[Bâtiment] La Taverne de la Gorgée d'Orge

[Manfred]

« Heu... Je sais pas trop. J’avais prévu de visiter les niveaux inférieurs des cryptes. J’ai été un peu frustré de pas pouvoir y aller. Sinon, j’étais presque tenté d’aller à la chasse aux dragons rouges. J’ai toujours rêvé d’en tuer un à mains nus ! Le mieux, c’est peut-être de tout faire à la fois. Toi tu fais les égouts et les cryptes. Et moi, la maison hantée et le dragon ! Le premier qui a terminé a gagné ! »
En voilà un programme plein de promesses ! Dommage que la réalité contraigne à viser plus bas, beaucoup plus bas. En fait, Silmandel se demandait quelle activité n’était pas risquée. Une petite voix dans sa tête lui disait qu’il n’y en avait aucune. Une simple balade pouvait tourner au drame.
« Plus sérieusement, j’ai aperçu une friperie un peu plus tôt. J’aimerais bien m’acheter un truc plus à ma taille, histoire que la prochaine fois où je me retrouve comme ça, j’ai de quoi me dissimuler. »

[Taliesin]

Son acolyte fronça les sourcils.
-Vous avez vraiment envie qu'il y ait une prochaine fois ? Je veux dire... D'accord, avec cette apparence, vous pouvez surprendre ou même faire peur. D'accord, vous êtes peut-être aussi plus agile... Mais ça fait quand même peu d'avantages par rapport à tous les inconvénients : vous devez vous dissimuler, vous pouvez sans doute plus utiliser votre magie... Vous préféreriez pas demander à un clerc de vous libérer de la lycanthropie ? Ou, au moins... Tenter d'apprendre à vous retransformer ? Là, par exemple, ça faciliterait bien les choses. Parce que si le vendeur de la friperie est du genre... collant, il va insister pour que vous essayez le manteau et... hum...

[Manfred]

Silmandel, une fois n’était pas coutume, réfléchit quelques secondes avant de répondre honnêtement à Alexandre :
« Ho, je n’ai pas spécialement envie d’être débarrassé de la lycanthropie. J’ai entendu dire, et il me semble que c’est une infos fiable, qu’il était possible de la maîtriser. Avec de l’entraînement, je pourrais me retransformer sans attendre l’aube. Je pourrais aussi devenir totalement chat. Mine de rien, c’est un bon moyen de passer inaperçu. Et puis, c’est toujours une carte de plus dans ma manche. Ça nous a pas mal aidé tout à l’heure. »
Il marqua une brève pause avant d’ajouter :
« Je ne me sens pas influencé, comme il parait que c’est le cas avec les lycanthropie maléfique. Enfin, bon c’est peut-être bête de dire ça, mais les chats-garous, ça a l’air d’être ultra rare. Je me demande même s’ils sont répertoriés dans les bibliothèques. J’en recroiserai certainement plus de toute ma vie. Alors j’aimerais tester, voir ce que ça donne. »
C’était en effet très amusant de se penser unique, ou quasi unique. De surcroit, l’elfe se méfiait des clercs de cette ville. Entre ceux qui lançaient des sorts de quêtes et ceux qui faisaient payer une fortune pour trois fois rien...
« Par contre, pour la friperie... t’as peut-être raison. On ne va pas tenter le diable. Mais du coup, on va peut-être juste devoir se balader. »

[Taliesin]

-Hé ben, ça promet d'être passionnant... soupira Alexandre.
Pourtant, il se remettait déjà en marche, d'un pas de flâneur.
-Je comprends que vous ayez envie de tester... Et c'est vrai qu'il y a des lycanthropes qui ne sont pas méchants. Certains sont mêmes bienveillants. Mais bon, ça va quand même être la galère pour gérer vos affaires : vous devrez avoir toujours dans votre sac une tenue pour quand vous adopterez cette forme-là, et faudra laisser ledit sac derrière vous si vous devenez un chat... Hum, d'ailleurs, faudra vous méfier. Il y en a qui trouvent que ça se mange bien, les chats, et qui sont devenus experts pour les attraper...

