[Lieu] La Route de la Lorien

[Voyageuse]

" A ce point ?, s'étonna Astrée. Moi qui craignais que simplement suivre la route soit un peu monotone... Mais c'est vrai que je n'y ai jamais mis les pieds, donc je ne sais pas à quoi m'attendre. Je sais juste que je n'aime pas suivre les routes toutes tracées, je préfère me sentir libre d'aller et venir... et pouvoir me promener en forêt."
Pour le reste, elle avait bien l'intention d'observer, d'écouter, tout ce qu'elle rencontrerait au fil du voyage. Mais elle regretterait de ne pas pouvoir explorer les bois en espérant y croiser des licornes, des centaures, des faunes, ou autres espèces inhabituelles.

[Galathée]

" Vous savez, la Vallée du Nirvana est beaucoup plus riche en termes d'espèces étranges et de lieux fantastiques que la Lorien... Si vous tenez vraiment à circuler hors des sentiers battus, vous devriez peut-être songer à changer de direction... A moins que vous n'ayez vraiment à faire dans les Rocheuses. Ce qui est toujours un peu suspect, je dois dire. Vu qu'il y a Ithilion tout près, évidemment... C'est un endroit qui n'est pas très fréquenté... et pas toujours très fréquentable."

[Voyageuse]

" Les Rocheuses sont ma destination. Et il n'y a rien d'anormal là-dedans.... même si je vois ce que vous voulez dire : puisque personne n'y va jamais, c'est forcément un peu suspect. Quoique je ne suis pas la seule à m'y rendre : j'ai déjà trouvé deux autres voyageurs qui y vont et pour des raisons tout à fait honnêtes, sans rapport avec Ithillion. Dans mon cas, c'est mon mentor qui m'y envoie, pour étudier les diverses races qui y vivent : ça fait partie de ma formation de druide."
Elle sourit.
" Et donc, la Lorien n'est qu'un passage, une étape, c'était le chemin le plus court pour m'y rendre. Et j'aime bien profiter de mes voyages pour découvrir des endroits que je ne connais pas... donc une immense forêt, ça me tente. Mais je retiens l'idée d'aller un jour visiter la vallée du Nirvana, votre description est alléchante! Vous avez l'air d'avoir beaucoup bourlingué... "
A moins qu'elle ne connaisse ces régions que de réputation?

[Galathée]

" Je connais bien la Vallée du Nirvana, oui, mais pas tous les endroits... Depuis dix ans, mon créneau, c'est cette fameuse route."
Elle fit signe à la serveuse d'apporter une tasse pour Astrée et la lui remplit d'un thé odorant qui fleurait bon la menthe et le citron.
" Je m'appelle Elseris. Je suis une des patrouilleuses de la route. Nous veillons à la sécurité des voyageurs, qu'ils soient simples promeneurs ou marchands, de Belred à l'orée occidentale."

[Voyageuse]

Astrée haussa un sourcil.
" Je ne savais pas qu'il y avait des patrouilleurs sur la route. Enfin... maintenant que vous le dites, ça n'est pas étonnant. J'imagine que vous veillez surtout à ce que les règles soient respectées pour ne pas créer d'incident... Est-ce qu'il y a souvent des problèmes ?"
Sans doute, puisque Elseris venait de dire qu'il s'y passait toujours quelque chose

[Galathée]

" Je ne dirais pas que les incidents interraciaux soient notre souci principal, bien que cela fasse partie de notre travail, oui. Mais vous pensez vraiment que les créatures de la Lorien s'inquiètent de la présence d'une route ?"
Elle rit doucement.
" Il y a des loups, des ours, des créatures féériques parfois très mal intentionnées, et puis les arbres s'abattent régulièrement en travers de la route et il faut les dégager. Le plus classique, cela dit, ce sont les voyageurs qui ont des soucis : un fer à cheval qui se détache, un manque de prévoyance par rapport à la longueur d'un itinéraire, une roue de chariot qui craque, une chute inopinée, un empoisonnement parce qu'on a frit le mauvais champignon... C'est le gros du travail. Il y a quelques années, il y avait encore des bandits, parfois, mais c'est terminé pour l'instant, Sylvanus en soit remercié."

