Le Cimetière

[Le Façonneur]

Asmodeus passa de nombreuses heures en expérimentation, des expérimentations qui lui permirent de découvrir bien des talents inédits. Ceux-ci, sans doute, l’aidèrent à se mettre dans la peau de celui qu’il était désormais, un impérieux seigneur momie, un être aux talents bien supérieurs au commun des mortels. Ce travail de découverte achevé, Asmodeus avait consumé une bonne partie de sa puissance magique. Peut-être devrait-il songer à se ressourcer, à moins qu’il n’ait d’autres projets pressants à mener.

HRP : considère que tu sais utiliser toutes les capacités de ton personnage.

[Asmodeus]

HRP : Formidable, merci !

Asmodeus était sous le coup de l'euphorie après avoir découvert des capacités extraordinaires que les livres de son prédécesseur ne mentionnaient même pas. Il disposait désormais d'un arsenal qui pourrait complètement surprendre et triompher de biens des adversaires et ce savoir lui donnait une énorme confiance en lui-même. Une énorme confiance qui lui permettrait de ne pas rester dans l'ombre d'alliés gênants comme Dame Irélia, sinon par stratégie. Conscient d'avoir épuisé une bonne partie de son potentiel magique et qu'il ne lui restait plus énormément de temps pour le régénérer, c'est naturellement vers son sarcophage que le seigneur momie porta ses pas pour un repos bien mérité.

[Le Façonneur]

Voilà Asmodeus reposé et détenteur de tout son pouvoir, de toute sa puissance. Il lui restait un peu de temps devant lui avant que n’arrive l’heure de son rendez-vous avec Dame Irélia, rendez-vous qui marquerait probablement le retour vers la Gisombre. Son repaire était d’un calme mortuaire très reposant et, pour l’instant, aucun intrus ne semblait vouloir s’y aventurer, de sorte qu’il n’y avait rien à défendre.

[Asmodeus]

Asmodeus se sentait investi d’une nouvelle puissance implacable mais il ne savait toujours que beaucoup trop vaguement où il allait mettre les pieds. Ce désavantage était stratégiquement intolérable et il décida donc de mettre à profit les quelques heures dont il disposait pour effectuer des recherches dans sa bibliothèque. Sur le seigneur qui régnait dans la Gisombre mélandienne mais aussi sur l’ordre des sœurs de la lumière et sur le paladin qu’ils avaient brièvement affronté. Sans doute ne trouverait-il que peu d’informations précises mais avoir une petite idée de la puissance des belligérants et de leurs faiblesses éventuelles constituerait un avantage inestimable.

[Le Façonneur]

Effectivement, Asmodeus trouva peu de choses. En fait, il ne trouva tout simplement rien sur le paladin qui, peut-être, ne devait pas spécifiquement appartenir à cette région. Il ne trouva rien non plus sur un éventuel seigneur de la Melandis de la Gisombre. La ville n’appartenait soit à personne de précis, soit au contraire à trop de monde pour qu’il soit probant de les citer. Enfin, il trouva quelques mentions sur les sœurs de la lumière. Leur ordre était apparemment assez vieux. Jamais très important, il avait sut survivre à bien des revers et se révélait donc d’une ténacité remarquable. Le genre de force du bien dont on ne parvenait jamais à se débarrasser. La momie allait se lancer dans la lecture d’un nouveau livre quand elle sentit qu’on tentait de communiquer avec elle. La voix de Dame Irélia résonna dans sa tête.
« Vous êtes prêts ? Auquel cas, je vous attend au lieu prévu. »

[Asmodeus]

Bien que n’ayant pas pu obtenir les informations dont il aurait aimé disposer, Asmodeus n’était pas peu satisfait d’abandonner ces lectures frustrantes qui lui avaient fait perdre un temps précieux. Sa réponse ne se fit donc pas attendre, claire, simple et efficace :

- Entendu. Rendez-vous dans une heure.

Autrement dit le temps de prendre ses affaires, à commencer par son bâton, et de parcourir prudemment le trajet jusqu’au caveau abritant la Croisée la plus proche de son domaine.

