[Lieu] Une cité perdue

[Taliesin]

-C'est pour cela que j'ai dit que je me ferai aider. De surcroit, le chemin jusqu'à la caserne n'est vraiment pas compliqué à expliquer. Pour le reste...
Il se tourna vers le Luménien.
-Étienne est probablement entre leurs mains, Frida est portée disparue et on n'a plus de nouvelles d’Ézéchiel. Du Conseil, il ne reste plus qu'Hubert et toi. Tant que vous êtes libres, la Communauté conserve des chefs légitimes en qui tout ses membres se reconnaissent, des chefs grâce auxquels ils garderont espoir. Soyez capturée, et la Communauté sera décapitée, n'existera plus vraiment : ce ne sera qu'un ensemble de réfugiés perdus, ne sachant plus vers qui se tourner...
Il soupira.
-Que ça te plaise ou non, tu es un symbole. En tant que tel, tu ne peux pas t'exposer inutilement.

[Galathée]

Albérich acquiesça, vaincu. A nouveau, il était menacé à cause de la place qu'il avait prise. N'apprenait-il donc rien ?
" Très bien."
Il se tourna vers Hubert. Celui-ci, pâle, maculé de sang, semblait toujours sous le choc.
" Qu'en penses-tu ?
— De quoi ?
— De rallier la caserne.
— Oh. Si vous voulez."
Le Luménien grimaça et refit face à Thibault.
" Bon, d'accord. Comme pied à terre temporaire, pour cette nuit, peut-être la suivante... dès que le groupe est rassemblé, nous bougerons par les souterrains et nous trouverons une base moins évidente."

[Taliesin]

-J'organiserai ça pendant que vous vous reposez. Parce que vous devez vous reposer : quand je vois dans quel état je suis alors que j'ai moins morflé que vous, j'ai du mal à croire que vous teniez encore debout.
Quelques minutes encore et ils auraient atteint la cité.
Mais tout indiquait que les Ithiliens n'avaient pas, pour l'heure, renoncé à les rattraper...

[Galathée]

Ils devaient fuir... et donc se séparer.
" Thibault, sois prudent, dit alors Albérich. Je suis peut-être un symbole, mais tu es notre messager. En cela, ton rôle est tout aussi crucial."
Il se tourna vers les mages.
" Ne vous sacrifiez pas inutilement. Nous aurons besoin de vous."
Il fit face à son groupe. Le paladin n'était plus capable de rien. Restaient donc Giovanni et les quatre enfants.
" Alban, Ruth, vous restez près d'Hubert. On y va."
Il n'avait rien d'un éclaireur, mais il avait un excellente mémoire, en ce compris des chemins à emprunter. Il étreignit brusquement Thibault, puis détala entre deux maisons, dans une allée obscure que personne n'avait encore empruntée.

[Taliesin]

Personne hormis, peut-être, les éclaireurs d’Ézéchiel au cours de leurs patients repérages...
Par souci de discrétion, ils ne gardèrent aucune torche allumée, comptant sur une pierre enchantée par Albérich, sur la vision d'Hubert et sur celle des jumeaux.
Ils s'étaient séparés des autres depuis peut-être cinq minutes lorsque retentit le son atténué mais caractéristique des boules de feu.
Puis il cessa et il n'y eut d'autre bruit que celui de leurs pas, que celui du sac jeté sur l'épaule de Giovanni et qui contenait une partie du trésor du tumulus.
En dehors de cela, le silence.
Le silence, les ténèbres et un sentiment poignant de solitude et d'isolement rendu plus criant encore par leur petit nombre, par le contraste qui existait entre ce calme et la frénésie des heures précédentes.
Malgré le froid qui les tétanisait chaque instant davantage, malgré la fatigue qui les faisait chanceler, ils continuèrent à progresser parmi les antiques édifices déserts.
Combien de temps marchèrent-ils ? Une heure. Peut-être plus, peut-être moins.
Enfin, alors qu'ils n'y croyaient plus, ils atteignirent la caserne.

