[Lieu] Une cité perdue

[Taliesin]

Cela parut durer une éternité.
Il faut dire que l'école recouvrait une surface conséquente et qu'examiner l'ensemble des murs entre lesquels devaient se trouver ses sous-sols prenait forcément du temps...
Ruth ne ménagea pas ses efforts, multiplia les tentatives. En vain, d'abord. Et Hubert la sentit se tendre, s'inquiéter, s'angoisser, même : elle devait craindre d'échouer, de décevoir la confiance qu'on avait placé en elle...
Sur la fin, elle était partagée entre fureur et désespoir.
Se produisit alors ce qui se produisait toujours : elle eut un geste d'agacement, décocha un coup à la paroi la plus proche... et fit bouger un moellon. Quand on l'eut retiré de sa place apparut un petit mécanisme qui, actionné, entraîna l'apparition d'une ouverture.
Au-delà, un couloir rectiligne, long, étroit et... absolument désert.

[Hubert de Maleval]

Hubert sourit à la gamine et, plus sérieux, fit signe à Ezéchiel. Plus vite ils seraient rentrés dans le bâtiment, mieux ce serait. Les Ithiliens étaient très proches, il ne fallait pas tenter le fiélon. Cette fois, il envoya Thibault à l'avant-garde, demeurant derrière pour surveiller le couloir et refermer derrière eux. Il lui confia Ruth, cependant, pour qu'elle puisse les aider à progresser en cas de nouveau cul-de-sac.

[Taliesin]

Mais... Ils n'entrèrent même pas.
Ezéchiel, torche à la main, avait passé quelques instants à examiner le couloir. Son attention alertée par quelque chose, il murmura à l'oreille de Thibault qui, aussitôt, incanta.
-Vous aviez raison, annonça-t-il. Ce que vous avez remarqué sur le sol, là-bas, est bien un symbole magique... Par contre, je ne sais pas quels sont ses effets.

[Hubert de Maleval]

" Et nous n'avons rien pour le dissiper, je présume." dit Hubert, redoutant déjà la réponse.
Un glyphe, à n'en pas douter. Ils auraient pu le prévoir, dans une université de la magie.
" Bon... On pourrait sans doute envoyer des hommes pour repérer les accès par la rue, mais ne risquons-nous pas de tomber sur le même genre de choses, quelle que soit l'issue ? Sinon, nous pouvons forcer le passage... avec une créature invoquée ? Ou rebrousser chemin et revenir mieux préparés demain."
Ce qui était probablement la pire des options, vu la proximité des Ithiliens.

[Taliesin]

-Je peux convoquer une créature, effectivement. Ou tenter de dissiper cette protection... La seule chose qui m'inquiète, c'est que s'il y en a beaucoup du même genre, je finirai par être à court de sortilèges.
-On en a quelques-uns en réserve aussi, tu sais, fit Gabriel.
-J'ai emporté le Passepierre, au cas où, intervint Giovanni. Cela nous permettrait d'éviter les passages trop bien protégés.

[Hubert de Maleval]

" Le Passepierre ne fonctionne que pour une personne, non ? demanda le Paladin. Ce que je crains, avec la créature, c'est de déclencher quelque chose qui va alerter tout le monde à trois couloirs d'ici... Hum."
Il avança d'un pas pour regarder la marque. Peut-être y reconnaîtrait-il quelque chose... du genre des inscriptions présentes sur les portes. Mais même si c'était le même langage, ça ne signifierait pas qu'il était immunisé contre quoi que ce soit.
" Une zone de silence, est-ce qu'on a ça en réserve ? Et une protection contre les énergies négatives, quelque chose comme ça ?"
Misère, Thibault avait raison : ils manquaient de ressources magiques pour affronter pareil endroit.
" Ruth, regarde un peu s'il n'y a pas un panneau de contrôle qui nous permettrait de désactiver tout ça..."
On pouvait toujours rêver. C'était le propre des Lathandrites, on le lui avait rappelé.

[Taliesin]

Malgré la distance, il lui sembla remarquer quelques vagues similitudes entre le symbole qui leur bloquait le passage et ceux qui apparaissaient sur les portes du palais lorsqu'il les touchait.
-Je crois que la brève ouverte par le Passepierre demeure tant que celui-ci reste à l'intérieur... souffla Giovanni.
-J'ai rien trouvé... soupira Ruth quelques minutes plus tard.

