[Lieu-dit] Les ruelles des Bas Quartiers

[Manfred]

« Alix la Louve... répéta Boniface, pensif. Ancien soldat Melandien... Je ne sais pas. Mine de rien, il faut en savoir des choses pour se faire passer soldats, des choses que je ne peux pas t’apprendre. Je n’ai jamais été un soldat, et je n’ai jamais côtoyé de soldats pour savoir leur jargon, leur habitude, tous ces petits trucs qui font tout. Pour te dire, j’ignore même si à Melandis, une femme peut être soldat. C’est peut-être réservé au hommes. »
Il observa un temps de silence. De l’autre côté du mur, la copulation arrivait à un stade particulièrement bruyant.
« Alix la Louve, ça fait farouche. Moi, ça ne m’inspire pas un nom de soldat. Ça fait mercenaire. Je crois que tu pourrais sans mal passer pour une mercenaire. Après tout, les mercenaires sont des chasseurs. Ils chassent pour avoir de l’or. Certains restent dans les villes mais d’autres sont prêt à s’enfoncer loin dans les zones sauvages pour traquer leurs proies. Alors, qu’est-ce que tu en dis ? »

[Louve]

"Mercenaire, chasseur ..."

La voix de Louve s'était faite un tantinet rêveuse. Elle n'avait jamais couru après l'or mais apparemment, c'était une denrée importante pour avoir sa place dans la société et même un moyen de survivre en ville. Elle, pour sa part avait toujours mangé à sa fin et avait toujours obtenu ce qu'elle voulait. Un coup de griffe bien placé lui avait toujours suffi. Mais en ville, les règles étaient totalement différentes. On achetait ce que l'on voulait et pour acheter, il fallait de l'or. Pour avoir de l'or, on chassait ...

"Mercenaire ça me va bien."

Elle jeta un bref coup d'oeil au mur derrière lequel les vocalises de ses voisins avaient redoublé d'intensité et eut un sourire goguenard. Elle pouvait-être très douée en tant que mercenaire.

"ça me va très bien, même."

[Manfred]

[Quête : La Naissance d’Alix la Louve]

« Et bien, Alix la Louve, mercenaire de ton état, je te montrerais ce qu’il faut savoir pour porter ton masque. Et pour ce que j’ignore, je trouverai quelqu’un qui pourra te l’apprendre. »

Boniface s’approcha de Louve, planta son regard dans le sien et ajouta :

« Mais tu te doutes bien que rien n’est gratuit. Surtout pas en ville. Le service que je te rends, tu me le rembourseras. Pas de mensonge ou de sal coup entre nous. Tu auras bien assez d’ennemis sur le dos pour ne pas prendre le risque de me fâcher. On est d’accord ? »

Le rat-garou était loin d’être un sain. Louve savait cependant qu’il avait le don de savoir tuer vite et bien. Rien en face, tous dans le dos.

[Louve]

Quête : la naissance d'Alix la Louve

Louve n'ignorait rien de tout cela. Boniface ne lui inspirait aucune confiance mais il était le seul trait d'union entre elle et une cité dont elle ignorait tous les codes. Elle n'avait jamais aimé dépendre de qui que ce fut. Même avec le Vieux elle s'était débrouillée pour acquérir de l'autonomie le plus vite possible. Parfois, elle se trompait et elle tombait et son ego recevait un coup mais rien de plus. A Mélandis, elle savait que le simple faux pas pouvait lui coûter la vie et dans des circonstances peu agréables. Et quelque chose lui disait que le rat-garou ferait durer le plaisir.

Elle acquiesça donc à son corps défendant.

"Je rembourserai ma dette. Comment veux-tu que je l'honore. Avec de l'argent, des services ?"

[Manfred]

[Quête : La naissance d’Alix la Louve]

« Très bien. On verra bien en temps utile. Et si d’aventure, tu me vois en difficulté, contentes-toi de me protéger. Si je vais prendre des risques, c’est aussi pour toi. »
La discussion n’alla pas plus loin. Plusieurs jours passèrent. La désormais nommée Alix suivit Boniface dans plusieurs auberges sordides. Avec les conseils du rat-garou, elle sut éviter les problèmes. Souvent, elle se retrouvait seule. Boniface partait faire ses affaires dans son coin, lui racontant peu, lui cachant beaucoup supposait-elle. Elle avait la désagréable impression qu’elle était à sa merci. Ici, après tout, c’était son terrain de chasse, il y montrait toute sa finesse, toute sa ruse alors qu’en forêt ses limites apparaissaient rapidement. Lorsqu’il revenait, il avait de l’argent. Lorsqu’il avait du temps à lui consacrer, il poursuivait les leçons de lecture et d’écriture ou lui apprenait quelques petites choses utiles, notamment le code gestuel, la manière d’en imposer ou au contraire de s’effacer.