[Galathée]

Epuisé mais soulagé, Albérich s'immobilisa devant la porte et leur fit signe d'attendre une seconde.
" Hubert, nous avons besoin de toi." dit-il au paladin.
Ce dernier acquiesça puis prit la tête.

Hubert -> Détection du mal

Il s'engagea ensuite à l'intérieur. La caserne avait peut-être été nettoyée de ses morts-vivants, mais pas de leurs carcasses. Trouver un endroit où s'installer ne serait peut-être pas si évident.

[Taliesin]

Ce ne fut pas aussi difficile qu'on aurait pu le croire, en partie parce que la magie d'Albérich, lorsqu'elle avait été lancée, avait littéralement réduit en poussière les morts-vivants. Ce sans compter les pièces qui n'en avaient pas abrité... Ils s'installèrent dans l'une d'entre elles, au rez de chaussée.
Giovanni déposa son sac puis s'assit lourdement sur les dalles glacées.
-Quand je pense que je vais devoir recommencer toutes mes esquisses... lâcha-t-il.
Il tentait de plaisanter mais le coeur n'y était pas vraiment.

[Galathée]

Albérich aurait aimé trouver quelque chose à répondre mais rien ne lui vint. Il retira sa cotte de mailles qui lui pesait sur les épaules et l'abandonna dans un coin, avant de s'asseoir contre le mur à son tour. Hubert était encore debout, scrutant la pièce voisine. Il était voûté, frissonnant, les vêtements déchirés, et aucun espoir d'en changer dans les jours à venir.
" Je vais placer un glyphe... Tu peux venir te reposer."
Le paladin murmura quelque chose en retour. Albérich se releva.
" Hubert. Viens.
— C'était Louis, dit-il alors d'une voix sourde. Louis les a menés jusqu'à nous. Louis, d'entre tous. Je vais lui arracher le coeur."

[Taliesin]

Sans doute dans un effort désespéré pour détendre l'atmosphère, Giovanni avait entrepris de se plaindre de l'état lamentable de son justaucorps - déchiré, trempé d'eau à demi gelée et de sang coagulé -, mais la déclaration d'Hubert sembla lui faire l'effet d'une douche froide.
-Louis ? Tu es sûr ?
Il n'ajouta rien, abasourdi.

[Galathée]

" Il était sur les remparts. Il m'a identifié pour l'officier ithilien."
Il secoua la tête et posa une paume sur son visage.
" Il doit y avoir une explication, intervint doucement Albérich. Il est sans doute leur prisonnier. Ils ont pu le contraindre... Cela expliquerait la disparition de la colonne...
— Une colonne peut-être constituée d'Ithiliens depuis le premier jour, se faisant passer pour des Sunites et de joyeux paysans, dit le paladin d'une voix glaciale. C'est un chevalier. Il a un code d'honneur. Même prisonnier... même prisonnier, il ne devait pas nous trahir. Robert a donné sa vie pour lui, bon sang !
— Hubert !" souffla Albérich, tout en jetant un regard inquiet vers Alban.

[Taliesin]

Alban les fixait, tout comme ses trois amis. Serrés les uns contre les autres dans un coin de la salle, aussi glacés qu'épuisés, sans doute assommés, aussi, par tout ce qui venait de se produire, ils ne faisaient pas un bruit. Mais, pour autant, ils paraissaient ne pas perdre une miette de ce qui s'échangeait.
-Il doit y avoir une explication, intervint Giovanni.
Il n'était manifestement pas revenu de sa surprise. Mais il avait suivi le regard d'Albérich.
-Et si nous voulons avoir une chance de la découvrir, il va d'abord falloir qu'on survive. Je crois que c'est là dessus que nous devrions concentrer nos pensées.

[Galathée]

Albérich s'était porté jusqu'à Hubert et il passa un bras autour de sa taille. Le paladin trembla de tout son corps, comme s'il était frappé par un sortilège invisible. Mais il ne devait pas flancher, malgré les événements de la nuit.

