[Lieu] Aubépine

[Voyageuse]

Elle haussa les épaules.
" Chasser est vital pour un loup, et cela fait partie des lois de la nature. J'ai faim, je me nourris, pourquoi serait-ce une mauvaise chose ? J'ai besoin de viande. Tous les carnivores chassent, c'est notre nature. Vos dieux l'interdisent-ils ? Ce serait me condamner à mourir... "
Elle soupira, et secoua la tête, semblant presque s'ébrouer à la façon d'un animal.
"Mais je respecterai votre souhait puisque je vous doit ma survie. Même si je ne comprends pas ces réticences...."

[Kasumi]

Manifestement, il s'était mal fait comprendre ou alors la créature humanoïde penchait bien plus vers son côté sauvage que son allure ne le laissait penser. Il répondit néanmoins d'un ton conciliant :

- Ma déesse encourage l'équilibre mais cette clairière et ses abords est l'un de ses sanctuaires. Je ne vous demande pas de renoncer à chasser puisque c'est dans votre nature et que c'est nécessaire à votre survie. Respecter juste le périmètre comme le font les autres prédateurs.

[Voyageuse]

Elle haussa les épaules, à nouveau.
" Comme vous voulez. La forêt est vaste et je ne manque pas de proies. Mais je vais filer. Je sens la présence d'un autre prédateur qui approche, je n'ai pas assez de forces pour l'affronter... Peut-être devriez-vous vous mettre à l'abri. Je ne suis pas sûre que tous respecteront votre sanctuaire."
Elle inclina légèrement la tête, en guise d'au-revoir. Et se transforma à nouveau en loup avant de disparaître d'un bond dans les buis.

[Kasumi]

Kasumi considéra cet avertissement mais commença par souhaiter bonne chasse à l'étrange créature dont il aurait été bien en peine de définir la nature. Il n'était pas impossible qu'ils se recroisent un jour et peut-être saurait-il en obtenir un avantage vis-à-vis de sa gestion de la meute de loups. Dès qu'elle eut disparut, il reprit sa veille attentive, les sens en alerte pour se préparer à la venue d'un prédateur tout en espérant qu'il ne se montrerait pas plus hostile que les précédents.

[Voyageuse]

Il n'eut pas à attendre longtemps : il entendit une sorte de cliquetis inquiétant... Puis apparut, au-dessus des buis, un corps tout aussi inquiétant, perché sur d'immenses pattes bien trop nombreuses.
Une araignée géante. Qui avançait vers la clairière d'un pas qui lui semblait rapide, comme toujours pour une araignée. Difficile de deviner son état d'esprit en revanche.

[Kasumi]

Les araignées faisaient partie de la nature et avaient leur rôle dans la régulation des nuisibles. Toutefois, puisqu'il s'agissait d'une araignée géante et qu'elle n'avait peut-être plus grand chose de naturel, Kasumi se mit aussitôt sur ses gardes, sans pour autant faire mine d'aller chercher son épée : au besoin, il avait de quoi se défendre sans avoir à attaquer et il tenait, avant cela, à déterminer quelles étaient les intentions de la créature et surtout si elle était blessée ou non.

[Voyageuse]

L'araignée était blessée. Une flèche était plantée dans son abdomen et la faisait certainement affreusement souffrir. Un liquide en gouttait, verdâtre.
Elle ne semblait pas vraiment avoir conscience de ce qu'elle traversait : elle fonçait droit devant elle, peut-être en poussant des cris de douleur trop aigus pour une oreille humaine. Elle avait en tout cas le comportement d'un animal rendu fou de douleur. Elle pila net, cependant, en apercevant Kasumi, et se détourna de sa course pour se précipiter sur lui.

[Kasumi]

La créature était bien trop proche pour être raisonnée et le rôdeur réagit d'instinct pour tenter de la stopper :

Kasumi -> Enchevêtrement -> Araignée

Il espérait ainsi stopper sa progression avant de tenter d'obtenir les conseils de sa déesse : fallait-il tenter de lui venir en aide comme il en avait eu tout d'abord l'intention ou la laisser repartir ?

