[Lieu] Peyregorde

[Kasumi]

Kasumi concocta rapidement un petit plateau en optant, sans hésiter pour la limonade et une petite coupelle contenant un assortiment de fruits rouges. Il déposa le tout sur la table basse à côté du siège de Sylvia et lui adressa un sourire avant de se rasseoir :

- Moi aussi. Et justement, j'en discutais avec Bertrand : il m'a proposé de me prêter ses outils et je lui ai demandé de l'aide pour transporter les meubles que tu nous as trouvés. Autant qu'ils soient sur place quand j'aurai fini de colmater les fuites et réparé la porte et les fenêtres. Je compte m'y mettre à mon retour de Respelm même si je devrai aussi retourner à la clairière et commencer à chercher des sites pour une nouvelle tanière...

Sans compter que l'avis médical de Martha compterait dans leur décision de déménager effectivement.

[Voyageuse]

Le visage de Sylvia s'éclaira.
"Ah, ça va enfin avancer ! Il y a des volets à consolider... ou même à refaire. Et j'ai récupéré la plupart des meubles mais il faudra des rangements, des étagères. Il faut vérifier le plancher du haut, aussi... On pourrait éclaircir un peu l'intérieur avec une peinture ou un enduit à la chaux, je pense. Il y a des meubles à repeindre ou à vernir aussi. Ou à réparer. Du boulot en perspective.... Et Martha m'interdit de commencer à le faire ! Même peindre les meubles..."
Ses yeux brillaient quand elle évoquait leur prochain emménagement.
" Et faudra se bricoler une sorte de matelas aussi... Bref, tu ne vas pas chômer ! Tu crois que tu en auras pour longtemps avant que ce soit habitable ? Enfin, je veux dire... On peut y habiter tout de suite bien sûr, mais il vaut mieux que j'aie un minimum de confort je pense... Pas que je m'y sois habituée, hein, ce n'est pas ce que je voulais dire..."

[Kasumi]

Le visage de Kasumi s'éclaira à son tour de l'enthousiasme qu'il venait de faire naître même si ça allait effectivement lui faire beaucoup de travail en perspective avec en prime le cas des loups à gérer et le bosquet naissant à surveiller : de l'aide serait certainement bienvenue tout compte fait !

- On fera en sorte de nous installer au mieux ! De toute façon, Martha posera son véto si je ne montre pas que je sais m'occuper comme il faut de ma fiancée et de notre enfant !

[Voyageuse]

Sylvia grimaça.
" Pffff.... à mon avis, Martha posera son véto dans tous les cas ! Elle ne voit pas pourquoi j'ai tant envie de vivre à l'écart du village, plus près des bois, elle ne comprend pas que ça me manque. Elle pense qu'il est plus sûr d'être à proximité du village quand j'accoucherai... mais bon, faut pas exagérer, on n'est pas si loin quand même !"

[Kasumi]

Kasumi ne pouvait que comprendre le besoin de Sylvia de se rapprocher à nouveau des bois, cet environnement qui lui était de loin le plus familier. Et il était aussi bien placé pour partager son désir d'indépendance, la sensation d'avoir un endroit qui lui appartienne vraiment. Malgré toute la gentillesse et l'hospitalité de Martha, vivre chez elle ne remplacerait jamais le goût de vivre chez soi.

- Je comprends. Je lui parlerai... Comme je te disais, je vais commencer à rénover tout ce qui doit encore l'être et avancer aussi dans la recherche de la tanière. Je préfère être le plus présent possible à tes côtés dès lors qu'on aura emménagé !

[Voyageuse]

" En tout cas, c'est chouette que tu sois de retour, sourit Sylvia. Je me sentais un peu seule parfois..."
Son ton exprimait un réel soulagement.

La porte s'ouvrit à ce moment-là sur Martha, souriante, les bras chargés de draps.
" Vous ne devriez pas rester enfermés par un soleil pareil, leur lança-t-elle. Le plus fort de la chaleur est passé et on est merveilleusement bien dehors ! Profitez donc de la lumière... Surtout pour tricoter, ajouta-t-elle en avisant le tricot abandonné.
- Tricoter, bof... Je préférerais pouvoir me promener !
- Oh, vous devez pouvoir faire une centaine de toises... mais guère plus."
Le soupir que poussa Sylvia était éloquent.
" Il faudrait encore au moins trois mois de précautions. Je sais que c'est long..."

