[Quête] Sur la Ronde

[Galathée]

Quête : Les Pieds dans l'Eau


Au départ d'Hawkhurst, il fallut trois heures de chevauchée à Joffren, Maël et le reste de la troupe pour atteindre Garvell. Le village apparut au détour d'une colline, hameau de bois posé sur la rivière, de part et d'autre d'un pont qui, jolie prouesse technique, pouvait être abaissé à loisir pour laisser passer les bateaux. Au moment où le petit groupe arriva, le pont était baissé et plusieurs pêcheurs y étaient installés.
Joffren s'y fit indiquer le point de rendez-vous avec son commanditaire — une auberge du nom du Vairon aux Courgettes — puis y guida le groupe et ils démontèrent dans la cour d'un établissement plus que modeste.
" Bon. On ne va pas tous entrer. Dame Fiona, messire Maëvian, avec moi. Les autres, profitez-en pour trouver un endroit où laisser les chevaux."
Ensuite, il guida sa paire d'invités à l'intérieur.
La salle était sombre, un peu crasseuse, presque déserte, mais disposait d'une jolie terrasse donnant directement sur la Ronde. La lisière de la forêt paraissait très proche, sans doute à moins d'une lieue. Le tenancier, un petit homme chauve et empressé, les guida jusqu'à une table et disparut à l'intérieur, avant de revenir avec des rafraichissements. Vu la température, ce n'était pas un luxe, même près d'une eau vive et, en ces lieux, d'apparence ordinaire.
Peu après, deux personnes arrivèrent, un homme et une femme, peut-être un couple, ou un frère et une soeur. Ils partageaient le goût de la couleur rouge, une mine contrariée et des gestes nerveux.
" Capitaine Joffren, c'est un honneur et un soulagement de vous rencontrer." dit l'homme avant de s'asseoir.
La femme l'imita en les gratifiant d'un signe de tête.

[Maël Maëviàn]

Ils avaient finalement atteint le terme de leur périple à cheval. Sans doute allaient-ils maintenant pouvoir en apprendre davantage sur ce qui les attendait, ce qui ne serait assurément pas un luxe.

Respecuteux, Maël salua les personnes qui les accueillait, laissant le capitaine recevoir les honneurs et faire les présentations s'il jugeait la chose utile. Pour sa part, il attendrait sans doute que le cœur du sujet soit abordé pour intervenir, si besoin en était.

[Galathée]

Et le sujet le fut rapidement car, comme lui sans doute, Joffren avait l'intention d'embarquer rapidement. L'homme se nommait Oscar Colbhair, c'était le responsable des quais de Garvell. La femme était Deirdre Faolain, maîtresse de la guilde des convoyeurs. L'un et l'autre résidaient dans le village, bien que la seconde soit souvent en voyage le long de la Ronde.
" Nous avons perdu trois barges ces dernières veilles. Nous sommes en plein été, la rivière est tranquille... Même les quelques orages d'été ne peuvent pas expliquer cette disparition des bateaux, expliqua Oscar.
— Nous n'avons retrouvé que d'infimes traces... des morceaux de bois flotté... aucun corps, aucune épave, et aucune cargaison..."

[Maël Maëviàn]

Jusque là, les informations complémentaires se faisaient assez rares. Maël se permit donc d'intervenir.

« Vous n'avez donc aucune idée de ce qui se passe ? »

Ils avaient, après tout, demandé l'aide d'un druide et non celle d'un prêtre, plus facile à trouver : il fallait bien que quelque chose les pousse à imaginer que cela soit davantage dans ses cordes.

« Il paraît assez tentant de penser que la cause du problème provienne de la Forêt, puisque la Ronde la traverse, mais cela signifierait que, quelle que soit cette cause, elle soit d'abord passé ici, me trompe-je ? À quand remontent les derniers incidents inexpliqués survenus à ce niveau ? »

Il était possible qu'une sorte d'animal ait pu s'échapper de la forêt pour venir ensuite établir son territoire plus en aval, et y grossir suffisamment pour provoquer ces incidents. Mais, d'une part, cela nécessitait qu'il soit vivant – du moins, le druide n'avait jamais entendu parler d'un mort-vivant capable de passer de l'état d'enfant à celui d'adulte. D'autre part, à moins d'avoir transité par une forme de cocon ou de chrysalide, la créature aurait vraisemblablement fait parler d'elle au cours de sa croissance.
Il était également possible que, malgré la proximité de la forêt, il s'agisse en fait de quelque chose venant de la mer, ou au moins ayant remonté le courant. Auquel cas il n'était pas impossible que la chose continue de se déplacer, et finisse par menacer Garvell. Peut-être aurait-il fallu commencer par prendre – par la terre – des nouvelles des autres villages situés près de ce cours d'eau.

