[Lieu] Le Pont des trois Sires

[Galathée]

Victor lui sourit dans sa brume.
" Merci d'être mirésicordieux.
— C'est miséricordieux.
— Gnagnagna."
Il s'était levé et alla d'un pas lent vers les escaliers. Il était stable, cependant, et ne chuterait pas dans les escaliers.
" Il a voulu imiter les compétiteurs, je parie." dit Baptiste, avec une grimace désolée.

[Taliesin]

-C'est en partie ma faute : je pensais qu'il n'y avait aucun risque à le laisser regarder les duels mais... j'aurais dû être plus vigilant, le connaissant. Enfin, j'imagine qu'on ne l'y reprendra plus de sitôt. C'est une leçon un peu trop rude, peut-être, mais qui au moins... a des chances d'être efficace.
Il se leva.
-Mais si nous voulons avoir le temps de nous promener un peu avant le repas... Mieux vaut se mettre en route sans tarder.

[Galathée]

Baptiste sauta sur ses pieds et l'accompagna vers la sortie. Quelques secondes plus tard, ils étaient dans la rue devant l'auberge. A la lumière du jour, on pouvait mieux apprécier sa façade imposante aux colombages de bois. Elle paraissait de construction relativement récente à partir de la moitié du premier étage. Il faisait nettement plus frais que la veille et le ciel restait voilé, la terre battue devant l'auberge s'était muée en boue, mais il y avait de la circulation, principalement des gens à pied, quelques cavaliers, peu de chariots.
" Il y a tout un port fluvial, dit Baptiste. Des péniches qui descendent des villes naines, si j'ai bien compris."

[Taliesin]

-Allons y jeter un œil. De toute façon, j'imagine que c'est depuis les berges du fleuve qu'on peut avoir les meilleurs aperçus du pont...
Restait à traverser la rue sans trop se salir...
Pour le reste, ils n'étaient pas pressés et pouvaient donc prendre tout leur temps pour se promener. Puisqu'ils étaient là toute une journée, ils pouvaient remettre à l'après-midi la recherche d'une carte. Et la réservation de trois places dans un coche partant tôt le lendemain matin : ainsi, au final, n'auraient-ils "perdu" qu'une demi-journée.

[Galathée]

Ils se promenèrent ainsi un moment dans les rues. L’activité du Pont était principalement commerciale, il semblait y avoir très peu d’habitations. Ils virent de nombreux entrepôts le long des berges, théâtres d’un va-et-vient constant entre les quais où étaient amarrés les bateaux et les espaces de stockage. On déchargeait du minerai, principalement, à l’aide de petits chariots posés sur rails. Le tout était animé mais plutôt sale, et ils s’en écartèrent pour gagner des rives plus épargnées, en aval. Ils eurent alors une vue magnifique sur l’ouvrage qu’avait permis la collaboration entre elfes, nains et humains. C’était un ensemble hybride, étrange dans son mélange de styles, mais qui avait traversé bien des crues sans flancher. Baptiste était très impressionné et il essaya de reproduire le pont dans son carnet, bien que l’architecture ne soit pas son domaine favori.
Ensuite, ils remontèrent vers l’auberge, car il était déjà midi. Ils retrouvèrent Victor, encore un peu éteint, dans la grande salle : le tournoi intervillages avait repris par une compétition d’Hermines, et le gamin observait les adversaires jouer dans le plus grand silence. La moyenne d’âge était sensiblement plus élevée que la veille au soir, lors des affrontements musculeux au bras de fer.
Baptiste s’installa près de son frère et ils commentèrent les parties en cours à mi-voix, tandis que Taliesin leur commandait un repas. Victor, bon prince, écouta le récit de Baptiste pendant le repas, et celui-ci ne fut pas avare de partage.
Quand ils eurent terminé, ils retournèrent tous les trois dans la rue. Baptiste proposa de les mener au relais de coche, mais la serveuse — qui avait fait sa réapparition — leur apprit que le meilleur vendeur de cartes se trouvait de l’autre côté du Pont.

