[Ambre] Intervention - code 7 - 14/289.16

[Galathée]

Harold opta pour la première solution. Il n'imaginait pas parvenir à se défaire des chiens avec une seule pierre, mais il espérait les freiner dans leur élan et profiter de ces quelques secondes de répit pour modifier sa peau et la rendre moins sensible aux crocs à venir. Il faudrait ensuite qu'il se résolve à affronter ces créatures au corps à corps... ce qui paraissait, à l'heure actuelle, absolument dément. Mais il savait qu'un Ambrien ne manque pas de ressources et il était notamment capable de guérir en cours de combat. Il ramasserait une pierre plus petite et il fracasserait des crânes. Pas tellement son genre, mais, comme disait le dicton, à coeur vaillant rien d'impossible.

[Vel Cheran]

Harold fut l'auteur d'un magnifique jet, qui lui aurait sans doute valu une bonne place dans le concours olympique du lancer du poids. Mais cela aurait nécessité qu'il se trouvât dans un stade d'Ombre-Terre au moment des Jeux Olympiques, ce qui n'était pas vraiment le cas. La pierre frappa un premier lévrier à la tête dans un cri de douleur avant de s'écraser sur son voisin de meute, le renversant au passage.

Parmi les trois canidés restants, le plus rapide était déjà là, et bondit sur l'Ambrien, crocs dénudés, sans doute avec l'intention de lui pratiquer une trachéotomie improvisée - alors que tout le monde sait qu'aucun chien ne possède les compétences médicales appropriées.

[Galathée]

Harold réagit en lui saisissant la tête à pleines mains, ou du moins en tentant de le faire. Il lui semblait avoir entendu dire qu'il fallait enfoncer ses pouces dans les yeux et frapper aux ventres, mais c'était peut-être du délire, ou un souvenir d'une de ces séries anciennes qu'ils regardaient au QG pour décompresser. Quoi qu'il en soit, il était doté d'une force surhumaine et il n'était pas impossible qu'il soit capable de défoncer un crâne à mains nues, juste en serrant. Ce serait répugnant. Mais ce n'était pas comme si, à l'instant, il avait vraiment le temps d'y réfléchir. Pas plus qu'il n'eut le temps de songer à durcir mains et gorge, en prévision de la lutte. Mais c'était le genre de choses qu'un corps entraîné à la métamorphose réalisait par réflexe.

[Vel Cheran]

De manière surprenante, le chien sembla anticiper la réaction de Harold et recula sa tête au moment où il tentait de la saisir. Ce faisant, il n'était plus à portée de sa gorge mais il pesa de tout son poids pour mettre l'Ambrien à terre. Les autres chiens avaient ralenti et se déployaient en arc de cercle autour des deux lutteurs, ne laissant aucune retraite à Harold.

[Galathée]

Il y avait quelque chose d'étrange, chez cette bête, d'inanimal, si on pouvait utiliser ce barbarisme. Bien sûr, cette pensée fila dans l'esprit d'Harold, insaisissable, alors même qu'il tentait de reculer une jambe pour maintenir son appui. Encerclé, il serait probablement attaqué par derrière, mais il n'y songea pas vraiment. Il chercha une prise sur le chien, n'importe laquelle, pour s'y raccrocher quitte à chuter. S'il ne pouvait lui broyer le crâne, il lui briserait autre chose, une patte, la poitrine, tout ce qui passait à sa portée. Il n'avait pas peur de lutter : le chien était peut-être grand mais il ne pouvait pas être bien lourd. Il pouvait sans doute le saisir et le renverser contre les pierres. Non. Le fracasser.

[Vel Cheran]

Après quelques instants de lutte, Harold parvint à le saisir et à le projeter contre les pierres, mais la masse du canidé, plus importante que prévue, l'emporta dans son élan et il chut avec lui - ou plutôt sur lui. Écrasant le chien sous son poids, il sentit ses os craquer dans un jappement de douleur. À part quelques soubresauts, il n'était désormais plus un danger.

En revanche, les quatre lévriers restants étaient encore en pleine forme, et choisirent ce moment pour attaquer : deux se ruèrent vers les jambes de Harold, un vers son visage et le dernier vers son bras gauche.