[Le Façonneur]

Une heure plus tard, donc, voilà Asmodeus et Dame Irélia de nouveau réunis. La liche observait l’endroit avec un certain intérêt. Elle était arrivée ici en premier. Lorsqu’apparût la momie, elle le salua sobrement, avant de déclarer :
« Avez-vous emporté votre fiole pour ouvrir le passage ? Ou vais-je devoir m’en charger ? »
Une chose était certaine, la vague anthropique n’avait pas rendu la liche plus agréable à côtoyer.

[Asmodeus]

Asmodeus n'avait évidemment pas commis l'erreur d'oublier la fiole garantissant un passage aisé vers la Gisombre. Il hésita tout de même un instant en se demandant s'il ne ferait pas mieux d'économiser ses ressources mais se dit que les sorts de Dame Irélia risquaient d'être fort utile avec les combats qui les attendaient encore certainement. Le seigneur momie sortit l'objet remis par le Façonneur et en utilisa une charge en guise de réponse. Une fois la faille ouverte, il se sentait suffisamment en confiance pour franchir le premier le passage et affronter ce que le hasard mettrait sur son chemin de l'autre côté. Bien malheureux le premier ennemi qui devrait s'opposer à ses nouvelles capacités !

[Le Façonneur]

De l’autre côté, il découvrit un caveau presque similaire et qui, si cela continuait ainsi, allait finir par devenir familier. Rien de menaçant ne se trouvait à proximité. La Gisombre était pareille à elle-même : désolée, mélancolique. Dame Irélia, qui n’avait rien perdu de son hautaine dignité, s’avança sur les premières marches, en direction de la sortie. Ses cheveux blancs voletaient derrière elle, agités par le vent.
« Bien. Je suppose que le plus indiqué est de revenir vers cette maudite tour, au moins pour savoir ce qu’il en est. Mais nous pourrions aussi directement nous rendre chez le Roi de Cendre. C’est lui qui doit avoir votre morceau de miroir. »

[Asmodeus]

La perspective - même hautement improbable - de retrouver Sire Danval et peut-être aussi de se venger des maudits aventuriers qui leur avait imposé indirectement un détour par les abysses était plus forte que la volonté de ne plus perdre de temps. C'est pourquoi Asmodeus donna son assentiment à la première idée exprimée par la liche. Qui plus était, s'il n'y avait rien sur place, ils n'auraient fait qu'un très court détour et se seraient assurés de l'absence d'ennemi dans leur dos.

[Le Façonneur]

« L’expression de la radicalité », commenta pensivement Dame Irélia à la vue qui se présentait désormais devant elle et Asmodeus.
Il n’avait pas fallut bien longtemps aux deux morts-vivants pour retourner là où se dressait la tour du fantôme dément. De la tour, il ne restait qu’un amas de pierres. Elle s’était écroulée, ce qui aurait dû arriver depuis longtemps d’après sa précédente apparence. Autour de la ruine, aucun autre bâtiment n’avait souffert particulièrement.
« Je suppose que la construction dimensionnelle qu’était cette tour devait être trop fragile, trop branlante, pour résister à la vague entropique. Ce buté de Chevalier Noir et cette bande de vermines téméraires ont dû être envoyés, comme nous, dans les plans. J’espère que vous ne comptez pas fouiller tout le multivers à leur recherche. »

[Asmodeus]

La disparition de Sire Danval était quelque peu décevante mais Asmodeus n'était pas non plus particulièrement émotif à ce sujet. Il se contenta donc d'un commentaire ironique et flegmatique :

- Pourquoi donc Asmodeus ferait-il une chose pareille alors que l'éternité lui permet d'attendre où il le souhaite que ses vrais amis, ou ennemis, le retrouvent ? Il fallait s'assurer qu'aucun de ces impertinents aventuriers n'attendent ici l'occasion de se venger. Non pas qu'Asmodeus les craigne mais ils ont prouvé leur pouvoir de nuisance... Mais assez bavardé : vous proposiez d'aller rendre visite au seigneur local, Asmlodeus vous suit !

