Butte aux cormorans

[Kasumi]

La petite communauté halfeline de la Butte aux cormorans peut paraître tellement insignifiante pour les grands de ce monde qu'aucun d'entre eux ou presque n'a pris la peine de la faire figurer sur les cartes d'Helonna ou de la Côte de la Lumière. Les petites gens qui se sont regroupés ici autout d'un tertre bénéficie tout de même de la protection relative offerte par les grandes cités du sud du continent, Antelucas la première. Les halfelins locaux trouvent leur subsistance dans la pêche et la cueillette. Ces maigres ressources ne justifient pas que les habitants en fasse commerce et ils ne se mêlent guère des affaires des longues jambes. Ces derniers le leur rendent d'ailleurs bien.

Signe que la région n'est tout de même pas totalement pacifiée, les quelques trous abritant les halfelins sont entourés d'une barricade plus ou moins symbolique.

***

Mais avec l'arrivée du jeune Pabon et de son étrange acolyte, le petit hameau allait peut-être vivre ses plus grandes - ou plus sombres - heures de gloire.

[ZOLTAN]

Pabon était tout content d'arriver dans une communauté d'halfelins, son Papou lui avait longuement décrit les coutumes de ceux de sa race pour compenser l'interdiction de trop poser de questions à ceux de Lumenis.
Après sa mort, il avait respecté cette prudence imposée, après tout Papou n'était plus là pour le protéger comme à Luménis où il était très respecté par les bardes des différents collèges mais aussi des dirigeants de la cité.
Le barde Torazen, son Papou, était le conseiller de tous et avait réglé tellement de différents, que personne n'osait remettre en question ses recommandations, qui avaient valeur d'ordres pour beaucoup.
Depuis seul Rufie avait cet effet sur Pabon, il se savait vulnérable malgré sa petite forfanterie sur "la loi de Pabon". Même si elle comportait une certaine vérité, la chance en faisait partie, et si cette dernière l'abandonnait, Pabon risquait de très graves ennuis. Il suivit Rufie en silence, mais les yeux et les oreilles en alerte.

[Kasumi]

Rufie ralentit avant d'arriver au niveau des portes du petit village. Il hésita un moment avant de se tourner vers Pabon, la mine grave :

- Je suis plutôt connu ici. C'est un handicap pour toi si tu as l'intention de poser des questions et surtout d'obtenir des réponses fiables et sincères. Je crois qu'il serait plus prudent qu'on ne nous voie pas arriver ensemble.

[ZOLTAN]

- je peux garder le poney ?

Rufie fut un temps légèrement décontenancé par la question, mais Pabon poursuivi sa pensée :

- tu comprends, c'est un peu perdu comme endroit, je vois mal quelqu'un à pied faire un détour pour venir ici sans une arrière pensée, bonne ou mauvaise d'ailleurs, comme te suivre par exemple. Là, je pourrais toujours dire que le poney s'est perdu pendant que je somnolais.

Cette soudaine ruse de Pabon surprit Rufie, après tout ses suggestions portaient peut-être ses fruits.
En fait Pabon n'en menait pas large mais n'oubliait pas pour autant ses réflexes de survie. Pabon n'était plus un enfant que sa Mamou ne perdait pas une occasion de câliner, il avait grandi de 10 cm au moins !

[Kasumi]

Rufie esquissa une grimace en entendant la demande de Pabon. Il lui expliqua que les poneys n'avaient pas vraiment de réalité et qu'il lui serait donc difficile d'en garder un.

-Il ne faut pas t'inquiéter de l'accueil des villageois : ils sont toujours ravis de voir une nouvelle tête. Du moins quand elle ne dépasse pas assez du sol pour leur donner le vertige. Dis leur que tu as perdu ton poney et tu auras des volontaires pour t'aider. Ce sera une bonne première approche pour poser les questions qui te tracassent.

HRP : désolé pour le rythme un peu erratique ces jours-ci : cela s'arrangera après mardi.

[ZOLTAN]

Pabon opina du chef et regarda Rufie s'éloigner, il sortit son carnet et raconta sa rencontre avec un dieu, ses interrogations, ses espoirs. Son carnet de note était le dernier cadeau de son Papou, il était vierge de toute écriture si on ne touchait pas la reliure d'une certaine façon, c'était très pratique pour garder les petits secrets de Pabon.
Au bout de deux heures, il se mis en marche pour rejoindre la butte qui servait de refuge aux halfelins.

