[Lieu] Une cité perdue

[Taliesin]

Nouvel acquiescement.
-Je ferai mon possible : je ne suis pas un sauvage. Juste un peu franc du collier, disons.
Il fixa Hubert.
-Et tu te leurres si tu me penses moins sensibles à certaines choses. Je suis simplement convaincu que la mort est parfois préférable à la servitude. Cependant, je ne crois pas que ce soit le cas ici, d'autant que cette servitude n'est que provisoire.

[Hubert de Maleval]

" Je ne te crois pas insensible, Varamyr, excuse-moi si je me suis mal exprimé. Je ne voulais pas présumer, encore moins t'insulter. Je pense juste que... Giovanni pourrait avoir... une baisse de régime... et je ne suis pas sûr que la manière forte soit la manière la plus efficace de le requinquer. Mais je le sous-estime sans doute et je m'inquiète pour rien."
Il haussa les épaules.
" Je te fais confiance, sans arrière-pensée."

[Taliesin]

-J'essaierai de ne pas te décevoir.
Il observa son lynx, revint au paladin.
-Je ferai en sorte de n'employer la manière forte que si c'est absolument nécessaire. Par contre, j'ai une question à te poser... Jusqu'où devons-nous aller pour ne pas être capturés ?

[Hubert de Maleval]

" J'aimerais autant que vous ne preniez pas de risques inconsidérés, dit le paladin. A part ça..."
Il soupira.
" Est-ce que tu es en train de me demander si je pense que vous devriez vous... supprimer plutôt que d'être pris ? Ou bien si vous avez l'autorisation de massacrer quelques Ithiliens au besoin ? Parce que l'autorisation, vous l'avez."

[Taliesin]

-Voilà qui répond au deuxième point sur lequel portait ma question. Mais le premier demeure sans réponse.
Le Paludier fixait toujours Hubert.
-L'autre point, tu l'as deviné. En ce qui me concerne, les choses sont claires comme de l'eau de roche : jamais personne ne me prendra vivant. Reste à savoir ce qu'il en est pour Giovanni. Je sais, c'est horrible d'envisager cela mais... C'est nécessaire. S'il est capturé, il révélera l'emplacement de notre base, laquelle sera aussitôt assiégée. Et comme il est impossible d'user de magie à l'intérieur de ses murs, vous serez faits comme des rats : incapables de sortir, incapables de mander du secours...

[Hubert de Maleval]

Hubert ferma une seconde les yeux.
" Varamyr, c'est à lui qu'il faut poser cette question. Je ne pourrais jamais te demander de le tuer, même si c'est la chose... raisonnable à faire. C'est au-delà de mes forces... et hors de mon champ de décisions. S'il est pris, s'il révèle l'emplacement de notre refuge... Nous ferons face aux conséquences. Mais tu peux lui poser la question."

[Taliesin]

-Voilà qui ne va pas faciliter nos relations...
Varamyr secoua la tête.
-Écoute, je lui en parlerai mais seulement si c'est incontournable. Dans le cas contraire, si aucune capture ne paraît imminente, je m'abstiendrai. S'il est aussi sensible que tu le dis, mieux vaut ne pas lui charger l'esprit avec ça en plus.

[Hubert de Maleval]

" Effectivement."
Il soupira.
" Ne vous faites pas prendre, Varamyr. Nous avons besoin de vous."
Il sourit.
" Mais je sais que je ne dois pas te dire ça. Vous partirez sans doute en milieu de matinée... Nous voulons procéder à de l'espionnage magique avant de vous envoyer physiquement sur place. Mais je te tiens au courant. Je vais aller parler à Giovanni, maintenant."

[Taliesin]

Hubert trouva comme annoncé le barde dans la salle du trésor, en compagnie de ses apprentis. Il leur expliquait manifestement quelque chose avec sérieux mais enthousiasme, et les gamins l'écoutaient avec la plus grande des attention. Néanmoins, la leçon s'interrompit sitôt que l'on prit conscience qu'un visiteur était arrivé.
-Les gars, je crois que le moment est venu pour vous d'aller retrouver Ruth et Alban : ils doivent s'ennuyer, sans vous.
Les jumeaux l'observèrent un instant mais, sans s'offusquer d'être ainsi congédiés, sortirent de la pièce - non sans avoir respectueusement salué le paladin.