[Voyageuse]

" C'est le genre de petits problèmes qu'on rencontre partout, fit remarquer Astrée , sans qu'il y ait pour autant un patrouilleur pour venir à l'aide de l'infortuné voyageur. On peut aussi, un minimum, se débrouiller par nous-mêmes ou demander de l'aide aux passants, la route n'est pas déserte. Mais c'est peut-être un peu plus compliqué à gérer du fait qu'on soit en territoire elfique et qu'on n'ait pas directement accès aux structures habituelles. Surtout pour les attaques de bandits. C'est une bonne chose que ce soit réglé."
Elle était de taille à affronter seule la plupart des autres problèmes, mais préférait ne pas avoir affaire à celui-ci.
" Il y a beaucoup de passage sur cette route ? J'ai du mal à imaginer..."

[Galathée]

" Pas tellement. Mais vous savez, toutes les routes d'importance sont patrouillées, sur Hélonna, à l'exception de la route qui va de Correliah à Ithilion. Les grandes villes ont tout intérêt à garantir la sécurité des voyageurs, c'est nécessaire à tout type d'échange. L'équipe qui patrouille la route de la Lorien dépend de Belred Luyn. Et vous avez raison de penser que la situation de cette route est spécifique. Il y a peu de passage, et en certaines saisons, on peut passer deux jours sans voir personne. Il n'y a pas de fermes aux portes desquelles frapper... et vous seriez surprise du nombre de personnes qui ne savent pas allumer un feu ou trouver de l'eau et la rendre potable."

[Voyageuse]

Astrée sourit, amusée.
" Ceux-ci ont tout intérêt à ne jamais voyager seuls ! Ou à vraiment bien planifier leur itinéraire pour ne jamais se trouver loin d'une auberge. Mais d'un autre côté, ajouta-t-elle, sur cette route-ci, allumer un feu et trouver de l'eau quand on n'a pas le droit de s'éloigner de plus de dix mètres de la route, ça peut vite devenir problématique. D'où l'intérêt de vous avoir."
Elle avala quelques gorgées du thé au citron à l'odeur alléchante, songeant que la jeune demi-elfe faisait un métier plutôt sympathique, même si ça devait être frustrant de rester toujours sur le même itinéraire.
" Merci pour le thé... Et pour les informations."

[Galathée]

" Avec plaisir. Mon métier, c'est aussi de renseigner les gens. L'adage dit : un homme averti en vaut deux. Cela veut aussi pour les femmes."
Elle lui fit un clin d'oeil.
" Cela dit, vous m'avez de quelqu'un qui a la tête sur les épaules. A votre allure, bien sûr. Parfois, ça ne veut rien dire, mais... si vous visez les Rocheuses, il vaut mieux avoir de la bouteille, oui. C'est un coin rude, sans doute le plus rude d'Hélonna. Avec la Forêt Maudite, à ce qu'on dit."

[Voyageuse]

" J'ai vécu un temps en bordure de la Forêt Maudite. La journée, on n'y croise heureusement pas grand-chose d'autre que les bêtes habituelles qui peuplent des bois. Enfin... la plupart du temps. Mais il règne toujours une atmosphère.... disons sombre, oppressante. Et il vaut mieux éviter de se trouver au milieu des bois à l'approche de la nuit, c'est sûr. Ou alors, il faut être plusieurs, armés, et veiller à tour de rôle... Je pense que la Lorien va me paraitre infiniment plus hospitalière ! "
Elle sourit.
"Mais je ne connais absolument rien des Rocheuses. Je comptais me renseigner à Belred Luyn avant d'y entrer. Pourquoi dites-vous que c'est l'un des endroits les plus rudes de l'île ?"