[Kasumi]

Personne ne chercha à s'interposer quand le halfelin franchit les portes du vilage. Pabon constata aussitôt que le village était peuplé de halfelins de toutes tailles - de manière relative cela dit - et surtout de tous âges. La variété était moins nette pour ce qui était des constructions car seuls deux bâtiments dépassaient du sol de plus d'un niveau : la première était sans doute la demeure commune et l'autre ressemblait à un entrepôt sommaire. Le reste du village s'organisait autour d'un puits et d'un grand arbre sur les branches duquel étaient nichés de nombreux oiseaux de mer.

Alors que le nouveau venu s'avançait vers ce dernier, nombre de conversations cessèrent et quelques mères intimèrent à leur progéniture de rentrer se mettre à l'abri tandis que plusieurs hommes se tournaient vers l'étranger.

[ZOLTAN]

- Bonjour tous le monde. Je cherchais justement une communauté halfeline quand ma monture à disparue pas très loin d'ici, un vrai coup de chance.
Figurer vous que j'ai été élevé par des humains depuis ma naissance, ils m'ont appelé Pabon, mais depuis ils sont morts, alors je recherche des personnes de ma famille. Si quelqu'un connaît le barde Torazen, mon Papou humain, il pourrait sûrement savoir où est ma famille. Enfin ma famille comme vous et moi pas humaine. J'espère que vous pourrez m'aider dans ma recherche.

Vous noterez que Pabon était pour une approche directe. L'enseignement de Rufie pour une approche subtile avait été pulvérisée par l'impatience de son élève.
Heureusement son jeune age et son visage ouvert avaient fait son petit effet, et certains sourires bienveillants et amusés apparurent chez certains de ses interlocuteurs. Il faut dire aussi qu'il avait fait une courbette si prononcée que son chapeau était tombé dans la poussière et qu'il l'avait remit sur sa tête en tapotant dessus, ce qui avait dégagé un nuage de poussière plus comique que protocolaire.

[Kasumi]

La butte aux cormorans et ses habitants avaient affrontés bien des tempêtes avec persévérance et flegme mais peut-être ses habitants n'étaient-ils pas encore tout à fait prêts pour le passage du cyclone Pabon : certains villageois s'entre-regardèrent, échangeant des expressions dubitatives tandis que les autres optaient pour une approche plus fuyante en retournant simplement à leurs affaires en espérant ne pas être le malheureux à qui on poserat directement des questions dérangeantes. Un téméraire halfelin aux cheveux grisonnants finit toutefois par faire un pas en direction de l'étranger :

- Hum, pas si vite jeune homme. C'est quoi ton nom ? Tu t'es perdu, c'est ça ?

[ZOLTAN]

- Ben oui !

Pabon n'en revenait pas, il avait devant lui le gâteux du village et c'était le seul qui daignait lui répondre. Il avait tout dit mais il n'avait rien compris, ou alors il était sourd, voilà c'est ça il était sûrement un peu sourd.
Il reprit donc en hurlant:

- Je m'appelle Pabon mais ce n'est pas mon vrai nom, je ne le connais pas, c'est ce que je cherche.

Tous les cormorans posés sur l'arbre s’envolèrent affolés, certains petits enfants se mirent à pleurer et les personnes encore un peu trop proche de la scène durent appliquer fermement leurs mains aux oreilles. Le brave halfelin resta statufié devant Papou, puis cligna des yeux tel un hibou, et s'il n'était pas sourd avant, il l'était sûrement maintenant.
Si ses oreilles étaient bouchées, elles ne le sont plus, mais pour ce qui se trouve entre les deux, c'est plus problématique à diagnostiquer.
La voix de Pabon, déjà «spéciale» quand il chantait, était proprement stupéfiante lorsqu'il hurlait. On comprend mieux les problèmes de sa Mamou lorsqu'il était bébé, et lorsqu'il a grandi aussi.

Enfin Pabon pensait qu'il avait été suffisamment clair maintenant, et se félicitait de n'avoir pas menti à propos du poney de Rafie, il avait rusé en disant la vérité.
Il lui souri en hochant la tête dans attente que son interlocuteur reprenne son esprit et lui fournisse une réponse.
C'était un gentil petit vieux, bien aimable et sûrement très serviable, dommage qu'il soit atteint de surdité pensait-il compatissant.