[Voyageuse]

Le sortilège immobilisa un court moment l'araignée. Avec ses longues et fines pattes, il était probable qu'elle s'en libérerait rapidement, mais Kasumi put profiter du court répit pour prier. Juste un instant. Il n'eut pas l'impression d'obtenir de réponse, mais il lui sembla cependant avoir une conscience accrue de ce que ressentait confusément l'araignée : elle souffrait terriblement, elle en voulait à la terre entière et particulièrement aux bipèdes qu'elle haïssait. Elle le tuerait probablement s'il lui en laissait l'occasion. Mais ce qui dominait était la souffrance, terrible, due à la flèche plantée dans son abdomen. Il fallait soulager cette souffrance... mais il risquait de se faire tuer s'il s'approchait.
Et puis, soudain, il comprit qu'il suffisait de lui donner l'ordre de ne plus bouger : elle ne pourrait qu'obéir à son injonction. Pour un temps qu'il avait du mal à estimer.
Déjà, l'araignée détachait une patte, puis une seconde, du piège de racines.

[Kasumi]

Ne pouvant s'approcher de lui-même au risque de se retrouver piéger par son propre sortilège, le demi-elfe recula de quelques pas puis essaya d'exprimer un ordre en direction de la créature :

- Approche ! Je vais te soulager...

Il exprima sa pensée par plus que des mots, notamment par l'emploi de gestes calmes tout en désignant la flèche qu'il comptait retirer.

[Voyageuse]

Son ton, ses gestes, ne semblèrent pas vraiment atteindre l'esprit de la créature, complètement aveuglée par sa fureur. Pourtant, il devait y avoir quelque chose dans sa voix qui la fit obéir, car elle approcha aussitôt qu'il en donna l'ordre, du moins dès qu'elle put se dégager du piège. Celui-ci était toujours actif, mais elle était désormais sortie de la zone. Sans paraître spécialement belliqueuse... mais c'était difficile à estimer en réalité. Elle semblait ne pas savoir vraiment pourquoi elle s'était approchée, et la fureur causée par la douleur pouvait très bien la reprendre, la rendant mortellement dangereuse. Mais Kasumi savait, sans savoir d'où venait cette certitude, que s'il donnait certains ordres simples avec conviction, en s'en remettant au pouvoir de Mielikki qu'il sentait en lui, elle serait contrainte d'obéir.

[Kasumi]

C'était une affaire de foi et de confiance et Kasumi n'avait plus de doutes. Il éprouva donc le don inexplicable dont l'avait gratifié la Dame des bois et demanda avec conviction à l'araignée de ne plus bouger. Ce faisant, il s'approcha à son tour pour dispenser un soin autour de la flèche puis entreprit de la retirer le plus doucement possible tout en laissant son énergie soigner la plaie.

[Voyageuse]

Un liquide verdâtre et malodorant s'échappa de la plaie en flot continu lorsqu'il retira la flèche. Peut-être était-ce une forme de sang, après tout. Mais son sortilège de soin agit immédiatement, et le flot se tarit.
" Non mais vous êtes fou ? Ecartez-vous de là, je vais l'avoir !"
La voix venait d'un homme armé d'un arc, une flèche encochée. L'araignée restait parfaitement immobile pour le moment. Une cible facile...

[Kasumi]

Kasumi sentait qu'il ne pouvait pas se permettre de perdre sa concentration au risque de subir une attaque de l'araignée. L'intrusion était donc des plus mal venues et il ne pouvait pas vraiment se retourner vers l'origine de la voix pour apprendre à qui il avait affaire.

- J'ai la situation bien en main, merci. Ceci est un sanctuaire de Mielikki et aucune créature vivante ne doit y être attaqué ! Rangez votre arc, qui que vous soyez !

[Voyageuse]

" Bon sang, mais vous vous rendez compte de ce que vous êtes en train de soigner ? Vous êtes fou ma parole ! Sanctuaire ou pas, laissez-moi tuer cette engeance du mal, avant qu'elle ne nous tue tous les deux !"
L'araignée était toujours parfaitement immobile. Kasumi pouvait certainement relâcher sa concentration quelques instants sans qu'elle ne se mette en mouvement, et il savait qu'elle obéirait encore s'il lui ordonnait quoi que ce soit. A condition qu'il agisse avant qu'elle ne reprenne ses esprits -ou avant qu'elle ne l'attaque en tout cas. Si toutefois telle était son intention, ce qu'il ignorait.

[Kasumi]

Constatant que l'araignée de bougeait pas, il décida de tourner la tête pour regarder son interlocuteur afin d'évaluer ses intentions et la menace éventuelle qu'il pouvait représenter.

- Cette créature souffrait. Je ne vais pas attaquer une créature sans défense qui ne s'est pas montrée hostile. Qui êtes-vous ?

Une réponse qu'il entendait bien obtenir, ne serait-ce que par son observation.

