[Commerce] L'Ombre de l'Arbre

[Streen]

Streen occupé ? Qu’avait il à faire au juste à Luménis ? A part aller au temple pour obtenir des précisions sur le lieu où rendre les cimeterres, il n’avait nul endroit où aller à Luménis. Pas question en revanche de se rendre au palais. Il ne voulait pas prendre le risque de rencontrer un haut conseiller. Sans cela, la situation risquait de se compliquer et il serait contraint de justifier sa présence. De plus, on pourrait le jeter en prison voire même l’exécuter uniquement pour ce qu’il était. Non, mieux valait rester discret. Ce qui l’étonnait également, c’était la persévérance de Sylveneige dans son choix. Pourquoi avoir choisi Streen pour voyager alors qu’il existait des hommes plus charmants et plus courageux que lui ? Parfois, il était difficile de comprendre les femmes. Il répondit néanmoins :
-Je n’ai rien de spécial à faire. Dès que tu seras prête, rejoints moi au temple pour récupérer les cimeterres et parler une dernière fois à Elorep pour un briefing.

[Féérune]

Quête : Cimeterres maléfiques

Sylveneige cilla.

- Mais tu ne m'accompagnes pas ?

C'était extraordinaire, cette propension qu'avait Streen à se débiner. Bon, c'était clair que la veulerie du choupinou était rédhibitoire pour une balade dangereuse jusqu'à la Porte de Baldur ; que la candidature de Sam était celle d'un jeune garçon trop perdu dans ses rêves de gloire ; qu'au fond la rôdeuse ne connaissait pas assez de monde à Lumenis pour faire un choix de compagnon de voyage vraiment efficace ; bref, Streen était vraiment l'unique personne à peu près sérieuse sur qui elle puisse compter.

Tout était dans ce "à peu près". Mais bon, cela participera à l'aventure. Sylveneige soupira.

- Allez, première étape, la Forge. Et là, tu viens, j'ai besoin de toi.

la suite à : http://www.baldursgateworld.fr/lacouron ... post357384

[Féérune]

Quête : Cimeterres Maléfiques

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De retour à l'Ombre de l'Arbre, ils s'installèrent dans un coin calme de la salle d'auberge.

Sylveneige, tendue, posa les inévitables questions.

- Streen, nous allons voyager ensemble. Et je ne voyage pas avec quelqu'un sans le connaître suffisamment. Donc je dois savoir pourquoi tu refuses obstinément d'entrer dans certains lieux. Si tu crains quelque chose de grave, pourquoi craindre des lieux a priori complètement innocents ? Sauf si toi-même, tu as quelque chose de grave à te reprocher, ou fait quelque chose contre les personnes qui tiennent ces lieux.

[Streen]

Les questions que Streen redoutaient arrivaient. D’un autre coté, il ne pouvait pas en vouloir à Sylveneige qui souhaitait simplement avoir des réponses et un refus trop abrupt de sa part serait synonyme de séparation immédiate jusqu’à même de ne plus pouvoir l’accompagner où que ce soit. Le problème, c’est qu’il avait quelque chose à se reprocher. Non pas qu’il ait commis un acte délictueux ni même un crime ou encore causé du tort à un luménien mais c’était sa propre existence qui allait poser problème. Sans compter qu’il avait partagé son esprit avec un démon pour pouvoir revenir à Luménis sans en avoir mesuré l’ampleur des conséquences. Mais comment dévoiler tout ceci à Sylveneige ? Bon, il existait encore un avantage. Sylveneige ne connaissait rien de lui donc autant ne pas tout lui dévoiler mais seulement ce qui répondait à ses questions. Regardant autour de lui pour s’assurer que personne ne les écoutait, il lui dit discrètement.
-Ecoute, il y a quelques endroits que je souhaiterais éviter. La forge de Dorian et le palais présidentiel sont justement les deux endroits que je redoute. Ici à l’Ombre de l’arbre et au temple, personne ne me connait donc cela a peu d’importance. Mais voilà pourquoi je ne souhaite pas me rendre à ces endroits. Il y a quelques semaines, le gouvernement luménien m’a contacté pour participer à une expédition dangereuse. Non pas que j’ai choisi de mon plein grés mais plutôt obligé d’y participer malgré moi. Bref, les trois hauts conseillers nous ont donné leurs instructions et je suis parti avec Dorian le forgeron de la ville et quelques autres luméniens. Peut-être que tu en connais quelques uns parmi ceux-ci. Au cours de l’expédition, j’ai découvert des choses sur mon identité que j’ignorais jusqu’à alors et que j’aurais préféré ne pas savoir. Tout ce que j’ai découvert est compromettant aussi bien pour le gouvernement que la sécurité des luméniens. J’ignore si Dorian a gardé un souvenir de cette expédition ou si les hauts conseillers ont lancé un sortilège d’amnésie à tous les survivants pour qu’ils oublient l’expédition.
Il poussa un soupir avant de reprendre :
-Si je suis le seul qui garde encore en esprit les informations, c’est parce que tout le monde me croit décédé. D’ailleurs si tu vas à la capitainerie, il est possible que mon nom figure dans les archives et qu’il soit fait mention de ma mort. On ne peut pas blâmer les luméniens de cette erreur. C’est ce qui aurait dû se passer d’ailleurs. Le fait que je sois encore ici relève du miracle, si on peut en appeler ca un. Comprends bien une chose Sylveneige, je n’ai rien fait de grave mais le gouvernement peut me reprocher ma propre identité et tout ce que j’ai découvert. Et si jamais il me trouve, il sera impossible de dire que je ne suis pas Streen. Des hommes aux yeux violets, ça ne courre pas les rues. J’ignore si je me fais du soucis pour rien ou non mais je préfère ne prendre aucun risque. Tout ceux qui m’ont connu antérieurement ne doivent pas me voir ici. Je ne peux t’en dire plus car le reste fait référence à mon passé que je souhaiterais ne pas te faire connaître. J’espère malgré cela que ta curiosité est satisfaite. Peut-être qu’un jour je te dévoilerai tout mon passé mais j’ai bien peur que cela ne te rebute si tu devais l’apprendre.

[Féérune]

Sylveneige regarda Streen droit dans les yeux. Sans ciller.

- Streen, peux-tu me jurer que tu n'as jamais agi contre Dorian et Zaïu ? J'ai besoin de le savoir... Je serais désolée de devoir me méfier de toi, mais vraiment tu comprendras que je doive être sûre de ne pas courir de risque en faisant équipe avec toi... Nous aurons assez à faire avec les cimeterres !

[Streen]

Streen hocha gravement la tête .
-Je te jure sur ma tête que je n’ai jamais agi contre Zaïu ni Dorian ni contre Luménis. Tu peux dormir sur tes deux oreilles de ce coté là. Cela dit, je comprendrais que tu puisse te méfier de moi. Si je te dévoilais maintenant mon passé, c’est la première réaction que tu aurais. Mais je n’ai jamais fait de mal à quiconque et je ne compte pas m’y mettre dés maintenant. Je suis bien conscient de l’importance de la mission qui nous attend et je ne compte pas m’en écarter ni échouer. En revanche, je ne sais pas si tu dois pour autant me faire confiance.
Streen regarda autour de lui comme s'il craignait quelque chose.
-Je peux si tu le souhaites t'en donner la raison mais sauras tu garder ce secret pour toi et uniquement toi? Sauras tu le cacher à la personne qui t'es la plus chère? Je prends un gros risque en te le révélant.

[Féérune]

Sylveneige se pencha vers son ami et murmura :

- Oui. Je te le promets. Ton secret sera le mien.

[Streen]

Streen commencait à avoir des sueurs froides. Il ignorait tout des relations entre son amie et Dorian et Zaïu mais elle semblait très attachée à eux. Ca ne présageait probablement rien de bon pour la suite. Comment allait elle réagir ? Mais elle venait de lui donner sa parole. Il devait donc respecter sa part de marché. Et puis si elle le trahissait, il sera quand même resté honnête. Après tout, il lui fallait une personne de confiance pour l’aider à remettre des cimeterres en mains propre. Streen ne se sentirait mieux que lorsqu’elle saurait tout. Quant à lui, il serait un homme mort si le moindre luménien savait qui il était.
-Alors je vais te le dire chuchota t’il. Je sais que cela va te paraitre invraisemblable mais c’est pourtant la vérité. Il est vrai comme je te l’ai juré que je n’ai jamais causé du tort à Zaiu, Dorian ni même à Luménis. En revanche, tout mon entourage, toute ma famille l’a fait. Mes parents comptaient parmi les pires ordures qu’ils puissent exister. Tous mes frères étaient sous leur contrôle et à eux seuls, ils ont manqué de détruire Luménis et de déchainer le chaos. Les autorités luménienne ont caché cette réalité car elle est la preuve que leur système de sécurité a été défaillant. Désormais la menace est écartée et comme tout le monde me croit mort, personne ne se soucie de la suite des évènements. Ils n’ont pas tort. Comme je te l’ai dit, je ne compte pas trahir Luménis ni même un de ses habitants mais si les hauts conseillers apprenaient que je suis vivant, je suis un homme mort. Ils pourraient m’emprisonner voire même m’exécuter uniquement pour cacher ce qui s’est produit. Et comme je détiens des informations qu’ils redoutent, seule ma disparition pourrait les contenter. Je ne pense pas que Dorian et Zaiu agiraient de la sorte s’ils me revoyaient. Ils savent que dans toute cette histoire j’ai été une victime des circonstances. Mais je me méfie, je ne sais pas s’ils seraient capables de me dénoncer aux autorités.
Il soupira avant de reprendre :
-Je suis désolé de t’avoir caché cela et il y a encore des choses que tu ignores sur moi. Comprends que ce n’est pas très facile pour moi d’en parler. Néanmoins, si tu souhaites prendre quelqu’un d’autre comme compagnon de voyage, je ne t’en tiendrai pas rigueur et je respecterai ton choix. Dans ce cas, je m’arrangerai pour disparaitre. La décision ne revient qu’à toi.

[Féérune]

Sylveneige avait écouté avec toute son attention. Tout son cœur, aussi. Comment pouvait-on grandir, vivre avec des parents dangereux ? Comment pouvait-on construire sa personnalité, savoir comment exister, faire sa place dans le monde ?

- Streen... Merci. Merci pour ta confiance. Et je dois te dire, honnêtement, que malgré ton passé difficile, tu t'en sors magnifiquement bien. Et c'est avec toi que je veux porter ces cimeterres où ils doivent être. Et avec nul autre.