[Galathée]

" Vous voulez dire au niveau de Garvell ? Il n'y en a jamais eu... par la rivière, du moins. Mais cette veille-ci, il y a eu des rumeurs sur une disparition plus haut sur la Ronde. Cela arrive de temps en temps, cela dit : il y a des passages dangereux et certains silures sont énormes et vous avalent un chien ou un enfant d'une seule bouchée... mais c'est la bordure de la Forêt Maudite, messire... Si on devait chroniquer chaque accident, on devrait y employer dix personnes à plein temps."
Dame Deirdre observa le druide un instant.
" Je n'avais pas imaginé que la menace puisse venir de la forêt... mais j'imagine que c'est possible... Certaines des créatures maudites qui y vivent ne sont pas dépourvues d'intelligence, et elles pourraient tout à fait avoir traversé Garvell sans se faire remarquer, soit à la nage, soit en contournant le hameau, ou sur une barge distraite... "

[Maël Maëviàn]

Voilà qui, pour l'heure, n'aidait pas à savoir ce qu'il en était.

« Les trois barges perdues étaient-elles les seules à avoir pris le large dernièrement, ou d'autres navires sont-ils passés ? Avez-vous eu des contacts par voie de terre avec d'autres villages situés sur la Ronde qui auraient pu voir passer quelque chose ? »

Il paraissait inutile de demander s'il y avait un rôdeur ou approchant aux alentours : si tel avait été le cas et qu'on avait tout de même jugé utile de faire appel à eux, celui-ci, s'il n'avait pu être présent à leur arrivé, aurait au moins déjà été évoqué.

[Galathée]

HRP : c'est le capitaine qui a décidé de faire appel à Maël... a priori, il n'a pas d'indication que c'était une demande de la part des gens du cru...

" Il y a d'autres barges qui sont passées, dit Dame Deirdre. C'est un secteur très fréquenté... mais depuis les disparitions, les gens sont moins emballés... et du coup, plusieurs de nos clients habituels ont décidé de passer par les terres... ce qui est pourtant beaucoup plus coûteux.
— Plusieurs barges sont restées amarrées ces derniers temps, à vide... Les gens ont peur."

[Maël Maëviàn]

HRP : juste. Je pose la question, du coup

« Et personne, à votre connaissance, n'a rien remarqué qui pourrait nous mettre sur la voie ? »

Combien de phénomènes naturels pouvaient causer la perte de navires entiers au point qu'on n'en retrouve que quelques planches, et en laisser passer d'autres sans que rien ne soit remarqué ? Certains animaux pouvaient avaler une proie entière et passer ensuite plusieurs jours à digérer dans un état si calme que, pour peu que le décors environnant le leur permettent, ils semblaient invisibles à qui ne les cherchait pas spécifiquement ; mais une telle créature suffisamment grande pour gober un vaisseau entier paraissait difficile à imaginer aux abords d'une rivière, fut-elle assez large pour être naviguée.
Bien sûr, il y avait l'hypothèse que la chose ne soit en rien naturelle… mais si tel était le cas, il ne serait sans doute pas le mieux placé pour y remédier.

« Y a-t-il un rôdeur ou un druide demeurant aux alentours ? J'aimerais pouvoir discuter avec lui, si c'est le cas. »

Il lui semblait impossible que de telles choses se produise sur le territoire d'un adepte de la nature sans que celui-ci ne mène l'enquête, même s'il était du genre à estimer que les navires étaient une abomination trop humaine.

[Galathée]

" Il y a une rôdeuse à Hawkhurst, je pense, dit Dame Deirdre. Mais je ne crois pas qu'elle vienne jusqu'à la rivière.
— Il y avait un druide plus bas, dans le temps, mais je pense qu'il est mort depuis plusieurs années... La région n'est pas très propice : la forêt est inhospitalière, à moins de vénérer les ténèbres, et la campagne est très... domestiquée, je suppose. Pas directement sur les bords de la Ronde, cela dit, mais à quelques centaines de toises...
— La côte est plus sauvage, mais ce n'est pas là qu'il y a eu des problèmes."

[Maël Maëviàn]

« Nous avons rencontré la rôdeuse en venant. Elle n'est effectivement au courant de rien. »

Il ne releva pas concernant le druide : il lui paraissait probable qu'il soit plus vivant qu'ils ne le pensaient, mais si nul ne l'avait vu depuis plusieurs années, partir en expédition à sa recherche serait sans doute perçu comme un délai inutile par ses compagnons.
Visiblement, les gens du cru n'en savaient guère plus que Joffren, et Maël commençait à douter de l'intérêt de poser davantage de question – il ne voyait d'ailleurs guère quoi demander de plus. Peut-être le capitaine ou la magicienne auraient-ils davantage de demandes pertinentes. Faute de quoi, le meilleur moyen d'en savoir plus serait sans doute d'embarquer…