[Taliesin]

Après avoir remercié la serveuse, il se tourna vers les garçons.
-Commençons par le relai de coche : comme nous sommes trois, comme nous avons de surcroit une monture, mieux vaut s'y prendre tôt pour être sûr d'avoir de la place. Ensuite, nous irons acheter une carte. Nous pourrons en profiter pour visiter l'autre partie du bourg.
Ainsi auraient-ils, au final, un aperçu global des lieux.

[Galathée]

Situé en périphérie du bourg, le relais de coches était un vaste bâtiment de plain pied, en U, dans l'enceinte duquel on pénétrait en passant sous une petite arche de pierre jouxtant une seconde, beaucoup plus large, qui laissait passer deux coches de front. Juste à gauche du passage pour les piétons se trouvait le bâtiment où les voyageurs pouvaient venir réserver leurs places et attendre, tandis que les deux autres accueillaient les véhicules, les chevaux et les cochers. La cour était momentanément vide de tout convoi, mais le maréchal ferrant en occupait un des coins, avec ses assistants, et était en plein travail.
Taliesin et ses deux fils purent donc entrer dans la salle de vente. Il y avait trois comptoirs, un pour chaque compagnie, et chacune vantait ses services à grands renforts de panneaux de bois peint. La Compagnie de la Trouée était symbolisée par un cheval au grand galop, gris fer, et se targuait d'être la plus rapide. La Compagnie de la Lumière garantissait un trajet sans tracas, et était représentée par un soleil levant devant lequel on apercevait la silhouette d'un coche. Enfin, la Compagnie d'Helonna avertissait le voyageur qu'elle l'emmènerait "n'importe où, n'importe quand, dans l'instant". Son panneau était orné de la forme de l'île parsemée de traits dorés représentant — sûrement — les mille itinéraires proposés.
Victor verbalisa ce qu'ils pensant sans doute tous trois.
" Et on choisit comment, en fait ?"

[Taliesin]

-Au jugé, j'imagine. Quelle réclame vous inspire le plus ?
Il se frotta le menton.
-Autre option : on opte pour la compagnie nationale, à laquelle il y a des chances que nous devions nous adresser tôt ou tard puisque notre périple nous mènera au-delà de la Trouée...

[Galathée]

Les deux garçons regardèrent leur père, un peu interdits, l'un et l'autre.
" Heu... Moi je dirais que c'est toi qui dois décider... dit finalement Baptiste.
— Parce que... c'est toi l'adulte, tu vois, renchérit Victor.
— Donc on fera comme tu décides.
— Mais le cheval, il est quand même plus beau que le soleil."

[Taliesin]

-Et si je décide que c'est vous qui décidez, hum ? fit-il d'un ton dégagé.
Puis il sourit largement.
-On va commencer par la compagnie d'Helonna. De toute façon, il n'est pas impossible que nous devions faire les trois avant de trouver des places ou un horaire qui nous convienne.

[Galathée]

Mais il se trompait. Le jeune homme qui se tenait derrière le comptoir l'informa qu'un coche quitterait le Pont dès le lendemain matin, en direction de Rohan. C'était un véhicule six places, dont deux étaient déjà occupées, tout confort, pas de soucis pour le cheval, arrêts à midi et le soir. La nourriture n'était pas fournie et le prix du logement n'était pas compris, mais ils devaient s'engager à dormir dans les hostelleries sélectionnées par la compagnie, sur le parcours. Le cocher avait déjà plusieurs voyages bien plus longs à son actif et disposait à tout moment de potions de soins en cas de pépin. Mais il n'y avait jamais de pépin. La somme demandée était raisonnable, sans doute comparable à ce qu'on leur demanderait ailleurs. Il fallait évidemment payer d'avance et être là une demi-heure avant le départ, pour l'installation des bagages.

[Taliesin]

Puisque tout semblait convenir, l'elfe paya la somme demandée puis, saluant l'employé, regagna l'extérieur en compagnie des enfants.
-Bien, à présent, l'autre rive nous attend !
Son seul regret était que le voyage en coche ne serait pas très palpitant pour eux... Mais peut-être avaient-ils emporté des livres ? Sinon, il serait toujours temps d'y remédier. Ou d'acheter un jeu de cartes, par exemple.