Un soir, alors qu’une pluie poisseuse tombait sur Melandis, Boniface conduisit Alix non pas à une nouvelle auberge, mais à une maison décrépite sans enseigne, coincée entre deux édifices lépreux. Il frappa à la porte selon un rythme que Louve devina précis. C’était un code. UN verrou tourna, la porte s’ouvrit, révélant un homme entre deux âge et plutôt imposant. Presque chauve, une barbe grisonnante lui mangeait le visage et il empestait la piquette. Il était ^vêtu en spadassin, épée au côté et chemise de mailles par-dessus sa tunique.
« Alors c’est elle, grogna-t-il en détaillant Louve comme si c’était un quartier de viande.
- C’est elle », confirma Boniface.

[Louve]

Quête : la naissance d'Alix la Louve

Louve n'aimait pas Boniface et surtout le sentiment qu'elle avait d'être à sa merci et au fil des semaines ce sentiment s'amplifia. Mais elle eut la sagesse de ne rien laisser paraître. De toute façon, il lui semblait que son animosité était réciproque. C'était une sorte de mariage forcé en quelque sorte. En même temps, elle aurait été bien imbécile de nier le fait que leur union contre nature lui apportait beaucoup. Elle avait fait des progrès en lecture et écriture et commençait à se familiariser aux us et coutumes de la faune locale.

Un fameux soir, donc elle le suivit jusqu'à la maison décrépite. Qui pouvait donc bien vivre dans cette foutue bicoque ? Et surtout qu'est-ce qui l'attendait à l'intérieur. Elle détesta d'emblée le vieux briscard qui se trouvait là et surtout son attitude dégradante. Cependant, elle s'abstint de tout commentaire, se contentant de soutenir son regard avec un léger sourire. Et comme on parlait d'elle comme en son absence, elle demanda.

"Et que lui veut-on ?"

[Manfred]

[Quête : La naissance d’Alix la Louve]

Le vieux hocha la tête.
« Elle me plait déjà. J’te tiens au courant, vermine. »
Il invita Alix à entrer, sans faire de manière, puis claqua la porte au nez de Boniface. L’homme semblait être insupportable avec tout le monde. Insupportable et sûr de lui. La lycanthrope se trouvait désormais dans une cuisine rustique moins miteuse que ce que la façade du bâtiment pouvait laisser croire. Louve avait en tout cas vue des auberges moins présentables.
« Avec ton pote, on a fait un petit arrangement, dit le vieux en revenant vers la table pour y prendre la bouteille de vin et aller la ranger. On y gagnera tous les trois. Moi j’vais gagner de l’or, toi, tu vas apprendre des trucs utiles et lui, il pourra aller faire ses petites affaires en toutes libertés. Tu vas dormir chez moi pendant un petit moment. »
Il se retourna :
« T’as juste intérêt d’être à la hauteur. Je déteste perdre mon temps. Et je déteste avoir à me répéter. Alors comme ça, il paraît que t’es une tueuse. C’est le cas ? »

[Louve]

Quête : la naissance d'Alix la Louve

Insupportable et puant la suffisance à plein nez. Louve se demanda fugitivement s'il ne perdrait pas de sa superbe si elle lui arrachait quelques viscères avec ses dents. Mais il faisait partie de son processus d'intégration et il lui profiterait beaucoup plus en vie que les tripes à l'air même s'il aurait constitué un bon apport en nourriture. Tant pis ... Elle avait au moins le plaisir de voir Boniface se faire refouler à l'entrée.

Elle prit alors conscience qu'elle se retrouvait face à un illustre inconnu qui lui fournissait donc le gîte et le couvert en échange de menus services. Elle l'écouta tranquille jusqu'au bout avant de lui répondre sans se départir de son sourire.

"Il paraît oui ... Et toi tu me sers de maman pendant ce temps-là ?"

Elle n'avait pas peur car elle avait confiance en ses capacités. Trop peut-être.