[Hubert de Maleval]

Hubert n'oubliait pas qu'il devait encore invoquer Grand Vent pour Alban, mais cela attendrait ce dernier entretien. Le paladin se chercha un siège puis se tourna vers le barde. Ici encore, tergiverser ne servait à rien.
" Vous partirez demain en milieu de matinée. Toi et Varamyr. Nous vous dirons exactement ce que nous attendons de vous avant que vous ne vous mettiez en route. Je sais que tu voulais y aller seul, mais voilà... Je crois que ce sera plus sûr comme ça."

[Taliesin]

Le barde poussa un profond soupir. On le sentait tout sauf ravi.
-Soit.
Il hésita, sembla sur le point de dire quelque chose puis de se raviser.
-Faisons comme ça, alors.
Laconique, pour le moins, ce qui ne lui ressemblait guère. Et, en tout cas, montrait qu'il ne voulait pas épiloguer.

[Hubert de Maleval]

Hubert s'attarda, pourtant, mal à l'aise. Une part de lui avait envie d'en rester là, l'autre hésitait à faire une déclaration, n'importe laquelle.
Ta contribution nous est cruciale.
Je sais que c'est dur.
S'il y avait un moyen, je te jure que je t'épargnerais une chose pareille.
Tu as la force qu'il faut.
Nous les sauverons.
Je viendrai te chercher si tu es pris.
Mais il voulait aussi respecter le désir du barde de ne pas en dire davantage. Il avait l'impression de le trahir et dans le même temps, sa fragilité l'irritait. Mais Varamyr le protégerait contre les Ithiliens et contre lui-même.
Il voulut s'excuser, se ravisa à nouveau. C'était ridicule. Cela ne changerait rien à la nécessité pour Giovanni de se faire violence. Objectivement, dans le contexte, c'était peu de choses.
" Je vais te laisser. Nous nous verrons demain." souffla-t-il finalement.

[Taliesin]

-Bonne nuit, Hubert.
Il sembla d'abord que Giovanni allait s'en tenir là mais, sur un nouveau soupir, il reprit.
-Et ne te mets pas martel en tête : il était indispensable que je joue à nouveau les espions, étant le mieux placé pour cela. Quant au fait que je vive mal cette nécessité d'avoir une manière de nourrice pour m'épauler... Bah, mon amour propre prendrait un coup bien plus grand si j'étais asservi, alors...

[Hubert de Maleval]

" Giovanni..."
Hubert résista, résista, puis craqua.
" Giovanni, quand je monte au combat, je n'y vais jamais seul. Est-ce que mon amour-propre en prend un coup, de ne pas pouvoir tuer l'univers entier à moi seul ? Que devrais-je dire, moi qui ai été sauvé in extremis par votre intervention quand je suis rentré dans le tumulus avec Robert ? L'amour-propre... On doit le remiser devant la nécessité. Varamyr n'est pas une nourrice. C'est un rôdeur expérimenté. Les couloirs sont pleins d'Ithiliens, c'est une mission dangereuse. Ce serait folie que de t'envoyer là-bas seul. Si cela te vexe... Il est temps que tu prennes pied dans la réalité."
Plus furieux qu'il ne l'avait anticipé, conscient qu'il y avait là à la fois irritation et sentiment de culpabilité, le paladin préféra quitter la pièce. Il finirait par se montrer franchement désagréable, et c'était la dernière chose qu'il voulait. Heureusement que Varamyr avait un sang froid à toute épreuve, lui.

[Taliesin]

Mais il ne s'éloigna pas assez vite pour manquer la réplique qui suivit. Furieuse, elle aussi.
-Du suicide ? Alors pourquoi vous m'y avez envoyé seul, la première fois ? Qu'est-ce qui a fondamentalement changé, depuis ? RIEN ! Alors arrête de te payer ma fiole !
Puis ce fut le silence.

[Hubert de Maleval]