Albérich -> Apaisement des émotions -> Hubert

Hubert poussa un léger gémissement et recula. Albérich le tira doucement vers le mur et l'aida à s'asseoir. Il revint vers Giovanni.
" Je n'ai rien pour combattre le froid, annonça-t-il. Je peux seulement nous générer à boire et à manger. Il faut espérer qu'il y ait là-dedans un objet magique à même de nous aider. A moins qu'il ne te reste des sortilèges de feu... Mais même avec ça, nous n'avons pas de combustible."

[Taliesin]

Le Sunite sourit.
-J'ai bien une solution. Mais vous devez me promettre de n'en parler à personne, surtout pas aux praticiens des arcanes ou aux amis des êtres planaires, car ils pourraient s'offusquer...
Il avait prit un air mystérieux. Autre tactique pour changer les idées du groupe ?
-C'est un secret de barde. Transmis de génération en génération depuis la nuit des temps. A n'utiliser qu'en cas d'absolue nécessité. Alors s'il vous plait, pas de moqueries, mais du respect et... de la discrétion.
Il se mit en devoir d'incanter. Quelques instants plus tard, un élémentaire de feu se matérialisait dans la salle.
Il n'était pas particulièrement grand, pas particulièrement impressionnant. Cependant, il repoussa les ténèbres et ils ne tardèrent pas à sentir la chaleur bienfaisante qui émanait de lui.

[Galathée]

Albérich sourit à Giovanni puis se tourna vers les enfants.
" Venez plus près, vous réchauffer."
Ils n'avaient évidemment pas de couvertures pour adoucir la froideur et la dureté du sol de pierre. Mais l'épuisement pallierait au manque de confort. Il jeta ensuite un oeil à Hubert. Le paladin s'était recroquevillé, genoux pliés, visage entre les bras, et Albérich se sentit désoeuvré de le voir si mal. Il se doutait que sa dernière danse avec la mort n'y était pas étrangère, mais il ne pouvait rien faire pour lui dans l'immédiat. Comme l'avait dit Giovanni, il fallait d'abord parer au plus pressé.
" Est-ce que quelqu'un a faim, ou tout le monde veut juste dormir ?"

[Taliesin]

Les mines éreintées qui se levèrent vers lui étaient évocatrices : dormir, voilà ce à quoi tout le monde aspirait.
Restait à savoir s'ils y parviendraient, compte tenu des conditions plus que précaires...
-Reposez-vous, dit doucement Giovanni. Les Sunites étant des couches-tard, je veillerai sur votre sommeil jusqu'à l'aube.
Le barde faisait bonne figure et sa présence était réconfortante. Cependant, le regard aigu du clerc voyait au-delà des apparences et il savait à quel point il en avait gros sur le cœur.
Non, ce qui s'était produit cette nuit-là ne laisserait personne indemne.

[Galathée]

" Tu ferais mieux de dormir, toi aussi. Lathandre peut veiller sur nous." dit le clerc, tandis que les enfants s'étendaient sur le sol.
Il s'approcha de la porte.

Albérich -> Glyphe de Garde -> Porte

[Taliesin]

-Sauf que si je ne suis pas réveillé quand notre chaleureux invité retournera d'où il vient, je ne pourrai pas le remplacer...
Giovanni sourit.
-Mais en toute honnêteté, je suis tellement douillet que le froid me réveille à coup sûr. C'est infaillible, tu peux me croire : il suffit que j'aie ne serait-ce qu'un orteil hors des couvertures pour que je sois instantanément arraché au doux monde des rêves...
Il s'étendit à son tour.
-Bonne nuit, tout le monde.
Les gamins, en train de sombrer, répondirent par un vague grommellement.
Et il ne s'était pas écoulé une minute que le Sunite semblait dormir, lui aussi.