La rôdeuse prit les mains de son ami dans les siennes.

- Merci encore. Je serai digne de ce secret, qui est désormais le nôtre.

[Streen]

Streen conserva ses mains dans celles de Sylveneige et sourit.
-Je te remercie pour ta compréhension souffla t’il. Je te promets de t’aider de mon mieux.
Puis il pencha vers Sylveneige et l’embrassa.

HRP : quand tu seras prête à aller au temple, amenes nous-y.

[Féérune]

Sylveneige sortit sa bourse.

- Tout d'abord, il faut payer nos chambres et les repas. J'avais déjà payé une partie de ce que je dois, avant de partir chercher ses fichus cimeterres... Et Marvin avait eu la gentillesse de payer une grande partie de ce qui était dû. Mais je veux que nous payions maintenant le reste, comme ça je saurais exactement ce que j'aurai pour payer le solde de mon épée.

La rôdeuse se prit la tête dans les mains.

- Sinon je devrai laisser en gage ma harpe à Dorian, en garantie de mon retour pour le régler. Bon... Dame Poikarea, s'il vous plaît ?

[Voyageuse]

L'aubergiste s'approcha, et haussa un sourcil lorsque la rôdeuse lui demanda la note. Elle s'en retourna dans sa cuisine et revint, un calepin à la main. Elle posa une addition dans un coin, compta rapidement et releva la tête.
" Vous me devez... huit pièces d'or et six d'argent, pour les deux chambres et les repas. Mais donc, j'en déduis que vous partez déjà ? Vous quittez Luménis ou vous avez trouvé un autre hébergement ? Pardonnez-moi si je suis indiscrète..."

[Féérune]

Sylveneige fut soulagée. Elle avait craint que la facture soit beaucoup plus salée, mais l'auberge de l'Ombre de l'Arbre restait abordable.

- Non, chère dame Poikarea, simplement nous devons partir... Loin, sur Féérune. J'espère que nous pourrons revenir ! d'autant plus que j'avais trouvé un travail, à la taverne du Fond de la Barrique... Ah là là...

La rôdeuse avait les larmes aux yeux.

- Je vous regretterai bien, dame Poikarea, et Lumenis aussi... Je n'ai pas eu le temps de visiter réellement la ville... Tenez, voici neuf pièces d'or, gardez la monnaie, bien sûr. J'ai un petit service à vous demander : pourriez-vous dire à Sam de porter deux messages pour moi ?

Sylveneige sortir un petit calepin de sa poche et griffonna deux messages, détacha les feuillets et les donna à Poikarea.

- Le premier est pour la grand-mère de Shaun et Akul, les deux garçons que j'ai rencontrés lors de mon arrivée : l'adresse est au dos du message. Le second pour la patronne du Fond de la Barrique...

Lumi émit un bruit étrange, comme un gémissement. Il ressentait la tristesse de sa maîtresse. L'elfe tendit les messages à l'aubergiste, et ajouta une pièce d'or.

- Viens, Streen, nous allons au temple de Lathandre.


suite : http://www.baldursgateworld.fr/lacouron ... post358392

[Voyageuse]

RP solo : Apprentie-druide - prologue

Astrée poussa la porte de l'établissement, timidement, vers le milieu de la matinée, laissant devant l'entrée Prince chargé de ses bagages. La salle était presque déserte à cette heure-ci. Un couple d'amoureux était assis à une petite table, et un vieil homme sirotait une infusion à une autre. Des bouquets de fleurs égayaient les tables, l'atmosphère sentait bon la tarte aux fruits rouges et le thé noir, et le calme qui régnait, après le brouhaha permanent de la Bienveillance, avait quelque chose d'incroyablement reposant.
" Installez-vous, je suis à vous tout de suite !"
La voix, flûtée et agréable, était celle d'une elfe entre deux âges chargée d'un plateau qu'elle déposa devant le couple d'amoureux avant de revenir vers la jeune femme. Celle-ci s'était approchée d'une table, sans vraiment oser s'asseoir.
" Bienvenue à l'Ombre de mon Arbre, jeune demoiselle. Qu'y a-t-il pour votre service ?
- Et bien... je suis à la recherche d'une chambre. Est-ce que vous en auriez de libre ?
- Bien sûr. Il m'en reste deux, au second étage, dont l'une vient tout juste d'être refaite. La première est peut-être un tout petit peu plus calme, elle donne sur la cour, mais à cet étage ça ne se connaît guère... Mais choisissez plutôt : forêt ou montagne ?"
Astrée ouvrit des yeux ronds.
" Oh... Heu... Montagne, alors.
- Parfait. C'est la chambre tout de suite à gauche au second. Vous avez laissé vos bagages dehors ? Ou peut-être que vous n'en avez pas ?", s'enquit-elle avec curiosité en se dirigeant vers la porte.
Elle grimaça en apercevant Prince.
" Ah... Je n'ai malheureusement pas d'écurie.
- Oh, je n'en ai pas besoin ! Je... c'est un ami qui me l'a prêté ! Je vais le lui rendre...", répliqua la jeune femme, saisissant la première idée qui lui venait à l'esprit.
Bien sûr, Prince se ferait écureuil pour dormir auprès d'elle.
" Dans ce cas, c'est parfait. Je vais vous donner la clé, pour vous installer. Saaam ?
- Oui ?, répondit un jeune demi-elfe au sourire charmeur, surgissant de la cuisine.
- Tu peux monter les bagages de cette jeune dame ?
- Oh... mais ça n'est pas la peine..., protesta Astrée.
- Mais si, ce n'est rien, je vous assure, répondit le demi-elfe. Ecoutez, installez-vous plutôt à cette table, et laissez-vous tenter par une part de tarte. Ma mère fait les meilleures de toute la ville. Et moi, pendant ce temps, je monte vos affaires !
- Et c'est offert par la maison, compléta l'elfe. Cadeau de bienvenue !
- Ah... Et bien... d'accord..." répondit la rôdeuse d'un ton incertain.

Elle était curieuse de voir cette chambre associée à la montagne, mais après tout, elle avait tout le temps devant elle. Elle accompagna le dénommé Sam sur le pas de la porte pour lui confier son sac à dos ainsi que le vaste sac de cuir où elle avait rangé les quelques affaires auparavant stockées dans un coffre à la Bienveillance.
- Hum... Je vais... emmener mon cheval chez mes amis. Ce n'est pas loin, lança-t-elle avant de s'éloigner avec sa monture sans attendre la réponse.
Deux intersections plus tard, elle se retrouvait dans une ruelle déserte où Prince put se changer en toute discrétion en écureuil. Elle le laissa se glisser au chaud dans sa poche avant de revenir vers l'auberge, plus détendue. Tout de même, elle aurait dû anticiper la question de la monture et ne pas l'amener... mais ce qui était fait était fait.

Elle regagna l'auberge avec un sourire presque d'excuse et s'installa à la table la plus proche. Comme promis, quelques minutes plus tard, l'elfe déposait devant elle une part de tarte aux fraises qui semblait absolument délicieuse.
" Ma spécialité, en réalité, c'est plutôt la tarte aux pommes, mais il faut bien s'adapter à la saison, remarqua l'elfe avec un haussement d'épaules.
- Ca a l'air très bon...
- Mangez donc, ça vous fera du bien. Et dites-moi, est-ce que vous savez combien de temps vous allez rester, si ce n'est pas trop indiscret ? C'est juste au cas où on cherche à me réserver un lit. Mon auberge n'est pas grande, et la moitié des chambres sont occupées par des habitués qui y passent toute une saison... voire davantage. Ça fonctionne un peu comme une pension de famille, ici. Mais j'ai aussi quelques places pour les visiteurs de passage, comme vous."
La tarte avait un goût incomparable, et Astrée savoura lentement sa bouchée avant de répondre.
- Je ne sais pas combien de temps je vais rester, mais pas plus de deux ou trois nuits je pense. C'est une amie herboriste du nom d'Isudë qui m'a conseillé de venir ici...
- Isudë ? Mais il fallait le dire plus tôt ! C'est une vieille amie. La communauté elfique à Luménis est assez soudée, et nous sommes arrivées en ville à peu près en même temps..."
La discussion se poursuivit un moment, et Astrée apprit ainsi le nom de l'aubergiste -Poïkarea- et le prix de la pension complète -un peu moins élevé qu'à la Bienveillance. Elle se surprenait à se sentir incroyablement détendue dans cette ambiance simple et chaleureuse. Isudë avait bien fait de lui conseiller de venir ici : cet établissement lui correspondait tout à fait. Malgré les ses habitudes à la Bienveillance, et les liens tissés avec le tenancier via Moïse, elle pressentait qu'elle se sentirait peut-être, au bout du compte, plus à sa place ici que là-bas...

La chambre était aussi bucolique que son nom l'indiquait. Un bouquet de fleurs des champs l'attendait sur une petite table basse, ainsi que ses bagages, posés sur une chaise confortable. Une immense toile, accrochée sur le mur de gauche, représentait un paysage de pâturages au printemps sur fond de sommets enneigée. Le souci du détail allait jusqu'aux couleurs des draps et édredons, qui mariaient eux aussi le blanc et le vert. Un broc d'eau fraîche était posé sur une petite étagère, devant un miroir, et Sam lui avait indiqué la salle d'eau commune, à l'étage inférieur. Oui, décidément, elle serait parfaitement bien ici.
Elle prit le temps de s'installer confortablement, défaisant pour une fois complètement son sac. Si elle devait partir à nouveau pour une longue expédition, elle avait tout intérêt à faire un peu de tri, laver son linge, et faire l'inventaire de ce qui pouvait lui manquer. Elle avait du temps devant elle : l'herboriste ne l'attendait pas avant la fin d'après-midi.
Elle redescendit à l'heure du déjeuner, attiré par les bonnes odeurs émanant de la cuisine. Bien sûr, la cuisine était plus simple qu'à la bienveillance - une tourte aux champignons et à la viande accompagnée de salade-, mais tout de même délicieuse. Elle se découvrit une faim de loup : elle s'était réveillée au matin avec l'estomac un peu barbouillé, et n'avait pas pu avaler grand-chose. Elle avait besoin de compenser.