Rien ne serait plus comme avant à la butte aux cormorans, d'ailleurs il n'était pas sûr que ces derniers y reviennent de ci-tôt, on risque même d'avoir à en changer son nom dans l'avenir.

Surtout si personne ne fournissait de réponse à notre héros miniature, c'est peut-être ça l'effet Pabon.
On comprend maintenant pourquoi Rafie tenait absolument à garder ses distances, les dieux voient des choses que les mortels ne font que subir, un simple principe de précaution. La sagesse même.

Certaines rumeurs circulent au Panthéon des dieux : Brandobaris aurait trouver une arme pour embêter la déesse de la malchance Beschaba et le dieu nain de la cupidité et de l'avarice Abbathor, ses principaux détracteurs.
Ce serait une sorte de pâté dans un écrit d'Oghma, la possible source de l'entropie de Mystra, le couac dans un chant de Milil, le grain de sable dans un mécanisme de Gond. Certains des partisans du chaos auraient même un sourire entendu aux lèvres. Mais ce sont que des rumeurs...

Les cormorans pourront vous confirmer qu'une rumeur chez les dieux peut ressembler à un doux murmure, mais pas à un beuglement cataclysmique, et c'est des spécialistes de cris de mouettes en furies qui vous l'affirment.

Tout ceci n'est qu'une énorme exagération de la situation, certaines amibes à l'opposé de la planète ne furent pas plus dérangées que ça par la prestation vocale de Pabon, restons plausible.
Nous sommes dans un récit épique, pas dans un conte comique d'un bouffon !

[Kasumi]

Le vieillard s'approcha encore et - chose encore plus étonnante - tendit l'oreille en direction du jeune homme comme s'il avait du mal à l'écouter :

- Pabon vous dîtes, c'est très mauvais ça. Enfin, j'imagine que vos parents avaient leurs raisons. Où sont-il à propos ? Si vous les avez perdu, il faut savoir par où commencer les recherches...

Le reste du village faisait présentement bloc derrière le vieil homme. Enfin, bloc à bonne distance de sécurité et tous semblaient unanimement désireux de laisser le nouveau venu débattre avec le vieux gateux du village.

[ZOLTAN]

Catastrophe, le sourd était aussi gâteux ! Pabon compris qu'il n'était pas au bout de ses peines.
Il décida de prendre les choses une par une pour éviter une plus grande confusion dans l'esprit apparemment limité de son interlocuteur :

- Moi, adopté par humains de Lumenis, moi bébé pas aimé nourriture donné par eux et dire : pas bon, eux donné moi ce nom.
Moi rechercher ma famille halfeline maintenant. J'ai 24 ans donc ma maman était enceinte il y a 25 ans environ. Vous connaissez des halfelins avec des yeux gris comme moi ?

Inutile de dire que notre jeune ami n'entretenait pas un grand espoir d'obtenir une réponse cohérente. La chance avait toujours plus ou moins accompagnée Pabon jusque là, les autres habitants seront sûrement de meilleures aides mais il ne voulait pas être impoli vis à vis du brave homme, déficient mentalement mais bien aimable.

Vous noterez que Pabon n'était ni discret ni roublard, soit l'opposé de ce que demande Brandobaris à ses ouailles. Le dieu de la discrétion serait-il retord à ce point pour profiter de cet état de fait et nourrir un destin particulier à notre jeune et petit héros ? Ce serait bien son genre de ruse, mais pourquoi le laissait-il alors englué dans ce pot de miel de la butte aux cormorans (momentanément), lieu qu'il avait choisi ?
Il semblait évident qu'il ne comptait pas le mener à Peta Ouch'Noc (noc: lieu, endroit / ouch: secret / peta: mystère en langue halfeline), centre de formation de ses mains (+/- prêtres) et autres zélateurs, c'estle lieu le plus secret au monde dit-on au panthéon des dieux. Ce n'est pas une bonne chose d'attirer une tornade dans ce genre d'endroit, même petite.