[Galathée]

Il lui restait le droit !
Mais la seule chose qui émergea dans l'esprit du jeune homme fut un juron imagé et son seul réflexe fut de tenter de se mettre en boule et de durcir sa peau, comme il l'avait fait plus tôt face à la créature aquatique qui avait cherché à le noyer. Ce n'était pas très offensif comme stratégie, mais si les chiens s'y cassaient les dents, peut-être renonceraient-ils à leurs projets.
Ce n'était pas la première fois de sa courte vie qu'Harold était dans une situation critique, pas la première fois qu'il devait contempler une surprenante mais inéluctable mortalité. Ses capacités de métamorphe l'avaient sauvé autrefois, dans les eaux noires de Rebma, et il en serait de même aujourd'hui, il en était convaincu.
Dans le cas contraire... Il ne serait plus là pour s'en soucier.

[Vel Cheran]

Dans le feu de l'action, Harold ne remarqua pas immédiatement les changements qui s'opéraient en lui. La fatigue accumulée de ces dernières semaines, ajoutée à son interminable journée depuis qu'ils avaient reçu cet appel de détresse, commençait à s'abattre sur lui. Combien de fois avait-il eu recours à ses capacités de métamorphe dernièrement ? En avait-il seulement gardé le compte ? Sans compter sa récente marche en Ombre, dans cette grotte étrange - et maintenant, une meute de chiens qui tentait de faire de lui leur déjeuner.

Alors qu'il tentait de se mettre en boule, il se rendit alors compte de quelque chose d'étrange, comme si la taille de ses membres avait changée. Il eut soudain conscience qu'au moment où la cage thoracique du lévrier avait cédé, les coutures de sa combinaison également.

Étaient-ce des griffes au bout de ses doigts ?

Autour de lui, les chiens semblaient s'être figés, circonspects. Mais, de toute évidence, cet instant de répit ne durerait pas.

[Galathée]

Harold réalisa alors que, depuis le début des hostilités, il avait tenté de se contrôler : sa peur, son pouls, ses pensées, sa carcasse. Or, il y avait quelque chose en lui-même, quelque chose de violent, qui cherchait à s’échapper. Il avait cru que c’était la panique, un risque qu’il ne pouvait courir, qu’il lui fallait à tout prix contraindre et maîtriser. Il s’était trompé. Ce qui poussait contre ses liens, de l’intérieur, c’était la réaction instinctive de son pouvoir, et il réalisa que même s'il n'avait aucune idée de ce que c'était, il devait faire confiance à cet instinct de survie inné.

Alors il lâcha prise et aussitôt, la métamorphose l'engloutit. Il n'en mesura pas grand-chose car tout son organisme se modifiait à une vitesse vertigineuse, chaque cellule, peut-être même les molécules qui le composaient, et il ne fallut que quelques secondes pour qu'au milieu des chiens se trouve un autre lui, toujours lui pourtant, ce qui était déjà une surprise en soi. Il s'était attendu à perdre toute conscience. Ce n'était pas le cas. Il avait des membres... griffus et écailleux, d’un vert un peu nacré, taillés pour détruire et déchirer, et c'est ce qu'il fit aussitôt, s'attaquant au chien le plus proche, non sans balancer un coup de queue - intéressante nouveauté là aussi - à un autre derrière lui. Qu'ils viennent donc se casser les crocs sur sa carapace, ces crevures. Il pouvait aussi leur planter les cornes dans le flanc. Ou même les mordre. Tout cela était absolument magnifique, une bénédiction diabolique dont on ne pouvait que profiter.

Qu'Edgar ait pu assister à la scène était désormais un détail. Il n'y songea même pas.

[Vel Cheran]

Le premier chien fut proprement annihilé, tandis, que la queue fraîchement acquise de Harold envoya un second valser quelques mètres plus loin - le jappement de douleur qui accompagna sa chute témoignant qu'il s'était cassé quelque chose.

Les trois chiens restants tournèrent lentement autour de Harold en aboyant, manifestement incertains sur la conduite à tenir. Cela ne dura cependant pas longtemps avant qu'ils ne se jettent vers Harold, dans un élan parfaitement synchronisé, l'attaquant de toutes parts à la fois.

[Galathée]

Mais si Harold avait douté de ses capacités à se défendre un peu plus tôt, ce n'était plus le cas. Les chiens étaient passés à l'action, mais seulement un fragment de seconde avant qu'il n'en fasse de même. Il n'était pas certain que, s'ils décidaient de fuir, il ne les pourchasserait pas un à un pour les réduire en charpie. Il ne maîtrisait qu'imparfaitement son nouveau corps, aussi s'en remettait-il purement à ses sensations, quelque chose d'un peu neuf, d'un peu grisant. Mais c'était toujours comme ça, en métamorphose : l'esprit était lui aussi transformé, car il n'existait pas de conscience sans matérialité. Il était monstre et il se comporterait comme tel. Ces salopards avaient blessé Nora, avaient tué Sam, ils ne méritaient que sang, viscères et violence. Aussi choisit-il un chien, qu'il tenta de saisir et de briser, des griffes, des cornes et de la gueule, tout en balayant le reste de sa queue. Sans doute cela serait-il maladroit, mais il avait l'écaille dure, et il l'aurait plus dure encore si c'était nécessaire.