[Galathée]

" Parce que c'est une montagne très sauvage, au climat et au relief difficiles, très peu peuplée, très peu civilisée... Il y a peu de routes, peu de chemins même, il n'y a ni gnomes, ni nains, seulement des trolls et des gobelours. C'est une zone... hors la loi, vous voyez. N'importe où ailleurs, la civilisation s'est étendue. Les elfes règnent ici, les nains là-bas, les humains sur le reste... et tout ce petit monde s'entend et négocie, et il n'existe pas vraiment de zone de non droit. Mais les Rocheuses... bien des vallées y sont inaccessibles. Il peut s'y passer mille crimes et personne n'en sait rien. Sans compter la présence ithilienne, dont on sait peu de choses, mais qui existe... Non, ce n'est pas un endroit où il fait bon vivre. C'est la raison pour laquelle personne ne s'y est installé, d'ailleurs."

[Voyageuse]

" Effectivement, si le relief est trop accidenté, qu'il n'y a pas de mines donc pas de richesse du sous-sol, pas de mer à proximité.... c'est une région qui n'a rien pour inciter un peuple à y vivre. L'avantage, c'est qu'on peut peut-être y trouver une nature préservée, et c'est intéressant pour ceux de ma profession. Mais comme vous le dites, ça peut aussi être une zone de non-droit... qui pourrait servir de refuge à ceux qui ont des raisons de vouloir se cacher sans qu'on en sache rien. "
Elle grimaça.
" Me voilà avertie. Je ferai attention. Et donc, à part les trolls et les gobelours, vous dites qu'on n'y croise pas grand-chose. Même pas de dragon, alors ?"

[Galathée]

" Les Rocheuses sont immenses. Bien sûr qu'il pourrait y avoir un dragon. Même cent. Mais ce serait comme chercher une fourmi dans la Lorien. Avec la difficulté que ce ne sont pas de petites montagnes. Le dragon, je pense que sa dernière apparition documentée remonte à deux bons siècles, quelque chose comme ça. C'est un bon ami des elfes, selon les légendes, or il ne s'est jamais manifesté durant les guerres qui les opposaient aux humains, même dans les moments les plus critiques. Il est peut-être mort. Il est peut-être parti. Comment le savoir ? Mais je ne compterais pas trop sur le hasard pour le rencontrer."

[Voyageuse]

" Sans aucune idée de l'endroit où il est, si toutefois il y est, j'ai effectivement fort peu de chances", admit Astrée en haussant les épaules.
Un dragon, ça n'était pas exactement invisible. On aurait dû le voir. Quoique... il lui semblait avoir entendu dire que certains pouvaient se transformer pour passer inaperçus.
Elle commençait à se demander sérieusement ce qu'elle allait bien faire dans ces montagnes. Observer une race qu'elle ne connaissait pas, c'était vague et ça ressemblait, vu la réputation des Rocheuses, à une mission impossible. Ou peut-être existait-il des endroits protégés de toute influence "civilisée", où vivaient, sans qu'on en sache rien, des espèces qu'on ne trouvait pas ailleurs ? Ce serait chouette. Mais vu l'importance de la zone à explorer... et bien cela s'apparentait à chercher une fourmi dans la Lorien, comme le disait la patrouilleuse. Si personne ne connaissait leur existence, elle ne les trouverait jamais. Elle devrait peut-être songer à prier Tymora...
" D'après ce que vous dites, je ne dois pas trop espérer pouvoir me documenter à Belred Luyn : il ne doit pas exister des masses de bouquins. Tant pis, j'aviserai une fois sur place."

[Galathée]

" Vous cherchez vraiment le dragon ? Vous ne seriez pas la première, cela dit. C'est le grand mythe qui a attiré plus d'un chasseur de trésors. Je ne vous apprendrai sans doute rien en vous disant que tous ne sont pas revenus."
Elle eut un sourire.
" Je ne vous imaginais pas comme ça, traquant la chimère. Vous m'avez l'air d'une femme plutôt... équilibrée. Si vous cherchez des créatures des montagnes, vous ne serez pas déçue. On dit que toutes ne sont pas hostiles."