[Kasumi]

Pendant que Pabon nourrissait toutes ces réflexions, le vieil halfelin tentait encore à sa manière d'assembler les pièces déficientes du puzzle. Une manière qui impliquait visiblement d'enfoncer certains coins même si les formes ou les couleurs n'étaient pas tout à fait les bonnes :

- Des cheveux gris ? Non, tu es bien trop jeune pour en avoir ou alors tu ne dis pas la vérité sur ton âge. Et c'est mal de mentir, ça oui ! Autre chose ? Tu as faim peut-être ? Surtout si tes parents ne te donnnent pas à manger ! Viens, il doit me rester un peu de soupe aux navets. Délicieuse, tu verras : tous tes soucis s'envoleront !

[ZOLTAN]

Pabon le suivit en espérant que la soupe aurait des vertus curatives sur l'intellect et le système auditif du brave halfelin.
Son séjour à la butte aux cormorans risquait d'être bien long et Il ne crachait jamais sur un bon repas. Il nota que les autres les suivaient, soit par curiosité, soit que la soupe était vraiment très bonne et qu'ils comptaient bien en profiter. Le groupe se dirigea vers l'entrée d'un terrier tout proche.
Pabon n'avait jamais été dans un terrier et appréciait cet instant pour des raisons essentiellement ethnologique et architecturale. Pour le reste... il ne connaissait pas de prière pour invoquer l'aide d'un dieu, et surtout pas de Brandobaris qui l'avait mis dans cette situation.

[Kasumi]

Le terrier n'en avait de fait que le nom et le fait que son entrée et un bout du dôme formant le toit étaient les seules parties du foyer qui dépassaient le niveau du sol. Mais l'intérieur n'avait décidément rien à envier aux maisons cossues des petites bourgades humaines. L'ammeublement et la décoration étaient chaleureuses : des fauteuils destinés à se prélasser devant un âtre devaient être le théâtre de récits passionnants, une grande table basse entourée de coussins rebondis faisait office de salle à manger. Sur cette dernière fut promptement apporté une marmite de taille humaine dégageant un délicieux fumet par une dame d'un âge similaire à celui du vieillard qui avait abordé Pabon. Outre le vieux couple, une demi douzaine de halfelins de deux générations différentes surgit de différents recoins de la maison pour rejoindre les coussins.

[ZOLTAN]

La chaleur de l'âtre, l'ambiance confortable lui plurent beaucoup,mais l'odeur de la soupe fut trop forte. Pabon après les politesses d'usage à l'hôtesse se mis à engloutir son écuelle à une vitesse remarquable.
La suite fut moins claire dans l'esprit de Pabon, non pas que la soupe fut empoisonnée, mais elle était euphorisante et il se mis à raconter sa vie à Lumenis en détails et en tournant les événements de manière si comique que son auditoire fut transporté d'allégresse. Le vieux halfelin rit avec les autres, même s'il ne compris que le quart du récit. Pabon avait de qui tenir...

Un peu de généalogie semble être de mise à ce stade du récit. Si son vrai nom vous sera révélé, le suspens n'est qu'en partie dévoilé, la quête de notre héros reste entière.

Tout a commencé lorsque Pan Rosépine (dit Zizi Pan Pan, barde de sont état) rencontra sur le chemin de la colline aux baies une belle halfeline nommée Tamara Feuillemorte. Il la connaissait depuis la dernière fête du printemps, mais n'avait pas pu l'approcher en tête à tête. Il était un adepte d'Oghma et elle de Milil, et les choses évoluèrent favorablement et ils s'unirent assez rapidement.
Quelque année plus tard une petite fille nommée Biche Rosemorte, les rejoignit, fruit tardif de leur union.

Par ailleurs, Dor Brundherbe demandait en mariage Bree Nuagegris, elle dit oui. Pourtant les chose n'était pas simple car les traditions familiales faisaient des Brundherbe des adeptes convaincus de la déesse Yodalla, et des Nuagegris un foyer où les mains de Brandobaris pullulaient.
Néanmoins un petit Astor Herbegrise naquit comme un trait d'union apportant joie et paix aux amoureux.

Pour des raisons mystérieuses la rencontre et l'union de Biche Rosemorte et d'Astor Herbegrise restèrent secrètes et leurs personnalités aussi.
A la naissance du petit Pandor Rosegrise, pour des raisons toute aussi mystérieuse, ses parents durent prendre une grave décision qui bouleversa leurs vies et celle de leur enfant.
Ce petit bébé fut confié à un barde humain de renom à Lumenis et de sa compagne: Torazen et Amilil.