[Voyageuse]

" Pablo, répliqua l'homme. 'fin, c'est mon nom. Mais je ne comprends pas pourquoi vous vous obstinez à vouloir soigner ce genre de créature dangereuse ? Z'êtes un druide ? J'vous ai encore jamais vu dans l'coin..."
L'homme était plutôt petit, la démarche souple. Il portait un gilet de cuir et des vêtements dont les couleurs se fondaient dans les bois. Il pouvait être un rôdeur, tout comme lui, ou un simple chasseur peut-être. Il ne semblait pas hostile, juste complètement interloqué par l'attitude de Kasumi.

[Kasumi]

Kasumi se jeta un nouveau coup d'œil à l'araignée pour vérifier qu'elle restait toujours sous son contrôle puis il se fit fort de répondre d'un ton conciliant, espérant désamorcer la situation sans que rien ni personne ne soit blessé.

- Je suis Kasumi, le gardien de ce bosquet. Ma déesse attend de moi que je soigne tous les animaux blessés qui se présenteront ici ce matin. Cette araignée est dangereuse mais elle a répondu à ces critères. Baissez votre arc pendant que je lui demande de s'en aller.

Il espérait que le dénommé Pablo, tout comme l'araignée en fait, obtempérerait à son injonction.

[Voyageuse]

Pablo sembla hésiter... puis il haussa finalement les épaules, baissant son arc.
" J'vais quand même pas vous tirer dessus... Et vous êtes devant elle... Mais vous faites pas de fausses idées, j'la tuerai dès qu'elle sera hors de votre clairière... ou bosquet, si vous l'dites. Elle a gravement blessé les personnes que j'escortais, elle en tuera d'autres si on ne l'arrête pas. Ce serait criminel de la laisser vivre !"
L'araignée commençait à bouger, à réagir. Kasumi sentait qu'elle reprenait ses esprits et qu'il devrait rapidement utiliser une nouvelle injonction pour la faire fuir. Il n'était pas certain qu'elle le fasse d'elle-même après tout.

[Kasumi]

Kasumi prononça l'injonction pour faire fuir l'araignée maintenant qu'il avait accompli son devoir envers elle. Il répondit ensuite à Pablo avant - sans doute - qu'il se lance à sa poursuite :

- L'araignée a eu sa chance : je ne m'opposerai pas à ce que vous la traquiez. Essayer cependant de l'achever rapidement quand vous l'attaquerez. Est-ce que vois compagnons ont été pris en charge ?

[Voyageuse]

L'homme eut une légère grimace.
" J'les ai soignés comme j'pouvais. Mais y'en a un qu'est mal en point. Puisque vous pouvez soigner... Ce serait p'têt' bien que vous l'voyiez. Y sont à une bonne heure vers l'nord, près d'la rivière. On a eu un souci d'embarcation... Mon collègue va les sortir des bois et les emmener vers la route du bac dès qu'y s'ront un peu reposés. 'fin, ça fait p'têt' loin pour vous... D't'façon, on s'ra à Luménis demain soir... Y d'vrait t'nir jusque-là... 'fin j'crois, j'suis pas clerc..."
L'araignée avait filé vers l'est de toute la vitesse de ses pattes. Un peu lente, toutefois, pour une araignée.
" Moi j'vais d'abord voir si j'peux arrêter c'te bêt', d't'façon elle va êt' coincée par l'eau..."

[Kasumi]

Kasumi ne pouvait malheureusement pas quitter le bosquet car il n'avait pas encore accompli sa tâche. Il dut donc laisser le fameux Pablo repartir avec regrets mais non sans lui avoir confié certains de ses remèdes et bandage qui pouvaient être utiles aux blessés. La matinée n'était pas encore tout à fait achevée aussi se tenait-il encore à la disposition des animaux blessés qui pourraient encore se présenter. Puis l'après-midi serait destiné à s'occuper des plantes...

[Voyageuse]

Pablo remercia pour les bandages et divers remèdes, et s'en fut vers l'est à la poursuite de l'araignée.
Les animaux qui avaient fui à l'arrivée de celle-ci revinrent, peu à peu. Ils étaient tous plein de vie, et l'atmosphère particulière du lieu les incitait à l'euphorie. Il y eut un dernier malade, un rongeur légèrement blessé, pour lequel Kasumi n'eut même pas besoin d'utiliser de sort de soin.
Puis ce fut midi.

[Kasumi]

Comme prévu, Kasumi retourna en marge de la clairière pour boire une nouvelle infusion préparée à partir du gland. Cela pouvait paraître extrêmement frugal pour un observateur extérieur - surtout qu'il n'avait pas mangé depuis l'avant veille - mais la préparation suffit amplement à le ragaillardir.