[Manfred]

« Ha, quelle fin glorieuse ce serait ! Moi, Silmandel Songevent, finir en chat à la broche ! Un récit digne d’un barde ! Mais bon, peut-être qu’avec assez d’entraînement j’arriverai à utiliser ma magie même en chat. Imagine la tête de celui qui se reçois un rayon ardent de la part d’un innocent matou ! Ho... quelle scène... »
L’ensorceleur resta un instant pensif, avant de déclarer :
« Bon et bien, c’est reparti pour un tour. Combien de brigands on va croiser, cette fois ? »
Zéro, il l’espérait. Il comptait éviter les ruelles désertes ce qui, déjà, pouvait aider. Au bout d’une heure, il serait temps de rejeter un coup d’œil aux environs de la Gorgée d’Orge.

[Taliesin]

Ils ne croisèrent pas de brigands. Du moins, aucun qui osât dévaliser des passants en pleine rue. Il faut dire que sans constituer le quartier le plus aisé de la ville, loin s'en fallait, les abords de la Gorgée d'Orge n'avaient rien en commun avec l'enfer des taudis : on y voyait même, de temps à autre, des patrouilles du guet. Pour autant, la prudence restait de mise : l'on croisait des individus louches, l'on assistait parfois à des bagarres, sans compter les marchands ambulants et les mendiants refoulé loin des artères principales de l'Esplanade Impériale.
Silmandel et Alexandre errèrent une bonne heure avant de revenir près de la taverne... et de constater que Clémentine n'avait pas fait son aparition.
-Et c'est reparti pour un tour... lâcha le gosse.

[Manfred]

« Oui, hélas. »
Silmandel n’était pas d’avantage enthousiaste, mais il fallait se plier à se manège jusqu’à la soirée. Il n’osait rien entreprendre d’autres dans sa situation. Les patrouilles le faisait appréhender. Les gens trop louches aussi. A croire qu’il n’était plus le même. Lorsqu’il discutait avec le garçon et se changeait les idées, il parvenait tout de même à apprécier le moment présent. Il était un gros chat et personne ne le remarquait. Combien d’autres créatures se cachaient ainsi sous d’amples tenues ?
« Changeons légèrement de coin, qu’on ne nous voient pas aller et venir trop souvent dans les mêmes rues. »

[Taliesin]

Ce qu'ils firent.
Cela les mena vers des zones un peu plus commerçantes où se tenaient des échoppes de toutes sortes, depuis les boutiques de vêtements ou de vaisselle jusqu'aux armureries et aux forges, en passant par des épiceries. Son estomac criant famine, Alexandre en profita d'ailleurs pour leur acheter de quoi grignoter, ce qui les aida à passer le temps.
Puis ils revinrent à la Gorgée d'Orge, n'y virent pas plus de Clémentine que précédemment.
-Je crois que ça va être la journée la plus passionnante de toute ma vie... soupira le gamin.

[Manfred]

Les chaussures, c’était quand même pas mal, songea Silmandel qui, depuis l’incident, marchait pieds nus. Certes, il avait des pattes fait pour, mais c’était quand même un peu rude pour une première fois. De surcroit, le léger inconfort des chausses inadaptées ne cessaient de s’amplifier, devenant maintenant presque insupportable.
« Tu m’excuses deux secondes ? Un petit truc à régler. »
Il déposa son sac, l’ouvrit et ménagea un peu de place dedans.
Puis, profitant du fait qu’il nageait dans son manteau, il dégagea ses bras des manches, les ramenant donc à l’intérieur de l’habit, retira lestement ses chausses, enfin celles d’Alexandre, les laissèrent tomber, remit ses bras en place et n’eut plus qu’à se déplacer d’un pas pour récupérer le vêtement et le ranger. Le tout avait été effectuée en une petite vingtaines de secondes, assez discrètement. Enfin ! Il n’avait plus la queue coincée, sans mauvais jeu de mot.
« Ha, ça va mieux ! Et c’est reparti pour un tour ! »

