L'antre d'Asmodeus

[Asmodeus]

Le changement de ton mais surtout le fait que la liche se soit découverte en retirant son masque étaient révélateurs et encourageant pour entamer un dialogue sur un mode serein et constructif. Et pour répondre à ces gestes de bonne volonté de la part de Dame Irélia, l’élu divin répondit honnêtement à sa question. De toute façon, mentir ou cacher la vérité aurait été de la pire des maladresses alors même que Grêle pouvait rectifier tout ce dont il avait été le témoin :

- Asmodeus est le gardien de cette partie du cimetière de Melandis et de ses occupants légitimes et vous vous trouvez dans ses quartiers personnels. Une affaire l’a mené en Gisombre – la recherche d’un objet que souhaite acquérir l’une de ses connaissances – et c’est là qu’il a rencontré Grêle. Comme votre serviteur s’est montré courtois et qu’il lui a parlé de vous, Asmodeus a accepté de retourner à son domaine pour lui donner asile en votre absence.

[Le Façonneur]

« C’est aimable à vous. »

Dame Irélia promena son regard ardent sur les différents rayonnages qui l’environnaient. Elle fit quelques pas, lut quelques titres silencieusement avant de reporter son attention sur Asmodeus.

« Que cherchez-vous en Gisombre ? » lui demanda-t-elle avec un certain intérêt.

Grêle refit son apparition. Il s’était apparemment débarrassé du masque, mais celui-ci ne devait pas être très loin car le Morbide avait fait vite.

[Asmodeus]

Asmodeus esquissa un sourire amusé et son regard brilla d’une vive lueur d’intelligence lorsqu’il répondit d’un ton calme en montrant bien qu’il contournait volontairement la question :

- Un objet. Ou plutôt un fragment d’objet. Asmodeus peut-il vous demander si vous posez cette question par simple curiosité ou si vous pensez pouvoir l’aider dans sa recherche ? Il ne voudrait pas marcher - par mégarde cela va de soi - sur les plates-bandes d’une personne telle que vous !

De son point de vue, il préférait garder un certain secret et prendre les précautions d’usage avant de révéler de manière irréfléchie l’objet de sa recherche.

[Le Façonneur]

« Quelle manière singulière vous avez de vous exprimer. C’est... original. »

Dame Irélia s’approcha du maître des lieux, son pas assuré étant ponctué par celui de son bâton heurtant le sol. Elle s’immobilisa juste devant lui. La momie put sentir l’odeur acre qu’elle dégageait.

« Je peux aider si j’y trouve un intérêt. Je peux aider, si j’ai à faire à des gens intéressants. La Gisombre est mon terrain de chasse depuis maintenant presque un demi siècle. Peut-être pourriez-vous me faire visiter votre domaine tout en discutant d’une éventuelle... entraide ? »

La liche se montrait ouverte mais il était clair qu’elle n’était pas du genre à perdre son temps.

[Asmodeus]

Asmodeus n'était pas dupe : la manœuvre de la liche était destinée à l'intimider mais aussi et surtout à le jauger. L'élu divin n'était pas du genre à perdre son sang-froid et il n'avait pas bougé d'un pouce quand Dame Irélia l'avait approché. et pour renforcer encore cette impression de contrôle et d'assurance, il répondit d'une voix sereine à la remarque de son invitée :

- Asmodeus ne doute pas qu'il soit possible de trouver un terrain d'entente. Que souhaitez vous visiter en premier : la bibliothèque, le laboratoire, la salle du trône ? Asmodeus dispose également de sarcophages très confortables si vous préférez vous poser un moment.

[Le Façonneur]

« Une salle du trône... rien que ça. Seriez-vous intéressé par le pouvoir ? Le contrôle ? »

Il était difficile d’interpréter le ton de Dame Irélia. Derrière son affabilité se devinait une grande dureté. Pour le reste, c’était trouble. Asmodeus pouvait néanmoins se douter qu’il ne fallait pas s’attendre à une once de générosité de la part de son interlocutrice. Seule une âme des plus noire pouvait accepter de devenir une liche. Cette dernière se remit à observer la bibliothèque.

« Ma foi, vous semblez avoir là une collection assez étoffée.
- Certains ouvrages m’ont l’air très intéressants, fit remarquer servilement Grêle. C’est le prédécesseur d’Asmodeus qui les a rassemblés.
- Intéressant.
- Il y a même une collection complète des Mystéria, par là.
- Très intéressant. »

Forcément, le serviteur de Dame Irélia faisait son rapport. La momie se rappela qu’une journée durant il avait sauté d’un livre à l’autre, probablement dans l’unique but de les évaluer et d’en dresser la liste à la liche.