Ce petit avait la minceur et l'agilité des Brund'herbe, la débrouillardise et les yeux gris des Nuagegris, la voix puissante des Feuillemorte et le culot inventif des Rosépine.
Il avait aussi un surnom, donné par ses parents d'adoption humains : Pabon.

Pour des raison de paix religieuse entre les familles, on remarquera que les noms des enfants furent un habile mélange des noms de leurs parents respectifs. Les halfelins n'aiment pas les conflits et préfèrent faire la fête en famille, et ce moyen était le seul qui préservait les susceptibilités et permettait de trinquer en paix et ainsi absorber des quantités peu raisonnable de bière.
Pour le petit Pandor Rosegrise, ce fut par contre un soucis de dissimulation qui présida le recourt à ce stratagème, la cause est encore inconnue à ce jour.

On ignore si le choix de Pandor comme prénom du petit dernier est uniquement l'addition du prénom de ces ses deux grands-pères, ou une malheureuse référence au nom d'une boîte de légende au contenu maudis redouté de tous.
Certains pensent que c'est plutôt le contenu de cette boîte qui est sorti lors de sa naissance mais cette interprétation reste du domaine du ragot de mauvaises langues.

Quand on vous dit que Pabon avait de qui tenir ! Mais son futur était encore devant lui, et son fameux médaillon qu'il cachait sous sa tunique n'avait toujours pas la moindre signification à ce stade de l'histoire.
Après cette représentation festive imprévue, Pabon s'autorisa un petit roupillon digestif, une sieste quoi.

[Kasumi]

La bonhommie de Pabon était communicative et les membres de la maisonnée se montrèrent rapidement loquaces en sa présence. Les plus jeunes firent montre de curiosité pour la cité de Luménis, les yeux brillants et friands du moindre détail.

Alors que Pabon sommeillait plus ou moins complètement sur son coussin, une question insistante le tira de sa torpeur : voulait-il du sucre avec son thé ? Non, ce n’était pas cela. Oui : il avait des yeux bien étranges pour un halfelin disait-on. Des yeux qu’on n’avait pas vu depuis le départ du dernier membre de cette étrange famille, comment se faisaient-ils appeler déjà ? Ah oui, les Nuage-gris.

[ZOLTAN]

C'est ça, il avait bien entendu ce nom à travers le brouhaha des conversations. Voilà une piste à suivre mais avec tact.
Pabon et le tact cela faisait deux, bien qu'il soit persuadé du contraire, enfin on risque d'avoir une nouvelle définition du tact sous peu.

Une grande clameur s'éleva à l'extérieure, des bandits approchaient. Pabon sortit et vit que les habitants se préparaient promptement avec la force de l'habitude, il décida des les aider en entonnant un chant de circonstance, enfin il ne savait pas trop mais il le trouva approprié.

Il était un halfelin
Pirouette, cacahuète
Il était un halfelin
Qui avait une drôle de maison
Qui avait une drôle de maison

La maison est en carton
Pirouette, cacahuète
La maison est en carton
Les escaliers sont en papier
Les escaliers sont en papier

Si vous voulez y monter
Pirouette, cacahuète
Si vous voulez y monter
Vous vous casserez le bout du nez
Vous vous casserez le bout du nez

Un bandit y est monté
Il s'est cassé le bout du nez
On lui a raccommodé
Avec du joli fil doré
Avec du joli fil doré

Mon histoire est terminée
Pirouette, cacahuète
Mon histoire est terminée
Messieurs, mesdames, applaudissez

Approprié non mais cela décupla l'ardeur des défenseurs qui réglèrent le problème des bandits à une vitesse stupéfiante. Ces derniers prirent la fuite à grandes enjambées sous peine d'être lapidés, laissant leurs montures affolées ruer de tout côtés pour en chasser un agresseur imaginaire.
Pabon encore tout rouge de l'effort fourni à brailler, n'avait même pas eu le temps de sortir sa dague pour aider ses hôtes.
S'il ne fut pas applaudi, il eut des commentaires "presque" élogieux sur sa prestation vocale, une première en soit !
C'était son chant préféré il est vrai, et apparemment les halfelins avait une oreille musicale que les hommes et les animaux n'avait pas.

Ils rentrèrent tous pour fêter ça avec une bonne bière et Pabon pensa qu'il pourrait à cette occasion compléter ses informations sur les Nuagegris, enfin après que l’excitation due à son chant retombe un peu.

