[Quête] Guerre des plaines brûlantes : UCGPLM - Arthur

[Arthur de Faisanlys]

Ils n'avaient de toute façon aucun choix en la matière : c'était la seule issue et leur seul espoir. Les poumons en feu, Arthur laissa les deux Mélandiens passer devant lui et garda un moment leurs arrières, avant de les suivre. Il n'y avait rien pour obstruer l'escalier, il fallait espérer qu'ils trouvent quelque chose plus haut...

[Taliesin]

Avant d'atteindre les marches, ils dépassèrent un couloir s'ouvrant sur la droite, qui devait longer la muraille nord. Mais des bruits en provenaient, ce qui n'en faisait pas exactement une issue convenable... Sans compter que tergiverser n'était plus de mise.
Gravir l'escalier ne leur prit guère de temps. A son sommet, ils découvrirent un hall aux dimensions évidemment plus restreintes que celui du donjon. Les portes donnant sur l'extérieur étaient closes, et de nouveaux degrés s'élevaient vers les étages. Encore une fois, pas de battant à mettre entre eux et leurs poursuivants.

[Arthur de Faisanlys]

S'ils montaient trop haut, ils risquaient de se retrouver acculés par leurs poursuivants et calés dans les hauteurs. Bien sûr, ils pourraient sans doute se bricoler une corde avec des draps, des tapisseries ou des rideaux, et sauter dans les douves. C'était sans doute leur meilleure chance. Mais il avait le souvenir de ces fenêtres étroites, impossibles à franchir... Peut-être la forteresse, tournée exclusivement vers la guerre, ne disposait-elle pas d'ouvertures suffisamment grandes pour leur permettre de fuir... Mais il n'y en aurait certainement pas davantage à ce niveau, et déboucher dans la cour était suicidaire. Il fallait grimper et espérer, à nouveau.

[Taliesin]

Ils franchirent un premier pallier, où un battant fermé, donnant sur l'intérieur de la tour, devait mener à quelque pièce. Puis ils en atteignirent un deuxième qui, cette fois, était doté de trois portes.
-Celle-là doit donner sur le rempart ouest, et celle là sur le nord, fit Rodolphe.
-Non, c'est l'inverse : celle là le rempart nord, celle-là le rempart ouest.
-On s'en fout, non ?
-Ben non : il y a plus de chances que Destertres nous envoie ses p'tits copains par le second...

[Arthur de Faisanlys]

Les deux hommes semblaient savoir ce qu'ils faisaient, mais Arthur n'avait aucune idée de leur position.
" Il suffit d'ouvrir une porte, à la position du soleil, on saura de quel rempart il s'agit. Si c'est le mauvais, on prendra l'autre."
Il imaginait qu'ils avaient l'intention de descendre à partir du rempart. Sans doute avaient-ils embarqué une corde... Il ne s'en souvenait pas, mais il n'avait pas été très attentif à ce genre de choses, dernièrement. Il espérait aussi que le soleil s'était levé... mais la nuit ne pouvait pas être éternelle en cette contrée.

[Taliesin]

Hector se dirigea vers l'une des portes et l'entrebâilla légèrement, faisant entrer sur le pallier un rai de lumière dorée.
-Hé hé, je suis trop fort, c'est bien le rempart nord. La brume n'a pas atteint son chemin de ronde, et ça doit être... allez, dix heures du matin.
Il referma le battant et se tourna vers ses compagnons.
-Bon, faut qu'on avise, dit Rodolphe.
-Ben, on utilise la corde pour s'évader, non ?
-Oui, sauf qu'il faudrait aller repérer un endroit propice : faudrait pas qu'on découvre au dernier moment qu'on a nulle part ou poser le pied, en bas...
-Ouais. Hum, et peut-être qu'il faudrait trouver un moyen de ralentir nos poursuivants, aussi. Sinon, pourraient bien couper la corde alors qu'on est encore haut...

[Arthur de Faisanlys]

Ils étaient près du but. Enfin... d'un but. Qu'Arthur n'était pas certain d'avoir parfaitement compris. Est-ce qu'ils n'étaient pas simplement en train de fuir ? C'était raisonnable mais c'était curieux.
Ne réfléchis pas, ça ne sert à rien de réfléchir. Agir. Instinct. Survie. Demain est un autre jour.
" Est-ce qu'il y a moyen de ramper sur le chemin de ronde, ou quelque chose comme ça ? Les hommes de Destertres sont à l'intérieur de l'enceinte, jeter un coup d'oeil de l'autre côté ne doit pas être si risqué... Pour le reste, s'il n'y a pas moyen de fermer cette porte, peut-être devrait-on jeter un oeil derrière cette troisième porte... On ne sait jamais ce qu'on y découvrira... Peut-être quelque chose pour la bloquer... ou à balancer dans les escaliers..."