[Kasumi]

Une centaine de toises, c'était peu et très certainement frustrant mais tout de même mieux que rien. Le rôdeur suivit donc la proposition de Martha et aida galamment Sylvia à se lever avant de l'accompagner dehors pour une petite promenade dans le village : il était important pour Kasumi de prendre contact avec cette communauté qu'ils se proposaient de rallier. Une fois seuls, il lui glissa à l'oreille :

- Je vais essayer de passer beaucoup plus de temps près de toi, ma douce. Mais tu sais que je devrai aussi parfois m'absenter... Plus comme avant le solstice en tous cas !

[Voyageuse]

" J'espère bien !", répliqua-t-elle.
Elle soupira.
" Mais en fait je n'y crois pas. Tu vas vouloir partir en mission pour la capitale, de temps en temps, j'en suis sûre. Certes, si tu prends des apprentis, ça te freinera un peu... donc c'est tout bénéfice pour moi ! Mais je pense que tu tournerais vite en rond à rester ici, et que tu as besoin aussi de partir de temps en temps, de vivre des choses ailleurs. Je préfère m'y préparer..."
Elle marchait bien plus lentement qu'à l'ordinaire, ménageant visiblement ses efforts.

[Kasumi]

Il s'arrêta pour se tourner vers elle et poser délicatement une main sur sa taille avant de répondre d'un ton parfaitement sincère :

- Je ne sais pas si je repartirai en mission cette année mais c'est possible que ça m'arrive plus tard, oui. Mais je me suis lié à cet endroit, à toi, à nous : je ne vais plus passer mon temps à courir au travers de l'île, ça je peux te l'assurer !

[Voyageuse]

Elle eût une petite moue dubitative.
" Mwouais... Ça, j'attends de voir. Et puis, qui sait, c'est peut-être moi qui aurai envie de partir par moments pour voyager un peu, et te laisser la garde des marmots ! Ou peut-être même qu'on partira ensemble... Mais en tout cas, j'ai hâte de pouvoir vivre à nouveau normalement. C'est... pesant, c'est le cas de le dire !"
Elle commençait déjà à s'essouffler, et la main qu'elle avait posé sur son ventre, ou plutôt dessous, comme pour le soutenir, se crispait légèrement. Elle fit un signe amical à l'une des voisines qui se trouvait dans son jardin avec ses enfants, puis l'entraîna en sens inverse, revenant vers la maison de Martha et sa terrasse accueillante. Deux enfants les dépassèrent en courant, se dirigeant joyeusement dans la même direction qu'eux, et Kasumi reconnut les deux petits-fils de Martha, qu'il avait croisés lors de leur arrivée.

[Kasumi]

Kasumi se demanda un instant s'ils allaient avoir de la compagnie du fait de son retour et se surprit à en sourire. Mais son attention allait d'abord en direction de Sylvia qu'il soutint de son mieux d'un bras passé autour de ses épaules : nul doute qu'elle accueillerait avec joie l'un des fauteuils se trouvant à l'ombre de la terrasse. Ils avaient encore bien le temps de parler de leurs projets d'avenir en tous cas.

[Voyageuse]

Les deux garçons étaient arrivés avant eux à la maison et négociaient avec Martha la permission de venir dîner chez elle, permission qu'elle leur accorda en échange d'aide au jardin. Et la fin de l'après-midi se passa, pour eux, à sarcler, arracher les mauvaises herbes et ramasser petits pois et haricots qu'ils durent ensuite écosser, tâche à laquelle ils furent d'une efficacité exemplaire -à condition de ne pas trop regarder la qualité.
Puisque la petite table extérieure était envahie désormais de légumes, Kasumi et Sylvia furent mis à contribution pour aider les deux enfants. Et la raison réelle de leur présence ne resta pas plus longtemps un mystère:
" Dites, c'est vrai qu'c'est vous qu'avez fait l'arc pour Loïc ?"

[Kasumi]

Il aurait dû s'y attendre, bien sûr : qu'un enfant du village ait obtenu ce genre de cadeau et tous les autres suivraient pour lui demander le même : une évidence qui avait court en tous lieux apparemment. Kasumi esquissa un sourire entendu et amusé vers Sylvia avant de répondre, le plus innocemment du monde aux deux garçons :

- Oui, c'est bien vrai : qui vous l'a dit ?

[Voyageuse]

" Bah lui !
- Et il a pas voulu m'le prêter ! C'est pas juste, d'abord j'chuis sûr que j'tire mieux qu'lui !
- Vous voulez pas nous en faire un ?
- Chacun ?
- Nan, t'exagère...
- Mais tu voudras jamais m'le prêter !

