vous quitterez définitivement la cité, pour que nous puissions clore le dossier... Si vous voulez bien patienter quelques minutes ici, mon collègue va s'en occuper.
Il leur désigna une pièce confortable, meublée de quelques fauteuil.

[Kasumi]

Les formalités semblaient devoir durer moins longtemps que le rôdeur l'avait craint et ils étaient rapidement arrivé à un compromis qui ne leur imposerait pas trop de contraintes. Les mesures de protection du territoire everaskan étaient certes plus drastiques que ce qu'il avait connu dans les villes de l'ouest mais ce n'était peut-être pas un si lourds prix à payer pour garantir la sécurité du peuple elfe dans ces régions tourmentées...

Kasumi prit place sur le siège d'à côté de celui choisi par la rôdeuse et interrogea sa grand-mère sur ce qu'elle comptait faire jusqu'à leur prochain rendez-vous maintenant que Riniel lui avait fait faux bond.

- ... Je ne suis plus très familier du marché des portes. Y a-t-il une boutique ou un étal que tu nous conseillerais de visiter ? On peut aussi déambuler au hasard bien sûr mais ce serait dommage de manquer de bonnes occasions. Enfin, tout dépendra de ce que Sylvia voudra voir !

[Voyageuse]

- Oui, tout dépend de ce qu'elle veut voir...
Sylvia rougit.
- Et bien... je ne sais pas trop, en fait...
- Je te conseille de l'emmener voir le marché aux herbes et épices, avec ses couleurs multicolores... et aussi les étals des fruits, les miels en tout genre. Et bien sûr, les étoffes, elles sont toujours magnifiques. Il y a quelques vêtements, sans doute. Ah non, j'ai une meilleure idée : je suis sûre qu'en tant que rôdeuse, vous serez intéressée par une petit boutique, tout au bout du secteur des étoffes, tenu par un elfe, un nomade qui ne paie pas de mine : il vend les meilleurs articles de cuir du désert d'Anauroch. J'y suis allée un bon paquet de fois quand j'étais plus jeune... Il y a aussi quelques arcs elfiques, des flèches aussi, mais c'est plutôt à l'autre bout du marché. Tu devrais aimer, Kasumi : il y a aussi des objets en bois sculpté, et j'ai entendu dire que tu t'y entendais plutôt bien....

[Kasumi]

Le demi-elfe adressa un sourire à sa grand-mère à cette dernière remarque puis se tourna vers Sylvia :

- Je vois que Tilmandil se charge déjà de parfaire ma réputation ! Mais ce sera vraiment comme tu préfères, Sylvia : on aura certainement le temps de faire plusieurs boutiques en deux heures. Peut-être acheter quelques denrées chez l'apothicaire pour la suite du voyage aussi. Mais pour moi l'essentiel c'est de passer un moment avec toi. Et de te faire un petit plaisir pour fêter dignement ta visite à Everaska si quelque chose te plait !

[Voyageuse]

L'officier des douanes ressortit bientôt de son bureau avec toute une liasse de parchemins que Sylvia dut compléter, indiquant son identité complète, celle de ses parents, ainsi que ses origines géographiques et raciales. Elvilyth, quant à elle, dut écrire et signer en double exemplaire une lettre certifiant qu'elle hébergeait Sylvia pour la durée de son séjour. Puis, une fois tous ces documents dûment tamponnés, on les laissa repartir. Dehors, le temps se couvrait, mais restait heureusement sec pour le moment.
- Je vais vous laisser profiter du marché ! J'ai une vieille amie à voir, quelque part entre ici et la commanderie. Je vous donne rendez-vous à onze heures. D'ici là, promenez-vous bien ! Oh, Kasumi, le vendeur de pâtisseries que tu aimais tant, enfant, est toujours par là-bas, à l'angle de la rue de la commanderie... Et il fait toujours les meilleurs pâtisseries de la ville ! Et je ne dis pas ça parce que c'est mon ancien amant...

[Kasumi]

Kasumi fut tellement interloqué par cette révélation qu'il resta muet jusqu'à ce que sa grand-mère ait pris congé d'eux. Le visage qu'il offrait devait avoir quelque-chose de comique à en juger par l'air arboré par Sylvia en cet instant. Le demi-elfe lui adressa un sourire avant de lui tendre la main :

- Hum... Si ça te dit de rencontrer.. l'ami de ma grand-mère, c'est vrai que ses gâteaux au miel sont délicieux ! Et c'est juste à côté du marché aux herbes et aux épices si je me souviens bien. Mais tu préfères peut-être commencer par la boutique pour rôdeurs ?

[Voyageuse]

Sylvia, en effet, se retenait à grand-peine de rire. Et il suffisait qu'elle croise le regard de son compagnon pour que son sourire s'élargisse beaucoup trop tandis que ses yeux pétillaient de tous leurs feux.
Elle tenta cependant de reprendre son sérieux de son mieux, répondant à la question du rôdeur.
- Je ne sais pas... Dans la boutique pour rôdeurs, je risque d'être tentée par des achats, surtout que je n'ai jamais eu l'occasion d'entrer dans ce genre de boutique... donc il vaut mieux la garder pour la fin peut-être. Quoique, vu que je n'ai que quelques pièces d'argent, ça n'ira pas chercher bien loin... Écoute, faisons les choses dans l'ordre où elles se présentent, flânons un peu. Peut-être en commençant par le marché aux épices, oui... Et je tiens absolument à goûter ces gâteaux au miel !