[Vel Cheran]

Harold parvint à saisir le chien le plus proche, qu'il déchira en deux d'un coup de dents. Encore imparfaitement à l'aise dans son nouveau corps, il manqua l'un des deux lévriers restants, mais son coup de queue balaya néanmoins le troisième et l'envoya au tapis lui aussi.

Le canidé survivant n'hésita pas : il fit demi-tour et s'enfuit à toute allure vers ses congénères qui encerclaient encore le rocher où Edgar avait trouvé refuge.

[Galathée]

Harold ne tergiversa pas davantage et le prit en chasse, bien décidé à mettre la meute en déroute avant de se poser les questions de rigueur. Retrouver forme humaine, Edgar, le futur, tout cela viendrait. Sa forme présente n'était de toute façon ni portée sur la mesure, ni sur l'introspection. Elle était portée sur le massacre et il avait bien l'intention d'en profiter encore un peu...

[Vel Cheran]

Sous sa forme fraîchement acquise, Harold put constater une très nette amélioration de sa vitesse de pointe : il rattrapa aisément le chien survivant et le mit hors d'état de nuire.

Il restait désormais une dizaine d'assaillants s'en prenant à Edgar, dont la situation ne s'améliorait pas : dans un élan de collaboration improbable, les chiens s'étaient placés de manière à former une pyramide canine improvisée, qui allait bientôt leur permettre de grimper sur le rocher.

[Galathée]

Ces chiens étaient plus malins que la moyenne, et Harold doutait de plus en plus qu'ils soient originaires de l'ombre où il avait l'habitude d'opérer. Il n'était plus certain de pouvoir dire "cette ombre", car il n'était pas impossible qu'ils aient glissé dans un ailleurs proche mais pourtant différent, comme l'avaient fait les enfants rescapés. Il avait l'impression que son emprise sur la Marelle aurait pu le renseigner, lui faire percevoir cette modification subtile de la réalité, mais il n'avait jamais été très intéressé par le pouvoir ancestral de sa famille et n'en savait que ce qu'il avait retenu des leçons de Llewella. Pas assez, et ce n'était pas le problème le plus urgent. Le problème le plus urgent, c'était la pyramide de chiens, et il décida de la heurter de plein fouet, à grande vitesse, et les cornes en avant. En fauchant la base, il renverserait probablement tout l'édifice... qu'il s'empresserait de mettre en pièces, en petites pièces, bien trop petites pour pouvoir recommencer pareilles acrobaties...

[Vel Cheran]

La charge fut brutale. Quelques lévriers, le voyant arriver, tentèrent de se dégager, et deux d'entre eux parvinrent à l'esquiver d'un bond, mais le reste de la meute fut balayée par ce coup de bélier.

Le choc ne fut pas anodin pour Harold, néanmoins : il en perdit l'équilibre et dut se rattraper pour ne pas tomber et, le temps de faire volte-face, quelques chiens encore valides s'étaient remis sur leurs pattes et se préparaient à l'affrontement.

S'il n'était pas aussi accaparé par le combat qu'il menait, Harold aurait vu l'expression de terreur sur le visage d'Edgar. Et ce n'était pas vis-à-vis des chiens.

[Galathée]

Mais il avait les crocs pleins et son désir d'en finir une bonne fois pour toutes avec ces importuns accaparait son esprit. Ça et le contrôle incertain mais nécessaire qu'il avait sur sa carcasse, puissante et meurtrière, mais... déconcertante, pour dire le moins. Il agissait à l'instinct, mais même celui-là était tout neuf, et chaque action était comme une expérience grisante, dont il ne pouvait prévoir le résultat. Brutal, souvent.
Il savait que viendrait un atterrissage, sans doute douloureux, quand Harold — car cette chose n'était pas vraiment lui, ou pas complètement — prendrait la mesure de ce qui venait de se produire. Mais il n'avait pas le temps de s'en soucier. Et puis... il connaissait bien Harold. C'était un gars solide. Pragmatique. Il ne pourrait que se réjouir de ce retournement de situation.
Mais d'abord... broyer ces prédateurs de pacotille. Qu'ils viennent donc. Il était prêt à se repaître de leurs tripes.