[Galathée]

Albérich traça son glyphe en psalmodiant à mi-voix, trouvant un certain apaisement dans le rythme de sa prière, l’énergie de Lathandre qui continuait à l’embraser malgré l’heure tardive, les promesses et l’espoir d’une aube nouvelle, et sous ses doigts, les runes bleues luisaient un instant avant de disparaître dans l’air froid. Quand il en eut terminé, il se retourna et tout le monde dormait. Il demeura immobile à les observer. Le barde, les quatre enfants, le paladin qui n’avait pas bougé et lui renvoyait une affreuse image de désespoir.
Tout s’était écroulé si vite et si radicalement, il avait à moitié l’impression qu’il allait s’éveiller de ce cauchemar, sur sa couche, sous le décor de mer de sa chambre à la forteresse.
Il songea à Etienne et son cœur se serra. Leur jeune chef était très certainement vivant, prisonnier, et sa détresse devait être sans limites. Il se souvint de ce qu’ils avaient échangé quelques jours plus tôt, de l’angoisse du chevalier, comme s’il avait pressenti qu’une catastrophe était en gestation. Tous ces gens qui lui avaient fait confiance et que son plus fidèle ami avait apparemment trahis. Giovanni avait raison, quoi qu’en dise Hubert, il devait y avoir une explication et s’y attarder à la nuit, après la débandade, était une très mauvaise idée.
Il songea aussi à Agathe et Rebecca, parties devant, à Barthélémy le sage, qui avait disparu, à Ezéchiel et Guillermo, qui avaient combattu et qu’on n’avait pas vu ressortir. Il s’interrogea sur le destin des paladins sunites, protégeant vaillamment leur fuite.
Ingrid qui attendait des nouvelles de sa fille.
Où étaient Roxane et Gus, Clovis et Edgar, Gaspard et Gabriel ?
Il vit défiler des visages, le forgeron et ses apprentis grognons, le palefrenier que l’aubergiste leur avait demandé de tenir à l’œil, les petits paludiers revêches, l’équipe de la vaisselle, les artisans qui avaient défilé dans son bureau…
Il eut le vertige et il s’agenouilla sur la pierre pour prier.
Lathandre.
Lathandre, c’était lui. Il lui avait fallu du temps pour comprendre, mais désormais, il savait qu’il était l’instrument que son dieu envoyait aux hommes. Il n’y avait pas d’autre salut que celui qu’ils se créeraient. Ils en auraient la force.
Dieux, à ce moment précis, il était fatigué.
Lathandre.
Les mots lui venaient aisément, comme autrefois, comme toujours, les idées s’enchaînaient sans errance, l’une après l’autre, une improvisation qui venait de l’âme, qui parlait de lumière. Il s’y arracha à regrets.
Hubert n’avait toujours pas bougé, englué dans ses mailles et son sang, beaucoup trop loin du feu. Il n’avait jamais froid, mais l’hiver qui le menaçait ne venait pas du dehors. Albérich se releva et s’approcha de lui. Il ne lui parla pas, posa la main sur son épaule puis lui releva le visage. Le paladin ne dormait pas, son regard était rougi, hanté.
« Pardonne-moi. » souffla-t-il.
Albérich posa un doigt sur ses lèvres, puis les embrassa doucement. Ensuite, il l’aida à se dégager de sa cotte de mailles et lui ôta sa chemise en lambeaux. Sous le tissu sali, sa peau était souple et chaude, comme si un feu mouvant coulait sous la surface. Le Luménien retira sa tunique et l’étala sur le sol, puis invita le paladin à se coucher. Egaré, il ne résista pas. Le clerc se servit ensuite de son manteau pour les recouvrir tous les deux. Il se nicha entre les bras d’Hubert et chercha ses lèvres. L’étreinte du paladin se resserra brusquement, lui coupant le souffle, et son amant contint un sanglot, avant de le relâcher.
« J’aurais dû…
— Chhh…
— Albérich…
— Hubert, je t’en prie. Ni toi ni moi ne sommes en état. »
Le paladin acquiesça, nichant son visage dans le creux de son cou. Albérich sentit l’humidité de ses larmes lui mouiller l’épaule. Il le serra doucement, en lui caressant le dos et lui murmurant des paroles apaisantes. Et petit à petit, il le sentit se détendre, sans doute gagné par l’épuisement, lui aussi. De son côté, il n'espérait pas dormir, mais il se rasséréna au rythme de sa respiration devenue plus régulière, tentant de se satisfaire de ce contact, de cette connivence, sans songer à rien d'autre.
Car le lendemain, dès l’aube, il leur faudrait prendre la mesure de tout ce qu’ils avaient perdu.
Ce serait bien assez tôt.