[Galathée]

Fiona semblait avoir une autre idée.
" Est-ce que les bateaux qui ont été attaqués contenaient quelque chose de spécifique ? De différent des autres, je veux dire ? Je pense que le mieux est de se lancer sur la rivière à notre tour, mais ce serait bête de faire toute la descente jusqu'à la mer, sans rien rencontrer, parce qu'on n'a pas embarqué la cargaison qui intéresse nos monstres."
Leurs commanditaires s'entreregardèrent.
" Les barges sont rarement chargées d'une seule marchandise... On pourrait consulter le manifeste de chacune de celles qui ont disparu... De mémoire, je ne crois pas que leur chargement principal ait été le même...
— Bon, moi je vais aller inspecter la barge avec l'équipage. Fiona, vous pouvez regarder ce manifeste. Maître Maevian, désirez-vous... faire quelque chose de spécifique, de votre côté ?"

[Maël Maëviàn]

Étudier les marchandises était une bonne idée, et le druide aurait pu s'y mettre, mais la magicienne suffirait sans doute à la tâche. D'autant que c'était son idée à elle, et qu'il était préférable de ne pas lui voler les honneurs d'une éventuelle découverte, au cas où. Se mettre en quête de retrouver l'autre druide aurait pu s'avérer utile, mais sans doute trop long. Il y avait cependant quelque chose qui pouvait s'avérer utile et qui était sans doute davantage dans ses cordes que dans celles de quiconque d'autre dans les environs immédiats.

« J'aimerais effectuer une sorte de reconnaissance… longer l'eau par la berge quelques temps. Qui sait, il se peut que je puisse identifier des traces laissées par le passage d'une créature qui auraient échappé aux habitants, mais pourraient néanmoins nous renseigner. De combien de temps disposons nous avant d'être prêts à appareiller ? »

[Galathée]

" Et bien... Nous pouvons appareiller en fonction du temps qui vous est nécessaire... ou vous récupérer plus bas sur la rivière, si vous pensez aller vers l'aval... Nous devons pouvoir trouver une carte de son tracé, et des points remarquables, je suppose ?"
Le marchand acquiesça.
" Bien sûr mais... est-ce prudent que vous fassiez ce genre de chose... seul ?"

[Maël Maëviàn]

Le druide sourit, comme si sa propre survie était un sujet de plaisanterie.

« Mieux vaut ne risquer qu'un homme que de perdre l'équipage entier avant même d'embarquer. »

Il redevint cependant rapidement sérieux.

« Pour autant que nous le sachions, le danger se situe dans l'eau, et je compte pour l'heure rester sur le sol. Je sais par ailleurs passer inaperçu en pleine nature : une escorte non-entraînée nuirait fortement à ma discrétion et nous rendrait donc plus vulnérable. À moins, bien sûr, de retourner jusqu'à Hawkhurst solliciter le concours de la rôdeuse qui s'y trouve, mais cela nous retarderait d'autant. »

[Galathée]

Les deux locaux s'entreregardèrent.
" Elle avait des plans avec les Lathandrites, votre rôdeuse. Le temps qu'on y retourne, elle aura filé dans les bois à la chasse aux squelettes, intervint le capitaine.
— Cela dit, on pourrait trouver un gamin du coin, un pêcheur d'écrevisses..."

[Maël Maëviàn]

« Si cette escapade est véritablement dangereuse, il est préférable de ne pas risquer la vie d'un enfant. Si vous n'avez personne qui ait un minimum d'entraînement pour la discrétion en pleine nature, j'irai seul. Mais je serai prudent, ne vous en faites pas. »

Il serait surtout aux aguets : s'il observait quoi que ce fut qui soit susceptible d'être une menace – y compris sur la terre ferme, les seules disparitions connues s'étant jusque là produites dans l'eau –, il disposait de quelques moyens de prendre le large rapidement sans demander son reste, et n'hésiterait pas à s'en servir.

[Galathée]

" C'est difficile de savoir si c'est vraiment dangereux : vous ne trouverez peut-être rien. Ce n'est pas comme s'il disparaissait des gens tous les deux jours, et les habitants du coin continuent à pêcher dans la rivière et à y battre leur linge." remarqua Dame Deirdre.
Son acolyte acquiesça.
" C'est à vous de décider. Sinon je suis sûr que contre quelques piécettes, vous vous trouverez aisément un guide."

[Maël Maëviàn]

Si la zone n'était pas dangereuse, il n'avait sans doute nullement besoin d'aide. Et après avoir passé un certain temps accompagné lors du voyage depuis Lumenis – ainsi que lors du trajet en bateau qui l'avait précédé – et ne sachant pas combien de temps durerait ensuite leur trajet sur la Ronde, être seul pendant quelques instants ne lui poserait aucun problème, au contraire.