[Vel Cheran]

Les premiers chiens qui se jetèrent sur lui n'eurent aucune chance, et se retrouvèrent en charpie sans avoir eu le temps de comprendre ce qui leur arrivait. La furie du démon-Harold ne faiblissait pas, et même les lévriers qui hésitaient en furent pour leurs frais : la créature qui leur faisait face se jeta sur eux, en mâcha une partie, en déchira une autre. Il ne restait plus que trois chiens n'ayant pas réussi à se relever après la charge de Harold, et un quatrième qui avait profité de l'affrontement pour s'enfuir.

[Galathée]

Une partie de la créature voulait poursuivre le chien en fuite, mais Harold la (ou se ?) contraignit à rester en arrière. Il allait vérifier que les chiens restés à terre étaient bien morts et puis il tenterait de reprendre sa forme originelle. Il ne doutait pas d'y parvenir, mais il voulait d'abord être sûr qu'il ne serait pas nécessaire de réitérer la métamorphose dans l'immédiat. Il avait aussi besoin d'un peu de temps, de se poser, de rassembler ses esprits, de retrouver son souffle, de tempérer la fureur. De redevenir lui-même en pensée, au mieux, avant de contraindre son corps.

[Vel Cheran]

Sa rage retomba peu à peu, et il se rendit alors compte qu'il n'avait jamais vraiment cessé d'être lui-même, si ce n'est qu'il avait simplement été une autre facette de lui-même qu'il ignorait jusqu'à présent.

Les chiens étendus au sol étaient tous morts ou en un état tel qu'ils ne feraient plus de mal à personne, leurs gémissements brisant le silence. Aucun danger à l'horizon : Harold put donc tenter de retrouver sa forme d'origine, celle qui lui était la plus familière. Il lui sembla alors que le processus prenait plus de temps que d'habitude, que son corps réagissait difficilement. Lorsqu'il en vint enfin à bout, il était vidé de ses forces, et des étoiles emplirent son champ de vision.

Lorsqu'il revint à lui, il était étendu sur le flanc, au milieu du champ de bataille.

[Galathée]

La première chose qu'il fit, en reprenant péniblement ses esprits, fut de se tâter le crâne d'une main hésitante, pour vérifier qu'il avait de nouveau des cheveux ordinaires, et non plus des cornes. Rassuré sur ce point, il réalisa qu'il était à la fois nu et couvert d'une gangue de sang séché — pas le sien, bien sûr — mais la métamorphose n'avait pas fait office de grand nettoyage. Peut-être pourrait-il trouver une combinaison de rechange dans leur campement, s'il existait encore. Il décida de se redresser et de chercher Edgar. Il n'était pas certain que son collègue n'avait pas pris ses jambes à son cou à défaut de profiter de son inconscience pour l'occire — par sécurité. S'il le trouvait et bien... il faudrait qu'il y ait quelques explications. Il savait que nombre de ses proches auraient réglé la chose de manière définitive, ou ne s'en seraient pas soucié le moins du monde, mais ce n'était pas encore son genre.

[Vel Cheran]

Edgar n'était plus sur son rocher, mais sa piste n'était pas compliqué à suivre car il laissait de fines gouttes de sang derrière lui : Harold le vit, appuyé à un arbre mort, une dizaine de mètres plus loin.

Des coups de feu retentirent en contrebas, et il vit deux silhouettes échanger des tirs, à un bon kilomètre de distance. Impossible d'en déceler l'identité, mais aucune des deux n'était un chien, c'était une certitude.

[Galathée]

Et dans l'immédiat, il décida de ne pas s'en soucier le moins du monde. Il aurait sans doute dû s'émouvoir de leur présence, mais tout avait viré à la folie depuis un certain temps, déjà, et il n'espérait plus trouver grande logique dans les événements à venir.
Puisque les duellistes étaient en contrebas, il leur faudrait un certain temps pour arriver jusqu'à eux, s'ils décidaient de le faire, et Edgar était mal en point. C'est donc vers lui qu'Harold se dirigea d'un bon pas, dans l'idée d'évaluer l'état de ses blessures et de soigner ce qu'il pouvait — il en avait les compétences, après tout, et leur médecin officiel avait eu la gorge arrachée. L'absence de Nora était beaucoup plus inquiétante... mais d'abord les vivants, ensuite les disparus. Les morts... C'était de toute façon trop tard, pour les morts.