[Taliesin]

-Je préférerais balancer des trucs dans les escaliers. Parce que bloquer la porte... Si on nous tire dessus depuis le donjon ou la tour nord-est, ou si des ennemis sortent de celle-ci pour nous attaquer, ça serait galère de devoir débloquer la porte..
-Ouais. Mas regardons déjà s'il y a le nécessaire pour bloquer quoi que ce soit...
La pièce renfermait plusieurs lits, ainsi que des coffres : qu'elle ait toujours servi à cela ou que l'aménagement soit récent, il s'agisait d'un petit dortoir sans doute destiné aux hommes patrouillant sur les remparts.

[Arthur de Faisanlys]

" Si on parvient à coincer tout ça dans la cage d'escalier, je pense qu'on gagnera déjà pas mal de temps... mais il ne faut pas traîner..."
Il attrapa un lit par les pieds et le tira vers la porte, avant d'aviser ses deux compagnons.
" Après, peut-être que Rodolphe, tu pourrais aller repérer notre porte de sortie pendant qu'Hector me donne un coup de main ?"

[Taliesin]

L'intéressé obtempéra sans attendre. Aidé par son autre compagnon, Arthur déplaça un premier, puis un deuxième lit, ce qui commença à bien obstruer l'escalier. Ils étaient sur le point d'en charrier un troisième lorsque Rodolphe revint.
-J'ai repéré un coin où on aura un peu d'espace pour mettre pied à terre, annonça-t-il. Mais ensuite, faudra faire très attention, car l'a-pic commence vraiment près du bas de la muraille...
Il dévisagea ses interlocuteurs.
-Bon, et j'ai repéré du monde dans les étages supérieurs et au sommet du donjon. Apparemment, monsieur le comte n'est pas aussi mort que le souhaiterait Destertres. J'imagine donc que les otages sont saufs, eux aussi.

[Arthur de Faisanlys]

Arthur sentit une pointe de culpabilité le piquer à nouveau et le trouble lui brouiller les sens. Les otages étaient toujours dans la tour, et ils avaient fui... Il avait juré de les défendre. Il s'était engagé... à quoi exactement. Tout lui semblait flou.
" Est-ce que... est-ce que nous faisons vraiment ce qu'il faut ? demanda-t-il, incertain. Ne devrions-nous pas plutôt essayer de les rejoindre ? Je ne voudrais pas... faillir à ma parole... et que vous soyez accusés de désertion..."

[Taliesin]

-On fait qu'obéir aux ordres du lieutenant... dit Rodolphe, embarrassé.
-Ouais, mais ceux du donjon le savent pas, ça.
-Le lieutenant le leur dira quand il sera ressuscité.
-Et si les rats l'ont dévoré tout entier ? Et si avant ça, monsieur le comte ordonne à ses hommes de nous tirer dessus, pensant qu'on se carapate lâchement ?
-Je sais bien, mais... Vous proposez quoi ? Qu'on retourne dans les souterrains emplis de zombies, qu'on regagne le donjon, puis qu'on se jette dans la brume du premier étage ?
Il grimaça.
-J'aime pas l'idée de me barrer comme ça. Mais ce sont les ordres, non ? Faut bien aller quérir du renfort... Et si retourner en arrière signifie y passer, à quoi on sera utiles ? A monsieur le comte ou aux prisonniers ? Parce qu'à Destertres, c'est sûr qu'on lui sera utiles : on grossira son armée.

[Arthur de Faisanlys]

" Au pire, je dirai que je vous y ai contraints avec mes effroyables pouvoirs de paladin, dit Arthur. Filons. Rodolphe a raison : nous n'avons pas vraiment le choix. Notre seule autre option est de nous terrer quelque part et d'espérer que quelqu'un de plus vaillant nous sauve."
Il eut un sourire.
" Ce qui serait difficilement acceptable, en ce qui me concerne."
Il prit aussitôt la direction des remparts et de leur voie de sortie.

[Taliesin]

Une fois la porte franchie, il lui fallut quelques instants pour s'habituer à la luminosité ambiante, bien supérieure à celle que projetait leur torche. Au-dessus de sa tête, le soleil matinal brillait de mille feux dans un ciel d'azur. Sur sa droite, le donjon émergeait de son lac de brume verdâtre. En face de lui se dressait la tour nord-est. Enfin, sur sa gauche, au-delà d'un parapet crénelé et loin en contre-bas, s'étendait un paysage rural non dénué de charmes.
-Faut avancer sur une petite trentaine de mètres, souffla Rodolphe, dans son dos.