[Asmodeus]

Asmodeus n'avait pas douté un instant qu'inviter Grêle dans son domaine revenait à livrer bon nombre de précieuses informations à la liche. Et il avait tout autant conscience qu'il vivait à présent un moment décisif : il avait accepté de montrer une partie des trésors qu'il gardait jalousement.

C'était un jeu à double tranchant : il voulait montrer à Dame Irélia qu'il était en capacité de payer son aide par les informations dont il disposait et grâce à sa position de puissance. Mais la liche pouvait tout aussi bien tenter de s'en emparer si elle jugeait que ses chances de profit dépassaient les risques qu'il représentait. Il était donc urgent de reprendre la main sur la discussion afin de l'orienter comme il le souhaitait :

- Evidemment, ces trésors ont suscité bien des convoitises qui ont précipité la mort du prédécesseur d'Asmodeus. Il n'a pas été aisé de les préserver mais il était primordiale de garantir que tout cela ne puisse être utilisé que par les bonnes personnes.

Un sous-entendu clair : les bonnes personnes étant bien entendu Asmodeus et les personnes qu'il considérait comme ses alliés.

[Le Façonneur]

La liche eut un rire sans joie. Elle tendit une de ses mains vers un livre et le retira. Elle l’ouvrit, le feuilleta et un mince sourire se dessina sur ses lèvres desséchées. Elle le referma avec un petit bruit sec avant de le présenter à Asmodeus.

« Je trouve cela assez ironique. »

L’ouvrage s’intitulait "Science de la Noire Énergie" et était rédigée par une certaine Irélia de Hantelac.

« J’étais encore jeune, alors... Mes collègues magiciens me trouvaient... insensée. À présent, ils ne sont plus que poussière. Dites-moi donc ce que vous cherchez Asmodeus et on verra si nous allons nous aider ou nous opposer. J’aime quand les choses sont claires. »

[Asmodeus]

Tiens donc ! Cette liche était décidément très habile et entendait certainement marquer plus nettement son ascendant en produisant la preuve de son savoir séculaire par ce simple geste en apparence anodin. Asmodeus l’aurait presque félicitée si la manœuvre n’était tournée contre lui. Comme un avertissement pressant et un avantage à faire valoir dans une négociation éventuelle.

Dans ces conditions, il était plus prudent de jouer carte sur table et ne pas risquer d’envenimer leur discussion :

- Asmodeus cherche un certain fragment de miroir. Un objet puissant mais dont il n’aura pas personnellement l’usage. Cela dit, on lui a fait une bonne offre pour le retrouver.

Une façon de laisser la porte ouverte : non seulement cela signifiait qu’il ne se risquerait pas forcément à une confrontation très dangereuse pour le récupérer mais il était ouvert à une négociation si l’objet était aussi convoité par la liche.

[Le Façonneur]

« Un fragment de miroir... Intéressant. Vous piquez ma curiosité. »

Il était difficile de juger si Dame Irélia convoitait l’objet en question, mais en tout cas, rien ne le laissait penser. Et sa curiosité semblait réelle.

« De quel miroir s’agit-il ? Il doit être très spécial pour que quelqu’un se donne la peine d’employer une momie de votre rang et de l’envoyer fouiller la Gisombre. »

La liche avait cessé de regarder la bibliothèque, concentrant son attention sur Asmodeus.

[Asmodeus]

Asmodeus était bien conscient de ne disposer que de peu d’informations : d’une part, cela évitait de trop en révéler à celle qui pouvait toujours se trouver être une rivale potentielle mais, d’autre part, il n’avait pas envie de paraître en position d’infériorité en révélant un trop grand besoin de son aide :

- Le commanditaire d’Asmodeus ne lui a pas révélé les détails concernant cet objet mais l’aura qu’il dégage lui fait penser qu’il saura aisément le localiser dans la Melandis de Gisombre. Il sera alors temps de réévaluer sa valeur et le marché qu’il a passé.

[Le Façonneur]

Dame Irélia garda le silence un instant, tout en continuant de fixer Asmodeus, comme si elle cherchait toujours à le jauger, lui ou ses paroles. Finalement, elle déclara :

« Je n’ai pas connaissance de ce morceau de miroir, mais s’il s’agit d’un objet de valeur, de puissance, je pense savoir où le trouver. Moi, je suis en quête d’un ouvrage bien particulier. Si vous êtes capable de m’aider à l’obtenir, il se pourrait que je vous aide en retour. Montrez-moi donc votre laboratoire. J’aime les laboratoires... »

[Asmodeus]

Une vague hypothèse et une promesse d’aide future et mal définie contre une assistance bien concrète et immédiate… Le marché ne semblait pas vraiment à son avantage et Asmodeus avait l’intention de négocier pour obtenir plus de détails avant de donner fermement sa parole.