Un peu désœuvrée, elle passa le début d'après-midi à faire un peu de lessive avant de se décider à sortir. Elle avait envie d'un bol d'air frais, et se dirigea d'instinct vers le grand parc verdoyant. Elle sentait en elle un besoin viscéral de contact avec la nature, plus fort qu'il ne l'était auparavant. Une conséquence de sa nouvelle vocation de druide, peut-être... Toujours est-il qu'elle devait répondre à cet appel.

[Voyageuse]

RP Solo : apprentie druide - prologue

Astrée avait quitté l'herboristerie à l'heure de la fermeture, et dut traverser toute la ville avant d'atteindre son nouveau "chez-elle" provisoire. Elle poussa timidement la porte de la pension alors que la nuit tombait. Une délicieuse odeur -de quiche, peut-être- flottait dans l'air, et elle réalisa qu'elle avait faim. Sam, qui avait surgi des cuisines en entendant la porte s'ouvrir, lui sourit joyeusement.
" Bonsoir ! Le dîner sera servi d'ici... un bon quart d'heure, je dirais. Installez-vous où vous voulez !"
Une demi-douzaine de tables seulement avaient été préparées, au fond de la salle. Astrée devinait que les principaux clients, en soirée, étaient certainement ceux qui logeaient sur place : il y avait fort à parier que les luméniens en mal de distraction préféraient une taverne animée dans le genre de la Bienveillance. Quoique, pour un dîner romantique en amoureux, l'adresse était sûrement bonne...

Pour l'heure, un couple d'elfes d'un certain âge devisait paisiblement à l'une des tables, et l'homme âgé qu'elle avait aperçu le matin était installé, un parchemin à la main, à une autre. Petit et rondouillet, Il avait le visage ridé, un nez un peu trop gros, et des espèces de tâches de rousseur incongrues dans un visage aussi âgé.
Astrée s'installa, au hasard, à une troisième table, après être montée rapidement se laver les mains et poser sa besace. Une autre personne était descendue de l'étage, une halfeline entre deux âges qu'elle n'avait jamais croisée. La rôdeuse était trop timide pour hasarder une conversation, et puis elle ne comptait pas rester ici plus de quelques jours, aussi se contenta-t-elle de manger en silence, souriant poliment à son voisin âgé qui l'observait avec une curiosité non dissimulée.
" Je crois qu'il est d'usage de se présenter, entre gens de bonne compagnie, hasarda-t-il finalement. D'autant que je crois comprendre que vous vous apprêtez à loger ici, aussi serons-nous amenés à nous croiser régulièrement. Je suis le professeur Gargouille, chargé de cours à l'Université de la Magie.
- Enchantée, répondit Astrée, un rien embarrassée. Je me nomme Astrée. Mais je ne suis ici que pour quelques jours...
- Oh, quel dommage, pour une fois que nous avions un peu de jeunesse...
- Oseriez-vous insinuer que je suis vieux, professeur ?, lança joyeusement la voix de Sam qui venait d'apparaître, une soupière brûlante à la main.
- Oserais-tu me menacer, Sam ? répliqua le professeur du tac au tac. Voyons... Je pourrais peut-être te transformer... en rat d'égout ?
- Beurk ! Mais vous n'oseriez pas, répliqua en riant le jeune homme.
Posant sa soupière sur la table du mage, il sourit de toutes ses dents au mage, et leur en servit chacun une assiette.
- Je te trouve bien sûr de toi ! Mais tu as raison, je ne devrais pas proférer ce genre de menaces devant une jeune et accorte demoiselle. Oublions ça, et fait-moi goûter ce potage. Hum... Champignons, pointe d'asperge, et petits lardons, on dirait ?
- Avec aussi tout un tas d'herbes dont ma mère refuse de me donner la liste !"
Astrée, goûtant à son tour la soupe, risqua à son tour, presque étonnée d'oser poursuivre la conversation :
" Je dirais estragon, thym, oignons roses... et ciboulette peut-être ?
- Bravo ! intervint Poikarea, passant la tête par la porte de sa cuisine. Trois de justes sur les quatre ! Ce sont des échalotes, pas des oignons.
- Ma parole, vous êtes une espionne venue d'une autre cuisine de la ville, s'exclama Sam.
- Bah, si elle est herboriste, c'est normal qu'elle s'y connaisse... N'oublie pas que c'est Isudë qui nous l'envoie !
- Vous êtes herboriste ? intervint le mage. Ah, mais ça m'intéresse, savez-vous ? Vous n'imaginez pas les recherches que nous devons faire, à l'Université, pour retrouver le savoir trop méconnu sur les pouvoirs des plantes, lorsque nous élaborons nos potions. On ne peut pas dire que les herboristes nous y aident, d'ailleurs : ils gardent jalousement leurs secrets. Cela dit, je ne peux guère leur en vouloir, nous en faisons autant de notre côté...
- Je... ne suis pas vraiment herboriste, expliqua Astrée. Enfin... j'apprends, un peu, auprès d'Isudë, mais je ne suis qu'une simple débutante...
- Je me doute, vu votre âge... Hum... veuillez me pardonner, demoiselle, ce genre d'allusion ne se fait pas. Et après tout, vous auriez pu être une élève herboriste surdouée devenue maîtresse en son art !
- Ce n'est pas le cas, assura Astrée en rougissant.
- Hum... Excusez-moi, je m'enfonce."

Astrée était embarrassée par la tournure que prenait la conversation, mais heureusement, celle-ci dévia rapidement sur d'autres sujets, le vieil homme et Sam plaisantant sur des souvenirs communs, et elle put se replonger dans son mutisme habituel. Pas pour très longtemps, cependant. Le vieux mage revint à la charge et elle dut expliquer qu'elle était rôdeuse, qu'elle vivait généralement dans les montagnes de fer mais qu'elle faisait régulièrement des expéditions à d'autres endroits de l'île pour le compte d'Isudë, l'herboriste, qu'il semblait du reste connaître, au moins de réputation. Elle ne parla pas de sa nouvelle vocation de druide. C'était... personnel. Du moins était-ce son sentiment. Et puis, elle ne l'était pas encore vraiment. Le vieil homme, bavard, lui apprit qu'il enseignait la métamorphose aux étudiants de l'Université, depuis une petite quarantaine d'année. Elle jugea qu'il devait en avoir soixante-dix.

Une quiche avait succédé à la soupe, et le dessert, comme prévu, était une tarte aux pommes, la spécialité de la maison, agrémentée d'un peu de crème battue. Poikarea proposa ensuite une infusion, comme elle le faisait tous les soirs selon le professeur Gargouille. Le breuvage était délicieux, et Astrée le savoura lentement. Elle se sentait bien, plus détendue qu'elle ne l'était généralement à la Bienveillance. Il n'y avait pas à dire, cette auberge lui convenait plutôt bien...
La soirée s'acheva plus tard que d'ordinaire. La conversation avec le mage et Sam avait été agréable, et leur compagnie distrayait efficacement la rôdeuse de ses pensées solitaires souvent morose.

[Voyageuse]

Elle passa les deux jours suivants à préparer son sac, jetant les victuailles périmées, se réapprovisionnant en produits de première nécessité, lavant et pliant soigneusement les vêtements, faisant quelques travaux de couture. Elle racheta quelques menus ustensiles, trouva une corde solide à la boutique «Au Rodeur Accompli», un nouveau briquet à amadou, une pelote de ficelle. Bref, elle reconstitua tout son stock de petit matériel.

Puisqu'elle faisait désormais partie des pensionnaires, Poikarea lui apprit qu'elle avait accès à un petit salon, à l'arrière de la salle principale, plus lumineux que sa chambre, au cas où elle désire lire, ou tricoter, ou coudre, ou quoi que ce soit d'ailleurs. Peu à peu, elle prit ses marques, et osa sortir de sa chambre pour passer du temps dans la salle commune ou le petit salon intimiste. La pièce était toujours d'un calme absolu, et le principal occupant des lieux, en soirée, était le vieux mage qui l'avait abordée le premier soir.

L'observant avec amusement alors qu'elle restaurait son hamac, il ne put s'empêcher de remarquer.
« Vous avez une bonne panoplie d'aventurière, jeune dame. Êtes-vous donc de ces jeunes gens toujours à courir par monts et par vaux à la recherche de quelque trésor perdu ?
- Non, rétorqua-t-elle. Je voyage beaucoup, c'est vrai, mais je ne m'intéresse pas aux trésors. Enfin… pas le genre de trésor que vous imaginez.
- Et que donc savez-vous donc de ce que j'imagine ? s'exclama-t-il joyeusement.
- Heu… Rien, vous avez raison…, reconnut-elle en rougissant. Excusez-moi...
- Hey, je plaisantais ! Mais vous m'avez tout l'air de préparer une expédition, ces temps-ci. Serait-ce trop indiscret de demander où une jeune dame telle que vous compte se rendre ? A mon âge, vous comprenez, on ne voyage guère plus que par procuration, en écoutant les récits et les projets des jeunes...
- Je… Non… Je veux dire, ce n'est pas un secret. Je vais aller au nord des Pics des Orcs.
- Tiens donc ? Du côté de Togoria, si je ne m'abuse*?
- Oui, c'est ça. »

Il attendit quelques instants, espérant sans doute qu'elle en dirait davantage, mais elle resta silencieuse.
« Mais que peut-il donc y avoir de si intéressant par là-bas ? A part… des Orcs, peut-être, justement… Remarquez, ils ont peut-être en leur possession des artefacts magiques du plus grand intérêt. Je sais, vous ne vous intéressez pas à ces trésors, mais si vous voyez pensez donc à moi !
- Il est peu probable que je trouve ce genre d'objet, là où je vais.
- Qui sait ? Je sais en tout cas que Togoria est réputée pour ses boutiques d'Art de la Toile…
- Oui, mais moi, je vais plutôt me rendre en pleine nature.
- Ah, c'est bien une réponse de rôdeuse ça. Je présume que vous allez cueillir des herbes, pour la boutique de l'Herbe Folle ?
- Non, non… Enfin, peut-être, mais pas seulement. Je pars en apprentissage.»
L'explication lui avait échappée, et elle se sentait un peu ennuyée d'en avoir trop dit.
« Apprentissage d'herboriste ?, insista le mage.
- Non… je… je vais devenir druide,» osa-t-elle finalement avouer, un peu mal à l'aise.
Il n'y avait pas de quoi, sans doute. Mais elle savait que sa nouvelle profession pouvait être mal perçue par certains citadins, et que les rapports avec les pratiquants de la magie profane n'étaient pas toujours des plus cordiaux.