[Arthur de Faisanlys]

Arthur eut de la peine à avancer sur le chemin de ronde tant la vision de ce jeune soleil, enfin, le remplit d’un sentiment proche de l’extase. Il n’avait pas mesuré le poids des ténèbres, ou pas assez, et faillit perdre le sens de l’instant, gagné par l’envie profonde, viscérale, ou par une habitude, simplement, de s’arrêter pour prier.
La voix de son compagnon de route, derrière lui, le ramena à l’urgence et il tenta de se crapahuter, le plus discrètement possible, malgré sa haute taille, vers l’endroit qu’avait repéré Rodolphe. Il se demanda si quelqu’un les apercevrait. Dans la cour, dans une tour, si on les prendrait en chasse, si on jugerait leur comportement, s’il n’était pas en train de ternir à jamais la réputation des paladins de l’Aster.
Mais il reviendrait. Pour les otages manostiens, et pour le lieutenant mort, et puis pour l’honneur

[Taliesin]

Ils gagnèrent l'endroit indiqué par Rodolphe, et un regard suffit au paladin pour comprendre qu'ils n'avaient pas intérêt à se rater : une vingtaine de mètres plus bas, il y avait un minuscule promontoire, large de quelques pas seulement, puis c'était le vide ; et ailleurs, le long de la muraille, s'alongeait une corniche extrêmement étroite. Bref, si la voie d'évasion était clairement tracée, elle s'avèrerait difficile à suivre...
-J'espère que les lits retiendront les morts-vivants... fit Hector.
-J'espère surtout que le comte va pas nous prendre pour des déserteurs et pas ordonner au sieur de Roquebrune de nous jeter des sorts, ajouta Rodolphe en tirant un rouleau de corde de son sac. Sinon, on est foutus.

[Arthur de Faisanlys]

L'opération paraissait intégralement suicidaire. Non seulement la zone de réception était minuscule, mais ils constitueraient ensuite des cibles aisées pendant un bon bout de temps, sans aucune latitude pour se protéger.
On va se faire tuer.
Il ne pouvait pas le dire. Ce n'était pas lathandrite. Il fallait y croire. Il n'y avait pas d'alternative, de toute façon : soit ils fuyaient, soit ils mourraient.
C'est bien le problème, Arthur, un paladin mourrait. Il ne prendrait pas la tangente, comme un couard.
C'est pour ne pas devenir un mort-vivant, c'est tout. Un mal pour un bien. C'est ce que voudrait Lathandre.
Que dirait Sire Armand ?
Que dirait son père ?
Que dirait la belle Dame Chandara ?
Seul Gareth Maelwedd fuirait, Arthur en était convaincu.
Mais l'urgence, Arthur ! Bouge ton cul !
Il regarda le soleil, s'éblouit, sentit un gémissement naître dans sa gorge mais l'empêcha de sortir.
" Je passe le dernier. Pas de discussion."

[Taliesin]

La réaction des Melandiens fut unanime : ils échangèrent un regard, croisèrent les bras et lui firent face.
-Hors de question.
-Jamais de la vie.
-Si quelque chose cloche, tu te sacrifieras pour qu'on puisse s'en aller.
-Et même si rien ne cloche... Suffira que tu jettes un œil au donjon, que tu aperçoives un prisonnier regardant par la fenêtre, et tu voudras l'aider.
-Dans les deux cas, tu mourras, ce que ne voudrait pas le comte, ce que n'aurait pas voulu le lieutenant.
-Et ce qu'on veut pas non plus.
-Évidemment.

[Arthur de Faisanlys]

Autant pour le charisme des paladins. Apparemment, il ne s'en sortirait jamais, avec ces deux-là.
" C'est bon, c'est bon, je passe au milieu alors... Comme ça, si la corniche n'est pas solide, c'est Hector qui y passe. Si les zombies arrivent, c'est Rodolphe, et moi, formidable, je survis ! Ça vous permettra aussi de vous assurer que je ne m'enfuis pas. Quoi que je pourrais toujours pousser Hector dans le trou en arrivant. On ne sait jamais. Quitte à oublier qu'on est paladin, autant le faire franchement."
Il poussa un soupir excédé et attendit que les Mélandiens veuillent bien se décider à installer la corde et commencer à descendre.