[Hubert de Maleval]

Hubert posa une main amicale sur l'épaule de la gamine puis dévisagea Giovanni, incrédule.
" C'est... si radical ? Mais pourquoi..."
... ne nous en servons-nous pas pour faire évader tous ceux qui sont dans la forteresse, alors ? songea-t-il sans le dire.
" Enfin bref. Alors contournons celui-ci. Le panneau de contrôle est peut-être de l'autre côté. L'un dans l'autre, on ne peut plus rester dans le couloir."

[Taliesin]

-Il faudra quand même en user avec parcimonie, car je crois qu'il a un nombre d'utilisations limité...
Mais, pour l'heure, c'était la solution la plus prudente.
Et, surtout, ils n'eurent pas le temps d'hésiter : en effet, un éclaireur surgit à ce moment là, annonçant que les Ithiliens se rapprochaient.
Il fallait donc soit aller de l'avant et refermer la porte secrète derrière eux, soit rebrousser chemin en direction du palais. Pour peu que ce soit encore possible...

[Hubert de Maleval]

Ils optèrent donc pour le passemuraille et l'université, Hubert laissant le soin à Giovanni d'ouvrir le passage et à Ezéchiel de mener le groupe, comme il l'avait fait depuis le début de leur escapade.

[Taliesin]

Ainsi fut fait : Giovanni utilisa l'objet et l'expédition au grand complet s'engouffra par la brèche ainsi ménagée.
La porte donnant sur les souterrains se referma, avec un léger grondement, sitôt que le dernier éclaireur l'eut franchi.
Le passage dans le mur disparut, sans le moindre bruit, sitôt que Giovanni l'eut emprunté.
Ils se trouvaient à présent dans une vaste salle quasiment nue. Au centre, le sol était gravé d'une vaste étoile à cinq branche entourée d'un cercle lui-même orné de symboles inconnus. Sur son pourtour, de hauts candélabres encore munis de bougies étaient disposés.

[Hubert de Maleval]

" Fouiller cet endroit va être une horreur, qu'est-ce qui nous est passé par la tête..." dit Hubert à mi-voix.
Il se tourna vers les trois mages et le barde.
" Vraiment, nous allons avoir besoin de vos conseils. Je sais que c'est une culture ancienne mais... vous seuls avez des semblants de notions sur ces choses..."

[Taliesin]

Les magiciens s'entreregardèrent, opinèrent du chef.
-Ce lieu m'a tout l'air d'être une salle d'invocation, fit Luwyn. Le pentacle, le cercle de protection, les candélabres : malgré les différences dues à l'évolution des rituels au fil du temps, les similitudes sont trop flagrantes pour être une simple coïncidence. De surcroit, il n'est pas rare, dans les établissements voués à l'enseignement de la magie, que les salles vouées aux entraînements ou aux expérimentations les plus dangereuses soient situées en sous-sol. Une mesure de sécurité..

[Hubert de Maleval]

Il jeta un regard circulaire autour d'eux.
" C'est bien notre veine... Bon, donc, si je vous suis... On contourne, on ne touche à rien, on cherche une issue, quelque chose comme ça ? Ou bien on ne risque rien sans les bonnes formules magiques ?"

[Taliesin]

-On ne risque absolument rien sans les bonnes formules magiques, assura Luwyn.
Erwan lui fit remarquer qu'il existait cependant une possibilité pour que les mages aient du fuir au beau milieu d'un rituel, si bien que toucher quelque chose serait susceptible de mener celui-ci à terme et de faire apparaître quelque créature indésirable. Autre hypothèse : ils s'étaient carapaté juste après l'apparition de leur invocation. Son collègue lui opposa que si tel avait été le cas, celle-ci serait encore à l'intérieur du cercle de protection, mais il lui répondit qu'elle aurait eu des siècles pour parvenir à effacer l'une ou l'autre rune, se libérant du même coup et pouvant se promener à sa guise dans le bâtiment.
Débuta alors un débat animé entre les quatre praticiens des arcanes, débat qui fila de plus en plus vers des points de théorie ou de pratique totalement obscurs pour les non-initiés.
-Il vont mettre de l'ambiance, ceux-là... souffla Giovanni à l'oreille d'Hubert.

[Hubert de Maleval]

" Misère, dit Hubert. Pourquoi est-ce qu'on est venus ici ? Nous n'avons manifestement pas les compétences pour mener cette fouille à bien sans courir des risques..."
Il prit une profonde inspiration.
" Silence ! On contourne, comme ça, pas de danger. Ezéchiel, le terrain est à toi."