Contrairement à ses craintes, le visage de son interlocuteur s'illumina d'un sourire.
«Druide ? Mais savez-vous que c'est un métier passionnant, pour un mage spécialiste de la métamorphose? Ces hommes qui acquièrent le don de se transformer quasiment à volonté en animal, sans avoir à jeter de sortilège… c'est absolument fascinant!»
Elle n'avait jamais envisagé les choses ainsi. Bien sûr, elle savait que les druides pouvaient se transformer, elle l'avait suffisamment vu avec Neffen. Cependant, elle n'avait jamais imaginé pouvoir le faire elle-même un jour. Et pourtant, elle réalisait que ce serait le cas, si elle progressait dans cette voie… C'était déstabilisant, comme idée. Se sentir vivre dans le corps d'un animal... être, réellement un animal, totalement. Rien à voir avec les sensations qu'elle partageait lorsque Prince lui ouvrait son esprit. Elle frissonna, un instant, mais elle sentit que la curiosité l'emportait. Le mage avait raison : ça devait être fascinant. Elle s'imaginait déjà en aigle, survolant les montagnes. Voler, ça devait être grisant… Hum… Bon, en réalité, elle avait peut-être intérêt à s’entraîner à se transformer d'abord en quelque chose de plus simple. Quelque chose qui marche sur le sol, pour commencer. Et puis, ça n'était pas pour tout de suite. Elle en avait pour des années avant d'être capable d'une symbiose suffisante avec la nature pour réaliser ce prodige.

Perdue dans ses pensées, elle réalisa qu'elle n'écoutait plus le verbiage du vieil homme, et rougit de son impolitesse. Mais il se faisait tard, elle avait une bonne excuse pour regagner ses pénates. Demain, après un détour désormais rituel dans un coin de nature, sans doute au petit bosquet des docks cette fois-ci, elle irait chez Isudë pour refaire son stock d'herbes et de baumes. Pour l'heure, il était temps de dormir.

[Voyageuse]

RP Solo : apprentie-druide -prologue

C'est le coeur joyeux et la tête ailleurs qu'Astrée revint finalement à l'auberge. Son escapade dans les bois lui avait fait du bien, elle avait digéré la nouvelle. Enfin, presque. Elle avait encore un peu de mal à réaliser, en réalité. Un bébé...
Perdue dans ses pensées, elle accorda à peine un regard au vieux mage avec qui elle échangeait d'ordinaire quelques mots le soir. Celui-ci ne parut pas lui en tenir rigueur. Elle eût la sensation que Poïkarea lui jetait un regard intrigué, mais, discrète, l'aubergiste ne posa aucune question et elle lui en sut gré. Elle n'avait envie de parler à personne. Juste envie d'être seule.

Elle monta se coucher de bonne heure, sitôt le repas avalé, mais fut bien incapable de trouver le sommeil. Les yeux grands ouverts dans l'obscurité, elle posa la main sur son ventre et sourit. Je suis sûre que tu es un garçon. Et tu seras aussi beau que ton père, avec les mêmes yeux clairs. Peut-être pas les mêmes cheveux, non, pas si roux, mais tu auras sûrement des tâches de rousseur et des reflets. Oh là là, mon bébé, tu seras beau comme un dieu, c'est obligé avec le père que tu as !
Elle se tourna, se retourna, incapable de trouver le sommeil. Il faudrait lui choisir un prénom. Ça n'était pas urgent, elle avait encore sept mois devant elle, mais ça lui faisait tant envie. Un prénom... en rapport avec le feu brûlant de la passion ? Ou avec le rayon de soleil qu'était pour elle Reynald ? Hélios pour le soleil ? Félix, pour la joie ? Non. Cet enfant était avant tout un cadeau des dieux. Tu t'appelleras... Nathanael. Oui, Nathanaël. C'était exactement ce que ce prénom signifiait.

Et Reynald, comment allait-il réagir ? Allait-il vouloir reprendre leur relation ? Bon sang, ce type était un courant d'air, incapable de rester en place... Alors peut-être que ce serait une relation en pointillés. Ou peut-être ne viendrait-il lui rendre visite que pour voir l'enfant... et ça, elle devait bien admettre qu'elle aurait un peu de mal à le vivre. Mais leur passion avait été si forte... il devait rester quelques traces, non ? Dans son coeur à elle, tout était limpide : malgré la brutalité de leur séparation et ces reproches injustes, elle sentait bien qu'il suffirait d'un rien pour qu'elle l'aime à nouveau aussi fort qu'avant. Il faudrait juste qu'elle se méfie des sautes d'humeur, qu'elle soit l'élément pondérateur de leur couple... ça n'était pas forcément impossible. Bien sûr, ils étaient tellement différents que ça ne serait pas simple, sur le long terme. Une relation en pointillé, finalement, c'était sans doute le mieux. Elle pourrait s'installer dans la Trouée, à Bortheïas. Ou, mieux, dans les Pics des Orcs. Ça serait plus simple pour qu'il passe les voir, elle et l'enfant....
Quoiqu'il en soit, il ne fallait pas lui mettre la pression, c'était le plus sûr moyen de le faire fuir. Il devait se sentir libre de revenir auprès d'elle. Et elle ne pouvait s'empêcher d'espérer qu'il le ferait : même s'il restait itinérant une partie de l'année, ils pourraient passer les hivers ensemble, non ? A moins qu'il ne soit obligé de demeurer au temple ? Décidément, ça n'était pas simple, d'aimer un clerc : elle passerait après sa vocation, immanquablement, il ne serait peut-être pas souvent là. Mais elle ne serait pas seule de toute façon, il y aurait l'enfant. C'était tout ce qui comptait. Nathanaël...

Elle étouffa un bâillement. La fatigue commençait à prendre le dessus. Elle écrirait à Reynald dès demain matin, pour lui annoncer la nouvelle. A Erhedun, au temple. Au pire, il aurait la lettre au début de l'hiver, dans tous les cas avant la naissance, c'était l'essentiel. Ensuite... advienne que pourra. Quelle que soit la réaction de Reynald, elle serait là, elle, pour cet enfant, et c'était tout ce qui comptait. Elle l'aimait déjà si fort...

[Voyageuse]

Astrée trempa pour la dixième fois au moins sa plume dans l'encre : celle-ci séchait avant qu'elle ait réussi à écrire le moindre mot. Elle n'était décidément pas douée pour écrire... Et pourtant, il fallait qu'elle trouve les mots pour annoncer la nouvelle à Reynald.
Avec un soupir, elle prit un autre morceau de parchemin, cessant pour un moment de se triturer les méninges. Ce deuxième message était bien plus facile à écrire. Il s'agissait simplement d'annoncer à Kasumi qu'Isudë connaissait l'existence d'un bosquet sacré tout près de Peyregorde, sans doute celui qu'il cherchait. Elle écrivit cela en quelques mots, signa, et glissa le message dans une enveloppe qu'elle déposerait à la Bienveillance. Avec un soupir, elle y ajouta le médaillon qu'il lui avait offert juste avant son départ pour Everaska, qu'elle avait retrouvé l'avant-veille au fond de son sac. Cela remuait en elle des émotions douloureuses, mais elle s'interdit d'y penser. Elle avait tourné la page, définitivement. Le bébé à venir l'y aidait grandement.

En parlant de bébé... Elle revint au premier parchemin, et réfléchit à nouveau. Lui dire. Lui laisser entendre qu'elle voulait le revoir sans qu'il sente la moindre pression. Le laisser libre tout en faisant en sorte qu'il vienne...
Elle finit par se lancer. Il suffisait d'aller droit au but après tout. Être elle-même.

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Mon cher Reynald,
Je sais que tu ne souhaites peut-être plus me voir ni même entendre parler de moi. Mais si je t'écris aujourd'hui, c'est parce qu'il faut que je t'annonce quelque chose d'important : je suis enceinte.
Je voulais que tu le saches, parce que c'est ton enfant, que tu as le droit de le connaître, et qu'il aura le droit lui aussi de vouloir te connaître. Sache cependant que je te laisserai entièrement libre de décider de la place que tu voudras, ou pas, occuper dans sa vie, et dans la mienne éventuellement. Pour ma part, malgré les mots durs que nous avons pu échanger, je ne peux m'empêcher de t'aimer encore, sincèrement, du fond du coeur. Mais je ne veux pas non plus que tu te sentes prisonnier d'une histoire qui ne te corresponde pas : même si je songe à déménager dans la Trouée, je ne veux rien t'imposer.
Il naîtra à la fin de Nuiteuse, et je l'attends déjà avec impatience. Je pense que tu auras eu la lettre d'ici là. Tu peux me contacter quand tu le voudras.

Astrée

Elle lut et relut la lettre, et finit par sourire. Tout était dit. Elle cacheta l'enveloppe, inscrivit lisiblement en guise d'adresse "Reynald d'Erhedun, temple de Milil, Erhedun". Il ne lui restait plus qu'à se rendre à l'assemblée, là où se trouvait un service dédié aux correspondances entre les villes. Une lettre adressée à un temple arriverait fatalement à destination : elle ne serait sans doute pas la seule et serait jointe aux autres. Enfin, elle l'espérait. Sinon, si elle n'avait aucune nouvelle dans l'année, il faudrait qu'elle songe à en envoyer une autre à Maedron, peut-être... ou à la porter elle-même. Mais il n'y avait pas de raison après tout...
Mais pour l'heure, il était inutile de tergiverser : elle avait deux lettres à déposer, ensuite elle comptait bien aller méditer un moment dans le grand parc, puis se rendre chez Isudë maintenant qu'elle avait les idées un peu plus claires.

[Voyageuse]

RP solo : apprentie druide, prologue

Elle qui était sensée partir pour toute la belle saison, elle se trouvait de retour au bout de trois jours seulement. Elle ne donna aucune explication à l'aubergiste qui l'observait d'un oeil vaguement inquiet. Elle était d'une pâleur à faire peur, affaiblie, encore un peu fiévreuse. Malade, quoi : ça devait suffire à expliquer son retour inopiné après tout. Elle ne voulait pas de questions, elle ne voulait avoir à s'expliquer avec personne. Personne n'avait su qu'elle était enceinte, sauf Isudë. Et Reynald, puisqu'elle avait fait la bêtise de lui écrire. Il faudrait qu'elle le prévienne, qu'elle trouve le courage de lui dire qu'elle avait perdu l'enfant. Mais là, tout de suite, elle n'avait pas la force : le simple fait d'y songer provoquait des torrents de larmes.