[Galathée]

Traverser le Pont s'avéra moins aisé. Il était très étroit par rapport à la quantité de personnes désirant l'emprunter, et il fallait respecter un pas et une trajectoire précis, pour ne pas bloquer le trafic ou entrer en collision avec les voyageurs venant dans l'autre sens. L'elfe et les deux enfants durent donc patienter un bon moment dans une file disparate avant de pouvoir s'engager sur l'ouvrage ancien, sous le regard concentré de gardes. Ils étaient précédés par un chariot transportant des sacs de farine et suivis par deux cavaliers qui discutaient des mérites architecturaux du Temple de Sunie d'Antelucas par rapport à celui d'Eredhun et ne parvenaient pas à se mettre d'accord.
Pendant le trajet, Victor les distrait en leur proposant de s'inventer un nom de scène pour les nombreux concerts qu'ils donneraient dans la Vallée. Il ne manquait pas d'imagination et déblatérait énormité sur énormité, en fonction de ce qu'ils croisaient en sens inverse. Comme on transportait beaucoup de produits de la ferme, les propositions manquaient d'un certain raffinement...
Une fois de l'autre côté, ils trouvèrent facilement le comptoir où on vendait des cartes. C'était en fait un bazar calibré pour l'aventure sous toutes ses formes, et le tenancier, un homme jovial d'une cinquantaine d'années, les accueillit avec le sourire.

[Taliesin]

Après l'avoir salué avec son affabilité coutumière, Taliesin s'enquit des cartes dont il disposait : même si l'endroit devait receler bien des choses intéressantes, il préférait commencer par l'essentiel, d'autant que leurs finances n'étaient pas infinies et qu'ils avaient déjà emporté le nécessaire. Toutefois, il n'empêcha pas les garçons de divaguer à leur guise dans l'échoppe - après leur avoir toutefois demandé de ne toucher à rien, de se contenter de regarder.

[Galathée]

L'homme s'avéra bien embêté car il n'avait jamais entendu parler de Vauxgrisants et s'il disposait de plusieurs cartes de la Vallée du Nirvana, elles étaient généralistes et présentaient l'intégralité de la région, en figurant les grandes villes et les hameaux de bonne taille. Il en cèderait volontiers une à Taliesin, mais il lui conseilla plutôt de se rendre à l'Antre des Plans Fameux, à Togoria, où il trouverait absolument tout ce dont il pouvait rêver en matière de cartes... de la Vallée et d'ailleurs. D'ici là... le coche ne se perdrait pas et la plupart des meneurs d'équipage pouvaient servir de guide si on voulait obtenir des informations sur les villages traversés.

[Taliesin]

Après l'avoir chaleureusement remercié pour son conseil - un commerçant qui ne cherche pas à vendre à tout prix et qui indique même à ses clients qu'ils peuventt trouver mieux ailleurs, ça ne courrait pas les rues ! -, Taliesin dit qu'il le suivrait mais que, loin de partir immédiatement, il allait plutôt jeter un coup d’œil à ses autres marchandises. Après tout, qui sait s'il ne dénicherait pas quelque chose susceptible de s'avérer utile durant la suite de leur périple ?

[Galathée]

Le marchand vendait corde et torches, besaces et bâtons de marche, parchemins vierges et fioles vides, du matériel de cuisine et de quoi allumer un feu, des bâches en toile cirée et des petits sacs à dos, quelques potions de base, pour voir dans le noir ou alléger la fatigue, des bougies, du fil à coudre, quelques parchemins de sortilèges très simples, des cannes à pêche, de l'huile et des lampes correspondantes, des outils, du savon, des couvertures de toutes les couleurs.
Il y avait aussi un petit présentoir d'objets rapportés d'autres expéditions, statuettes et pierres semi-précieuses, souvenirs pour ceux qui n'avaient pas le courage d'explorer les ruines eux-mêmes.

[Taliesin]

Tout en examinant les différents objets avec attention, il dressait une liste mentale de leurs possessions et essayait de voir ce qui pourrait avantageusement venir s'y ajouter. Un surcroit d'huile pour leur lampe, par exemple, ne serait pas de trop. Voire quelques bougies, si elle venait à se casser... Des sacs à dos de petite taille pouvaient aussi avoir leur utilité, surtout durant les fouilles au cours desquelles ils n'emporteraient pas en permanence l'entièreté de leurs effets...
Il surveilla également les garçons du coin de l’œil. On ne savait jamais : ils pourraient dénicher quelque chose d'intéressant ou... manifester quelque enthousiasme subit.