[Le Façonneur]

Le duo se remit en route. Dame Irélia progressait d’un pas sûr, sachant apparemment avec exactitude où se rendre. Les sinistres bâtisses baignées de brumes défilaient. Rien ne semblait vouloir s’opposer à la progression du groupe, même s’il y avait toujours des mouvements imperceptibles dans les rues adjacentes et derrière les fenêtres. Asmodeus n’arrivait pas à se débarrasser de la désagréable impression d’être observé. Enfin apparût un manoir retranché derrière ses murs et son parc. La liche s’immobilisa sitôt en vue de celui-ci. Le portail clos de la propriété était surveillé par deux individus en robe sombre. Les sentinelles ne paraissait pas avoir remarqué les deux morts-vivants.
« Nous y voici, chuchota Dame Irélia. Le démon a encore des sbires sous ses ordres mais ils se font de moins en moins nombreux. Il n’est même pas à exclure de trahison de leur part. »

[Asmodeus]

Eliminer les deux gardes promptement était une option tout à fait envisageable et très tentante d'autant qu'Asmodeus ne portait pas dans son cœur les adorateurs des démons et tous leurs suppôts. Mais entrer en force n'était pas non plus sans risque pour la suite de l'opération. C'est pourquoi le seigneur momie s'adressa à son tour à Dame Irélia en chuchotant :

- Connaissez-vous une entrée qui pourrait ne pas être gardée ? Ou un moyen discret d'entrer ? Dans le cas contraire, il faudra décider comment aborder ces énergumènes pour éviter qu'ils ne donnent l'alerte.

[Le Façonneur]

« Ho, j’imagine qu’il doit bien y avoir une ou deux entrées secrètes, mais encore faut-il pouvoir les trouver. La première fois, je suis passé en force. La discrétion, ce n’est pas trop mon fort. Je suis en revanche tombé sur le groupe d’aventuriers qui eux avaient probablement emprunté un autre passage. J’ignore d’ailleurs ce qu’ils fabriquaient ici puisque leur objectif semble, enfin semblait être la tour maintenant détruite. Quoi qu’il en soit, le manoir ne paraît pas en proie aux affrontements pour l’instant. Le Roi des Cendres aurait-il repris le dessus ? Ou est-il déjà tombé ? S’il est encore sur son ridicule petit trône, je commence à me demander s’il tient à se mettre à dos deux individus tels que nous. Il a déjà nombre de soucis après tout. »

[Asmodeus]

Ces éléments pouvaient ouvrir d'autres perspectives d'autant qu'il pourrait être utile d'évaluer l'état des forces et des factions en présence avant de se ruer la tête la première dans un potentiel guêpier.

- Songez-vous à tenter de parlementer avec l'occupant des lieux ? Il pourrait avoir beaucoup à gagner à avoir des êtres puissants dans son camp. Temporairement, bien entendu... Un temps qui pourrait être mis à profit pour rafraichir vos informations.

[Le Façonneur]

« Négocier, pourquoi pas. Perdre du temps, surtout pas. Nous avons déjà été retardé par cet idiot de chevalier noir et cette fichue tour. Je ne tiens vraiment pas à m’embarquer dans une autre aventure alors que je pourrais très bien prendre ce que je désire de force. Nous avons à faire, au mieux, à un roitelet de pacotille sur le déclin. Le mieux qu’il puisse obtenir de nous, ce serait qu’on ne soit pas la cause de sa chute, rien de plus. »
Avec pareille discours, Asmodeus savait à quoi s’en tenir.

[Asmodeus]

Et c'est pourquoi il entendait mener lui-même les négociations. Mais avant cela, il fallait tout de même parvenir à convaincre Dame Irélia - non pas que c'était forcément la meilleure chose à faire dans l'absolu mais au moins de lui faire tenir certaines limites.

- Vous pourriez, vous obtenir les objets qui vous intéresse. Et Asmodeus le sien ou des informations sur l'endroit où il se trouve. En contrepartie, il pourrait être intéressant de proposer une aide très ponctuelle. Une aide consistant à occire quelques aventuriers qui vous ont fait du tort. Ainsi qu'à Asmodeus. Et il sera toujours possible de changer d'avis si les termes du contrat devenaient par trop pesants !

[Le Façonneur]

« Les aventuriers en question peuvent se trouver, je vous signale, n’importe où dans le multivers. »
Il y eut un instant de silence, puis :
« ... Ce qui est plutôt un avantage nous concernant. Il faut l’admettre. Nul n’est tenu à l’impossible. Et retrouver une aiguille dans une botte de foin multidimensionnelle, c’est impossible. Bien bien. Procédez, je vous suis. »
Au niveau du portail, rien n’avait changé. Les deux sentinelles étaient toujours à leur poste, immobiles, attentives.