[Taliesin]

Ceux-ci, cependant, n'esquissèrent pas le moindre mouvement, le dévisageant au contraire avec des mines incrédules.
-Arthur, tu penses vraiment qu'on va te surveiller ?
-Tu crois réellement qu'on va te ramener au camp mélandien le plus proche ?
-Bon sang, on a de telles têtes de salauds ?
-Faut croire.
Ils soupirèrent.
-T'es pas notre prisonnier, vieux.
-On a reçu aucun ordre en ce sens.
-On est pas tes supérieurs non plus, et tu nous as rien promis.
-Alors une fois qu'on sera hors de portée de ces horreurs, tu iras ou tu voudras.
-On est pas du genre à faire de sales coups aux mecs aux côtés desquels on s'est battus.
-

[Arthur de Faisanlys]

Arthur leva les yeux au ciel. C'était une épreuve envoyée par Lathandre, assurément. Mais la patience ne faisait pas partie de ses attributs.
" Le sale coup que vous êtes en train de me faire, c'est bavarder alors que nous devrions être en train de prendre la tangente ! s'exclama le paladin. Passe-moi cette corde, maintenant. Et mets-toi là. Et le premier qui cause encore, je le balance par-dessus les créneaux, et il n'a qu'à prier Tymora... ou Beshaba, je m'en fous, pour se rattraper à la corniche."
A moins que ce soit un signe : il était encore temps de changer d'avis. Il baissa les yeux sur la cour sous sa brume verte. Non. Il n'était plus temps de changer d'avis. Et pour faire quoi, de toute façon ?
" Bouge tes fesses, Hector, tu veux ?"

[Taliesin]

Décontenancé, le soldat obéit sans protester, montant sur le parapet, entre deux créneaux, saisissant la corde et basculant en arrière pour descendre en rappel.
Moins de cinq secondes plus tard, Rodolphe jurait.
-Jette-moi dans le vide si tu veux, Arthur, mais j'ai pas d'autre choix que de parler : y a du monde qui vient vers nous.
Effectivement, la porte de la tour nord-est venait de s'ouvrir, et une demi-douzaine d'hommes en armure s'avançaient vers eux. Enfin, d'hommes... De zombies, plutôt, leur ignoble nature étant aisément repérable à leurs visages cadavériques, à leur mouvements peu naturels. Quoi qu'il en soit, ils progressaient à un bon rythme.
Hector aurait peut-être - peut-être - le temps d'atteindre le promontoire. Mais pour ses compagnons, c'était tout bonnement impossible.

[Arthur de Faisanlys]

" Nous devons protéger sa descente... et peut-être faudra-t-il qu'il aille chercher de l'aide sans nous... Préviens-le, qu'il ne nous attende pas pour se mettre en sécurité. Je vais aller accueillir nos invités."
Les zombies ne pouvaient pas avancer à six de front sur le chemin de ronde, ils se gêneraient immanquablement pour combattre. Sans se soucier de ce que faisait Rodolphe, Arthur prit une profonde inspiration et alla droit vers eux, la lame au clair. Il fallait garder l'affrontement le plus loin possible de la corde, s'ils voulaient qu'Hector ait la moindre chance de réussir. Peut-être voir s'il y avait moyen de faire tomber l'un ou l'autre directement dans sa brume natale. Et puis trancher le reste...

[Taliesin]

Il lui sembla entendre, dans son dos, les échos d'un échange animé. Mais il ne put y prêter aucune attention : déjà, il arrivait au contact des non-morts. Ceux-ci avançaient deux par deux, ce qui gênait leurs mouvements compte tenu de l'étroitesse du chemin de ronde. Par conséquent, mais également parce que sa manœuvre profita de l'effet de surprise, il put sans guère de mal faire basculer dans la cour celui de ses adversaires qui s'en trouvait le plus près, puis engager le combat avec son comparse. L'instant suivant, toutefois, il se retrouvait à nouveau à deux contre un, et le nouvel arrivant, semblant tirer les leçons du sort malheureux de son prédécesseur, veillait à ne pas être précipité dans le vide. Ce qui avait l'avantage de le rendre un peu moins offensif...

[Arthur de Faisanlys]

Arthur ne savait pas si Rodolphe finirait par arriver et dans le fond, cela lui était égal. Vu son gabarit et l'allonge de son épée à deux mains, il était en fait beaucoup plus à l'aise de combattre seul, même contre deux, qu'avec un partenaire qu'il devrait veiller à ne pas bousculer.
Et en réalité, il se sentait serein. Fatigué aussi. Mais affronter l'ombre, c'était son métier, et c'était beaucoup plus facile que d'essayer de comprendre ce qu'il était en train de faire. Il allait fuir, et cela le rendait malade. Mais s'il pouvait lutter encore un peu... chaque zombie tué était comme une infime lueur...
Pendant une seconde, il songea que s'il pouvait mourir dans l'instant, les choses seraient plus simples, il se sentirait en paix avec lui-même. Mais Rodolphe avait raison : tomber, c'était renforcer les troupes de Destertres. Il ne fallait plus penser à rien : frapper, simplement, chercher la faille dans l'armure, déséquilibrer l'adversaire, le frapper encore... Cette non-vie répugnante... C'était tellement clair, pour changer.