[Taliesin]

Chapitre IV :
Oppression

Contrairement à ce qu'il avait craint, Albérich dormit.
Il sombra même assez rapidement, vaincu par la fatigue, bercé par la respiration de son compagnon, environné par sa chaleur.
Puis il s'éveilla.
La pièce était plongée dans la pénombre, non dans l'obscurité : l'élémentaire avait disparu, certes, mais l'aube n'allait sans doute pas tarder à poindre.
Alentour, tout le monde dormait : Hubert tout près de lui, Giovanni recroquevillé contre le mur, les enfants pelotonnés les uns contre les autres.
Plus loin, hors de la salle, il y avait du bruit.
Des souffles, des murmures, des pas.
Il semblait que d'autres réfugiés aient atteint la caserne.

[Galathée]

Le clerc se leva. Le froid était piquant mais il n'eut pas le coeur de réveiller Hubert, lequel goûtait à une quiétude factice mais dont il avait besoin. Il alla chercher la chemise déchirée et maculée de son ami.

Albérich -> Réparation -> Chemise

Elle était beaucoup trop grande pour lui, et toujours tachée, mais ce serait suffisant pour l'heure. Il se glissa hors de la pièce, à la rencontre des nouveaux venus. Il faudrait qu'il prie bientôt, pour regagner en puissance divine, et pouvoir faire face aux jours à venir.

[Taliesin]

Il y avait des gens un peu partout, répartis par petits groupes.
Certains dormaient, d'autres veillaient.
Tous tentaient de se protéger du froid ou des courants d'air en se serrant les uns contre les autres, en s'enfouissant sous de maigres couvertures, en se rencognant dans les angles des murs...
Des visages familiers se tournaient vers lui, des mains se levaient en des saluts silencieux.
Personne ne paraissait avoir la force de l'interpeler.
Pourtant, il lui sembla que le voir faisait du bien aux colons, apportait un peu de réconfort au milieu d'un océan d'abattement.
Abattus, tous l'étaient.
Ce qui ne les avaient pas empêché d'obéir aux consignes, de venir ici.
De s'organiser, aussi.
Il nota ainsi qu'on avait placé des gardes aux portes, des guetteurs près des fenêtres...

[Galathée]

Il distribua sourires et saluts, bien qu'au fond de lui-même, il soit inquiet. Comment se prémuniraient-ils de ce froid mortel ? Il l'avait su, en les envoyant au dehors, il ne le leur avait pas caché. Mais ils ne l'avaient sans doute qu'imparfaitement mesuré. Les gens paraissaient harassés, défaits, parfois déterminés. Des réfugiés dans les ruines. Il s'en sentait responsable, même s'il n'avait pas réellement fauté. Hubert en souffrirait davantage, lui qui devait assurer leur sécurité.
Il se mit en quête de visages mieux connus, qui pourraient le renseigner sur la situation et au passage, entreprit de compter ce peuple en déroute.

[Taliesin]

Il trouva sa première véritable connaissance à la porte principale.
C'était Agathe. Elle avait les traits tirés, elle était manifestement gelée, ce qui ne l'empêchait pas de tenir fermement... Une plume et du papier.
-L'aube vient et avec elle, les serviteurs de Lathandre, souffla-t-elle.
Aucune ironie dans sa voix.
-Content de te voir, Albérich.