[Manfred]

Le vieux eut un rire gras.
« T’es une coquine, hein ? »
Puis vint le coup, fulgurant, précis. Il prit Louve au dépourvu, la cueillit sous la mâchoire, l’envoya heurter le mur derrière elle. Ce fut insuffisant pour la faire tomber, elle était tout de même très robuste, mais tout de même, pour un coup de poing, cela forçait le respect. Le vieux poursuivit.
« Une tueuse peut-être, mais sauvage. Je sais qui tu es, loup-garou, je sais comment tu te bas. Pour toi, tout est griffe, muscle et crocs. Moi je vais t’apprendre une autre danse, celle de l’acier et de la discipline. Ne me regarde pas comme ça, ça va te plaire. Ça va te plaire parce que ça va te rendre plus forte que tu ne l’es. Et j’ai besoin que tu sois forte, j’ai besoin que tu sois invincible. Suis-moi. On commence tout de suite. »
Il se détourna, passa la porte du fond, quitta ainsi la cuisine, traversa un couloir, ouvrit une nouvelle porte. Celle-ci dévoila une salle d’armes sobres, pour ne pas dire austère, mais bien équipée. Louve n’avait jamais vue autant d’armes rassemblées au même endroit. Il y avait de tout, de la dague à l’épée à deux mains en passant par le sabre, la hache, la masse et le fléau. Il y avait aussi des arcs, des arbalètes, des boucliers de tailles divers, des armures de cuir ou de mailles, des casques... Au sol, une tâche de sang avait été grossièrement essuyée. Elle était sèche, mais ne datait pas plus de deux jours ou trois.

[Louve]

Le choc la fit vaciller et presque aussitôt, elle sentit un goût de fer dans sa bouche. Elle s'était sans doute mordu la joue sous le choc. Elle avait pris des baffes par le Vieux tout au long de son apprentissage et quand elle ne savait pas réfréner ses instincts. Mais cet enfant de salaud l'avait pris par surprise. Presque aussitôt lui vinrent des envies de meurtre presque aussitôt douchées par les paroles qu'il prononça ensuite.

Il savait ... Boniface l'avait vendue ... A un autre garou ? Difficile de savoir. Les dents et les poings serrés elle le suivit jusqu'à la salle d'arme. Ainsi donc, il voulait donc la discipliner et lui apprendre à troquer ses griffes contre le fer. L'idée de prime abord ne l’enthousiasma pas de même que la trace de sang séché sur le sol. Mais si elle devait garder son identité véritable secrète elle devrait en passer par là.

Elle devait tuer le loup pour devenir Alix, mercenaire de son état. Elle posa sur les râteliers garnis d'arme un regard à la fois curieux et admiratif. Oui, Alix la Louve aimait les armes et était impatiente de connaître leur maniement. Au fond d'elle-même, le loup poussa un soupir résigné.

[Manfred]

D’après les odeurs, le vieux n’était qu’un homme. Il se posta au milieu de l’espace dégagé réservé au combat, puis refit face à Louve.
« Je sais, tu te dis que tout ça, c’est juste pour porter le fameux masque dont t’as parlé le rat, pour te fondre dans la masse. Tu te dis que tout ça, ce sont des outils de faibles, de proies, que tu tues très bien sans ça. J’ajouterais même que tu as envie de me tuer, là, maintenant. »
Il ricana et dégaina son épée. Louve reconnu immédiatement l’éclat de l’argent. Il fit siffler sa lame dans l’air.
« Trois choses. La première, c’est que j’ai déjà tué des loups-garous alors évite de faire une connerie. La deuxième, c’est que bientôt, tu vas me haïr. La troisième, c’est que si tu es à la hauteur, tu finiras par m’apprécier. »
Il rengaina sa lame.
« Oui, par m’apprécier. Parce que je vais t’ouvrir les yeux sur quelques petites vérités que tu te refuses à admettre et qui pourtant sont d’une évidence... évidente. »
Il rit. Apparemment, il voulait trouver une formule plus élaborée, mais les mots s’étaient escamotés.
« T’es des griffes, t’as des crocs. Ouais, c’est pas mal, face à des gueux, des paysans et des saltimbanques. Mais qu’est-ce que ça vaut face à un chevalier ? Tu crois que c’est avec tes griffes que tu vas percer son armure ? Ce qui te fais gagner tes combats, c’est pas tes griffes ou tes crocs, c’est ton pouvoir de régénération. La plupart des armes ne sont pas en mesure de t’atteindre. Tu le sais, alors tu te rues au combat sans crainte. Et puis voilà, pas de pot, tu tombes contre un type avec une épée en argent ou contre un magicien et là, tu te trouves toute conne, parce que tu n’as plus de défense et que tu n’as jamais eu d’attaque. Moi, j’suis là pour te permettre de tuer des chevaliers et des magiciens, des ogres et des trolls. Alors, par quoi on commence ? »
Il désigna d’un ample geste la mortelle collection qui tapissait murs et râteliers.
« L’épée à deux mains ? L’arc ? La dague ? Le marteau de guerre ? La lance ? L’épée et le bouclier ? Prends quelque chose qui te plait. »