Les paysans qui l'avaient recueillie avaient eu la bonté de la ramener en charrette, et c'était heureux car elle n'aurait certainement pas eu la force de chevaucher jusqu'ici. Ils l'avaient déposée près de l'esplanade, là où ils devaient rencontrer le grossiste qui leur achetait leurs fromages, et l'avaient regardé s'éloigner avec inquiétude. Elle dut s'appuyer sur Prince pour parcourir les trois cent mètres qui la séparaient de l'auberge : elle tenait à peine sur ses jambes.

Sitôt la clé obtenue, elle monta directement dans sa chambre. C'était la même qu'elle occupait quelques jours plus tôt, et elle en était soulagée : elle s'y sentait chez elle. Elle demanda un peu timidement à l'aubergiste s'il était possible qu'on lui monte ses repas, requête qui fut acceptée immédiatement. L'empressement de Sam à transporter ses bagages prouvait qu'elle devait avoir l'air encore plus faible qu'elle le pensait. Le demi-elfe comme sa mère semblaient sérieusement inquiets de son état, et elle n'avait pas la force de trouver les mots pour les rassurer. Et puis, au fond, elle se fichait éperdument qu'ils soient inquiets.

Une fois le jeune demi-elfe parti, elle fit exactement ce qu'elle s'était promis durant tout le trajet en charrette : se déshabiller, se glisser sous les couverture et n'en plus bouger. Elle n'avait qu'une envie, dormir, pleurer, dormir encore, des heures et des heures, des jours et des jours, pour tenter d'oublier.
Prince s'était esquivé de lui-même avant qu'elle entre dans l'auberge, ce qui lui évita d'avoir à répondre à d'embarrassantes questions sur l'endroit où l'étalon passerait la nuit. Il la rejoignit au bout de quelques minutes, se glissant par la fenêtre qu'elle avait laissée entrouverte, frelon bourdonnant fort désagréablement à son oreille, puis se fit écureuil pour lui amener un peu de douceur. Mais elle avait beau caresser la petite bestiole, rien ne pouvait ôter de son coeur cette peine immense, rien ne pouvait combler ce vide sidéral : elle avait perdu son bébé, le fils de Reynald, sa raison de vivre. C'était la fin du monde.

[Voyageuse]

" Entrez..."
Elle se redressa machinalement dans son lit. Elle n'en avait quasiment pas bougé depuis trois jours et n'avait aucune envie d'en sortir, mais il était bientôt l'heure du dîner et Sam lui apportait probablement un bol de soupe, comme hier. Elle tira la table près du lit. Elle n'avait pas faim, et pourtant elle savait qu'elle devait se forcer, pour reprendre des forces. Mais elle s'en moquait. Le bol de soupe passerait, mais pas le plat principal.

" Pose ça ici, Sam".
C'était la voix d'Isudë. Astrée la fixa avec de grands yeux interloqués. Elle ne s'attendait pas à voir l'herboriste ici. Elle sentit son teint virer au rouge cramoisi, comme une gamine prise en faute, et n'accorda pas un regard au jeune demi-elfe qui déposait sur la table, non pas une soupe, mais un bol d'eau bouillante.
" Je présume que tu n'as pas pris les herbes que je t'ai données l'autre jour ? questionna-t-elle sans autre préambule.
- Heu... non...
- C'est bien ce qui me semblait."
Et sans attendre, l'elfe jeta dans le bol d'eau chaude une poignée de feuilles séchées qu'Astrée ne chercha pas vraiment à identifier. Millepertuis, probablement, et valériane, ou quelque chose comme ça.
" Poïkarea est venue m'acheter des herbes hier, en me disant que tu étais rentrée malade et qu'elle cherchait de quoi te soigner, expliqua l'herboriste.
- Ah... heu... C'est gentil à elle... Je..."
Elle aurait préféré qu'elle n'en fasse rien. Qu'Isudë n'apprenne pas qu'elle n'avait pas été plus loin qu'à un jour de cheval de Luménis. C'était un souhait stupide et absurde, pourtant : Isudë savait qu'elle était enceinte, elle pouvait certainement la soigner, l'aider à récupérer. Il n'y avait, objectivement, rien de honteux à être revenue à Luménis pour se remettre de sa fausse couche. Et pourtant, elle se sentait inexplicablement mal à l'aise et n'osait pas croiser le regard de l'elfe.
- Qu'est-ce qui s'est passé ? questionna l'herboriste inhabituellement douce.
- J'ai perdu mon bébé", avoua simplement la rôdeuse d'une voix à peine audible, en baissant le front piteusement.
L'herboriste acquiesça en silence. Une boule dans la gorge, Astrée était incapable de prononcer un mot de plus.

" Tu es bien pâle, finit par remarquer l'elfe.
- J'ai perdu du sang...
- Tu as vu un clerc ?
- Non, une sage-femme.
- Je vais te laisser des herbes qui vont aider ton sang à se reconstituer, ça te redonnera des forces. Mais il est indispensable que tu prennes également les simples que je t'ai donné l'autre jour. Tu en as besoin. Et tu as besoin de soleil, d'air frais, de nature aussi. Poïkarea dit que tu n'as pas bougé de ta chambre..."
Non, elle n'avait pas bougé. Elle n'avait pas envie.
" Ne ressens-tu plus l'appel de la Nature ?
- Non... Je suis trop fatiguée je crois."
C'était un mensonge, elles le savaient toutes les deux. C'était bien plus que la fatigue : elle avait sombré dans une mélancolie trop profonde et n'avait goût à rien. Elle ne ressentait plus rien.
" Double la dose de millepertuis, et de toutes les autres herbes que je t'ai prescrites. Matin, midi, quatre heures et soir.
- A quoi bon ? marmonna Astrée en haussant les épaules.
- Tu en as besoin. Vraiment, je t'assure. Tu ne me fais pas confiance ?
- Si... mais...
- Ou bien est-ce que tu comptes passer le restant de tes jours enfermée ici ?
- Non, bien sûr...
- Alors quand comptes-tu en bouger, dans ce cas ?
- Je ne sais pas. Quand j'aurai retrouvé l'énergie.
- Tu ne retrouveras aucune énergie si tu ne te soignes pas ! Et je ne parle pas que du physique..."
Astrée sentit ses lèvres se mettre à trembler et les larmes perler au coin de ses yeux. Elle serra les dents. Elle ne voulait pas pleurer devant Isudë. Elle ne voulait pas qu'on prenne soin d'elle. Elle ne voulait pas de ces herbes.

" Bois".
Incapable de refuser, consciente que ça aurait été une rebuffade stupide et stérile, elle but l'infusion.
" Demain, il faut que tu sortes de ta chambre. Que tu ailles méditer dans la nature. Tu es druide, et tu en as besoin. La Nature t'aidera à reprendre le dessus...
- La Nature m'a pris mon enfant!, répliqua-t-elle d'une voix subitement dure, sèche, pleine d'une colère qui la surprit.
- Si c'est arrivé, c'est que c'était nécessaire, qu'il n'était pas possible qu'il vive. Qu'il ne le pouvait pas.
- Mais ça n'est pas juste !"
Elle se retenait pour ne pas hurler.
" Non, ça n'est pas juste, acquiesça doucement Isudë. La Nature n'est ni juste, ni injuste. Elle est, c'est tout, et nul n'échappe à ses lois.
- Mais c'était mon bébé, et je l'aimais..."
Sa voix se brisa, et elle éclata en sanglots.
L'herboriste ne trouva rien à répondre, et Astrée n'avait rien d'autre à ajouter. Le silence s'installa, lourd, rompu par les sanglots de la rôdeuse. Elle replia ses genoux contre elle, les entoura de ses bras. Elle ne parvenait pas à s'arrêter de pleurer.

Elle entendit Isudë sortir de la pièce, lui laissant un bouquet d'herbes sur la table.

[Voyageuse]

Elle ne bougea pas de sa chambre le lendemain. Elle ne voulait pas sortir, ne voulait pas arpenter les murs de la ville, ni même voir le soleil qu'elle devinait derrière les rideaux, entendre les oiseaux chanter ou sentir le parfum des fleurs. Même l'idée d'une balade dans le Parc la rebutait. Elle ne voulait pas renouer le contact avec la Nature. Sans le vouloir -ou peut-être en sachant pertinemment ce qu'elle faisait-, Isudë lui avait fait prendre conscience de cette colère qui couvait en elle : la nature lui avait pris son bébé, et elle lui en voulait terriblement, aussi absurde et irrationnel que ça puisse paraître. C'était tellement injuste, cette fausse couche. Et tant pis si la sage-femme -elle s'en souvenait à présent- avait dit que ça concernait un tiers des grossesses. Pourquoi à elle, qui avait déjà perdu un enfant, pourquoi maintenant alors qu'il était tout ce qui lui restait de Reynald ?
Elle resta donc dans la pénombre, morose, l'esprit vide. Toute autre considération mise à part, elle se sentait de toute façon trop fatiguée pour sortir. Elle s'obligea néanmoins à boire une infusion le matin, à base de millepertuis comme la veille, et une autre à midi où elle glissa cette fois-ci les herbes sensées l'aider à se rétablir.