[Taliesin]

Ils contournèrent donc les symboles magiques et gagnèrent la porte, laquelle donnait sur un couloir partant loin vers la droite et vers la gauche. Sans doute était-ce dans ce même couloir que débouchait celui par lequel ils étaient entrés, et sa porte devait être la première sur leur gauche. Mais il y en avait beaucoup d'autres...
Ézéchiel envoya deux trios d'éclaireurs explorer le corridor, en leur demandant de revenir s'ils apercevaient, sur le sol ou les murs, le moindre glyphe, le moindre symbole.
Puis il se tourna vers Hubert :
-Fouillons-nous toutes les salles ?

[Hubert de Maleval]

Hubert soupira.
" Pour bien faire, oui. Si l'objectif est de ravir toute la puissance magique disponible au nez des Ithiliens... Nous ne pouvons pas prendre le risque de leur laisser justement l'artefact qui fera la différence... Même si je doute de notre capacité à le reconnaître, pour être honnête. Ecoute, commençons par être exhaustifs à ce niveau-ci. Nous aviserons en fonction du temps que cela nous prendra. Mais prenez un mage ou deux avec vous. Ils vous aideront, j'espère, à déterminer ce qui vaut la peine d'être fouillé en détails et ce qui peut faire l'objet d'un simple coup d'oeil."
Une seule journée pour toute une université. Il leur aurait fallu arrêter le temps. Mais ils feraient de leur mieux. Et vite, maintenant.

[Taliesin]

Ils n'eurent pas affaire à de nouvelles protections et purent jeter un œil aux multiples pièces des sous-sols. Jeter un œil seulement car, de l'avais des mages, il n'était pas nécessaire de faire davantage : la plupart des salles étaient vouées aux exercices ou aux expériences dans à peu près toutes les disciplines magiques et si elles contenaient du matériel en plus ou moins bon état, elles ne renfermaient, du moins en avaient-ils l'impression, aucun artefact susceptible de faire la différence face aux ithiliens. Il y avait également des réserves, de boissons - alcoolisées - et de nourriture notamment, mais si la manière dont leur contenu avait traversé les siècles demeurait remarquable, c'était bien moins impressionnant que pour le palais.
-C'est plus comme la bibliothèque, souffla Ruth. Une magie super puissante qui conserve les choses mais... Moins bien que chez nous. Enfin, qu'au refuge, je veux dire.

[Hubert de Maleval]

Puisqu'ils avaient le sac de contenance, Hubert demanda aux hommes de ramasser tout ce qui semblait encore plus ou moins consommable. Les clercs avaient des sorts de purification de la nourriture qui chasseraient efficacement l'effet du temps. Il ouvrit aussi l'oeil au cas où des couvertures auraient survécu, ou n'importe quel type de vêtements. Mais Ruth avait raison : la conservation avait moins bien fonctionné ici, aussi les chances étaient-elles maigres.
Quand ils en eurent terminé avec les caves, le paladin suggéra à Ezéchiel de monter à l'étage... pour autant qu'ils aient découvert les escaliers.

[Taliesin]

Ils en avaient même découvert plusieurs, ce qui était fort logique : du temps où l'établissement était en fonctionnement, ceux qui y étudiaient, qui y enseignaient ou qui s'occupaient de son fonctionnement quotidien avaient eu besoin de fréquemment descendre aux caves...
Le rôdeur leur fit emprunter celui qui, d'après son estimation, déboucherait a proximité de l'entrée du bâtiment. Il ne s'était pas trompé : peu après avoir atteint le sommet de la volée de marche, ils débouchaient dans un vaste hall à colonnes, à la fois austère et imposant. Une haute double porte de métal ouvragé donnait sur l'extérieur, de même que maintes fenêtres poussiéreuses par lesquelles se faufilait la lumière d'un matin ensoleillé. D'autres ouvertures étaient visibles, menant vers les diverses parties de l'édifice.
Les mages s'étaient à nouveau lancés dans un grand débat. Selon toute vraisemblance, ils se demandaient s'il n'y aurait pas des similitude entre cette école et l'université de la magie de Luménis, ce qui permettrait de s'y retrouver plus facilement...

[Hubert de Maleval]

Hubert les laissa palabrer un moment tout en envoyant l'équipe d'Ezéchiel faire ses premières reconnaissances dans les environs immédiats. Même s'il était encore très tôt, ils devaient faire vite et ratisser le bâtiment sans tarder. Il garda néanmoins Ruth avec lui. Les éclaireurs les préviendraient s'ils tombaient sur des énigmes...