[Louve]

Louve absorbait chaque parole de l'homme. Oui, sa partie de loup le détestait déjà, avait envie de l'éventrer et de répandre ses entrailles sur chaque mur de sa demeure mais sa part humaine reconnaissait que ce qu'il disait était sage. Et quelque part commençait à l'admirer, elle devait le reconnaître. Il était fort probable qu'il ait déjà tué des garous et pas que la sombre vermine. Et grâce à lui, elle deviendrait plus puissante.

Elle ne reconnaissait pas encore vraiment l'importance de l'argent ni celle du pouvoir. Par contre, elle avait besoin de puissance pour partir à l'assaut du monde. Par les dents ou le fer !

A la demande de l'homme, elle balaya les armes du regard se demandant comment tout un arsenal avait pu atterrir là. Elle allait devoir choisir. Elle méprisa d'emblée les armes de trait. Elle voulait regarder ses victimes dans les yeux lorsqu'elle les tuerait. En revanche, elle s'arrêta devant l'épée longue, un tantinet hésitante. Elle avait l'air lourde mais capable d'infliger de profondes blessures si on savait s'en servir.

"Tu peux me montrer comment on manie cet engin là ?"

[Manfred]

« L’épée longue... très bien. Vas-y, prends-là. Bien. Parfait ! Tu te rends compte que tu as une main de libre. La question est de savoir si elle va le rester ou prendre un bouclier. Ça n’est pas la même chose avec ou sans bouclier. Ce n’est pas la même philosophie, la même façon de procéder. »
Le vieux prit également une épée longue et il exécuta quelques gestes experts avec cette arme.
« Sans bouclier, le guerrier compte sur sa rapidité, sur son esquive et sa mobilité. Ça sous-entend qu’il n’a pas d’armure lourde sur le dos. Personne n’évite quelque chose en se trimbalant avec plusieurs dizaines de kilos d’acier. »
Il prit un bouclier.
« Le bouclier ralentit, encombre dans une certaine mesure, mais il est un atout de taille. C’est un mur sur lequel va se briser les assauts ennemis. Le guerrier avec un bouclier se voit comme un roc. Il avance tranquillement et écrase ses cibles. Le bouclier sert aussi pour bousculer. On peut frapper avec, même charger. Ça pas très fin, mais c’est efficace. »

HRP : quoi que tu choisisse, le vieux va contraindre Louve a essayer un maximum d’armes différentes au cours des semaines suivantes. À toi de me dire avec lesquels elle se sent le plus à l’aise. Je te permets ainsi de justifier ta classe de guerrier et les maîtrises qui vont avec.

[Louve]

hrp : merci

Louve essaya avec le bouclier puis sans avant de se rendre compte qu'elle aimait être libre de ses mouvements avant toute chose. Elle essaya alors la hache et la trouva moins agréable à manier que l'épée. Elle tenta ensuite de porter une armure et se décida une nouvelle fois pour une qui entraverait le moins ses gestes. Elle tenta la lance pour une approche plus à distance ainsi que la hallebarde mais ne les aima pas. Elle trouva la rapière trop peu solide. L'épée longue et le sabre lui semblèrent moins maniables que l'épée courte. Et c'est ce qu'elle préféra.

Son style de combat préféré était assurément rapide. Harceler l'adversaire en évitant ses assauts jusqu'à ce qu'il se fatigue. Un style bien aux antipodes de ce qu'elle adoptait sous son apparence lupine.