[Voyageuse]

" Je ne cherche pas forcément le dragon, répondit Astrée. Je dois surtout approfondir mes connaissances sur les espèces qui vivent en montagne, en explorant d'autres régions que celles que je connais déjà. On m'a demandé, en particulier, d'observer et d'étudier une race qui m'est inconnue, et ses relations aux autres. On ne m'a pas donné d'autres précisions, je fais un peu ce que je veux une fois là-bas. Mais je me dis que c'est plus intéressant s'il s'agit de races un minimum intelligentes : il y a plus à apprendre. Et comme étudier les trolls ne m'attire pas tellement, je cherche à savoir ce qui peut bien vivre par là-bas. Forcément, vu le nom des montagnes, j'ai pensé au dragon, mais ce n'est pas ce qui m'attire le plus. Un peu trop solitaire..."

[Galathée]

" Je ne suis pas sûre non plus qu'un dragon serait ravi de la présence d'un humain lui collant aux griffes, en prenant note de ses petites habitudes, dit la demi-elfe en souriant. C'est un peu intrusif, votre truc, non ? Vous comptez vous mêler à une tribu d'êtres intelligents qui, jusque là, ont vécu bien tranquillement, cachés dans les montagnes, c'est ça ? Je peux imaginer que des loups finissent par se laisser approcher, mais des êtres pensants... Ils vont fatalement trouver ça bizarre, vous en croyez pas ? Vous avez déjà fait ça ailleurs ?"

[Voyageuse]

Astrée haussa les épaules.
" Non. Pas directement... enfin, il m'est arrivé, par hasard, d'être hébergée par une race dont j'ignorais tout, et de partager leur quotidien pendant quelques jours. Et j'ai beaucoup appris juste en bavardant et en observant... d'ailleurs j'ai dû certainement les saouler avec mes questions, mais j'avais envie de mieux les connaître. On peut aussi imaginer que je tombe sur des créatures hostiles, dans ce cas je ne vais pas me mêler à elles. Je pourrai juste déduire de petites informations de ce que j'observerai à distance, ou interroger à leur sujet d'autres habitants du secteur, s'il y en a. C'est plus facile avec des animaux, comme vous le dites : je l'ai déjà fait avec des loups. Mais bon, je ne cherche pas à faire une étude exhaustive de tout ce qu'il y a à savoir sur une race ! Je cherche juste à rencontrer, et à apprendre... ce que je pourrai. Pas grand-chose peut-être."
La mission qu'on avait donné à chaque apprenti druide, pour achever sa formation, était suffisamment floue pour être traduite par chacun en fonction de ce qu'il rencontrerait.
" Je crois que le coeur de cette mission, dans l'esprit de mon mentor, n'est pas dans la somme d'information que je serai capable ou non de recueillir, mais dans la démarche que j'aurai, la façon dont je m'y prendrai. Une fois rentrée, il me dira sans doute que j'ai loupé telle ou telle information que j'aurais pu deviner, déduire, à partir de tel ou tel élément... ou me reprochera d'avoir été trop peu discrète, trop présente, ou pas assez, ou pas suffisamment neutre..."

[Galathée]

" D'accord, je pense que je comprends plus ou moins, dit la demi-elfe. Mais est-ce que le métier de druide n'est pas intrinsèquement complexe, dès qu'il s'agit d'espèces intelligentes ? Je veux dire, je comprends qu'on puisse vouloir conserver un certain équilibre entre... je ne sais pas... les loups et les bouquetins et les aigles et les marmottes, pour parler de montagnes, et vérifier que les villages humains voisins ne prélèvent pas trop de l'un ou de l'autre, mais... devez-vous veiller à ce que les drows, les orques ou les trolls aient leur part de... respect ? Même si leur culture exige des choses atroces ?"
Elle sourit.
" Ne répondez pas. Je n'aurais jamais pu être druide. La voie du rôdeur me suffit amplement."