[Taliesin]

Il terrassa un deuxième ennemi, un troisième... C'était encourageant, et plus que cela : il avait tout lieu de croire qu'il parviendrait à éliminer l'escouade entière.
Mais c'était sans compter sur une réaction imprévue des trois zombies survivants.
Sans crier gare, ils se ruèrent en avant, tentèrent à la fois de le percuter et de le déborder.
Son pied buta sur une pierre mal ajustée.
Il bascula de côté, fut poussé...
Il chut.
Faillit choir.
Car, dans un réflexe salvateur, sa main jaillit, se raccrocha au rebord du chemin de ronde.
Ses pieds frôlaient la surface nébuleuse de la brume maudite.
Et au-dessus de lui, ses ennemis se penchaient, bien décidés à lui faire lâcher prise...

[Arthur de Faisanlys]

Arthur ne put s'empêcher de se demander si boucher son nez servirait à quelque chose, en plongeant dans la brume. Probablement pas. Ce n'était pas l'océan qui baignait les quais de Luménis, vert et ondulant, mystérieux lui aussi, tellement moins hostile. Il était parfaitement conscient qu'à moins d'une intervention providentielle, celle de Rodolphe, de Lathandre, de quelqu'un dans le donjon qui les observait, de Destertres lui-même préférant le prendre vivant (après tout, ce serait plus comique), il était fichu. Il n'avait pas particulièrement peur, car les paladins ne le peuvent pas, mais il regrettait de ne pas avoir eu la chance de tomber de l'autre côté. Au moins la chute aurait été mortelle et son corps n'aurait été récupéré par personne. Un souci en moins pour le père Maelwedd. La brume, par contre, c'était la garantie de mauvais moments à passer, du moins pour sa carcasse. Son âme, elle, demeurait immortelle et irait à Lathandre. En cela, il n'y avait rien à craindre et rien à regretter.
Mais Arthur n'avait pas vingt ans.
" Rodolphe, mon vieux, c'est le moment de te pointer !"

[Taliesin]

-C'est bon, c'est bon, j'arrive. Sois pas stressé comme ça !
L'instant suivant, le Melandien apparut dans son champ de vision. Mais non pour tendre la main au Luménien : il fonça au contraire tête baissée sur les morts-vivants, les repoussant, faisant s'étaler l'un d'entre eux sur le chemin de ronde, martelant les autres de coups tant de son arme que de son bouclier.
Celui qui aida Arthur, ce fut Hector. Il s'étendit à plat ventre, saisit fermement son poignet.
-Rengaine ton épée et tend ton autre main, ça sera plus facile pour te hisser.

[Arthur de Faisanlys]

Arthur n'était pas surpris : il s'était attendu à ce qu'Hector fasse son paladin et remonte pour les aider. Un pour tous, tous pour un, comme dans les vieilles légendes. Il batailla avec son épée et finit par réussir à la rengainer, avant de tendre sa seconde main à Hector. Le soldat était heureusement costaud, il parviendrait sans doute à le hisser jusqu'au chemin de ronde sans trop de soucis, d'autant qu'Arthur, de son côté, allait sûrement pouvoir trouver des aspérités pour y prendre appui.
" C'était brave et stupide, dit-il à Hector. Si tu cherches du boulot, on recrute à la commanderie."
Et maintenant, les Mélandiens lui avaient sauvé la vie. Autant dire qu'il était dans la mouise jusqu'au cou. Dans les dettes d'honneur, en fait. L'horreur. Il ne voulait rien devoir à ces gens, rien du tout. C'était sans doute trop tard depuis un certain temps, mais ce n'était pas réconfortant pour autant.

[Taliesin]

-Tu vois... Autant je suis pas du genre à enquiquiner la veuve et l'orphelin... Autant leur venir constamment en aide... Mouais, j'crois que filer un coup de main aux copains... de temps à autre... c'est suffisant pour moi... ahana le Melandien tout en lie hissant.
Bientôt, Arthur fut à ses côtés, tout autant à bout de souffle que lui.
Mais ce n'était pas le moment de faire une pause. Si Rodolphe avait terrassé l'un de ses adversaires, les deux autres lui donnaient beaucoup de fil à retordre. Sans doute la fatigue commençait-elle à peser lourdement sur ses épaules.