[Taliesin]

Malheureusement, le débat entre les praticiens des arcanes n'aboutit pas à grand chose. De ce qu'Hubert put en entendre, les mages estimaient que les tours étaient indispensables pour pratiquer leurs activités. Or, cet édifice n'en comprenant pas, ils étaient comme privés de points de repère...
De temps à autre, des éclaireurs venaient lui faire leur rapport. Le rez-de-chaussée comprenait surtout des lieux voués aux activités du quotidien - cuisines, salles à manger, dortoirs -, des locaux dévolus à l'accueil des visiteurs ou à l'administration... Rien de très palpitant, donc.
Cependant, des escaliers menaient aux étages, lesquels, selon toute vraisemblance, seraient plus intéressants.
Le souci, c'est qu'au pied de chacun d'entre eux, des symboles étaient gravés dans le sol... Des symboles magiques, évidemment.

[Hubert de Maleval]

Il fallait traverser, pourtant. Ils ne pouvaient pas avoir fait tout ce chemin en vain. Il organisa un semblant de conciliabule avec Thibault et Ezéchiel.
" Bon, je propose qu'on tente le coup de la créature invoquée. Si elle passe sans heurts, nous aviserons... Avec un peu de chance, elle désactivera le glyphe..."
Même si les mages avaient piégé leur université, ils n'auraient jamais imaginé de sortilèges assez puissants pour la détruire.

[Taliesin]

Ses comparses acquiescèrent et, aussitôt, se mirent en marche.
Suivant un large couloir en leur compagnie, Hubert aperçut bientôt le pied d'un superbe escalier de marbre s'élevant élégamment vers les hauteurs. Le petit groupe s'immobilisa, Thibault convoqua un petit être de flammes et l'envoya en avant.
La créature avait parcouru à peine la moitié de la distance la séparant des marches lorsque le symbole, devant elle, se mit à briller.
L'instant suivant, l'invocation s'était volatilisée.

[Hubert de Maleval]

" Je me demande si c'est lié à nouveau au sang céleste, dit Hubert à Giovanni. Cela dit, j'ai promis de ne pas prendre de risques et comme je n'ai pas tellement envie d'être désintégré, je vais laisser les bestioles s'en charger."
Pour le reste, c'était à nouveau à Ezéchiel de prendre la tête de leur cortège, en espérant que les étages seraient plus riches en trouvailles que le rez de chaussée...

[Taliesin]

Il le fut.
Outre de nouveaux escaliers prouvant qu'il y avait un second étage et des salles de cours petites ou grandes - certaines formant des amphithéâtres n'ayant rien à envier à celui du palais -, les éclaireurs rapportèrent la présence de plusieurs bibliothèques. Quand à Ézéchiel en personne, il vint annoncer la découverte d'une galerie aux allures de musée : on y trouvait des bustes - sans doute ceux des plus éminents personnages de l'histoire de l'établissement - mais également des vitrines renfermant sceptres, baguettes et bourdons.

[Hubert de Maleval]

Il fallait espérer que tout cela n'était pas piégé, mais Hubert devinait qu'Ezéchiel devait avoir, parmi ses hommes, des personnes douées de ce genre de compétences. Aussi, une fois que la voie fut déclarée libre, il se tourna vers son groupe.
" Bon, les mages, vous vous occupez des bibliothèques. Essayez de faire un tri grossier de ce qu'il faut embarquer et ce qu'on peut laisser. Giovanni, Thibault, vous allez dans la galerie. Nous autres, les soldats, nous vous servirons de porteurs : nous n'avons qu'un sac de contenance, il faudra faire des allers-retours. Ruth, tu restes avec moi."
Il se tourna vers Ezéchiel.
" Si vous en avez fini de cette partie... autant poursuivre plus haut, je suppose."

[Taliesin]

-Il va falloir que je demande à Thibault de m'ouvrir la voie mais sitôt que ce sera chose faite, nous irons explorer le dernier étage.
Il s'en fut, de même que toutes les personnes à qui Hubert avait confié une tâche.
-Si on trouve un chouette sceptre, vous pensez pas qu'on pourrait l'offrir à Alban ? finit par demander Ruth qui, si elle vivait mal son immobilisme forcé, n'en laissait absolument rien paraître. Pour remplacer celui qu'il a déjà, je veux dire... Il est bien, c'est sûr, mais pas très... fiable.

[Hubert de Maleval]

" Ça dépend... Si ça vous rend encore plus téméraires, je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée, dit le paladin, tout en s'engageant dans l'escalier. Mais si j'arrive à vous extirper la promesse de ne vous en servir que pour des raisons défensives... Un sceptre qui génère un cercle de protection par exemple, ou quelque chose comme ça... Je pourrai l'envisager."
Il avait l'intention d'aller superviser l'examen de la galerie et entraîna la petite fille dans cette direction, suivant les derniers membres de l'expédition.