[Galathée]

Mais les garçons ne repérèrent rien de spécial, et une fois que Taliesin eut choisi quelques menues fournitures, ils purent regagner l'extérieur. A priori, Baptiste n'était pas très motivé à l'idée de refaire la file aussi rapidement, mais Victor parvint à le convaincre en lui parlant des épreuves du tournoi intervillages auxquelles ils pourraient peut-être assister s'ils se dépêchaient. La traversée fut encore plus lente dans l'autre sens car les voyageurs étaient plus nombreux à se rendre à Luménis qu'à quitter la capitale. Victor proposa de la faire à la nage la fois suivante, ce qui paraissait assez audacieux, compte tenu du courant de la rivière en dessous d'eux. Il y avait sans doute un bac, cependant, mais personne ne leur en avait parlé.
Ils parvinrent donc à nouveau sur la rive sud de la Lézarde et les deux gamins se renseignèrent auprès du premier quidam qu'ils rencontrèrent sur l'endroit où avaient lieu les affrontements. Ils apprirent ainsi qu'un concours de tir à l'arc avait lieu dans un champ voisin, qu'on ramait sur la rivière et qu'il y avait de la danse dans une grange plus loin.

[Taliesin]

Il les laissa libres de choisir ce qu'ils voulaient voir, du moment que tous deux réussissent à se mettre d'accord.
Et en attendant qu'ils y parviennent, il se livra mentalement à quelques pronostics.
A son avis, ils n'opteraient pas pour la danse : même si Victor n'avait rien contre se démener au son d'une musique endiablée, même si Baptiste avait un peu dansé la veille, il les voyait mal assister à pareil concours. Non, à son avis, cela se jouerait plutôt entre la rame - après tout, en tant que Luméniens, ils devaient aimer les sports nautiques - ou le tir à l'arc.

[Galathée]

Ils optèrent pour le tir à l'arc. Ils convinrent assez rapidement que Taliesin était meilleur que le meilleur des compétiteurs et se demandèrent s'il pourrait, l'année suivante, représenter Pré-aux-Clercs. A la pause, ils abandonnèrent le champ et coururent jusqu'au bord de l'onde pour regarder les rameurs. La rivière était brune, charriant la boue que l'orage avait précipité dans son lit, et le courant d'allure paresseuse filait en réalité bien plus vite qu'il n'y paraissait. Le concours opposait de fines barques à six rameurs, qui avançaient contre le mouvement naturel de la Lézarde, avec peine. Victor et Baptiste encouragèrent d'abord les bleus, puis les jaunes, firent des paris sur la course suivante, envisagèrent de créer une équipe avec les frères Merlus et de s'entraîner sur la petite rivière qui coulait au fond du bois.
Le ciel, déjà, fonçait à l'est.
Une odeur de viande rôtie flottait dans l'air et ils abandonnèrent le bord de l'eau, où les moustiques devenaient nombreux, pour gagner la place devant l'auberge où trois boeufs avaient été mis en broche. Encore une nuit qui promettait d'être mouvementée pour le voisinage...

[Taliesin]

Mais qui le serait moins pour eux trois. Pour les garçons, surtout : puisqu'ils partaient tôt le lendemain matin, il ne les laisserait pas veiller aussi longtemps que le soir précédent, même s'il ne les enverrait pas forcément au lit sitôt le repas terminé.
Le repas, d'ailleurs... Lui-même n'avait rien contre une part de bœuf grillé : cela lui faisait même plutôt envie. Cependant, il laissa à nouveau le choix aux garçons, sachant que Baptiste aurait peut-être envie de quelque chose de plus élaboré.

[Galathée]

Mais les garçons s'étaient glissés dans l'ambiance festive et ils firent la file avec les autres convives pour recevoir leur part de boeuf à moitié calcinée. Ils bavardèrent ensuite de leurs observations de l'après-midi, la meilleure technique pour faire pénétrer la rame dans l'eau, la bonne manière de bander son arc quand la cible était très éloignée, puis demandèrent à Taliesin de leur raconter comment il avait appris à tirer à l'arc, avec qui, et où. Derrière eux, les musiciens accordaient leurs instruments — parmi eux l'elfe de lune qui avait longuement parlé au barde le matin.
Victor piquait du nez avant d'avoir terminé son assiette, cependant, et il s'excusa pour aller se coucher. Baptiste, lui, ne semblait pas pressé, mais il surveillait aussi Taliesin du coin de l'oeil, pour s'assurer de ne pas manquer le signal du départ.