[Taliesin]

Alexandre avait jeté des regards inquiets autour de lui, pour s'assurer que personne n'observait la discrète mais étrange manœuvre
-Hum, maintenant, va falloir que vous fassiez doublement gaffe à ce que votre manteau ne s'ouvre pas. Sinon, vous serez coffré à la fois pour lycanthropie illicite et pour exhibitionnisme ! Et puis, franchement, c'est pas très sympa de laisser trainer par terre les vêtements que je vous ai prêtés... On voit que c'est pas vous qui devrez faire la lessive !
Ils repartirent pour une troisième promenade forcée qui s'avéra tout aussi ennuyeuse que les précédente et qui, comme elle, s'acheva par une déconvenue.
-On va vraiment passer tout l'après-midi à faire ça ? fit son acolyte, manifestement lassé.

[Manfred]

« Non, pas tout l’après midi. De toute façon, à force de marcher, on va finir par faire une mauvaise rencontre. On va trouver autre chose. Quelque chose de plus distrayant », assura Silmandel, conciliant.
Tourner en rond dans le même coin, il s’en serait lassé depuis longtemps s’il avait été seul. Alors il ne pouvait que comprendre la réaction du garçon.
« On va se caller dans un endroit tranquille et jouer à un jeu. Tu aimes jouer aux cartes ? J’en ai pas sur moi, mais on peut aller en acheter. »

[Taliesin]

-Oui, c'est sympa, les cartes, et effectivement, on doit pouvoir en trouver dans le secteur. Alors...
Il s'interrompit brusquement et claqua des doigts.
-Oh, mais ça me fait penser ! J'ai entendu parler d'un endroit génial dans le Noyau Occulte ! Ça s'appelle "La mauvaise pioche", et on peut y jouer aux cartes merveilleuses ! Bon, c'est sûrement pas donné mais au moins, là-bas, il y aurait aucun risque qu'on s'ennuie !

[Manfred]

« Non ! Pas la Mauvaise Pioche ! », répondit Silmandel, avec une spontanéité et un empressement qui le surprirent lui-même.
Plus jamais il ne toucherait à des Cartes Merveilleuses ! C’était à cause d’elles que ses aventures à Melandis avaient débuté. Même si au final il n’avait pas à se plaindre du dénouement, il était conscient d’avoir frôlé la catastrophe. Après s’être reprit, il ajouta :
« Ce n’est pas une bonne idée. Les Cartes Merveilleuses, j’ai testé et j’ai failli y rester. On va prendre des cartes ordinaires. Ça n’empèche pas de faire des jeux très intéressants ! »

[Taliesin]

Manifestement pris au dépourvu par la vive réaction de son compagnon, Alexandre ne sut d'abord que répondre. Puis, sans crier gare, il le pointa du doigt.
-Oh la poule mouillée ! Une mini mésaventure de rien du tout avec les Cartes Merveilleuses et ça y est, vous ne voulez plus y jouer ! Ah là là, dire que je vous avais pris pour quelqu'un d'amusant et de courageux, je me suis bien trompé !
Il poussa un soupir spectaculaire.
-En fait, vous êtes sérieux, raisonnable, prudent, ennuyeux et... peureux. Mais allez, je vous aime bien quand même.