Contre toute attente, Isudë reparut le soir, après le dîner qu'elle avait à peine touché. Astrée sentit son corps se raidir, sans vraiment savoir pourquoi. En présence de l'herboriste -druide-, elle éprouvait un sentiment diffus de culpabilité, la sensation irrationnelle de n'avoir pas été à la hauteur, de l'avoir déçue.
L'elfe déposa sur la table un petit bouquet d'herbes.
" Vigne rouge, scutellaire, sauge et aubépine. Une fois par jour. Pour t'aider à retrouver des forces. Mais ne néglige pas celles agissant sur la mélancolie, surtout pas.
- Oh... Merci..."
Ce fut tout ce qu'elle trouva à répondre. Elle n'avait pas envie de parler, du reste : tout avait été dit.
Sam apparut sur ces entrefaites, les bras chargés d'un immense sac de jute d'où il sortit quatre pots de terre, contenant des plantes inconnues de la rôdeuse. Astrée l'observa, médusée, installer les quatre pots au pied de la fenêtre, suivant les directives d'Isudë.
" Astrée, puisque tu ne bouges pas d'ici, je me suis dit que tu pourrais peut-être me rendre un service...
- Un service ? Heu... Oui... enfin... Quel genre de service ?
- Je dois m'absenter pendant deux jours. Ces plantes-ci ont besoin de soins particuliers, je ne peux pas les laisser dans ma boutique. Peux-tu t'en occuper ici ?
- Heu... Oui, bien sûr... mais... que dois-je faire ?
- Oh, simplement les arroser une fois le matin au lever du soleil, une fois en début d'après-midi, une dernière fois après le coucher du soleil. Il faut être très régulière. Environ un litre par pot, elles ont besoin de boire énormément au printemps. Et lorsque tu les arroses le matin, il faut... Attends, viens voir de plus près, je vais te montrer : tu vois cette feuille qui s'enroule sur elle-même ? Il y en aura trois semblables chaque matin, sur chaque plant. Tu dois la dérouler très délicatement, du bout des doigts, et faire en sorte qu'elle se trouve dans la lumière du soleil, s'il y en a. Par chance, ta chambre donne à l'est... Et le soir, comme maintenant, tu dois repérer, sur chaque plant, les fleurs fanées du jour -celles-ci, tu vois?- et récupérer soigneusement ses pétales dans ce petit sachet. Elles ont des vertus très intéressantes... "
Astrée observa l'herboriste décoller les pétales fanées, une à une.
" Il faudra aussi que tu laisses la fenêtre grande ouverte toute la journée pour qu'elles respirent, et qu'au contraire tu fermes bien la fenêtre et le rideau dès le coucher du soleil pour les protéger du froid. Est-ce que ça te semble possible ?
- Ou..oui, bien sûr, répondit Astrée avec un bref haussement d'épaules.
- Parfait ! s'exclama joyeusement l'herboriste. Je vais me charger des pétales de ce soir...
- Je vais vous aider", proposa spontanément la jeune femme.
C'était après tout le meilleur moyen d'apprendre.

Isudë l'observa avec un léger sourire au coin des lèvres tandis qu'elle s'appliquait à reproduire son geste.
" C'est parfait, commenta-t-elle simplement. Je savais que je pourrais compter sur toi."
La signification de ces mots était plus profonde qu'il paraissait, Astrée en était certaine. Il y avait un message là-dessous.
" Occupe-toi bien de mes protégées en mon absence, poursuivit l'herboriste. Elles sont extrêmement vulnérables en cette saison. Et... Essaie de te départir de cette colère et de cette rancœur que je sens en toi."
Astrée pinça les lèvres, l'air boudeur.
" La nature n'est pas responsable de ta souffrance. Elle n'est pas responsable de la perte que tu as subie. Elle est au contraire celle qui t'a protégée, toi, et qui a préservé ta santé, en faisant en sorte que ton corps réagisse de façon adéquate en expulsant un foetus non viable. Sans cela, ton sang aurait été empoisonné par le contact de cette chair morte."
Astrée se contenta d'afficher une expression fermée. Elle ne voulait pas entendre, ne voulait pas penser à tout cela.
" Ne repousse pas la Nature dont tu fais partie. N'oublie pas ce que tu es désormais."
Elle serra les dents. Elle n'avait pas envie d'écouter ce qui ressemblait à une réprimande ou du moins à une leçon de morale.
" Astrée... Je sais qu'il faut un peu de temps pour faire le deuil de ce que tu espérais si fort... Mais n'attends pas trop. Et surtout, soigne-toi. Le corps et l'esprit. Je reviendrai après-demain soir récupérer mes protégées. J'espère que tu iras mieux.
- J'espère aussi," parvint-elle à marmonner entre ses dents.
En réalité, ça lui était bien égal. Pire, elle se complaisait presque dans sa souffrance, comme si tourner la page avait été trahir cet enfant perdu et tous les projets qu'elle avait formés.

[Voyageuse]

Elle alla se coucher peu après, le coeur triste, la tête vide. Incapable de penser. Sentiment de culpabilité, de trahir... mais de trahir qui, quoi ? La nature ? La confiance d'Isudë, de Neffen ? Sa soi-disant Vocation ?
Elle se tourna et se retourna sous les couvertures, sans parvenir à trouver le sommeil. Elle avait pris son infusion, pourtant. Mais elle avait l'esprit empli de sentiments sombres et confus, de rancœur, de tristesse, de désarroi. Et elle se sentait tellement épuisée...

Elle dut finir par s'endormir, puisqu'elle se réveilla en sursaut le lendemain matin, peu avant l'aube. Un cauchemar, Reynald lui reprochant la port de leur enfant. Tellement réaliste, tellement probable. Elle se recroquevilla sous les couvertures.
Au-dehors, le ciel avait pâli : l'aurore était proche. Elle jeta un coup d’œil plein de rancœur aux plants d'Isudë, comme s'ils étaient responsables de sa souffrance. Qu'est-ce qui lui avait pris d'accepter de s'en occuper ? Elle n'avait nulle envie de se lever à l'aube !

Mais puisqu'elle s'était engagée... et bien elle se leva, maugréant intérieurement. Elle pourrait toujours se recoucher après tout. Comme Isudë l'avait demandé, elle ouvrit les rideaux en grand, puis la fenêtre, juste au moment où la luminosité annonçait le lever du soleil à l'horizon, invisible derrière les murs de la ville. Elle arrosa les plants, utilisant le seau que Sam avait obligeamment monté à cet effet la veille. Puis elle rechercha les fameuses feuilles enroulées, et les déplia, une à une. Une brise légère s'engouffra par la fenêtre, la faisant frissonner : elle attrapa machinalement un pull. Les feuilles des plantes, quant à elles, vibrèrent légèrement sous le courant d'air... et chantèrent. Oui, il n'y avait pas d'autre mot : ce n'était pas le sifflement habituel de la brise sur les feuilles des plantes, c'était presque une mélodie, légère et harmonieuse, qui lui rappelait l'arbre de vie et ce moment où toute la forêt s'était mise à chanter en sylvestre la chanson de Neffen, mais aussi le moment où elle était devenue druide. Elle sentit une émotion irrépressible lui nouer la gorge. Elle s'obligea à continuer sa tâche, à fermer son cœur à ce son si merveilleux, mais ce furent ensuite les parfums qui se répandirent, émanant des feuilles qu'elle déroulait une à une, suaves et sucrés comme ceux de mille fleurs.
Une fois la dernière feuille dépliée, elle fixa d'un oeil médusé les quatre arbustes, ne sachant que penser de ces étranges phénomènes. Un rayon de soleil, se glissant entre les murs de la ville, choisit ce moment-là pour frapper un plant de plein fouet, et il se mit à briller de mille feux, juste l'espace d'un instant. Il redevint presque aussitôt un simple arbuste, mais la branche qui se trouvait face au soleil portait maintenant une fleur en bourgeon, qui s'ouvrait, peu à peu, écartant ses sépales, déployant pétale après pétale. Et cette fleur était d'une beauté si fascinante qu'elle eut bien du mal à en détacher les yeux : chaque pétale, brillant d'un reflet nacré, était d'une couleur différente, le tout formant une harmonie parfaite, étincelant sous le soleil. Et ce parfum... Elle inspira, s'en imbibant jusqu'au plus profond de son être. La brise souffla à nouveau, faisant chanter les feuilles, en une voix amicale, qui murmurait dans un souffle des choses incompréhensibles...

Non, ça devait être son imagination. Elle recula de quelques pas, s'assit sur son lit. A distance, l'effet était moins spectaculaire. La fleur était magnifique, le parfum parvenait jusqu'à elle, le chant également, mais beaucoup plus ténus. Elle pouvait presque se persuader qu'elle les avait imaginés. Presque. Elle savait qu'il n'en était rien. Et elle était convaincue qu'Isudë savait parfaitement ce qu'elle faisait en lui confiant ces plantes.

Comme elle se l'était promis, elle s'allongea à nouveau, espérant se reposer. L'air printanier s'engouffrait par la fenêtre ouverte, apportant avec lui les chants des oiseaux, emplissant ses poumons du parfum suave des fleurs, ses oreilles du murmure doux des feuilles. Le soleil illuminait la pièce, et elle vit d'autres fleurs éclore, une à une. Elle ferma les yeux, mais ne put en faire autant de ses oreilles et de ses poumons : malgré elle, son esprit vibrait au diapason de la nature qui l'appelait. Le printemps était merveilleux, les fleurs magnifiques, l'air parfumé, elle sentait la puissance de la Nature autour d'elle. Douce, amicale, maternelle, et en même temps neutre, presque distante.
Sans savoir vraiment pourquoi, elle se mit à pleurer toutes les larmes de son corps, sanglotant contre son oreiller.

[Voyageuse]

Impression de paix, de sécurité, de bien-être. Sensation d'une présence veillant sur elle, discrète, silencieuse, amicale, presque maternelle. Un chant en langue sylvestre résonnait dans sa mémoire, celui de Neffen, et tout son être vibrait au diapason. La mélodie parlait à ses membres, à son coeur, à son corps, à son âme, à chacune des fibres qui tissaient son être. Paix et harmonie. Chaque être vivant a sa place, son rôle, et la Nature veille sur tous. Tout est parfaitement en équilibre, et elle est à sa place, elle aussi.

Elle se réveilla en sursaut. Trop épuisée par ses mauvaises nuits, et sans doute apaisée malgré elle par l'étrange bruissement de la brise dans les feuilles des arbustes, elle avait fini par s'endormir un moment. L'oreiller était encore humide des pleurs qu'elle avait versés, et pourtant, elle se sentait inexplicablement apaisée. Elle avait fait un rêve étrange, elle le sentait affleurer à sa mémoire sans pouvoir le saisir. C'était quelque chose d'important, d'essentiel, mais plus elle fouillait sa mémoire, plus le sens de son rêve la fuyait. Elle renonça. Quoi que ce fut, il lui avait procuré une quiétude qu'elle n'avait plus ressentie depuis bien longtemps.

Elle réalisa qu'il était midi passé. Sam n'allait pas tarder à lui apporter un plateau repas -et une infusion, également : apparemment, Isudë avait laissé des consignes qu'il suivait à la lettre. Et il faudrait ensuite qu'elle s'occupe de ces étranges plants. Elle s'approcha, les observa à nouveau. Les fleurs avaient grossi, leurs pétales s'étaient élargies, mais elles ne lui évoquaient rien de connu. Leur parfum était fin et exquis, leurs couleurs magnifiques et harmonieuses. La brise, légère, faisait murmurer les feuilles. Un chant étrange, apaisant. Un pouvoir en émanait, elle le sentait pans parvenir à le décrire. Ces plants étaient magnifiques, merveilleux. Magiques.