Hubert ne releva et s'en fut, bouillant de son côté. Les gens étaient incapables de prendre soin d'eux-mêmes et ils ne supportaient pas qu'on puisse vouloir le faire à leur place. Mais c'était son métier, il était paladin, protecteur, garde du corps, il était obligé, par essence, de veiller sur autrui. Il se rendit compte que dans son état de fureur, aller chercher Alban n'était pas une bonne idée. Grand Vent, par contre, lui apporterait de l'apaisement. Il décida donc d'invoquer le cheval d'abord, le temps de se calmer, puis il irait chercher l'enfant. Comme Varamyr était dans les jardins, le paladin mit le cap vers l'un des autres espaces verts de l'étage, espérant le trouver désert.
Une fois seul, il tempéra sa colère, et appela le cheval. Grand Vent se matérialisa et il l'enfourcha, le laissant se déplacer au gré de ses envies. Son mouvement et sa chaleur le rassérénèrent presque instantanément, mais il s'offrit le droit d'une déambulation paresseuse. Il fallait qu'il prenne sur lui, lui aussi. Tant pis si Giovanni lui en voulait. Toutes ces émotions négatives n'apportaient rien de bon à personne et il fallait que certains d'entre eux parviennent à conserver leur sang-froid. Albérich, sans doute, demeurerait de marbre. Hubert se sentait parfois... si jeune. Si mal préparé. Malgré le drame qui l'avait jeté hors de Luménis et forcé à s'enfuir, il n'avait pas connu de tragédie personnelle, de guerre civile... Il était resté protégé. Cela lui donnait un enthousiasme intact... mais aussi une étrange incompétence.
Il se demanda si son sang céleste n'aurait pas dû le rendre plus serein. Pourquoi se sentait-il fiévreux comme un fiélon, s'il était fils de ces êtres extérieurs qui observaient le monde avec détachement ?
Questions stériles.
Il mit pied à terre et abandonna Grand Vent un moment pour aller chercher Alban.

[Taliesin]

Aucun de ses écuyers n'était présent dans la salle commune. Ils avaient pris soin, toutefois, au cas où on les chercherait, de prévenir qu'ils se rendaient aux thermes en compagnie de leurs amis. Entre le conseil, plus long que de coutume, les démarches d'Hubert auprès de Varamyr et de Giovanni ainsi que le temps qu'il avait passé dans les jardins avec Grand Vent, il se faisait tard et Alban avait dû estimer que ses obligations empêcheraient son maître de lui donner, ce soir-là, une leçon d'équitation.

[Hubert de Maleval]

Il était tard, en effet, et Hubert n'était en réalité pas d'humeur à faire conversation avec l'enfant. Mais il était aussi furieux de n'avoir pas, une fois encore, tenu ses engagements. Il avait pourtant l'impression de ne pas avoir chômé. Le fait que ses manquements le mettent dans un état de tension pareil le conforta dans l'idée que voir le gosse n'était sans doute pas une bonne idée. Il voulait s'excuser, cependant, et c'est ce qu'il fit en se rendant aux thermes. Quand il aurait souhaité la bonne nuit aux gamins, il se mettrait en quête du seul remède possible à sa tension : Albérich.
En espérant qu'il n'ait pas décidé de passer la soirée à boire avec Thibault, bien sûr...

[Taliesin]

Les enfants, qui s'amusaient sans se priver, lui souhaitèrent également bonne nuit avant de retourner à leurs jeux aquatiques. Alban ne semblait pas lui en vouloir le moins du monde, ce qui n'était guère étonnant : il avait parfaitement conscience des obligations qui étaient celles d'Hubert et des priorités criantes vers lesquelles celui-ci devait se tourner. Bref, pas de souci de ce côté-là.
Bonne nouvelle également en ce qui concernait Albérich : non, il n'avait pas décidé de passer la soirée avec Thibault.

[Hubert de Maleval]