[Manfred]

Forcément ! Alexandre ne pouvait pas manquer une si belle occasion de se moquer de Silmandel. Celui-ci croisa les bras et répondit sans se laisser déstabiliser.
« Ho, toi, tu ne connais pas les Cartes Merveilleuses. Je vais t’expliquer en quoi consiste la partie.
Ça se joue à deux. Chaque joueur choisi à l’avance le nombre de cartes qu’il est prêt à tirer. A tour de rôle, ils en tirent une, jusqu’à arriver à ce nombre. Interdiction de s’arrêter avant. Et bien sûr, chaque carte a un effet particulier. Leur magie est extrêmement puissante. Dès fois, elle est bénéfique, dès fois, néfaste. Moi, j’ai osé tirer quatre cartes. Une m’a fait gagner un paquet d’or. Une autre m’a assoiffé comme si j’étais en plein désert. J’ai dû vider ma gourde des dizaines de fois avant que ça cesse. Jusque là, soyons franc, ça va. Par contre, une m’a rendu plus petit que toi et ça aurait dû être définitif. La dernière a manqué de peu m’arracher mon âme. Crois-moi, ça secoue. J’ai dû courir dans le temple le plus proche pour m’en sortir ! Imagine une seconde si ta sœur apprend que je t’ai laissé jouer à un truc comme ça ! Sa réaction sera pire que toutes les Cartes Merveilleuses de Toril ! »
Il pointa le garçon du doigt.
« Mais, si tu aimes les enjeux élevé, ça peut se faire avec des cartes normales. »
Il avait un petit ton de défi.

[Taliesin]

-Vous savez, suffirait que je mette la robe magique pour plus rien avoir à craindre des effets négatifs des Cartes Merveilleuses tout en profitant de leurs effets bénéfiques... Mais bon, il n'y aurait plus aucun suspens, et puis, même si je pense que vous seriez mieux en poule-garou qu'en chat-garou, j'ai quand même pas envie qu'il vous arrive des bricoles... Alors ce seront les cartes toutes bêtes. Mais...
Il croisa les bras.
-Mais ce sera quoi, les enjeux élevés ? Et faudra trouver mieux que condamner le perdant à simplement boire un bol de lait !

[Manfred]

« L’enjeu classique, c’est l’or. Quand les sommes deviennent importantes, ça devient sacrément tendu. »
Silmandel parlait d’expérience. De telles parties, il en avait disputées. Toutefois, il se trouvait entre adultes, dans des lieux pas très fréquentables. Avec Alexandre, se serait forcément différent.
« Mais tu n’as pas de quoi me suivre sur ce terrain. Alors on peut jouer pour des gages. Ha, ne me demande pas les quels, ce sera autant à toi qu’à moi de les inventer. Et puis ça peut dépendre du coin où on va s’installer. Allez vient. D’abord on achète ce jeu, ensuite on trouve où jouer, puis... tu vas perdre ! »

[Taliesin]

Ils trouvèrent rapidement une boutique vendant ce genre d'articles et, comme pour la nourriture, ce fut Alexandre qui se chargea de la course, usant de pièces de cuivre pour ne pas attirer l'attention. Ils se dégotèrent ensuite un coin tranquille, non loin de la taverne. Il s'agissait d'une courte venelle transversale reliant deux artères fréquentées, où les risques d'agression étaient rares. De surcroit, à deux pas, il y avait une échoppe pour l'heure fermée : si on s'étonnait de les voir là, ils pourraient toujours arguer attendre son ouverture...
Ils s'assirent sur les marches d'un porche et se mirent à jouer. La partie fut disputée mais s'acheva par la défaite d'Alexandre.
-Mouais, la pioche n'a pas été mon amie. Enfin, la prochaine partie, c'est moi qui la remporterai... Bon, et en attendant, c'est quoi mon gage ?