C'est donc avec un enthousiasme renouvelé qu'il se mit à la tâche qui lui avait été assignée par la dryade : s'occuper de toutes les plantes de la clairière. Il commença par nettoyer de son mieux les traces du passage de l'araignée et de l'ours et les siennes puis s'attela à retirer les feuilles et les branches mortes de divers buissons et arbustes. Le travail ne manquait pas et il en aurait jusqu'à la nuit tombée mais il ne rechignait pas, sentant que chaque geste rétablissait l'équilibre et augmentait les chances que le bosquet se porte au mieux.

[Voyageuse]

Comme le matin, boire l'infusion eût un effet particulier sur son organisme. Il ressentait plus intensément la moindre parcelle de vie des lieux, et, désormais, était même capable de ressentir les besoins des plantes. Il sut, par exemple, que le lierre enserrait trop le saule et le fragilisait. Il sentait son chêne grandir encore, centimètre par centimètre -il avait l'impression de le voir croître sous ses yeux. Il sentait la vie des poissons dans l'onde claire du ruisseau s'écoulant de la source, celle des batraciens et des minuscules araignées d'eau. Il sentait le saule pleureur avide de boire cette eau bénie, tout comme le chêne et le sorbier. Les fleurs d'aubépine lui paraissait incroyablement blanches, mais il devina la menace causée par une attaque de pucerons quelque part en son sein, qu'il devait détruire ou au moins circonscrire. Des chenilles menaçaient le sorbier, trop nombreuses. Le passage des grands prédateurs avait arraché de menus branchages et les végétaux souffraient de ces blessures vives. Un peu d'eau bénie les aiderait à se remettre, une fois qu'il aurait remis chaque branche en place en consolidant les "fractures". Un pic-vert avait entamé le sorbier, et par la blessure une colonie de fourmis se faufilaient.
Par-dessus tout, il ressentait que chacun de ses gestes était une offrande à sa déesse, dont il devinait le regard posé sur lui.

[Kasumi]

Ressentir les bienfaits de chacune de ses actions était une gratification grandiose et ce d'autant plus qu'il savait répondre ainsi à la volonté de sa bienfaisante déesse. Il devenait l'agent de sa volonté dans ce sanctuaire magnifique, un endroit et un moment où il se sentait plus utile et à sa place que jamais. Mais il ne s'attardait pas plus longtemps que nécessaire auprès de chaque plante car il y avait toujours un autre déséquilibre à corriger, une autre espèce à soulager de ses souffrances.

[Voyageuse]

L'après-midi s'écoula rapidement, dans une atmosphère sereine et paisible. Tout était parfait. L'effet de la poudre de gland était merveilleux, mais il le sentait décliner au fur et à mesure que le soleil baissait à l'horizon.
Quelque part au-dessus de lui, le faucon de Sylvia s'était remis à tournoyer, puis il finit par descendre, hésitant visiblement, comme si quelque chose l'en dissuadait. Mais il descendit quand même, se posant juste à la lisière de la clairière, dans les buis. Il sembla à Kasumi qu'il portait un message accroché à la patte.

[Kasumi]

Sa compagne devait s'inquiéter, forcément. Et certainement se poser beaucoup de questions étant donné le peu d'explications qu'il avait été en mesure de fournir au moment de son départ nocturne. Kasumi décida donc de ne pas attendre pour prendre cinq minutes sur son programme et aller voir le faucon pour récupérer le message dont il était porteur. Il faudrait aussi y répondre mais il ne pensait pas que cela nuirait au rituel : il avait considérablement avancé et effectué les tâches les plus pressantes, laissant celles de confort pour la fin d'après-midi.

[Voyageuse]

Le message n'était pas de l'écriture de Sylvia, mais de celle de Martha.

" Sylvia a fait un petit malaise. Rien de grave, ne vous inquiétez pas. Elle se repose et tout est rentré dans l'ordre. Je voulais juste vous avertir, pour que vous ne attardiez pas plus que nécessaire là-bas."

[Kasumi]

En ne reconnaissant pas l'écriture attendue et surtout en lisant le début du message, Kasumi eut un léger vertige. Il lui fallut relire la suite à plusieurs reprises pour reprendre contenance. S'il avait pu rentrer aussitôt pour se rendre au chevet de sa fiancée, il ne s'en serait pas privé. Mais il lui fallait tout de même plusieurs heures pour rentrer. Et finir la cérémonie qu'il avait commencée : il n'avait pas le choix, il ne pouvait pas tourner le dos à la confiance placée en lui. Mais dès ce soir, il rentrerait à Peyregorde. En attendant, il tenta avec difficulté de reprendre sa tâche là où il l'avait laissée.