Le plateau-repas arriva, comme prévu, et elle déjeuna lentement face à la fenêtre, les yeux fixés sur les arbustes, les poumons emplis de cet air printanier qui s'engouffrait par la fenêtre ouverte, porteur de chants d'oiseaux et des mille et une senteur de la vie. Elle sentait, dans son corps, dans son âme, la Nature l'appeler, sensation ténue et indescriptible, à peine réelle, peut-être imaginée. Mais le Parc était loin, elle se sentait encore si faible... ou n'était-ce que des prétextes ? Elle avait avalé tout son plateau repas, ce qui ne lui était pas arrivé depuis son retour, et elle sentait les forces lui revenir. Peut-être était-ce encore trop tôt cependant. Demain. Elle irait méditer demain dans le Parc. Elle sourit, apaisée d'avoir pris cette décision. Demain.

Elle arrosa les plants et les vit, sous ses yeux, se redresser littéralement, plus beaux et plus forts. Les feuilles se parèrent de reflets argentés et leur chant s'intensifia. Et elle eut la sensation étrange que ce chant étrange, ce parfum merveilleux, s'insinuant dans son âme par ses oreilles et ses poumons, lui donnaient force et confiance, apaisant son âme meurtrie.
Elle retourna s'allonger, mais ne chercha plus à fuir cette étrange magie. Au contraire, elle s'en imbiba, par le regard, l'ouïe et l'odorat, consciente du bien que cela lui faisait.

Cette nuit-là, elle dormit paisiblement et profondément, dans le calme et le silence revenus dès qu'elle avait fermé la fenêtre. Il y eut des rêves, elle en avait la certitude, des rêves paisibles et serein, des rêves où la nature attendait qu'elle reprenne sa place, des rêves où sa rancœur était retombée et où elle avait de nouveau confiance. Rien de suffisamment précis pour qu'elle s'en souvienne le lendemain. Mais elle se réveilla sereine.

[Voyageuse]

Isudë revint peu après le coucher du soleil, alors qu'elle s'appliquait à récolter les pétales fanés.
" Tu vas mieux, fit-elle simplement remarquer avec un sourire.
- Oui, acquiesça Astrée
- Ton aura est de nouveau intacte, précisa l'herboriste. C'est un signe qui ne trompe pas."

La rôdeuse se contenta d'approuver en silence. Comme elle se l'était promis, elle était sortie dans la matinée, pour aller se ressourcer au contact de la nature -ou de ce qui s'en approchait dans cette cité de pierre. Elle était restée prostrée au pied d'un chêne, bien plus longtemps qu'elle l'avait escompté, se laissant aller à pleurer, à prier, quémandant le pardon des dieux -et surtout Mielikki- pour avoir fui ce contact depuis plusieurs jours, pour avoir douté de leur bienveillance et les avoir rendu responsable de la mort de son bébé, les suppliant de l'aider à retrouver le goût de vivre, à aller à nouveau de l'avant. Toute rancœur l'avait quittée, et si la tristesse restait intacte, si sa souffrance était encore vive, elle n'était plus en colère contre la nature. Elle apprenait à accepter.
Sans qu'elle puisse l'expliquer, elle s'était sentie écoutée, soutenue, comprise, et pardonnée. En s'ouvrant à la nature, elle avait eu la sensation d'une présence infinie et bienveillante qui l'accueillait en son sein, entendait sa souffrance, acceptait l'imperfection de sa nature humaine et lui redonnait sa place, partageant avec elle une infime part de sa puissance. Elle avait choisi les pouvoirs dont elle souhaitait disposer, sortilèges fascinants, beaux et puissants, que la Nature mettait à sa disposition à elle, simple mortelle, don pour lequel elle éprouvait une gratitude infinie. Et elle était resté longtemps dans cet état de grâce dans lequel elle communiait avec la nature, y puisant la force et la sérénité qui lui faisaient tant défaut. Elle en était sortie requinquée, apaisée.

" Qu'est-ce que c'est, ces plants ? questionna-t-elle en désignant les arbustes qu'elle venait d'arroser.
- Ah, ça... secret d'herboriste," répliqua gaiement l'elfe.
Astrée se sentit rougir, et n'osa pas insister.
" Les elfes les surnomment Souffle-de-Rillifane, précisa tout de même l'herboriste. Mais ça ne t'avance pas à grand-chose.
- Ils sont magiques."
C'était une affirmation et non une question.
" Tu l'as ressenti, alors. Je m'y attendais. Ils sont parfois utilisés par les druides de notre race, notamment lorsqu'ils ne peuvent pas, pour une raison quelconque, avoir accès à un lieu naturel pour y méditer pendant une longue période. Ils créent, en quelque sorte, une présence de la Nature dans la pièce où ils se trouvent."
Elle sourit et regarda les plants avec affection, effeuillant l'une des fleurs fanées.
" Ils sont merveilleux, n'est-ce pas ?"
Astrée acquiesça en silence, la gorge subitement nouée d'émotion.
" Puisque tu n'avais pas la force d'aller jusqu'à la Nature, il m'a semblé bon que la Nature vienne à toi. T'ont-ils fait du bien ?
- Oui. beaucoup de bien. Et... je suis sortie un moment ce matin. J'ignorais que je pouvais simplement méditer auprès d'eux.
- Je pensais que tu t'en rendrais compte, que tu sentirais l'appel...
- Je l'ai senti. Mais je suis sortie pour y répondre.
- Tu as bien fait. C'est toujours préférable."
L'herboriste la contempla en secouant la tête, et sourit.
" Je suis soulagée qu'ils aient pu t'aider et que tu ailles mieux.
- C'est... difficile. Ce qui m'arrive. J'ai une peine immense, j'avais fait tant de projets...."
Elle sentit les larmes affleurer, mais parvint à les contenir.
" Mais je n'ai plus de rancœur contre la nature. Et ça me soulage.
- Tu as retrouvé ton équilibre, et ça se voit. Pour qui sait voir.
- C'est presque... incroyable. C'est comme si, en quelques heures, ils m'avaient extirpé mes sentiments négatifs du cœur et apporté la paix.
- C'est ce qu'ils ont fait. Par le biais de ton ouïe, de ta vue, de ton odorat, de ton toucher également lorsque tu as déroulé les feuilles. Quatre sens sur les cinq. Il ne te manque plus qu'une infusion pour qu'ils agissent par le biais du dernier sens."
Et sur ces mots, elle prit deux des pétales qu'elle venait de recueillir et les ajouta dans la tisane qui infusait déjà.

Le goût en était divin, aussi merveilleux que le parfum, la beauté des fleurs ou la magie du chant des feuilles. Les elfes avaient raison, cette plante venait des dieux. Astrée ferma les yeux pour mieux savourer et, presque sans en avoir conscience, elle s'ouvrir instantanément à la nature. Elle percevait tout avec plus d'acuité, comme si ses sens étaient transformés. Elle était un maillon d'une chaîne infinie, infime et pourtant indispensable, un être vivant parmi des millions, insignifiant et important. Elle sentait la puissance infinie de la Nature tourbillonner autour d'elle, en elle, et ce contact la comblait. Tout était en parfait équilibre, tout était à sa place, la Vie pulsait en elle et l'appelait à reprendre la route, à suivre son destin, à prendre sa place dans le monde, à jouer le rôle qui lui était désormais dévolu.
Elle rouvrit les yeux, fixant le vide, troublée. La contact de la main de l'herboriste sur la sienne la fit tressaillir.
" Ca va ?
- Oui... oui..."
Elle passa une main sur son front. Elle avait une sensation de vertige.
" Tu as affaiblie, tu as encore besoin de repos, constata Isudë. Et de viande rouge, de poissons, de tomates et de carottes. De mes herbes, aussi. Mais tu es sur la voie de la guérison.
- Merci, murmura Astrée d'un ton rauque.
- Pas de quoi ! Prend le temps qu'il te faut pour te remettre... Veux-tu garder l'un de ces plants un moment encore, et t'en occuper, ou penses-tu pouvoir t'en passer et avoir la force d'aller méditer chaque jour dans la parc ?
- J'aurai la force d'aller dans le parc. Mais... ils m'apportent tellement d'autres choses... je ne sais pas si leur absence ne va pas provoquer un vide trop brutal.
- Dans ce cas, gardes-en un. Tu me le rapporteras à la boutique quand tu n'en auras plus besoin.
- D'accord. Merci beaucoup, vraiment. Ces plants... ils m'ont fait un bien fou !
- Tu en avais besoin. Et l'important est que tu aies accepté leur magie. Tu aurais pu choisir de la refuser, résister à leur pouvoir.
- J'ai voulu résister, au début. Mais... c'est comme si une part de moi savait que j'en avais besoin, et c'était plus fort que la colère...
- Tu es druide, Astrée. Ton âme a un besoin vital de ce contact avec la Nature. Le refuser, ce serait renoncer à ce que tu es, à ta vocation. Et je suis heureuse que tu n'aies pas fait ce choix.
- Moi aussi... Et je ne vous remercierai jamais assez pour votre aide.
- Je pense que tu serais sortie de cet état tôt ou tard, même sans mon aide. J'ai juste accéléré le processus. Mais je vais te laisser te reposer à présent. Passe une bonne nuit, et à bientôt !"

Elle laissa le plus beau des quatre plants en place sous la fenêtre, et Astrée resta un long moment à l'observer, souriant béatement sans savoir pourquoi. Cet arbuste merveilleux, par sa seule présence, lui apportait la paix.

[Voyageuse]

Quittant enfin le plant des yeux, Astrée finit par pousser un profond soupir, revenant à la réalité. Oui, elle allait mieux, oui, elle avait retrouvé le contact avec la Nature et s'était même, à cet instant-là, sentie comblée. Mais le vide était toujours là, au fond de son cœur, elle en avait conscience, et la mélancolie couvait sous la surface, prête à l'envahir en un instant. Elle avait perdu son bébé, elle avait perdu son amour, elle n'avait plus de raison de vivre. Isudë avait raison, il lui faudrait encore du temps, et sans doute du millepertuis et autres plantes, pour arriver à faire face jusqu'à avoir fait le deuil. Mais une certitude se faisait jour en son coeur : elle ne devait pas rester enfermée dans cette chambre. Elle avait besoin de grands espaces, de marcher dans la nature, de galoper sur le dos de Prince, de respirer le parfum des fleurs, admirer un lac ou une cascade, écouter le silence si plein de vie de la montagne. Il fallait qu'elle occupe ses journées à autre chose que ruminer sa souffrance, qu'elle se trouve un but, même aussi dérisoire qu'atteindre une destination, qu'elle se concentre un moment sur son nouvel état de druide peut-être. Qu'elle bouge, qu'elle se défoule, qu'elle s'épuise physiquement pour ne pas songer. Qu'elle songe à Neffen mort, à la harde détruite, à toutes ces injustices qui l'avaient révoltée et l'avaient sensibilisé à la cause des autres espèces et de l'équilibre fragile de la nature. Qu'elle se centre sur les autres et non sur elle-même.