[Kasumi]

Ce qui frappa avant tout Pabon était l'impression de nonchalance et le sens des priorités qui se dégageait des villageois : la famille qui lui servait d'hôte se contenta presque de reprendre le repas là où il s'était interrompu de manière impromptue : soit on ne plaisantait pas avec la nourriture - ce qui était une hypothèse fort probable pour des halfelins - soit les attaques de bandit étaient coutumières. Pabon aurait pu s'imaginer avoir rêvé l'incident si quelques échanges n'avaient pas porté sur celui-ci pour souligner que les pillards n'étaient décidément plus ce qu'ils étaient. Quant à la remarque sur les Nuage-gris, le jeune halfelin allait devoir prendre l'initiative d'interroger ses hôtes s'il souhaitait en apprendre davantage.

[ZOLTAN]

- Alors c'est qui ces Nuagegris, ceux qui avaient les yeux gris comme moi ? clama t'il bien fort pour être entendu de tous.

Vous remarquerez que le tact n'a pas la même définition chez tous le monde. Ce n'est pas faute de vous avoir prévenu (chose aisée quand on connait les réaction du personnage depuis le début de l'histoire).
Pour quelqu'un qui veux devenir barde, Pabon acculait des gros handicaps : une méconnaissance abyssale de la musique instrumentale, une connaissance générale assez limitée pour un futur barde il faut bien le dire, une voix assez "spéciale" lui interdisant le chant récréatif, une absence de toutes bases de la magie et pour terminer une diplomatie très exotique. On mettra son tact dans cette dernière catégorie.

Bien qu'élevé par un barde il est normal qu'il ne soit pas au fait de l'exercice d'un barde en bonne société, coincé chez lui sous la garde de sa Mamou plus préoccupée de sa sécurité qu'à son ouverture sur le monde.
De fait Pabon bien qu'adulte avait gardé une âme d'enfant et le manque de subtilité qui va avec. Enfin sa Mamou lui avait quand même inculqué une bonne dose de politesse malgré tout.

- Excusez moi mais ça me trotte dans la tête depuis tout à l'heure, j'aimerai beaucoup que vous disiez plus sur eux s'il vous plait !

[Kasumi]

Le sens des priorités de ses hôtes était bien plus conforme à ce que l'on était en droit d'attendre de la part de halfelin. C'est pour cela qu'on ignora tout d'abord la question de Pabon le temps de lui resservir de la soupe et une assiette de gruau au fromage des plus roborative. Mais la cheffe de maison eut tout de même assez pitié de lui pour consentir à quelques commérages : les Nuage-gris avaient toujours été des originaux, à tel point que leur trou familial n'était même pas situé à l'intérieur des murs du hameau. Enfin, cela était de toute manière une histoire ancienne : plus personne de sain d'esprit ne se rendait encore dans leur ancienne demeure depuis près de dix ans, au bas mot.

[ZOLTAN]

Après avoir remercié ses hôtes de leur accueil, il leur annonça qu'il allait se rendre dans cet ancien logis des Nuagegris dont ils lui avait indiqué l'emplacement.
L'heure était déjà avancé mais il avait suffisamment le temps d'y arriver avant la nuit. Son hôtesse lui remplit les bras de victuailles pour qu'il soupe au moins correctement et ponctua chaque geste de recommandations très maternelle. Certains commentaient sa décision de "ridicule", "inutile", "risquée" et autres épithètes peu encourageants.
Pabon se mis en route sa sacoche à dos pleine à craquer, non sans faire un petit geste d'au revoir au groupe le regardant partir.
Une grosse heure plus tard il arriva sur l'entrée close mais encore en bon état du terrier. La végétation avait envahie le pourtour, mais apparemment quelqu'un était venu il y a peu car un accès était suffisamment dégagé pour approcher de l'entrée. Pabon essaya de pousser la porte et à sa grande surprise celle-ci s'ouvrit dans un grincement sinistre. Autre surprise, Rufie l'attendait.

[Kasumi]

Il faisait très sombre dans le terrier. Comme s'il était destiné à se cacher plutôt qu'à permettre à une joyeuse famille halfeline d'y vivre mais Pabon ne pouvait pas avoir de doute sur l'identité de celui qui l'y attendait et l'accueillit par ces mots :

- Tu en as mis du temps : je pensais qu'un halfelin aussi dégourdi que toi aurait mis une bonne heure de moins à trouver cet endroit. Mais entre donc, il ne faut pas qu'on risque de te voir fureter par ici !