[Manfred]

« D’affirmer, avec véhémence, que c’est bien grâce à mon coup d’éclat, et uniquement grâce à lui, que les bandits se sont enfuis ! »
Il avait déclaré cela d’un ton goguenard. Très vite, il ajouta, plus sérieux, plus malicieux aussi :
« Et après, on jouera une vraie partie. Le gage choisi à la fin, c’est bon pour les amateurs. L’enjeu doit être connu dès le début. Tu verras, c’est très différent quand tu sais à l’avance ce que tu peux gagner ou perdre. Du niveau de l’enjeu dépend l’intensité de la partie. A toi d’en décider. A toi de choisir en premier mon gage si je perds la prochaine partie. Je choisirai le tien en conséquence. Puis on se soumettra au jugement des cartes. Note que les gages ne sont pas forcément à exécution immédiate. Ça peut se passer ce soir, ou cette nuit. »

[Taliesin]

En entendait en quoi consistait son gage, Alexandre afficha une mine scandalisée.
-Quoi ? Vous voulez que je mente ?? Mais c'est un acte déshonorable ! Ah, si me dédire ne l'était pas encore davantage, je refuserais tout net !
Il poussa un profond soupir, prit une tout aussi profonde inspiration puis se lança :
-Mais si, je vous jure ! Moi, je n'y suis pour rien ! C'est seulement grâce à vous qu'on s'en est tirés ! Si si ! Voir ce que vous étiez subitement devenu, ça les a terrifiés, tellement qu'ils ont lâché leurs armes et détalé sans demander leur reste ! Vous avez, d'un coup d'un seul, transformé une situation désespérée en victoire éclatante !
Il s'était montré véhément tout en réussissant à ne pas hausser le ton, ce qui n'était pas un mince exploit...
-Bon, maintenant, passons aux choses sérieuses, reprit-il. Si je remporte la prochaine partie, vous devrez vous prosterner devant moi, me reconnaître comme votre dieu, implorer mon pardon pour vos fautes et jurer que vous ferez désormais tout ce que je vous demanderai.

[Manfred]

Silmandel fut satisfait par la déclaration d’Alexandre et très amusé par l’annonce du gage. C’était un petit malin ce gamin.
« D’accord, mais uniquement jusqu’à l’aube, ou jusqu’à ce que Clémentine revienne. Et puisque c’est comme ça, si je gagne, tu seras mon valet et donc, tu te pliera à mes quatre volontés, et avec le sourire en plus ! Affaire conclue ? »

[Taliesin]

Alexandre éclata de rire.
-Ah là là, comme vous me recopiez : c'est exactement le même gage ! Ça pourrait presque s'apparenter à de la triche... Mais bon, c'est pas forcément votre faute si vous manquez d'imagination... Alors très bien, partons là-dessus, mais seulement jusqu'à ce qu'on retrouve Clémentine ou jusqu'à demain matin, sinon, elle nous prendra pour des fous. Enfin, vous, surtout.
Et il se mit à mélanger soigneusement les cartes.

[Manfred]

« Mais la triche a toujours fait partie du jeu, déclara Silmandel avec malice. C’est même un jeu dans le jeu, avec ses propres enjeux. »
S’assurer la victoire au risque de perdre plus encore qu’annoncé.
« Même si tu n’as pas l’intention de tricher, ne l’oublie pas, parce que, tôt ou tard, tu auras affaire à des tricheurs. »
L’ensorceleur en était un. Pas forcément le meilleur qui soit, mais il se défendait pas mal et n’avait strictement aucun scrupule à fausser les parties. Pour autant, cette fois-ci, il allait jouer honnêtement.
« Que le meilleur gagne ! »

[Taliesin]

-Si j'en crois ce que vous venez de dire, ce serait plutôt "Que le meilleur tricheur gagne !", répondit-il d'un ton légèrement moqueur. Ah, je comprends mieux pourquoi vous avez remporté la précédente partie... Mais personnellement, je préfère perdre en jouant avec honneur, c'est-à-dire en respectant les règles, que gagner en en étant déloyal...
Il joua donc loyalement... Et perdit lamentablement.

HRP : Tu as du bol aux dés !

[Manfred]

HRP : comme toujours !