[Kasumi]

Le demi-elfe eut un peu de mal à s'empêcher d'éclater de rire devant l'audace des deux garçons. Mais c'était bon signe : s'il parvenait à gagner la confiance des enfants, leurs parents se méfieraient peut-être un peu moins de lui et de son lien avec la nature. Il répondit néanmoins spontanément, loin de tout calcul de ce type :

- Je ne sais pas, j'ai demandé l'avis du père de Loïc avant de lui confectionner son arc. Et aussi promettre de lui donner des cours pour qu'il ne fasse pas n'importe quoi avec : c'est un objet dangereux, un arc. Pas un jouet. Il faudrait que vous acceptiez que je vous entraîne avant de vous confier un arc...

[Voyageuse]

Les yeux s'illuminèrent.
" T'as vu, j't'avais dit qu'il dirait oui.
- Mais il a pas dit...
- Mais t'osais pas lui demander, pour les cours, coupa le plus jeune.
- Ça commence quand ? Demain ?"

[Kasumi]

Toujours aussi amusé, le rôdeur chercha toutefois à tempérer un peu l'enthousiasme des deux jeunes garçons :

- Il va vous falloir patienter quelques jours comme Loïc l'a fait. D'autant que je ne serai pas là demain et qu'il me faut un peu de temps pour trouver le bon bois et en faire des arcs.

[Voyageuse]

" Mais nous, on peut le trouver le bois !
- On ira dans les bois, on sait reconnaître les arbres !
- Enfin, certains... Faut du chêne ? Du hêtre ? De la charmille ? Du bouleau ?
- Ou bien du sapin ?
- Y'en a pas ici, enfin ! De l'orme peut-être ? De l'épicéa ?
- Vous nous dites et on le rapporte !"
Sylvia contenait une envie de rire.

[Kasumi]

Kasumi sourit de plus belle et échangea un regard complice avec Sylvia avant de tourner son attention vers Martha pour vérifier qu'elle ne désapprouvait pas la manœuvre. Il devait reconnaître que laisser les garçons trouver eux-mêmes leur bois avait des vertus pédagogiques mais il les incita tout de même à faire montre de prudence :

- Je ne veux pas que vous vous éloigniez du village sans un adulte mais je suis sûr que Mylène accepterait de vous accompagner si vous le dîtes que vous venez de ma part. Le meilleur bois pour les arcs est l'if mais l'orme fait très bien l'affaire lui aussi.

[Voyageuse]

" L'if c'est quoi ?
- Un truc pointu je crois. Y'en a pas dans le coin. Mais y'a des ormes dans les bois...
- Alors on demandera à Mylène !
- Elle en voudra un aussi...
- Elle aura qu'à le faire elle-même !
- En attendant, que diriez-vous de dîner ?" les interrompit Martha.
Elle venait de déposer sur le bord de la table une pile d'assiette qu'ils n'eurent plus qu'à se répartir tandis qu'elle allait chercher le repas du soir, à base de tourtes aux légumes.

[Kasumi]

Le rôdeur attendit que les enfants aient obéi à Martha en disposant les assiettes pour leur répondre qu'on ne trouvait effectivement que peu d'ifs dans la région et qu'il s'agissait d'une sorte de conifère. En tous cas, cela faisait une raison de plus de s'attarder au village mais aussi une mission qui - quoiqu'agréable - allait un peu plus empiéter sur les multiples dossiers dans lesquels il était déjà engagé.

[Voyageuse]

Le repas se passa dans la bonne humeur. Les enfants bavardaient de tout et de rien, racontant leurs journées précédentes à leur grand-mère, échangeant des potins sans grand intérêt. Ils questionnèrent un moment le rôdeur sur ce qu'ils faisait dans les bois, mais sans insistance, sans paraître vraiment s'y intéresser. A part pour ce qui était de la chasse...
Leur petite sœur débarqua à son tour pour le dessert, chargée par leur mère de les ramener au bercail -comme s'ils risquaient de l'oublier. Elle en profitait pour rapporter quelques vieilleries, notamment des bijoux de famille qu'elle voulut faire admirer à Sylvia, que sa mère avait trouvées en aidant son oncle Marco à ranger le grenier. Kasumi reconnut, au passage, une bague ressemblant comme une jumelle à celle qu'il avait trouvée dans le repaire des malarites. Mais déjà, Martha refermait le petit coffret en les enjoignant à se resservir en gâteau.

[Kasumi]

En faisant ce rapprochement, Kasumi eut bien du mal à garder sa contenance et sa bonne humeur : l'espace d'un instant, il se sentit même un peu blêmir mais il se garda bien d'intervenir : nul doute que la bague en question ait directement appartenu au fils devenu loup-garou. Il l'avait caché dans le tertre, sans doute parce que l'argent lui était douloureux mais peut-être aussi pour rompre avec son passé, couper ce lien qui l'attachait au village et à sa famille. C'était tout un symbole en tous cas.