[Asmodeus]

Asmodeus calqua sa démarche et son allure sur celle de la liche, marchant juste à son côté. Il se dirigea droit vers les deux gardes en donnant l’impression d’avoir d’excellentes raisons pour être là. Son attitude n’avait rien d’agressif mais il voulait transmettre aux deux factionnaires qu’il valait mieux les recevoir dignement. Il leur laisserait tout de même l’initiative de la conversation, autant d’éléments pour jauger la situation dans laquelle il mettait les pieds.

[Le Façonneur]

La réaction des sentinelles ne se fit pas attendre. Elles empoignèrent de courts sabres, presque des dagues courbes, et firent face à l’inquiétant duo.
« Qui êtes-vous ?! Que faites-vous ici sur les terres du Roi des Cendre, plus grand souverain de cette cité ?! » demanda un des gardes avec une amabilité plus que relative.
Cette personne était sur la défensive, cela se voyait comme le nez au milieu de la figure.

[Asmodeus]

Asmodeus prit la parole pour devancer une réaction violente de la part de sa comparse. Comme pour mieux marquer encore sa supériorité sur le garde, c’est d’un ton calme et mondain qu’il répondit :

- La réponse à votre question est évidente : c’est pour obtenir une audience auprès de votre maître. Pour aborder des affaires pressantes susceptibles de l’intéresser. Pourriez-vous avoir l’amabilité de le prévenir de la présence d’invités de marque ?

[Le Façonneur]

Le garde, qui devait plutôt avoir l’habitude de se battre, fut pris au dépourvu. Il tourna la tête vers son collègue. Ce dernier s’avança d’un pas et prit la parole :
« Pourrions-nous savoir qui vous êtes ? Comprenez que sans nom à annoncer à notre maître, vous risquez fort de rester dehors. Et de quelle sorte d’affaires souhaitez-vous discuter ? »
Le ton était déjà plus aimable, mais la demande se voulait ferme.

[Asmodeus]

Asmodeus ne voyait aucune raison de tenir secrète sa réelle identité : il doutait de toute façon que le Roi des ombres puisse avoir eu vent de celle-ci.

- Vous pouvez lui annoncer la présence du Seigneur Asmodeus von Krigeneck. Il laisse, comme il convient, la Dame se présenter elle-même. Quant aux affaires qui les amènent, elles ont trait à la sécurité de Melandis en général et des sœurs de la lumière en particulier.

Il avait prononcé ces derniers mots avec un dédain manifeste pour bien faire comprendre qu'il ne craignait en rien ces fanatiques de la bonté.

[Le Façonneur]

Dame Irélia se présenta d’une manière assez distante et supérieure, ce qui collait bien à son apparence. Le garde hésita quelque peu puis parût prendre une décision. Il se recula, fit un signe en direction du parc décrépit. Plusieurs silhouettes en émergèrent, de probables renforts en cas d’attaques. Et les attaques, en ce moment, étaient plutôt courantes. Les nouveaux sbires, fort semblables à ceux qui gardaient la grille, s’approchèrent. Il y eut des murmures, puis quelqu’un se détacha du groupe en direction du manoir.
« Veuillez patientez un petit instant », reprit le garde, visiblement plus désireux de parler à la momie qu’à la liche.
Dame Irélia croisa les bras. Elle, elle n’allait pas attendre longtemps.

[Asmodeus]

Asmodeus était – semble-t-il – plus patient que la liche mais il se préparait lui aussi à changer de position si la situation dégénérait. Il n’avait en tous cas pas envie de se désolidariser de son alliée temporaire pour le moment et, au fond, peu lui importait la méthode pour parvenir à ses fins face à une créature du chaos. Le moment d’attente pouvait tout de même être mis à profit pour jauger les forces de l’adversaire, en tous cas celles que son intervention avait permis de mettre en évidence. Que les renforts se montrent ainsi donnait déjà une précieuse information : les gardes préféraient éviter un combat plutôt que de garder l’élément de surprise. Un signe qu’ils n’étaient pas confiants quant à leurs chances de succès en cas de conflit.