[Manfred]

Alix n’apprit le nom du vieux qu’après le troisième jour d’entrainement. Il s’appelait Elguert et ses manières étaient celles d’un rustre. Pour autant, dans la salle d’arme, il devenait un autre, celui que jadis il fut probablement, un spadassin à l’effroyable efficacité capable de tuer avec n’importe quoi, y compris avec un pied de table. Les leçons qu’il prodiguait sentait le vécu, l’expérience. Cela allait bien au-delà du simple fait de savoir se battre.
« Tu t’en doutes, ma belle, les combats réglos, ça n’existe que dans les histoires. La seule règle, la seule, c’est que tu dois rester en vie et que l’autre, en face, doit crever. C’pour ça que toute ces conneries de jolies mouvements, j’insiste pas trop dessus. Ils peuvent être utiles, j’dis pas, pour intimider. Si tu fais peur, tu as déjà à moitié gagné. Mais à part ça, les manœuvres avec lesquelles j’te soule le plus, elles sont là pour être efficaces, quoi qu’il arrive. ... Au rayon des petites bottes secrètes, ne néglige pas le coup de genoux dans les couilles et le gravier dans les yeux. ... Fait toujours attention à l’orientation du soleil. Cherche à l’avoir dans le dos pour pas t’faire aveugler. Et si t’as quelque chose de brillant sur toi, comme la lame de ton épée, un reflet bien placé et c’est gagné. ... Si tu te bats en intérieur, par exemple dans une taverne, profite de tout ce qui te passe sous la main. Une chope de bière, ça peut se lancer. Une table, ça peut se renverser. Casse une chaise pour t’en faire un Gourdain si jamais t’as plus ton épée. ... La dague dans la botte, c’est un grand classique parce que ça a fait ses preuves. Tu peux la choper en moins de deux et ça rend tout un tas de service. ... »
La nuit, Louve dormait à l’étage, dans une chambre minuscule. L’entrainement avait lieu durant de longues heures. Les rares moments où elle avait du temps libre, elle pouvait faire un petit tour dehors, en faisant profil bas. Son arme de prédilection devint l’épée courte. En matière d’armure, Elguert la laissa tout essayer, y compris la pesante armure à plaques, mais il déclara très vite que tout ce qui dépassait la basique armure de cuir, ce n’était pas pour elle.
« Et encore, même l’armure de cuir, c’est sans doute trop. Tu es un loup-garou, tu dois pouvoir te transformer à tout moment. Et te transformer dans une armure de plaques, tu vois le problème. D’ailleurs, en parlant de transformation, maintenant que t’as acquis les bases, tu feras la moitié des entrainements sous ta forme hybride. ... Je t’avais dit que les crocs et les griffes, c’était de la merde, j’ai un peu menti. C’est très bien, mais encore faut-il s’en servir correctement. C’est ça la clé, le bon moment. Tu vois que ton adversaire anticipe une garde basse, saute-lui à la gorge et tu règles le problème. Plante-toi et il te coupe la tête. »

[Louve]

Alix apprit, écouta, but les paroles d'Elguert. Les techniques de combat peu académiques la rassurèrent. La nuit qui suivit les premières séances d'entraînement elle s'endormit harassée et se réveilla avec d'abominables courbatures. Mais au fil du temps son corps humain se transforma, devint plus solide, se fortifia. Certes, il ne compensait pas sa puissance quand elle passait en forme hybride mais elle s'habitua.

Le regard qu'elle posa sur l'ancien spadassin se modifia. Peu à peu, elle l'apprécia, le voyant comme un Maître dont elle recherchait sans cesse les nouveaux enseignements.

[Manfred]

[Quête : La Naissance d'Alix la Louve]

Un jour, le programme ô combien exigeant d’Elguert fut subitement allégé. Le vieux spadassin accorda bien d’avantage de temps libre à celle qui était devenue son élève et, le soir venu, il partagea avec elle un bon repas. Ce fut à l’occasion de ce dernier qu’il déclara :
« Cette nuit, tu vas devoir faire tes preuves. Il est tant que tout ça me rapporte de l’or. À toi aussi, d’ailleurs. On va sortir, rejoindre un endroit un peu spécial. Là-bas, tu vas te battre, à mort. Enfin, à mort, c’est le public qui décidera. Je veux que tu restes humaines. Je veux que tu éclates tout ceux qui te feront face juste avec ce que je t’ai appris. Tu es prête à me prouver que tu vaux quelque chose ? »

[Louve]

"Oui"

Alix n'avait jamais été douée pour les longs discours mais dans ses yeux brillait une détermination farouche. Oui, elle voulait plaire à Elguert et lui montrer que son enseignement avait porté ses fruits. Oui, elle voulait tailler, mettre en pièce tout en faisant parler l'acier. Par contre, laisser le choix à d'autres personnes de décider de sa vie ou de sa mort lui fit pincer les lèvres. Personne n'avait le droit de décider à sa place si elle pouvait vivre ou mourir ... Mais en même temps, l'enjeu était de taille. Ceux qui la verraient combattre sauraient ce que valait Alix la Louve. Elle serait respectée. A moins que l'on parle de sa défaite rapide et de sa mort en riant. Elle décida que cette option n'était en rien envisageable. Même au seuil du trépas, elle continuerait à se battre.