« Hum, hum, ça ressemble à une victoire éclatante ! Eclatante et honnête ! Qu’est-ce que t’en dis ? » déclara Silmandel, goguenard.
Sauf qu’ils n’avaient fait qu’une partie, qu’il y avait encore bien du temps à tuer et qu’il lui semblait que l’enjeu était déjà assez élevé compte tenu des contraintes de leur situation.
« Allez, un à zéro. Les gages sont d’importance. Une seule partie ne suffit pas. On va en faire une série. Le gagnant est le premier à dix points. »

[Taliesin]

Ils se remirent donc à jouer. Si certaines manches s'avérèrent expéditives, la plupart furent âprement disputées, si bien que le temps fila sans qu'ils en aient réellement conscience. Ils durent néanmoins s'interrompre en deux occasions, pour aller voir si Clémentine n'était pas arrivée. A chaque fois, ils rentrèrent bredouilles.
L'après-midi s'acheminait lentement vers sa fin lorsqu'ils en terminèrent. Le score était sans appel : dix parties reportées par Silmandel, contre seulement deux par Alexandre.

HRP : tu as vraiment TROP de chance aux dés.

[Manfred]

HRP : héhé !

« Bon et bien, il semble que le jugement des cartes soit sans équivoque ! Ça fait de moi le meilleur et de toi, mon valet ! »
Silmandel s’étira avec une nonchalance théâtrale. Il souriait, même si cela ne pouvait se voir sous son capuchon. Et d’ailleurs, à quoi ressemblait le sourire d’un chat ? Il leva les yeux au ciel. Plus que quelques heures et il serait temps d’entrer dans la taverne. Toujours pas de Clémentine... A présent, il s’était fait à l’idée qu’elle reviendrait demain. En un sens, c’était mieux. Elle ne le verrait pas ainsi. Il pourrait lui expliquer de façon... moins abrupte.
« Je suis prêt à te laisser une toute dernière chance, histoire de te prouver que je suis totalement imbattable sans même avoir besoin de tricher. On remet les compteurs à zéro et le premier à cinq gagne. Par contre, si je l’emporte encore, tu devras en plus d’être mon valet jouer la fillette. »

[Taliesin]

-Pardon ? s'exclama Alexandre.
Il avait l'air scandalisé.
-Non seulement vous trichez comme c'est pas permis mais, en plus, vous essayez de profiter de la situation ? Messire, laissez-moi vous dire que vous êtes décidément un individu très peu recommandable ! A ce prix là, je préfère encore en rester là et faire semblant d'être votre valet : de toute façon, même si je le voulais, je ne pourrais pas me faire passer pour une fille, ça crève les yeux que je suis un garçon, même quand j'ai un capuchon sur la tête. Ou alors...
Il s'interrompit un instant.
-Ou alors, on rejoue cinq parties, et si je gagne, vous devrez me traiter comme votre dieu ET vous comporter en vrai chat !

[Manfred]

« Ça marche ! J’ai déjà trouvé ton nom. Tu seras... Justine ! Non, mieux, Justinette ! Justinette ma fidèle servante ! Et tu adoreras les fées, les fleurs et les papillons ! La danse aussi ! Et le chant ! »
Silmandel se frottait les mains, sûr de l’emporter. Dix à deux, n’était-ce pas un résultat rassurant ? Et puis, il pouvait être contant, Alexandre se prenait au jeu. Attendre la soirée n’était vraiment plus un problème. Et les cartes permettaient de ne pas s’inquiéter pour Clémentine. Que demander de plus ?

[Taliesin]

-Gnagnagnagnagna, se contenta-t-il de répondre.
Ils recommencèrent à jouer, firent un détour par la Gorgée d'Orge alors que le garçon venait de remporter coup sur coup trois parties, revinrent sur leur perron et reprirent leur duel au sommet. Quelques manches encore, et c'en était terminé. Score final ? Cinq trois... pour Alexandre.
-Ah, tout de même, il y a une justice en ce bas monde ! s'exclama ce dernier. Tymora a entendu mes prières, les tricheurs ont été châtiés, les honnêtes gens récompensés ! Alors, qu'est-ce qu'on dit ?

HRP : Ouf, la chance a tourné !