« Je me contenterai d'une carte, si vous pouvez m'en procurer une. Je n'ai d'ailleurs pas l'intention d'aller bien loin : juste ce qu'il faudra pour voir si je perçois, ou non, les traces de quelque chose qui sorte de l'ordinaire vis-à-vis de la nature locale. Je serai de retour pour le véritable départ. »

[Galathée]

" Une carte ? dit le marchand avec une grimace. Je ne suis pas certain que nous ayons ça...
— Si, il y en a une au siège de la guilde, mais je ne peux pas vous la donner comme ça...
— Je peux aider à la copier, intervint Fiona. Enfin... En fonction de vos compétences en la matière."

[Maël Maëviàn]

Curieux : il lui avait toujours semblé que ce type d'outil était d'usage courant. L'habitude des cartes marines, sans doute.

« Vous avez une tâche bien plus importante à accomplir ; inutile de perdre votre temps avec ceci. Je me contenterai d'y jeter un œil, et je prendrai moi-même quelques notes en cas de besoin. »

Après tout, ce n'était pas comme s'il allait affronter un dédale, ou que des récifs risquaient de venir abimer sa coque pendant qu'il marchait. Il allait longer le lit d'une rivière, chose pour laquelle il n'était généralement pas nécessaire d'être druide pour éviter de se perdre, et préférait simplement visualiser assez les choses pour déterminer où il aurait le plus de chances de trouver d'éventuelles traces.

[Galathée]

HRP : pas sûre qu'on trouvait beaucoup de cartes chez le commun des mortels au Moyen Age... et encore moins des cartes exactes o
Pour le reste, ayant mauvaise mémoire, et vu le temps écoulé depuis la partie précédente de la quête, n'hésite pas à me faire remarquer les incohérences narratives...

" Dans ce cas, au travail." dit leur capitaine en se levant.
Fiona l'imita et ils sortirent peu après de l'auberge, direction le siège de la guilde. Le soleil implacable les attendait au dehors et les accompagna jusqu'au bâtiment rustique qui abritait les archives et la fameuse carte. Deirdre emmena la magicienne consulter les registres et son collègue mena Maël à la fameuse carte, encadrée sur l'un des murs, qui représentait le tracé de la Ronde, depuis la Forêt Maudite jusqu'à la mer.
" Je ne sais pas ce qui vous intéresse en particulier... Ces petits rectangles figurent les fermes importantes... Et ça c'est un château... Ici des ruines... et là aussi... Le tracé des berges est, je crois, assez exact, mais la carte date déjà d'un petit moment..."

[Maël Maëviàn]

Certes, mais j'ai tendance à penser que les R.O. sont un peu plus pourvus que notre moyen-âge, de ce point de vue-là, avec les mages et tout. En tout cas, sachant que la navigation inter-continents y est largement plus développée, il y a sans doute plus de cartes marines. C'est vrai que pour un petit village où il n'y a même pas de rôdeur, par contre…
Et pas de souci pour les incohérences si j'en repère.

« Je veux surtout me faire une idée de ce qui entoure les berges et avoir quelques points de repères pour évaluer la distance que j'aurai parcouru. »

Un jeteur de sorts fou pouvait bien avoir élu domicile dans les ruines – il avait déjà vu ça. Il était également possible que les habitants de l'une des fermes ou du château – selon leurs éloignements respectifs de l'eau – aient pu voir quelque chose, sans forcément y avoir prêté attention sur le moment. Si, au contraire, toutes les formes de vie se disant civilisées restaient à bonne distance des berges, celles-ci pouvaient avoir été envahies, outre les animaux, de créatures moins recommandables.

[Galathée]

" Et bien... Vous voyez que de ce côté, on est rapidement à la Forêt. Il y a des gens qui vont par là, mais rarement seuls, et rarement la nuit, le classique de la région, en somme... Nous sommes le dernier village avant la lisière, sur la Ronde... Il y en a un plus excentré, là, mais aux dernières nouvelles, il n'y restait que trois ou quatre familles et elles faisaient leurs bagages... Ce ne sont pas seulement les morts-vivants, ce sont aussi... les perspectives, simplement. La ville attire les jeunes et je ne peux pas les blâmer... Nous avons de la chance, ici : une petite communauté dynamique, soudée, c'est un bon cadre... mais dans ces hameaux reculés, ma foi... On peut vite s'ennuyer. Alors avec la peur en plus..."
Il haussa les épaules.
" Juste ici, vous voyez ce point... C'est un vieux moulin en ruines. Il n'en reste presque rien. Mais c'est peut-être un bon repère. Vous devez juste savoir que si vous remontez par la rive gauche ou la rive droite, à partir du pont ici, il ne vous sera pas facile de traverser en amont... et en aval, pas avant ici, deux bonnes lieues de marche pour atteindre ce pont..."