[Voyageuse]

Astré rit.
" Je comprends ça. C'est un peu le hasard qui m'a mise récemment sur cette voie, sinon je serais restée rôdeuse, ça me convenait très bien jusque-là. Et je ne regrette pas ce tournant, c'est vraiment passionnant.... mais comme vous le dites, c'est loin d'être évident. C'est un peu une histoire de liberté d'opinion, de liberté d'action, mais dans la limite où cette liberté ne nuit pas à l'équilibre global. Ce qui peut très vite devenir infiniment complexe. "
Elle haussa les épaules.
" Le métier que vous faites est très bien, aussi. Mais peut-être qu'au bout de quelques temps on se lasse de surveiller toujours la même zone... mais c'est inhérent à tous les métiers, cette lassitude."

[Galathée]

" Je ne sais pas. La route est longue et il y passe sans cesse de nouvelles personnes. Nous avons bien sûr nos habitués mais je dois dire qu'il est rare que je m'ennuie. Déjà, j'aime galoper sous les frondaisons, regarder la marche des saisons... Nous autres, demi-elfes, vivons un peu moins vite que les humains, peut-être sommes-nous moins sensibles à l'ennui, je ne sais pas. Certaines journées sont tranquilles, d'autres riches en événements et en surprises. J'aime l'idée d'appartenir à un lieu, de tisser des liens avec les gens, les arbres, les créatures, de développer une certaine... affinité avec l'endroit, une connexion presque physique. C'est sans doute une question de tempérament, en partie. Certains ont besoin de mouvement constant pour maintenir leur intérêt, je suppose. Moi je trouve que j'ai le boulot parfait."

[Voyageuse]

" Je finirai certainement par me poser quelque part, moi aussi. Je trouverai un endroit sur lequel je veillerai... Mais ce n'est pas pour tout de suite. Je ressens encore le besoin de bourlinguer pour découvrir de nouvelles choses."
Ce besoin de mouvement était probablement un moyen de fuir certaines blessures, d'oublier -à défaut de combler- le vide de sa vie. Elle se connaissait suffisamment pour en être consciente, mais ne s'en souciait guère : c'était ce dont elle avait besoin en ce moment, et elle se sentait bien ainsi. Et puis, être sur la route, découvrir de nouvelles choses, cela avait longtemps fait partie de son quotidien.... dans une autre vie, des années plus tôt.
" En tout cas, si d'aventure il se passe quelque chose d'étrange ou d'anormal sur la route, je saurai à qui le signaler," conclut-elle avec un sourire en vidant la dernière goutte de son thé, désormais froid.

[Galathée]

La demi-elfe sourit.
" Nous sommes une douzaine en service en même temps... donc oui, vous devriez trouver quelqu'un. Nous montons des chevaux gris, les tapis de selle sont verts, et nous portons tous cet écusson..."
Elle tapa du doigt un blason vert frappé d'un arbre, cousu sur l'épaule de sa veste.
" N'hésitez pas, c'est notre métier."

[Voyageuse]

" Je n'hésiterai pas", acquiesça Astrée.
Sur un dernier sourire, elle rejoignit sa propre table et acheva de ranger la carte et son livret. La luminosité avait baissé, de toute façon, et elle savait l'essentiel pour démarrer son périple. Elle avait faim -mais la cuisine réputée de l'auberge y remédierait vite-, et ressentait la lassitude dans ses membres.
Par acquis de conscience, elle chercha du regard si l'un des deux jeunes gens avec qui elle avait lié connaissance était dans la salle. Mais il y avait tant d'auberges qu'ils avaient pu choisir n'importe quelle autre.