- C’est par ici, veuillez suivre Asmodeus. Et donc, que pouvez-vous lui dire sur ce livre et la façon de l’obtenir ?

[Le Façonneur]

« Le livre en lui-même, c’est mon affaire. Inutile donc d’aborder ce sujet. Quant à la façon de l’obtenir, c’est en fait assez simple, simple à expliquer. La Melandis de la Gisombre est gouvernée par un monarque sur le déclin, le Roi de Cendre. Le livre se trouve dans sa citadelle. Il se pourrait que votre morceau de miroir s’y trouve également. Le roi a fait main basse sur nombre d’objets puissants. Il faut se servir avant que d’autres le fassent. »

Disant cela, la liche emboita le pas à Asmodeus.

« Le chaos qui règne à Melandis va croissant. Des conflits entre divers factions se multiplient. Il faut savoir bien s’entourer pour s’aventurer dans ses rues sans courir de risque inconsidéré. »

[Asmodeus]

La momie conservait son apparence flegmatique et accueillante mais bouillonnait intérieurement : comme avec le Façonneur, on ne lui donnait pas plus de détail qu’on ne le ferait pour un simple exécutant. Que le secret soit de mise, Asmodeus pouvait le comprendre, mais il n’aimait pas cette impression de se retrouver mêlé à des intrigues dont il ignorait presque tous les tenants et aboutissants. C’est néanmoins du même ton patient qu’il répondit :

- Si Asmodeus résume : vous proposez que nous nous introduisions dans la citadelle de ce Roi des Cendres où vous êtes certaine de récupérer le livre que vous cherchez. Mais rien ne garantit qu’Asmodeus puisse y trouver ce qu’il cherche. Qu’y gagnera-t-il dans l’éventualité où le miroir soit détenu par une autre faction que la chute du Roi pourrait considérablement renforcer ?

[Le Façonneur]

« Je gage que le trésor du Roi des Cendre contiendra assez de choses intéressantes pour vous satisfaire. Nous nous partagerons les gains équitablement et peut-être que vous apprendrez des informations utiles sur votre morceau de miroir durant ce périple. Ça me semble être un marcher honnête », répondit Dame Irélia avec aplomb.

[Asmodeus]

Asmodeus n’était pas naïf : il savait que traiter avec les liches était toujours à double tranchant : on ne pouvait s’attendre à ce qu’elles tiennent leurs engagements que tant qu’on leur restait utile. Il se garderait donc bien de conclure un pacte avec son invitée car il serait certainement le seul qui se sentirait engagé à le respecter.

Les arguments de Dame Irélia étaient sensés et logiques mais le Gardien sentait que, malgré tout, elle lui cachait bien plus que ce qu’elle voulait bien lui révéler. C’est pourquoi il enchaîna par une question en arrivant à l’entrée de son laboratoire :

- Vous qui les avez déjà affronté - c’était une supposition qui ne faisait aucun doute dans son esprit – à quoi devrait-on s’attendre si on devait affronter le Roi des Cendres ou ses gardes ? Connaissez-vous un moyen pour entrer dans son palais sans s’y frotter ?

La réponse de la liche le renseignerait sur ce qu’il voulait vraiment savoir - en tous cas il l’espérait – et notamment si elle cherchait à assouvir une vengeance personnelle contre cet ennemi et peut-être même si elle avait déjà effectué une tentative pour le voler et qui puisse expliquer son récent revers.

[Le Façonneur]

« Le Roi de Cendre est un démon, un puissant démon. Il contrôle une horde de monstres qui comprend nombre de morts-vivants. Sa citadelle est truffée de pièges. En somme, ses trésors sont bien gardés. »

Dame Irélia prit un instant pour observer le laboratoire. Encore une fois, difficile de deviner ce qu’elle en pensait, mais Asmodeus la sentit attentive. Elle avait remarqué le matériel en cours d’utilisation ainsi que la fiole contenant l’encre spectrale expérimentale. Elle ne fit pas de commentaire et reprit plutôt ses explications.

« Mais notre nature de non mort nous rend insensible à une partie de ces pièges et comme je vous l’ai déjà dit, le roi est sur le déclin. Il a des ennemis, son pouvoir vacille. Certains de ses sbires échappent à son contrôle. Il me faut aussi mentionner les sœurs de la lumière, sans doute le plus grand danger pour nous. Elles ne sont pas très nombreuses. Elles tiennent une chapelle dans la ville, un îlot de lumière au milieu d’un océan de ténèbres. C’en est presque risible ! Mais, depuis peu, elles ont reçu le soutien de plusieurs aventuriers, dont un paladin. »

La momie repéra sur le visage de son interlocutrice la colère apparaître. Les flammes de ses orbites semblèrent plus vives un instant.