Elle recommença alors à manger en silence, savourant chaque saveur et la force que lui apportait chaque aliment. Alix la Louve attendait son heure.

[Manfred]

Une fois la nuit tombée, Elguert mena Alix dans les profondeurs putrides de Melandis, à travers un réseau de ruelles et de places minuscules coincées entre des édifices croulants. La loup-garou sut qu’elle était arrivée lorsqu’elle entendit la rumeur d’une petite foule assemblée. Sueur, crasse, pisse et excrément au programme olfactif. La destination était une place, à peine plus grande que celles traversées juste avant. Le centre était laissé vide pour servir d’arène. Dans un coin, un tonneau servait de comptoir pour déposer les paries. Ici, on se battait, on mourait pour l’amour du sang et de l’or. Quelques torches assuraient un semblant d’éclairage. Malgré cela, difficile, voir impossible de distinguer ceux qui allaient risquer leur vie de ceux qui allaient juste commenter et apprécier le sordide spectacle. Cela venait du fait que tout le monde avait une tête de brute ou de truand. Alix, vêtue comme la mercenaire qu’elle était sensée être, découvrit sans doute avec satisfaction à quel point elle se mêlaient à la masse. Elle ne semblait même pas être la plus farouche du lot. Le demi-orque, juste à sa droite, avait le regard fou et semblait n’attendre qu’un prétexte pour arracher la bouille de quelqu’un à mains nues. Elguert se pencha à l’oreille de la rousse :
« Je ne veux pas que tu te battes en premier. Tu vas regarder et attendre que quelqu’un gagne plusieurs duels d’affilé. Puis tu lui ruineras son moment de gloire et tu resteras dans l’arène tant qu’il y aura quelqu’un d’assez fou pour te défier. Le programme te conviens, chérie ? »

[Louve]

L'odeur de la pisse, de la crasse, de la sueur ... L'odeur du sang et de la mort. La peur, l'envie d'en découdre, la folie ... Louve se régalait de ce spectacle de l'humanité dans ce qu'elle avait de plus bestial. Elle garda cependant un visage impassible comme elle avait imaginé celui d'Alix. Alix était calme et posée comme l'eau dormante jusqu'au moment de passer à l'action. A l'intérieur, le loup jubilait, réclamait du sang. Mais l'humaine tout comme la louve ou hybride écoutèrent avec attention leur maître d'arme.

Non, elle ne combattrait pas tout de suite. Avant, elle observerait, repérerait les failles, les faiblesses pour frapper. Et ainsi, elle aurait son heure de gloire. Elle acquiesça, le sourire aux lèvres.

[Manfred]

[Quête : La naissance d’Alix la louve]

La danse mortelle débuta. Les volontaires pour le bain de sang ne manquaient pas, ce qui n’empêchait pas que ne se présentent sur cette arène de terre boueuse des personnes contraintes et terrorisées. Bien souvent, les combats n’avaient rien de vrais duels. C’était de la boucherie où le plus fort expédiait son adversaire en quelques passes d’armes à peine. À la fin de chaque confrontation, le sort du perdant dépendait de l’humeur du public. Les spectateurs étaient en effet invités à dire s’ils voulaient voir le vaincu épargné ou non. En général, ce n’était pas le cas, la perspective d’une exécution bien crade et humiliante ayant tout pour plaire à cette assemblée de dépravés. Voilà l’arène devenue rouge. Les cadavres étaient jetés à l’écart, non sans se faire au préalable dépouiller. Sur le tonneau, l’argent allait et venait au gré des paris. Plus le temps passait, plus le niveau montait, plus les combats ressemblaient à quelque chose. Voilà de vrais guerriers qui faisaient spectacle de leurs confrontations impitoyables. Parmi eux, un jeune homme se distingua. D’allure modeste, pour ne pas dire misérable, il se battait avec un cimeterre à la triste mine mais qui, entre ses mains, devenait une lame mortelle. Rapide, précis, il envoya mordre la poussière des personnes ô combien plus imposantes que lui. La foule commençait à l’acclamer. Serait-ce là le champion de la nuit ? Louve sentit la main d’Elguert la pousser lorsque vint le moment de savoir qui allait contester la domination naissante du fameux larron.