[Taliesin]

Il leur avait répondu sans hésiter, parlant un moment de sa famille adoptive : c'était elle qui lui avait appris à tirer et... c'était de son père qu'il tenait l'arc qui se trouvait dans leur chambre. Il n'avait pas manqué, non plus, d'adresser un salut amical au jeune elfe quand leurs regards s'étaient croisés.
Enfin, trois quarts d'heure environs après le départ de Victor, il annonça qu'il était temps de monter se coucher. Mine de rien, sa nuit n'avait pas été aussi longue que cela et il craignait d'être entraîné dans quelque activité s'il s'attardait trop. Bref, mieux valait se montrer raisonnable.

[Galathée]

Baptiste ne broncha pas un instant et ils rentrèrent dans l'auberge — qui était comble malgré la foule à l'extérieur — et entreprirent la longue ascension jusqu'à leur chambre. Sur le palier du premier, Baptiste s'immobilisa, les sourcils froncés, comme s'il allait faire une grande déclaration.
" L'arc que t'a donné ton père... Il a plus de 100 ans, alors ? Est-ce que c'est parce qu'il y a un sortilège sur le bois, qu'il est toujours en aussi bon état ?"

[Taliesin]

Il acquiesça.
[color=#FFFFF66]-Oui, il est empreint d'une certaine magie. Rien d'extraordinaire mais... c'est toutefois suffisant pour le préserver du temps et en faire une arme légèrement supérieure à la moyenne. Je n'ai jamais su comment mon père a procédé, s'il l'a fabriqué entièrement lui-même ou s'il a demandé de l'aide. Ce que je sais, c'est que tous les membres de notre fratrie en ont reçu un identique.[/color]
Il eut un souvenir nostalgique.
-C'est miraculeux qu'il ait survécu jusqu'ici... Ou plutôt que je sois parvenu à le conserver. Et j'en suis très heureux : j'y tiens beaucoup. Pas que je sois foncièrement matérialiste mais... C'est quelque chose de très fort, symboliquement. Et c'est l'un des rares objets qu'il me reste de cette époque.

[Galathée]

Baptiste reprit son ascension.
" C'est sûr qu'avec tout ce qui t'est arrivé, c'est assez miraculeux... murmura-t-il. Moi il ne me reste absolument rien d'autrefois. Mais je sais que le commandant des paladins de Luménis m'a gardé l'épée de ma mère."
Il haussa les épaules sans se retourner.
" Je ne crois pas que je me servirai jamais d'une épée. L'arc me tente davantage."

[Taliesin]

Lui s'était immobilisé, extraordinairement gêné.
-Je te demande pardon, Baptiste. Souvent, ma langue s'agite plus vite que mon cerveau et... Enfin voilà, désolé pour ma maladresse.
Souligner que l'arc était une des rares choses qu'il lui restait de son enfance remontant déjà à plus d'un siècle devant un gosse qui avait tout perdu quelques années plus tôt... Pouvait-on imaginer être plus stupide ?

[Galathée]

Baptiste s'immobilisa et se retourna, surpris.
" Oh, non, tu ne dois pas t'excuser ! C'est nous qui avons parlé de l'arc les premiers, et c'est moi qui ai relancé le sujet... J'y pensais, juste."
Il s'empourpra.
" Je suis désolé de t'avoir mis mal à l'aise. Ce n'était pas mon intention."
Il reprit rapidement son ascension.

[Taliesin]

Bigre.
-Alors je me suis mépris. Et je suis désolé que tu sois désolé que je sois désolé. fit-il d'un ton plus léger.
Sur cette tentative pour détendre l'atmosphère - mais qui montrait assez qu'ils n'étaient pas sortis de l'auberge s'ils commençaient à s'embarrasser mutuellement -, il se hâta à sa suite.