[Asmodeus]

Le dégoût se lut aussi sur les traits d’Asmodeus à la mention de ces abjects défenseurs de la bonté et particulièrement d’un de ces extrémistes de paladins. Il n’appréciait pas davantage de devoir se frotter à un démon alors qu’il figurait déjà en bonne place de la liste noire de l’un d’entre eux. Mais ces arguments avaient achevé de le convaincre :

- Le risque est grand de rendre un fier service à ces odieux partisans de la lumière en s’attaquant au Roi des Cendres. Mais il n’est pas concevable de les laisser s’emparer d’artefacts précieux comme ils ont tenté de le faire ici même. Avez-vous des détails concernant ce paladin ? Est-il puissant ?

Encore une fois, il pensait déjà connaître une partie de la réponse mais évaluer la menace – de ses ennemis comme de ses alliés de circonstances – relevait de la prudence la plus élémentaire.

[Le Façonneur]

« Le paladin se nomme Sir Orfrois et il est puissant, en effet. Encore que je soupçonne son épée magique d’y être pour beaucoup. Sa lame est douée de parole et empeste l’énergie céleste. Ce serait une bonne chose si nous pouvions défaire ce chevalier blanc et ses compagnons, mais peut-être est-il préférable de considérer cela comme un bonus. Le trésor du Roi de Cendre est ma priorité. »

Dame Irélia s’avança dans le laboratoire. Elle s’approchait de la fiole tout en poursuivant ses explications :

« Concernant le souverain démon, son règne est terminé. Notre intervention ne changera rien à cette fin inéluctable. Quoi qu’il arrive, nous n’aideront pas la lumière. Hum, qu’est-ce que c’est ? »

La liche désignait la fiole avec l’encre expérimentale.

[Asmodeus]

Asmodeus était d’accord avec Dame Irélia concernant le paladin : malgré sa haine viscérale pour cette engeance, il estimait plus prudent de ne pas chercher à tous prix l’affrontement surtout étant donné le contexte. Il ne connaissait en effet pas ni Gisombre ni le jeu des factions susceptibles de se mêler à leurs affaires. Après, s’il y avait moyen de l’isoler en l’attirant dans un piège ou de le combattre s’il se mettait sur leur route, c’était une toute autre histoire…

Pour l’heure, il préféra se concentrer sur la visite du laboratoire et la question de la liche qui lui faisait secrètement plaisir. Il n’en montra rien pour ne pas lui concéder cette petite victoire et c’est donc avec le détachement le plus total qu’il lui répondit :

- Oh ça ? C’est une toute nouvelle expérience débutée plus tôt dans la journée. Une encre expérimentale qui brille dans le noir mais uniquement pour les yeux de son créateur. Elle fonctionne déjà mais il reste à l’améliorer.

[Le Façonneur]

La liche considéra la fiole et le liquide étrange qui la remplissait. Si elle pensa quelque chose, elle n’en dit rien et bientôt elle reprit son observation du lieu en général.

« Un joli endroit, finit-elle par déclarer en refaisant face à Asmodeus. Je poursuivrais bien cette visite mais je pense en avoir vu assez. Le temps presse. J’ai quelques préparatifs à faire, je ne serai pas longue et je m’isole dans votre bibliothèque. D’ici une petite heure, je serai prête à retourner en Gisombre. Ce programme vous convient-il ? »

[Asmodeus]

Asmodeus avait de plus en plus la désagréable impression que la liche se comportait comme si elle se trouvait chez elle et qu'il était devenu un simple serviteur. La façon dont elle avait repéré les lieux sans but apparent et maintenant la volonté de s'y isoler mettait le Gardien mal à l'aise. Mais il ne pouvait bien entendu pas refuser sa proposition : elle ne s'était trahie en rien et mieux valaiit demeurer vigilant pour le moment où elle le ferait.

- Faites à votre aise : Asmodeus sera ici pour quand vous serez prête à partir.

[Le Façonneur]

La liche gagna donc la bibliothèque, probablement pour y potasser son grimoire. Grêle, quant à lui, se mit à errer ici et là, jetant des regards curieux de partout. Asmodeus avait une heure devant lui de temps libre avant de reprendre la route de la Gisombre. Il était peu probable que cela suffise à parfaire son encre magique mais peut-être pouvait-il mener à bien d’autres préparatifs...