Hubert déchargea sa tension dans une étreinte un peu brutale, improvisée presque sans préliminaires dans une salle du deuxième étage. Dès qu’il en eut terminé, il fut envahi par la honte d’avoir usé du clerc de la sorte, mais ce dernier ne dit rien, se contentant de rassembler ses vêtements tout en reprenant son souffle.
Il voulut se confondre en excuses, préféra s’écarter, conscient qu’il n’y en avait aucune.
« Ne t’inquiète pas, comme ça. » finit par dire Albérich.
Le paladin se contenta de secouer la tête et de s’écarter davantage. Le clerc le rejoignit, posa une main sur sa hanche et le força à le regarder.
« Qu’est-ce qui ne va pas ?
— Je n’aurais pas dû…
— J’en avais envie, moi aussi. Arrête de te faire des… épopées d’un rien. »
Hubert posa le front contre le sien et acquiesça doucement.
« Il n’empêche…
— Tu es tendu. Moi aussi. Ces choses arrivent. C’est plutôt bien, d’avoir un exutoire aussi agréable.
— J’aurais voulu que les choses se passent autrement… ailleurs… sans tout… ce danger autour de nous. »
Ils s’étreignirent.
« Ces temps viendront, murmura Albérich. Si tu me disais ce qui te hante, maintenant… »
Le paladin secoua la tête.
« Je me suis accroché avec Giovanni. C’est juste un symptôme, en réalité… L’expression de ce sentiment de… menace… je suppose. D’impuissance. D’incertitude.
— Ce n’est pas parce que tu es conseiller que tu n’as pas le droit d’être sur les nerfs.
— Je sais, c’est juste… j’en deviens moins tolérant… aux petites humeurs de chacun. On dit qu’un commandant doit rester le chef de ses hommes, et ne pas devenir leur ami. Quand Giovanni s’offusque d’être chaperonné… Je me dis que c’est vrai. Que j’aurais peut-être dû rester le chef. Si je l’étais resté, il ne se permettrait pas ces petites sorties hostiles, qui ensuite me minent le moral…
— Mais la communauté n’est pas structurée de la sorte…
— Je sais. Je dois prendre mes distances.
— Je pense que c’est important que tu puisses… trouver un équilibre.
— Je ne suis pas sûr. Je suis trop… proche de mes hommes. Du coup, même en situation de crise, ils discutent mes ordres. C’est arrivé pendant l’attaque de la forteresse… Même un gars comme Edgar, habitué à obéir… »
Il secoua la tête.
« C’est risqué, je crois, au final. Je ne devrais pas leur permettre cette insubordination. Mais tout part du fait que je me sens illégitime… Robert m’a co-opté sans savoir ce que je valais. Et j’ai déjà prouvé que j’étais une tête brûlée… Hum.
— Diable, Hubert, non. Pas maintenant. »
Le paladin soupira.
« Tu as raison. Je me laisse atteindre à tous niveaux.
— Oui, et c'est... stupide. Hubert, aie foi, je t'en prie. Nous allons nous en sortir...
— Je sais. C'est juste..."
Albérich prit son visage entre ses mains et le regarda droit dans les yeux.
" Arrête. Descendons. Nous avons été absents trop longtemps. »
Il l’embrassa doucement. Hubert le serra plus fort, déstabilisé.
« Nous avons besoin de sommeil. »

[Taliesin]

Ils prirent donc le chemin du retour. En passant devant la pièce qui leur tenait lieu de bibliothèque, ila aperçurent de la lumière, signe que quelqu'un y travaillait encore - les mages, peut-être, ou bien Marthe, comme elle l'avait annoncé. En revanche, la salle commune était plongée dans une obscurité quasi complète : tout le monde y dormait ou, du moins, y était couché. Les écuyers et leurs amis occupaient leur place habituelle mais pas Giovanni, aux abonnés absents.

[Hubert de Maleval]

Hubert en prit note, bien sûr, mais se força à ne pas y songer. Il aurait aimé que Giovanni ne soit pas aussi esseulé face à ce qui l'attendait, mais il ne pouvait rien y faire, n'étant pas d'humeur à se coltiner l'irritation du barde. Chacun avait son poids à porter, et il n'avait aucune envie de servir de quintaine. Les choses étaient déjà bien assez compliquées en l'état.
Il se coucha donc, près du clerc, et dans le noir, Albérich lui prit la main. Ce simple contact le rasséréna. Il repoussa Giovanni hors de son esprit et se retrouva dans les rues de Maleval, un soir d'été. Quelqu'un marchait devant lui, en sautillant sur le chemin de terre qui menait de la rivière à la forge. C'était Clémence, avec son sourire espiègle, une chanson au coin des lèvres... Elle devait avoir douze ans...
Et la piste du sommeil se déroula dans les hautes herbes...

[Taliesin]

Un tunnel envahi de ténèbres que les flammes de torches, dérisoires, peinent à repousser.
Ues gravats, des rochets repoussés de côté, libérant un passage.
Plus loin, une porte, marquée d'un sceau.
Un sceau qui iuit dans les ténèbres.
Un sceau qui, soudain, se brise, vole en éclats.
Un souffle brûlant, presque incandescent.
Un grondement assourdissant.
Une clameur insoutenable sortant de milliers de gorges.
Humaines ? Pas sûr.
Une faille, enfin, telle une geule béante.
Qui vomit...
Qui vomit...
Hubert se redressa brusquement, essoufflé, trempé de sueur.
Autour de lui, le calme de la salle commune endormie.
Ce devait encore être le milieu de la nuit.