[Galathée]

Mais aucun des deux voyageurs dont elle avait fait la connaissance n'avait rallié l'Auberge du Cheval Ailé. Un jeune homme vint bientôt prendre sa commande, lui proposant du porc, de l'agneau ou du boeuf, accompagné de légumes de saison et de riz sauvage. La petite salle se remplit aux deux-tiers environ. La demi-elfe qui avait discuté avec Astrée fut rejointe par un collègue, demi-elfe lui aussi, et ils se lancèrent dans une conversation joyeuse et animée. Il y avait pour le reste quelques marchands, quelques voyageurs aux objectifs impossibles à déterminer sur base de leur accoutrement, quelques duos, quelques groupes, un ou deux solitaires qui, comme elle, prenaient leur repas seuls.

[Voyageuse]

Astrée se demanda s'il n'y avait que des demi-elfes pour assurer la sécurité de la route ou si c'était un pur hasard. Elle se fit aussi la réflexion qu'elle n'avait pas encore croisé beaucoup d'elfe sur la route. Peut-être avaient-ils leurs bonnes adresses bien à eux, différentes des auberges fréquentées par les humains ? Mais de toute façon, ils étaient, sur l'île, moins nombreux que les humains.
Elle ne chercha pas à engager la conversation avec quiconque - ça ne lui était pas naturel. Elle se contenta d'observer et d'écouter, en savourant lentement son dîner. La nourriture était plus riche et variée qu'elle n'en avait l'habitude, mais elle aurait tôt fait d'éliminer le surplus d'énergie avalé.

[Galathée]

La nuit fut tranquille, les bruits feutrés de l'auberge remplaçant les murmures habituels de la nature, et au petit matin, après un petit déjeuner honorable, la jeune femme put reprendre sa route. La journée n'apporta rien de particulier, elle ne croisa ni les patrouilleurs de la route, partis avant elle, ni l'archéologue, ni le marchand de marbre, sans doute loin derrière, de leur côté. La route demeurait relativement fréquentée, il était rare de ne pouvoir apercevoir personne, ni devant, ni derrière. Le temps restait au beau fixe, sans signe de nouveaux orages. Au vu de l'allure soutenue de Prince, en cet été splendide, Astrée n'avait plus qu'une nuit à passer en plaine avant d'atteindre l'orée de la Lorien.

[Voyageuse]

La perspective d'atteindre bientôt la forêt lui donnait des ailes. Même si elle était obligée de rester sur la route une fois là-bas, elle bénéficierait tout de même de l'ombre des arbres, et verrait peut-être un aperçu de la vie sauvage des bois, ou au moins quelques beaux arbres. Elle pourrait vérifier si vraiment "il se passait toujours quelque chose" sur cette route, et, qui sait, essayer d'obtenir la permission de s'éloigner de la route quand elle serait à mi-parcours.
Malgré son impatience, elle prit le temps d'une bonne pause en début d'après-midi, à la fois pour reposer sa monture et pour s'épargner la chaleur de ces heures-là. Elle marcha ensuite un moment, ses fesses menaçant de s'ankyloser sur sa monture. Puis elle s'offrit un nouveau petit galop.
Prince n'était décidément pas fait pour les efforts longs et réguliers : il préférait user toute on énergie puis se ressourcer un moment avant de repartir au galop. Et cela rendait finalement le voyage moins monotone.

[Galathée]

A nouveau, les auberges s'échelonnaient le long de la route, distantes souvent d'une lieue ou deux. Astrée traversa, en cours d'après-midi, un bourg de belle taille, qui s'étendait sur la gauche de la piste, jusqu'à la rivière. Ensuite, la campagne redevint sauvage, peut-être un peu plus que vers Togoria, mais il restait quelques fermes, quelques maisons, des auberges, comme autour de n'importe quelle voie commerciale d'importance. Astrée pouvait décider de s'arrêter rapidement ou au contraire pousser jusqu'au crépuscule, mais l'un dans l'autre, il faudrait tôt ou tard qu'elle pose ses bagages pour la nuit.