La nuit fut un peu moins paisible que la précédente : un seul plant était moins puissant que quatre, sans doute, et elle eût bien du mal à trouver le sommeil. A son réveil, elle s'appliqua à prendre soin de l'arbuste et de ses feuilles avant de se décider à sortir de sa chambre : elle prendrait désormais ses repas en bas, dans la salle commune.
" Vous allez mieux, commenta Poikarea.
- Suffisamment pour descendre manger ici, confirma-t-elle sobrement. Et puis, il faut que je reprenne des forces, j'ai un voyage interrompu à poursuivre.
- Vous comptez déjà repartir ?
- Dès que je m'en sentirai la force. Dans deux ou trois jours peut-être...
- Attendez tout de même d'être bien remise. Vous aviez vraiment mauvaise mine en arrivant, l'autre jour.
- Je sais, répliqua sombrement Astrée.
- Je crois que j'ai bien fait de prévenir Isudë..."
La rôdeuse acquiesça en silence. Oui, même si elle lui en avait initialement voulu d'avoir prévenu l'herboriste, elle admettait que ça avait été une bonne chose.
" Allez, installez-vous, je vous amène un bon petit déjeuner. Avec du miel. Rien de tel pour reprendre des forces !"
Le vieux mage -le professeur Gargouille-, assis à sa table habituelle, l'accueillit d'un sourire et de quelques paroles de salutations. Sam lui apporta des victuailles à foison -et un bol d'eau bouillante pour une infusion, bien sûr, d'autres habitués la saluèrent, et elle se retrouva peu à peu entraînée dans le train-train de la vie quotidienne.


Elle passa la matinée dans le parc, marchant dans les coins les plus isolés, s'enivrant des senteurs et des bruits de la nature. Comme la veille, elle médita, longuement, assise au pied d'un vieux chêne, et s'ouvrit à la vie qui l'entourait, aux puissances qui la parcouraient, s'en imprégnant telle une éponge, parcelle de vie parmi des milliards d'autres, semblable et différente. Elle accueillit avec humilité et gratitude les dons qui s'offraient à elle, pouvoirs de création ou de soins, dont elle se sentait une dépositaire si indigne et pourtant si fière d'avoir été choisie.
Elle revint à l'auberge passablement essoufflée, comme la veille. L'exercice physique était indispensable pour reprendre des forces, mais elle devait y aller doucement.

Elle remonta après le déjeuner et s'agenouilla auprès de l'arbuste. Elle versa presque avec dévotion un litre d'eau dans le pot, en murmurant :
" Souffle-de-Rillifane, quoi que tu sois, j'ai besoin que tu me donnes la force de repartir sur les routes. Et, auparavant, de faire ce que je dois faire maintenant."
C'était absurde de prier un arbre, même magique. Et pourtant, elle fut certaine d'entendre le chant des feuilles se modifier, se moduler, comme pour lui répondre.
Avec un soupir, elle sortit une plume, de l'encre et un parchemin, et s'installa à la petite table. Elle devait prévenir Reynald. Il n'avait sans doute pas encore eu son premier message, sinon il l'aurait contactée. Avec un peu de chance, il n'était plus à Erhedun, et on lui donnerait les deux en même temps. Il fallait qu'elle lui écrive...
Une fois devant la feuille blanche, elle se trouva incapable de trouver les mots. Et à peine eût-elle formé les premières phrases dans son esprit qu'elle se mit à pleurer. Des pleurs sans sanglots, silencieux, juste la tristesse qui s'évacuait, le coeur qui saignait. Mon bébé...

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Mon cher Reynald,
Ce que je t'annonçais dans l'autre lettre, il y a une veille, n'est plus. J'ai perdu l'enfant que j'attendais et que j'aimais déjà si fort. Pardon si je t'ai donné, involontairement, un espoir déçu.

Il lui avait fallu plus d'une heure pour écrire ces quelques lignes, et elle dut s'arrêter là, pleurant toutes les larmes de son corps. Elle prit le temps de laisser couler les larmes, sanglotant sur cet enfant qui ne verrait pas le jour, et finit par conclure de quelques mots.

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Je suis désolée.

J'aimerais te revoir.
Astrée.

Et elle pleura à nouveau, sur cet amour perdu, gâché, impossible, sur le vide de sa vie. Le chant des feuilles de l'arbuste parvenait à ses oreilles, ténu, mais elle l'entendait à peine, comme elle sentait à peine le parfum des fleurs. Un seul arbuste contenait moins de magie que quatre, et ne pouvait soigner son coeur meurtri. Le seul moyen d'échapper à ce vide était de reprendre ses projets d'il y a une veille, de partir vivre sa vie de druide, et de laisser le temps apaiser les douleurs. Elle partirait pour les montagnes dès qu'elle en aurait la force...


Elle se remit finalement en route le surlendemain, ses bagages sur le dos, Prince dans sa poche. Deux journées passées sous l'influence magique de l'étrange arbuste, à siroter les infusions adéquate et à s'aérer dans le parc quelques heures par jour, l'avaient un peu rquinquée, juste assez pour se mettre en route. le temps ferait le reste.
Plaçant soigneusement l'arbuste et son pot dans un sac, elle se dirigea vers l'herboristerie. Ensuite elle prendrait la route, direction la nature, les grands espaces, l'air pur, la liberté.

[Féérune]

En provenance de : http://www.baldursgateworld.fr/lacouron ... post416439

La porte de l'auberge s'ouvrit brusquement, dans un mouvement joyeux.

Sylveneige apparut sur le seuil de l'auberge, un sourire immense aux lèvres.

- Dame Poikarea ! youhou ! où êtes-vous ? Je suis de retour ! YOUHOU !!!

[HRP : un super MJ pour la réponse de dame Poikarea, siouplé !]

[Brutus]

(HRP:Me voici. :P,Je me dévoue.)

A peine la voix de Sylveneige ait retentie que Dame Poikarea revient des cuisines,Avec son sourire coutumier,L'elfe semblait plutôt heureuse de revoir la jeune rôdeuse...

"Eh bien jeune demoisselle vous voici de retour,vous tombez plutôt bien,Sam et moi étions entrain de finir quelques tartes aux myrtilles et aux pommes,Je me doute que vous allez y faire honneur."

Déclare la tenancière de la pension en fesant façe vers Sylveneige,quelques habitués quand a eux se tournèrent et certains reconnurent la jeune rôdeuse et lui adressèrent un salut de la tête,d'autres un sourire courtois...En tout cas l'auberge de l'ombre de l'arbre est toujours fidèle a elle même,Calme et paisible avec ses habitués et déja une succulante odeur de patisseries se fait doucement sentir dans la pièce principale...

[Féérune]

HRP : il me semble que c'est au MJ créateur du PNJ de le jouer. MP à Voyageuse, qui joue habituellement Dame Poikarea.

Accessoirement la "vraie" dame Poikarea sait très bien qu'on amadoue Sylveneige avec bien plus sérieux qu'une tarte aux myrtilles.

Ne modifie rien pour l'instant, attendons la réponse de Voya.

... Bon, apparemment tout baigne, on continue !

Sylveneige fut si étonnée qu'elle faillit en faire tomber sa besace.

- Dame Poikarea, vous plaisantez ? La tarte aux myrtilles, après un repas solide, pas avant. Avez-vous fait de nouvelles terrines ? Et le pain noir, qui est si bon, vous en avez, bien sûr ?

La rôdeuse s'assit. Lumi s'installa sur le dossier de sa chaise, examinant chaque coin de la pièce.

- Non mon chéri, pas de petites saucisses qui traînent ici... Ne rêve pas.

[Voyageuse]

" Au menu aujourd'hui, c'est plutôt tourte à la viande et aux champignons... mais je dois avoir un reste de la terrine d'hier. Saaaam ?
- Je vais voir...
- Mais asseyez vous donc, vous êtes chargée... "
Elle jeta un rapide coup d'oeil à la salle et la précéda à une table tout au fond de celle-ci, juste à côté de la cuisine.
" Sam va vous monter vos bagages.... du moins si vous comptez rester quelques jours ? Par contre, je crois que la chambre que vous occupiez habituellement est prise..."

[Féérune]

- Oh la tourte, c'est parfait ! et rester, mais bien sûr ! toute la vie, si je pouvais.

Une vision féérique de banquet continuel, avec les terrines et tous les mets délicieux cuisinés par dame Poikarea sur la plus grande des tables de l'auberge flotta dans le regard de Sylveneige.

- Allons, de la tourte, une bière légère mais bien fraîche, et pour la chambre l'essentiel est qu'il y en ait une... Plus d'une, j'y pense, peut-être que les amis avec qui j'ai voyagé vont venir. Donc, des chambres... Mon amie Adrastia dans la même chambre que moi, donc une chambre à deux lits... Avec une chaise au dossier confortable, pour que Lumi puisse se percher... Hé Sam ! je pourrais avoir une belle part de tourte ? J'ai faim à manger toute crue Lumenis entière ! enfin, je parie que les Lathandrites sont bien indigestes...

Elle rit, puis plaça vivement la main sur sa bouche.

- Désolée ! mais les prêtres et les paladins me font toujours le même effet. Se moquer des gens trop sérieux, c'est si drôle ! dites, chère Poikarea, avez-vous des nouvelles de Dorian et Zaïu ? Sont-ils rentrés de la guerre sains et saufs ?

Sylveneige se rappelait la vision de son amie, mais elle ne parvenait jamais à croire complètement à la divination. Les bardes voient tant de choses... Ils perdent le sens du sacré, je tiens mes doutes de mon père, sûrement...

Lumi fixait un point, loin en direction des cuisines. Une odeur de tourte vint aux narines de la rôdeuse affamée.