[ZOLTAN]

- Oui je me suis un peu perdu, c'est drôlement bien caché et le chemin qu'on m'a indiqué n'était pas très précis. Dit donc les Nuagegris avait plutôt envie de se cacher dit donc ! C'est lugubre ici.

Pabon inspecta minutieusement l'antre puis se tourna vers Rufie et lui dit d'un ton accusateur :

- Rufie puisque tu savais où aller, pourquoi tu m'as laissé avec ce vieux gâteux ? Ils sont bien gentils tous mais pas très bavards tu sais, il suffisait de venir directement ici, pas vrai ?

Il était en pétard contre Rufie, il l'aidait sans l'aider, il faisait des mystères sans aucune raison. Il n'avait plus confiance et cela se voyait.
Il était près de tout abandonner pour revenir à sa vie précédente sans grande saveur mais sans être obligé de fréquenter des faiseurs d'enquiquinements, et là c'est de Rufie auquel il pensait.
Il n'était pas un faiseur d'embrouilles (enfin pas consciemment) comme il soupçonnait que Rufie voulait qu'il devienne. Il n'aimait pas "faire les choses en cachette" et il ne furetait pas mais cherchait des indices ! Dieu ou pas Rufie avait dépassé les bornes et comme la patience de Pabon était de l'ordre de l'instant très court, son humeur s'expliquait.
Vous noterez que la notion de puissance divine n'avait aucune importance pour Pabon.

[Kasumi]

Rufie laissa le jeune halfelin maugréer tout son saoul et laissa passer l'orage tout en gardant les bras croisé. Ce n'était pas de l'indifférence : le dieu s'attendait manifestement à cette réaction et étudiait Pabon avec attention. Lorsque ce dernier lui en laissa l'opportunité, il répondit avec un ton flegme qui contrastait fortement avec les récriminations dont il venait de faire l'objet :

- Cela n'aurait servi à rien que je te mène moi-même ici : il fallait que tu puisses découvrir cet endroit par toi-même. A quoi bon aller plus loin sinon. La suite sera bien plus dangereuse que d'affronter une famille rurale et quelques toiles d'araignées : il fallait que je sois sûr - et toi aussi tu en avais certainement besoin - que tu puisses te débrouiller sans mon aide.

[ZOLTAN]

Après avoir rempli ses nombreuses poches d'un bric à brac glané ci et là, Pabon répondit enfin à la remarque de Rufie :

- C'est possible mais ça reste une traîtrise, J'aime pas ça, même à Grunt j'ai laissé l'argent qu'il avait gagné honnêtement quand je l'ai laissé aux docks de Lumenis.

Pabon respira un grand coup pour se calmer complètement. Il avait compris le principe mais pas la manière, il devait se débarasser du 1/2 orque trop encombrant et il avait négocier au mieux pour le faire. Rufie à qui il avait raconté l'histoire durant sa chevauchée avait hocher la tête, signe d'approbation pour Pabon.

- Alors ces Nuagegris sont de ma famille, mais pourquoi sont-il parti et où ? Il brandit un emblème de Brandobaris trouvé derrière une paillage éventrée et attendit la réponse.

[Kasumi]

Rufie leva la main, comme pour prévenir de nouvelles protestations. On ne pouvait pas vraiment savoir avec un dieu spécialisé dans la duperie qui venait de vous trahir mais il parut tout de même sincère lorsqu'il répondit :

- Je ne sais pas où ils sont partis. Pas encore en tous cas : les dieux ne sont pas aussi omnipotents qu'ils s'en vantent. Mais c'est un mystère que je compte élucider avec toi. Et c'est pour cela que nous sommes ici. Qu'as-tu trouvé ?