[Louve]

Louve avait apprécié le ballet de la mort, ces corps couchés perdant leur sang, ces rictus de souffrance. Elle goûta avec délectation la peur de ceux qui voyaient sonner leur dernière heure. Les plus les plus vicieux ou les plus violent remportèrent son adhésion. Seuls les plus méritants d'entre eux sortiraient vivants de cette sanglante nuit. Et elle comptait bien faire partie du lot.

Elle observa avec attention l'homme qui prétendait accéder au statut de champion. Son mentor lui avait dit de lui voler la vedette. Aussi, quand on demanda si quelqu'un contestait le titre elle se leva et dit d'une voix forte.

"Oui, moi je conteste."

[Manfred]

[Quête : La naissance d’Alix la Louve]

Il y eut des hourras car l’ambiance s’emplissait de testostérone. Alix entra sur l’arène de fortune, face à ce jeune homme et sa lame rouillée. Ensemble, ils firent chanter l’acier, offrant à ces yeux avides de sang le plus beau spectacle de la soirée. Alix finit par vaincre, mais pas sans avoir bataillé cinq bonnes minutes. Elle sut, de surcroit, que si elle avait été humaine elle aurait perdu car le premier à toucher fut son adversaire. Seulement son arme n’était pas en argent, encore moins magique. L’entaille qu’il lui fit au bras déchira sa manche, déchira la chair, mais la chair se referma sur l’instant, ce qui fut probablement impossible à remarquer dans la pénombre de cette place mal éclairée et sous les lambeaux de habit martyrisé. Alix demeura debout, le jeune homme tomba. Vint l’heure du jugement et le public, une fois ne fut pas coutume, désira que le jeune homme ne soit pas exécuté. Il put donc se retiré et se présenta à la place une brute épaisse, armée d’un marteau de guerre. Celui-là ne fit pas un pli. Trop lent, trop maladroit, Louve n’en fit qu’une bouchée et eut le plaisir de pouvoir le mettre à mort, tout comme elle mit à mort les trois suivants. Elle fut sacrée championne de la soirée.

De retour chez Elguert, ce dernier vida sur la table les pièces de cuivre, d’argent et même d’or qu’il avait gagné grâce à ses paris. Ses yeux brillèrent de convoitise, le même éclat que la loup-garou avait vu dans le regard de Boniface. Il compta puis, après une hésitation, écarta du petit tas quelques pièces. Trois fois rien.
« Pour toi. Tu l’as bien mérité. »

[Louve]

Quête : naissance d'Alix la Louve

Elle était fière, presque euphorique. Bien sûr, elle avait été blessée mais c'était une bagatelle sans lame en argent qui empêchait la plaie de se refermer. Elle s'était sentie invicible du moins le temps de la soirée. Elle savait que la prochaine fois qu'elle combattrait dans l'arène sa réputation naissante la précéderait donc ses adversaires se montreraient plus prudents. Tant mieux quelque part ... Elle aurait un prétexte pour affiner ses techniques de combat.

Elle accepta avec une certaine reconnaissance l'argent que lui donnait Egert sans protester face à la toute petite part qu'il lui avait octroyée face à ses gains considérables. Elle gagnerait sûrement plus à mesure qu'elle ferait ses preuves. Elle voulut savoir.

"Et les prochains combats, c'est quand ?"

[Manfred]

[Quête : La naissance d'Alix la Louve]

« Oh, bientôt ma belle, bientôt ! » lui répondit le vieux spadassin.
Et, effectivement, dès la nuit prochaine, Louve livra de nouveaux et sanglants combats dans un lieu clandestin. Cela ne lui rapporta pas plus que la précédente fois. Les choses se répétèrent le surlendemain. Un nouveau rythme s’instaura. Le jour, entraînement, la nuit, duels. C’était éprouvant. Elguert amassait son argent. Il n’en aurait visiblement jamais assez. Louve le surprit à quelques reprises en train de payer des individus louches. L’homme avait apparemment des dettes à rembourser, concept qu’elle connaissait désormais, même si cela restait plutôt abstrait. À une reprise Boniface vint voir comment cela se passait. Il ne s’attarda pas.