[Asmodeus]

L'avantage, quand on est mort, est que l'on a très peu de besoins. De plus, la momie avait déjà préparé tout ce qui lui semblait utile lors de sa précédente escapade. Il ne lui faudrait donc que quelques instants pour récupérer ses affaires et se mettre en mouvement à la fin de l'heure nécessaire à son alliée de circonstance.

En attendant, il se consacra à ses recherches sur la fiole même si elles ne lui seraient pas utile pour cette fois : en bon planificateur, il savait que ses efforts finiraient par payer et qu'il ne servait à rien de se montrer impatient.

[Le Façonneur]

Asmodeus avança quelque peu dans ses travaux de recherches jusqu’à ce qu’un fantôme bien connu lui rapporte une discussion entre Dame Irélia et son servile larbin.

« Tu ne viens pas, je te veux en arrière.
- Mais mon numéro de flûtiste n’a pas abouti. Il n’est pas arrivé.
- Tu as pris assez de risque, c’est assez. Et puis, tu as attiré cette momie, on a peut-être gagné au change.
- Je comprends Maîtresse. Est-ce que ce repaire est...
- Non. Fais ce que tu fais le mieux, disparait. »

Le fantôme s’en alla et, peu après, le pas décidé de la liche se fit entendre dans le couloir.

« Je suis prête Asmodeus. Il est grand temps d’y aller. »

[Asmodeus]

Asmodeus était content de pouvoir compter sur son fidèle allié en la circonstance car les éléments qu’il apportait venaient de confirmer ses soupçons. Il était évident que la liche intriguait et n’hésiterait pas à se servir de lui voire à simplement le doubler.

Malheureusement, les bribes de conversation recueillies ne faisaient que poser de nouvelles questions sans vraiment apporter de réponses satisfaisantes. Qui était donc cet autre entité que le morbide avait voulu attirer. Dans quel but ? Et qu’avait-il l’intention de faire s’il le laissait seul et sans surveillance dans son domaine ?

A l’arrivée de la liche, ses questions tournaient dans son esprit mais il savait masquer parfaitement ses émotions et c’est donc d’un ton neutre qu’il demanda à Dame Irélia :

- Votre serviteur vient-il aussi ? Parce qu’Asmodeus a placé nombre de glyphes de garde et il s’en voudrait qu’un accident survienne en son absence : Grêle est quelqu’un d’appréciable !

[Le Façonneur]

« Il va nous accompagner jusqu’au cimetière puis s’en ira de son côté. Vous n’avez pas à vous souciez de lui, répondit Dame Irélia avec aplomb. Allez, en route ! »

Asmodeus constata qu’elle avait retrouvé un masque d’argent et que celui-ci était intact. Probablement qu’il s’agissait du même simplement réparé par des moyens magiques. Ce masque lui donnait une allure particulièrement glaciale. Elle commença à s’éloigner, son pas ponctué par les sons de son bâton heurtant les dalles. Mais elle réalisa qu’elle ignorait par où aller.

« C’est par là ! indiqua Grêle, qui avait mémorisé le trajet. Sauf qu’il y a des glyphes a dit Maître Asmodeus. Peut-être que...
- C’est vrai, vous êtes chez vous. À vous l’honneur. »

[Asmodeus]

La plupart des vrais glyphes qu’il avait posés au cours des derniers jours étaient surtout orientés vers le passage secret menant à sa demeure de surface et à destination des vivants et Asmodeus se promit de renforcer son système de sécurité à son retour pour envisager d’autres menaces à son encontre. Il regrettait déjà de n’avoir pas encore pu reconstituer la garde mort-vivante de son prédécesseur mais ce genre de dossier demandait du temps et du tact dans ses négociations : il ne pouvait pas se permettre de devenir trop redevable vis-à-vis de certains de ses alliés.

Il joua cependant la carte du bluff en misant sur le fait que les fameux glyphes étaient prévu pour le laisser passer ainsi que les personnes l’accompagnant. De toute façon, il avait déjà fait ce même trajet en compagnie du Morbide. C’est donc d’un pas sûr qu’il les dirigea vers la plus proche sortie menant au caveau où se trouvait la faille entre les plans. L’idée était bien entendu de passer le moins de temps possible en surface d’autant qu’il ignorait qu’elle heure il était exactement.

[Le Façonneur]

C’était le matin. Le soleil devait être déjà levé mais d’épais nuages le cachaient. En ce triste début de journée, il n’y eut personne pour croiser la route du sinistre trio. Le trajet jusqu’à la croisée ombreuse se déroula donc sans encombre.