[Vel Cheran]

En l'entendant arriver, Edgar leva les yeux et eu un mouvement de recul. Mais, de toute évidence, il ne pouvait pas fuir, aussi jaugea-t-il Harold du regard.

"N'approchez pas plus loin", lança-t-il d'une voix plus assurée que son apparence ne l'aurait laissé penser, "Je ne sais pas qui vous êtes, ni ce que vous avez fait de Harold, mais ne croyez pas que je serai une cible facile. Je me battrai jusqu'à la mort, s'il le faut."

Il ne quitta pas Harold des yeux et, sans ciller, se plaça lentement dans une posture martiale qui lui était familière, pied droit reculé et les mains en garde, à mi-hauteur. Harold savait, pour l'avoir vu s'entraîner, qu'il était un adversaire redoutable à mains nues. Redoutable pour un humain normalement constitué, évidemment.

[Galathée]

Harold s'était attendu à de la peur, à de la défiance, mais pas à ce qu'on le prenne carrément pour un imposteur. Il n'avança pas davantage et leva les mains en signe de paix.
" Edgar, c'est moi, il n'y a pas de... d'autre personne... ou chose... créature, je suppose, serait le bon terme. J'ai juste... hum... adopté une forme adaptée à nos ennuis."
C'était dément, bien sûr. Leur monde avait été régi par des lois déréglées, mais par des lois tout de même. Une métamorphose en démon n'en faisait pas partie.
" J'ai toujours pu... altérer ma forme... C'est ce qui m'a permis d'être aussi bon à notre boulot... Respirer des gaz mortels, affronter le froid, les flammes... Résister sous les torrents ou les avalanches... Ce qui s'est produit... Hé bien, c'est la même chose, en un peu plus spectaculaire."

[Vel Cheran]

Edgar plissa les yeux, réfléchissant aux paroles de Harold. Sans baisser sa garde, il répliqua :

"Peut-être. Ou peut-être que tu mens pour m'induire en erreur."

Il était couvert de plaies, même si la plupart ne semblaient pas trop sérieuses. Malgré cela, il ne faiblit pas d'un pouce.

"Voyons si ta mémoire est intacte, alors : comment nous sommes-nous rencontrés ?"

[Galathée]

Harold poussa un bref soupir.
" Très bien. C'était il y a un peu plus de quatre ans, au café du District 7, en fin de soirée. C'est Wayne qui m'avait parlé de toi. Il avait été ton instructeur et vu qu'il n'était plus en état de continuer le boulot, après... l'épisode de la mine... Il m'a conseillé d'aller te débaucher. Il savait que tu n'étais plus très heureux des missions qui t'étaient confiées dans le cadre de ton boulot et... Je t'ai offert une bière... Je pense que tu as pris une Grisemine, on a d'ailleurs plaisanté sur la quantité de moisissure qui flottait dans le fond. Je t'ai convaincu assez vite. Tu en avais vraiment ras le bol, de ta hiérarchie. Tu es venu deux jours à l'essai. On a fait l'intervention sur l'île engloutie... Et c'était vendu."

[Vel Cheran]

À ces mots, Edgar mit un genou à terre et s'appuya de nouveau sur le tronc.

"C'est bien toi... Je... Désolé, je suis complètement perdu, là... Et tu ferais mieux de te mettre quelque chose sur le dos, les nuits sont fraîches dans le coin."

[Galathée]

Harold accueillit le revirement d'Edgar avec un soulagement indicible, mais aussi imprévu. Il réalisa qu'il avait eu besoin de cette confiance, grand besoin, pour se rassurer sur ce qu'il était — le même — en dépit de ce qui s'était produit.
" Ce serait volontiers mais ma combinaison n'a pas survécu à mes frasques." répondit-il avant de s'agenouiller à son tour.
Il se permit de toucher l'épaule de son collègue, un peu incertain de sa réaction.
" Est-ce que ça va ?"
C'était sans doute juste l'épuisement, et Harold pouvait le comprendre, mais il préférait s'en assurer. Il faudrait ensuite qu'il en vienne à Nora, mais il ne savait toujours pas comment aborder la question, et quel en serait le résultat.

[Vel Cheran]

"Je crois que j'ai une côte cassée, et ça me fait un mal de chien... C'est le cas de le dire... Le reste, ça n'est que de la chair déchirée, ça cicatrisera."

Il grimaça, mais parvint à se remettre sur pied.

"On devrait avoir des fringues de rechange au campement, je crois..."