[Le Façonneur]

Asmodeus ne voyait, parmi les gardes, que des humains en robe sombre et capuchon. Ils arboraient des armes divers, certains étaient imprégnés d’une légère aura magique, mais il n’y avait là rien qui puisse susciter une inquiétude particulière. L’attente ne se prolongea guère, même si déjà elle semblait un brin trop longue à la liche. Un individu, semblable aux autres, sortit du manoir, passa le portail et invita les visiteurs à entrer.
« Mon maître, le Roi des Sandre, daigne vous accorder quelques minutes de son temps si précieux. Veuillez me suivre. Sachez cependant qu’au premier signe d’hostilité, vous serez éliminés. Vous voici prévenus. »
Les gardes s’écartèrent, le guide s’engageait sur l’allée, Dame Irélia suivait, aussi intimidée que l’aurait été un géant face à une fourmis.

[Asmodeus]

Asmodeus répondit quant à lui par un haussement d’épaules qui pouvait tout signifier et son contraire. Il ne doutait pas un seul instant que le dirigeant de pacotille et sa secte de fanatiques tenteraient de les éliminer au moindre signe d’attaque. Mais il ne doutait guère plus de sa capacité, ainsi que celle de Dame Irélia, à faire face en cas de conflit.

Restait à évaluer la menace que pouvait représenter ce roi autoproclamé et ses sbires avant de décider de son sort. Et pour que l’infiltration soit possible, il devait imaginer quelles informations il choisirait de livrer au maître des lieux et aussi une bonne raison pour justifier cette audience. Il avait bien sûr quelques idées en tête mais il ne s’interdisait pas de les réviser en fonction de l’accueil qui leur serait fait.

[Le Façonneur]

Que dire des lieux tout d’abord ? Le parc était sinistre, le manoir plus encore. La bâtisse semblait exister depuis des millénaires et elle croulait sous le poids des ans. Une constante pour tout ce qui était bâtit en ce plan ténébreux, mais c’était particulièrement remarquable ici. L’endroit était également imprégné de malveillance. Les statues hideuses, les corridors menaçants, les sinistres courants d’air... De nombreux ombres encapuchonnées étaient présentes, les sbires du démon, mais encore une fois, elles n’inquiétèrent pas Asmodeus. En fait, paradoxalement, la demeure semblait plus dangereuse que ses occupants. Le guide conduisit le duo dans un ample salon où deux cheminées tentaient de réchauffer l’atmosphère morbide par des feux rougeoyants. Là était présent le maître des lieux. Il avait apparence humaine, il ressemblait à un chevalier particulièrement massif et brutal. Il portait une lourde armure, une cape vermeille, un casque à corne et de son dos dépassait le manche d’une claymore. Il se tenait devant une des cheminées et ne s’embarrassa pas de formule de politesse. Sitôt le guide mis en retrait, le démon demanda :
« Qu’est-ce que vous me voulez ? »

[Asmodeus]

Le trajet jusqu’à ce salon apprit à Asmodeus que le maître des lieux n’avait assurément aucun sens de l’esthétique et qu’il avait certainement peu de contrôle même en ses propres murs étant donné l’état de délabrement avancé de sa demeure. Bien sûr, cela pouvait être un genre qu’il se donnait mais cela s’apparentait tout de même à une certaine forme de négligence.

Quant à l’occupant du salon, son allure aurait pu en impressionner plus d’un mais le seigneur momie savait d’expérience que le principal danger ne résidait pas dans la force brute de son interlocuteur. Si c’était le cas, sa chute aurait été bien plus précoce… Non, les démons étaient connus pour leurs subterfuges, leurs capacités et leurs hordes chaotiques. Dès lors, il convenait de ne pas les mésestimer même si celui-ci ne faisait pas forte impression. Le côté prudent et pragmatique d’Asmodeus prit donc le dessus lorsqu’il répondit d’un ton calme :

- Il serait vaniteux et prétentieux que de vous réclamer quoique ce soit. En tous cas sans rien vous proposer en échange : Asmodeus et sa partenaire ont remarqué que d’impertinents zélotes de la lumière sévissent en ville et osent s’en prendre à de légitimes visiteurs. Dès lors, il leur a paru naturel de requérir une audience auprès de vous. Pour unir leurs forces face à ces gêneurs sacrilèges. Acceptez-vous d'en discuter ?

Bon, il y avait le risque que ce discours heurte l’arrogance bien connu des engeances démoniaques que le roitelet prenne ombrage de l’offre d’assistance. Mais, en l’état, Asmodeus n’avait rien de mieux à offrir et il pensait le démon suffisamment aux abois pour ne pas rechigner sur des alliés providentiels.