[Galathée]

Sans cérémonie, le clerc l'étreignit.
" Moi aussi, je suis heureux de te voir, Agathe. Heureux et soulagé." dit-il, sincère.
Il baissa les yeux sur ce qu'elle avait en main. Il sourit. Il y avait songé, lui aussi, mais elle l'avait devancé. Les membres de la communauté avaient des ressources, il ne l'ignorait pas, et ce serait plus que nécessaire dans les jours à venir.
" Je pense qu'on pourrait se servir du recensement pour comparer les listes. Giovanni l'a normalement emporté."

[Taliesin]

-Oh. je ne savais pas qu'il l'avait... Je savais juste qu'il était là, lui aussi.
Elle lorgna sa feuille.
-Cela fait donc deux bonnes nouvelles. Avec les autres, on essaie de prendre les noms des rescapés quand ils se présentent, mais sans le recensement, la mesure était loin d'être parfaite...
Elle soupira.
-J'ai un peu peur... du moment où nous prendrons conscience de tous ceux qui manquent, souffla-t-elle. Mais c'est nécessaire, je le sais bien.

[Galathée]

Il acquiesça, grave.
" Oui. Nous devrons d'ailleurs, dans un second temps, demander aux rescapés s'ils ont aperçu certaines des personnes manquantes et dans quelles circonstances. Mais le principal est d'abord qu'un maximum de personnes nous rejoignent."
Il regarda vers l'extérieur encore sombre.
" Est-ce que les Ithiliens ont continué leur traque en ville, cette nuit, ou ont-ils renoncé ?"

[Taliesin]

-Je ne peux pas te répondre avec certitude. Mais d'après Ambrosius, ils ont été refroidis par l'embuscade que ses collègues et lui leur ont tendu et... ils ont décidé de temporiser. Cela ne veut pas dire qu'ils ne se soient pas hasardés dans la cité un peu plus tard : les mages ne se sont pas attardés pour les observer. Cependant, ça ne semblerait pas impossible qu'ils aient choisi de ne pas tenter les diables. Après tout, ils ont subi de lourdes pertes...
Elle eut un triste sourire.
-Ils n'auront pas eu la partie aussi facile que ce qu'ils devaient croire. Au moins pouvons nous nous "réjouir" de cela.

[Galathée]

" Je ne sais pas." répondit simplement Albérich.
Il ne pouvait s'empêcher de penser que pour ceux qui n'avaient pas réussi à s'enfuir, leur résistance avait du empirer les choses. Il espérait que les Ithiliens resteraient dignes, mais il savait qu'un groupe conquérant avait toujours tendance à se lâcher quelque peu, surtout quand on lui en avait fait baver. Il repoussa ces pensées. Elles ne feraient que le miner, or il n'avait pas encore prié et il se sentait fragile.
" Est-ce que tu sais s'il y a des blessés ? J'ai encore un peu d'énergie divine à décharger..."

[Taliesin]

-Je crois que Thibault s'est occupé des cas les plus graves. Mais comme notre repli a été pour le moins mouvement, il reste une multitudes de foulures, d'entorses, de contusions... Et bientôt viendront les engelures et autres joyeusetés...
Elle se détourna un instant, observant les réfugiés les plus proches.
-On ne va pas pouvoir rester ici longtemps. Je me dis que les tunnels doivent être moins glacials...
Elle s'arracha un sourire.
-Ou alors on trouve les thermes légendaires qui seront chauffés, indubitablement. Ces coincés d'Oghmans ne s'intéressent pas à ce genre d'endroits...

[Galathée]

" Ne t'en fais pas... Trouver un refuge plus sûr sera notre priorité."
Installer toute la communauté dans les Thermes, voilà qui plairait sûrement à certains.
" Est-ce que tu as vu Thibault, justement ? Il est sûrement très résistant, mais j'imagine qu'il devra dormir tôt ou tard, comme le commun des mortels."