[ZOLTAN]

Pabon fouilla dans ses poches et sortit 2 parchemins déchirés et chiffonnés, il lut le premier :

- Les Rosépine et les Feuillemorte vous invitent à la fête donnée en l'honneur du mariage de leur fille Biche avec Astor Herbegrise au village des collines rouges près d'Evendum, le 3 ... Et là c'est déchiré, pour le deuxième tout chiffonné, le message est griffonné à la hâte mais il est entier : Fuyez vite, les mains rouges sont arrivés à Lumenis, j'ai prévenu nos enfants ! et c'est signé : Pan R

Pabon les tendit à Rufie pour qu'il les examine, puis après réflexion :

- Le mieux c'est de demander aux habitants de la Butte aux Cormorans s'ils connaissent les Rosépine, Feuillemorte et Herbegrise avant d'aller à Evendum, tu crois pas ? A moins que tu les connaisses ?
Les Nuagegris étaient de tes adeptes il me semble, tu dois savoir quelque chose à propos de ces mains rouges, "mains de la mésaventure" c'est bien comme ça que l'on nomme tes prêtres qui n'en sont pas !

Le sarcasme était présent mais l'interrogation était sincère et il faut bien le dire justifiée. Rufie hocha la tête pensif en examinant le deuxième message plutôt inquiétant.

[Kasumi]

Rufie répliqua qu'il s'intéressait assez peu à la généalogie des familles halfelines ou non et aussi qu'il avait plus ou moins perdu contact avec les Nuage-gris du moment que ses mains d'alors ne lui dédiaient plus de dévotions.

La mention des mains rouge le fit davantage réagir en dessinant une expression soucieuse sur son visage d'ordinaire affable et imperturbable.

- Les Mains de la mésaventure m'obéissent et me sont dévouées oui. Pas les Mains rouges, elles sont dangereuses. Nous allons découvrir à quel point en nous rendant à Evendum.

Pabon n'avait pas besoin d'être grand psychologue pour deviner que le dieu était loin de tout lui dire sur ce sujet. Cherchait-il à le tester une nouvelle fois ? A le préserver ? Ou à préserver de lourds secrets ?

[ZOLTAN]

Pabon n'était pas trop satisfait d'abandonner la recherche de sa parentèle et regardait avec attention l'âtre de la cheminée en réfléchissant. C'est l'élément central des foyers halfelins, et remarqua une petite anomalie sur l'un des côté. Une brique semblait moins usagée et il entreprit de la déceler à l'aide de sa dague. Une fois ôtée, une petite cache renfermait un parchemin soigneusement plié. Il lut à haute voix pour que Rufie, intrigué par son manège en connaisse la teneur :

- Astor, mon petit, si tu lis ce parchemin, sache que nous allons bien. Ta mère va beaucoup mieux et nous allons pouvoir enfin partir pour nous réfugier près des collines rouges où Tamara s'est cachée après la mort de son mari. Ses blagues, les récits de ses exploits et ses chants ne réjouiront plus personne. Il s'est sacrifié pour lui permettre de s'enfuir et se réfugier dans un endroit que sa fille connaît bien. Le village des collines rouge est maintenant un endroit dangereux. Nous avons reçu son message pendant que ma Bree était malade. Elle m'affirme que les mains rouges ne sont pas des adeptes de Brandobaris mais qu'ils se font passer pour tels auprès des halfelins.
C'est elle la spécialiste mais franchement j'ai du mal à comprendre pourquoi son dieu ne réagit pas à cette imposture, elle n'arrive plus à entrer en contact avec lui durant son sommeil. Pour elle, c'est des halfelins soumis à Cyric qui ont pris le nom «mains rouges» pour ne pas dire «soleil noir» trop évident. Les Nuagegris sont parfois bien mystérieux et ta mère est championne pour ça, mais je crois qu'elle n'a pas tord : qu'ils officient depuis plus de vingt ans montre qu'ils ont un protecteur très puissant.
Évite la butte aux cormorans car c'est trop voyant et plus aussi sûre qu'avant, ainsi que la communauté de ma famille que je sais surveillée.
Fais ce qui paraît le plus prudent, que Yodalla te protège,
ton père Dor Brindherbe.

Pabon regarda interrogatif Rufie qui semblait très mécontent à la lecture du message.

- Cet Astor n'est pas venu, mais ça date d'un moment puisque le terrier est vide depuis une dizaine d'année. On dirait que ces mains rouge ou plutôt noires sont des méchants, non ? Tu roupillais ou bien quoi ?

Le tact n'était vraiment pas son bol de potage mais il avait raison, Rufie secoua la tête d'un air accablé, ce sacré problème se révélait encore plus ardu et tout avait été fait pour qu'il en ignore la gravité.
Cap sur Evendum, et au galop ! Cela risquai d'être dangereux pour Pabon mais il était peut-être de taille à y faire face, à raison de 84 cm du moins.