Voilà qu’un soir, alors qu’Alix se promenait aux abords de la maison du vieux, elle croisa dans une ruelle ce jeune homme doué qu’elle avait affronté lors de sa première nuit. Il semblait s’être remis de sa blessure et ne pas éprouver à son égard d’animosité. Au contraire, il lui sourit avant de l’aborder :
« Alix, c’est ça ? As-tu deux secondes à m’accorder ? »

[Louve]

La naissance d'Alix la Louve

Le jour elle s’entraînait, la nuit, elle luttait. Alix avait du mal à supporter la cadence mais Louve jubilait. Elle appréciait cette vie simple, violente mais bien remplie dans laquelle chaque combats lui rappelait la chance qu'elle avait d'être en vie. Paradoxalement, sa partie lupine se mourrait chaque jour un peu plus. Ce n'était plus ses instincts primaires qu'elle employait lorsqu'elle se battait mais ceux de la guerrière qui savait manier l'épée avec agilité.

Aussi, c'est la femme et non l'animal qui répondit à son ancien adversaire avec un peu de méfiance toutefois. Le sourire pouvait toujours cacher de sombres intentions.

"Qu'est-ce que tu me veux ?"

[Manfred]

[Quête : La naissance d’Alix la louve]

« Ton bien », assura le jeune homme.
Il se décolla du mur auquel il était adossé, garda une petite distance de sécurité car apparemment la méfiance était mutuelle, puis il reprit :
« Je viens te proposer un p’tit truc. J’appartiens à un groupe de mercenaires et il se trouve que quelqu’un nous a filé un job un peu délicat. Tu te bas bien, ta lame pourrait nous aider. Bien sûr, tu toucherais ta part, pas que des miettes comme avec le vieux. Parce qu’il te file rien le vieux, hein ? Je sais, je le connais. Y’a pas plus radin que lui. À croire qu’il a du sang nain. »

[Louve]

Quête : la naissance d'Alix la Louve

Alix détailla le jeune homme avec attention avant de lui demander.

"Toi qui connais le vieux, tu crois qu'il va me dire quoi ? A ton avis, il ne va pas me mettre dehors quand il saura que je lui fais des ... infidélités ? Ce n'est pas que j'ai peur de lui mais ..."

En même temps, il était vrai qu'elle ne recevait de lui que des peccadilles. C'était très peu pour tout ce qu'elle lui rapportait. Elle voyait l'argent s'amonceler par tas sur la table après ses combats.

"Et ça serait quand votre petite sauterie ? Et il consiste en quoi votre truc délicat ?"

[Manfred]

[Quête : La Naissance d’Alix la louve]

Le jeune homme répondit sans se faire prier, ni sans s’ambler vouloir cacher quoi que ce soit :
« Notre affaire a lieu ce soir même. Si tu veux, on peut y aller dès maintenant. Ça consiste à tuer quelqu’un, chez lui. Il a des gardes et des murs pour se protéger. Mes les gardes et les murs, ça ne nous fait pas peur. Notre cible est douée au combat. On a juste besoin de quelqu’un comme toi pour être sûr de notre coup. En ce qui concerne le vieux... disons qu’il n’aime pas partager. La seule idée que tu puisses nous aider, nous, va le rendre malade. Après, la question que tu dois te poser c’est... »
Il s’approcha et poursuivit à mi-voix, presque sur le ton de la confidence :
« Est-ce que t’en a quelque chose à foutre de ce qu’il pense ? T’es pas à sa botte, si ? Et puis, je n’ai plus l’impression qu’il ait grand-chose à t’apprendre. »

[Louve]

Hrp : désolée, j'ai loupé ta réponse. Je ne l'ai vue que hier ...

Louve réfléchit murement. A bien réfléchir, elle craignait le vieux plus qu'elle ne le respectait voire même éprouvait de la loyauté ou quoi que ce soit d'autre pour lui. Ses semaines à Melandis lui avaient fait comprendre qu'on ne se nourrissait pas que de haine et d'eau fraiche. Elle voyait très bien qu'il l'exploitait. Cela aussi c'était une notion qu'elle avait acquise en vivant ici. En forêt, elle était libre, loin de toute contrainte. Ce n'était pas qu'elle regrettait d'être venue en ville et d'avoir créé son personnage d'Alix, bien au contraire. Mais elle voyait justement assez mal la mercenaire qu'elle venait de créer à la sueur de son front et de son sang à la botte d'un vieux maître d'arme.

Aussi hocha-t-elle la tête avec un sourire qui ne disait rien de bon.

"D'accord. ça m'intéresse."