[Voyageuse]

Personne ne sembla remarquer son petit moment de silence, et s'il blêmit, nul ne s'en émût : il avait le teint habituellement pâle et tout léger changement de carnation dut passer inaperçu. La petite fille, en admiration devant les bijoux, insista pour que Sylvia lui montre les siens. Ceux-ci se limitaient à peu de choses : la bague offerte par Kasumi et un vieux médaillon qu'elle avait depuis toujours et qui lui venait de sa grand-mère paternelle.
Les garçons, se désintéressant de la conversation féminine, changèrent de sujet et demandèrent conseil à Kasumi sur la possibilité de fabriquer eux-mêmes leurs premières flèches. L'aîné exhiba fièrement un couteau offert par son père, avec lequel il aimait tailler le bois.

[Kasumi]

Kasumi prit soin d’examiner le couteau sous toutes les coutures et loua sa bonne facture auprès du garçon : c’était en effet un bel outil, plus robuste et efficace qu’ornementé. Il réfléchit ensuite un instant à la question pertinente des flèches :

- Je vous montrerai comment confectionner des flèches de manière artisanale si le sujet vous intéresse : c’est un travail de patience mais vous n’aurez pas besoin de beaucoup de flèches si vous y faites attention. Nous irons chercher les ingrédients ensemble : de jeunes rejets d’églantier ou de prunier font l’affaire. Il faut aussi des plumes - d’oie de préférence – que vous pourrez certainement négocier au village. Et pour les pointes, je réutilise en général celles de mes flèches abîmées mais vous pouvez en faire confectionner auprès d’un forgeron. Sinon, il est toujours possible de tailler les pointes du bois et de les durcir au feu : c’est très bien pour des flèches d’entraînement.

[Voyageuse]

" Ouais mais on pourra pas chasser avec des pointes en bois !
- Bah, de toute façon, tu crois quand même pas que tu vas réussir à tirer une perdrix ?
- Hey, j'parie que j'tire mieux qu'toi, d'abord !
- Tu parles ! A une toise peut-être...
- Tu t'es pas r'gardé !
- Ça suffit les garçons ! Il est largement l'heure de rentrer ! Votre mère vous attend..."
Les garçons bougonnèrent, mais leur petite sœur, qui semblait tout juste se souvenir qu'elle était venue pour les ramener à la maison, tombait visiblement de sommeil. Ils remercièrent donc chaleureusement Kasumi pour sa promesse -d'arc et de cours- avant de filer.
Sylvia semblait fatiguée, elle aussi. Elle ne proposa même pas ses services pour aider à desservir.

[Kasumi]

Kasumi se proposa spontanément avant de se retrouver de toute façon réquisitionné par leur hôtesse. Il promit à Sylvia de la rejoindre dès qu'il en aurait fini mais Martha voudrait certainement connaître ses intentions pour le lendemain. Il n'avait pas l'intention de trop tarder avant de partir de sorte à être de retour le soir même mais il n'allait pas non plus chercher à partir avant l'aube.

[Voyageuse]

Martha lui promit un petit déjeuner consistant peu après l'aube, et un casse-croûte pour le midi. Elle refusa son aide pour la vaisselle : il avait trop peu vu sa fiancée ces derniers temps, elle l'encourageait donc à profiter pleinement de sa présence. Il termina simplement de desservir.
Sylvia l'attendait dans leur chambre, l'air fatiguée mais radieuse, à demi allongée sur les coussins.
" Il bouge..., dit-elle en souriant, la main posée sur son ventre, le regard illuminé. Viens sentir..."

[Kasumi]

Le demi-elfe referma doucement la porte et adressa un sourire tout aussi radieux à sa compagne avant de la rejoindre pour s'asseoir à côté d'elle et la laisser guider la paume de sa main sur son ventre. Il se sentait soudain un peu lourdaud mais aussi ravi de partager ce moment qui leur appartenait à tous les trois.

[Voyageuse]

Il sentait effectivement du mouvement, quelque chose d'un peu bizarre, celui des muscles du ventre qui se contractaient peut-être, et quelque chose d'autre, comme une bulle se déplaçant. Puis un coup plus net.
" Il te donne des coups de pied !" traduisit Sylvia avec assurance.
Tendant le cou, elle l'embrassa sur les lèvres.
" Ça doit être pour te faire payer ta longue absence..."