[Hubert de Maleval]

Un rêve, c'était juste un rêve.
Un cauchemar.
Ou pas. Une prémonition. Une... vision ?
Il se leva précipitamment. A côté de lui, Albérich se retourna dans son sommeil.
Hubert pensa le réveiller puis s'abstint. A quoi bon l'effrayer. C'était juste un rêve, le fruit des angoisses de la journée écoulée.
Mais il ne se rendormirait pas aisément.
Il enjamba précautionneusement les colons allongés qui le séparaient de la sortie de la pièce et alla jusqu'au couloir. Il avait besoin de marcher un moment, calmer les battements de son coeur.
Quelque chose s'était produit.
Ou alors se produire.
Quelque chose de dramatique.
Les Ithiliens avaient creusé trop profond. Ou allaient le faire.
Etait-ce trop tard ?
C'était juste un cauchemar.

[Taliesin]

Les couloirs qu'il arpenta étaient déserts, sombres et silencieux.
Plus de lumière dans la bibliothèque ni dans aucune des autres salles devant lesquelles il passa : tout le monde dormait, à moins que quelq'un ne se soit réfugié beaucoup plus loin, voire dans les étages.
Partout, un calme profond.
Pourtant, la désagréable sensation que lui avait laissé le cauchemar mit du temps à se dissiper. beaucoup de temps.

[Hubert de Maleval]

Il ne croyait plus que c'était un cauchemar. Mais il avait à moitié espéré croiser la devineresse paludière dans les couloirs. Or elle n'y était pas. Si quelque chose de grave s'était produit, sans doute l'aurait-elle perçu, elle aussi... A moins que... son sang céleste avait deviné l'ombre. Albérich avait parlé de conflits entre puissances extérieures. Les humains avaient creusé jusqu'à ouvrir une porte vers quelque chose... ou alors ils avaient réussi à l'enfermer, avec l'aide des planaires... Il ne savait pas, il n'y connaissait rien, tout était beaucoup trop confus.
Il savait qu'il ne dormirait plus, cependant.
Le programme de la journée à venir lui semblait subitement ridicule. Peut-être devaient-ils à tout pris interrompre les activités à la mine. S'il n'était pas trop tard. Il était peut-être trop tard. Les... créatures des profondeurs étaient peut-être en train de se répandre dans le ventre de Clairétoile...
Ou c'était un cauchemar.
Non.
Il continua à déambuler, en proie à une agitation qui ne s'éteindrait probablement même pas avec l'aube.

[Taliesin]

Les heures succédèrent aux heures sans qu'il ne croise personne.
Puis il sentit, au pplus profond de son être, que le soleil n'allait plus tarder à se lever.
Cela le réconforta, sans toutefois effacer complètement son malaise.
A quelque distance de là, dans la salle commune, les Lathandrites devaient commencer à s'éveiller...

[Hubert de Maleval]

Il intercepta le Luménien dès qu'il sortit de la pièce, manifestement surpris de ne pas l'avoir trouvé près de lui. Son expression s'altéra dès qu'il fut suffisamment près pour distinguer ses traits.
" Hubert, tu n'as pas dormi."
Ce n'était pas une question.
" Albérich, j'ai fait un cauchemar... Je crois que c'était une vision ou... une prémonition... Quelque chose s'est libéré ou va se libérer, dans la mine, je crois, je ne sais pas...
— Calme-toi, dit le clerc en posant la main sur son poignet.
— Il faut que nous fassions quelque chose, rapidement...
— Oui, nous allons prier. Ensuite, nous en parlerons. Mais sans énergie divine, nous ne serons utiles à rien."
D'autorité, il l'entraîna vers la salle où ils procédaient à leurs prières. Hubert ne se défendit pas, mais il ne put pas non plus contenir un gémissement.

[Taliesin]

Il gagnèrent la pièce coutumière - déserte, car Gabriel, comme toujours, arriverait bon dernier -, se concentrèrent, entrèrent en transe.
Communièrent avec leur dieu, ce qui les emplit d'une énergie lumineuse, électrisante.
Lorsqu'ils reprirent pied dans la réalité, le jeune Lathandrite faisait de même. Il leur sourit, radieux, puis se dirigea d'un pas allerte en direction de la salle commune où, désormais, la majeure partie de la Communauté devait avoir rejoint le monde de l'éveil.

[Hubert de Maleval]

Albérich rattrapa Gabriel en quelques pas.
" Gabriel, peux-tu animer une courte cérémonie ce matin ? Nous devons réunir le conseil dans l'instant mais je ne veux pas que les habitudes soient bouleversées. Puis-je compter sur toi ?"
Hubert se sentit soulagé : malgré l'énergie positive qui les avait envahis, le clerc avait gardé leur conversation à l'esprit.