[Lieu] Quelque part au nord des Landes

[Voyageuse]

titre de quête à définir


Le soleil baissait à l'horizon, et ne tarderait pas à disparaître derrière l'immense chaîne de montagnes qui s'étirait à l'horizon ouest. Les Rocheuses du Dragon, que Gabriel apercevait au loin, étaient les montagnes les plus hautes de l'île, à tel point que ses sommets restaient enneigés même au coeur de l'été. C'étaient aussi les plus inhospitalières de l'île, il le savait. Et par conséquent les moins peuplées.
Mais la région où il se trouvait n'avait rien à leur envier sur ce plan-là : les Landes des Sirènes étaient un territoire tout aussi inhospitalier et désertique que les Rocheuses. C'était une région de marécages qui passait pour être l'une des plus dangereuses de l'île. On y trouvait notamment quelques tumulus anciens servant de refuge à des morts-vivants puissants, mais aussi des créatures dangereuses de toutes sortes, guenaudes, feux-follets, et certainement d'autres dont il n'imaginait même pas la nature. Sans compter quelques végétaux et vases animés, des sables mouvants, et les odeurs pestilentielles qui s'en dégageaient parfois. Même l'eau était parfois d'une qualité plus que douteuse. On n'aurait pu imaginer pire région pour voyager seul. C'était pourtant ce qu'il était en train de faire...

Quelque part au nord se trouvait la rivière qui l'avait amené sur ces terres hostiles, avec ses compagnons d'armes, après qu'ils aient débarqué d'un navire de la marine luménienne dans un petit port dont il ignoraient le nom. Quelque part à l'est, assez loin, devait se trouver la mer sur laquelle il avait navigué quelques jours plus tôt. A l'ouest, les montagnes, à plusieurs jours de marche. Et au sud, une étendue infinie de marécages hostiles. Et au centre de cette région maudite, rien, lui semblait-il. Le vide, le néant. Des moustiques et des moucherons, et un paysage parsemé de quelques rochers dénudés, de flaques d'eau noirâtre et d'herbes étranges.

[Cendres]

Gabriel se dirige vers les montagnes des Rocheuses du Dragon. Ses pensées trop lourdes qui l'empêchent de raisonner par leur poids d'images douloureuses, le poussent à l'éloignement de tout. La destination n'est qu'un prétexte. Au début, le rythme de sa marche soutenue lui permettait l'effacement de ses pensées. N'y le futur, n'y le passé sont dans son esprit, seulement le moment présent.
Sa marche est ardue, il s'enfonce dans la mousse et traverse des buissons de la zone marécageuse où résonnent des cris inquiétants. Les seules traces de vie qu'il voit sont des empreintes de bêtes. Gabriel appréhende de se retrouver face à une de ces créatures, d'autant que la nuit s'annonce. Il se concentre sur chaque pas qui le fait avancer. L'air pestilentiel dans ses narines l'écoeure, l'humidité du sol favorise l'apparition de minuscules moustiques qui s'introduisent dans sa cotte de mailles.
Son corps est douloureux, il s'arrête. Très vite il est confronté à la nature hostile et découvre vite les prochaines difficultés de la survie en ce milieu. Malgré l'absence apparente de ressources naturelles, il découvre des baies sauvages sur un arbuste.
"Il faut maintenant que je trouve un endroit pour prendre du repos ! "

[Voyageuse]

Trouver un endroit où se reposer, dans ce territoire humide et plat comme la main, était un objectif proche de l'impossible. Ni les mares putrides, ni rochers tourmentés, ni les petits buissons d'épineux ne semblaient un abri convaincant. Et le soleil disparut derrière les montagnes sans qu'il ait trouvé de refuge. Lentement, le ciel commença à s'obscurcir.
Il continua à cheminer, n'ayant guère d'autres choix. Puis, plus loin, devant lui, il lui sembla distinguer une haie légèrement sur sa droite, ou du moins quelques bouquets d'arbustes plus hauts que les autres. Il devina qu'ils bordaient un cours d'eau : il s'agissait probablement du prolongement de la rivière qui l'avait amené ici, dont le cours avait dû bifurquer.

[Cendres]

La nuit est tombée et seule la minime clarté des étoiles l'éclaire. Il aperçoit un cours d'eau et sur ses rives d'épais buissons. Il marche vers le fourré. Les broussailles sont nombreuses, denses et touffus suffisamment pour se reposer caché.
Gabriel a les traits tirés et des cernes lui creusent le visage. Il s'assoit et pense allumer un feu pour se réchauffer du trajet humide qu'il venait de faire. Il s'abstient, la lumière émise attirerait les bêtes et les créatures hostiles et ainsi être facilement débusqué. Ses baies vite absorbées, il regarde le cours d'eau et remarque qu'il ne provient pas d'une source.
"C'est un ruisseau, si je le suis il devrait me conduire à une rivière où je pourrais y trouver des poissons et quitter ce bourbier."
Gabriel se lève, enhardi par ses espérances.

[Voyageuse]

Il n'eut pas à marcher très longtemps : la rivière était toute proche, serpentant entre des bouquets d'arbres rabougris, des rochers désolés, et des zones de terre sombre craquelée qui pouvaient en réalité dissimuler des tourbières ou des sables mouvants.
Il s'agissait d'un cours d'eau relativement important, qui s'écoulait paresseusement vers le nord-est, rejoignant probablement la mer, et peut-être même le port où il avait débarqué. Il abritait certainement des poissons, des batraciens, et toute les formes de vie aquatique imaginables. Et les quelques buissons et bouquets d'arbres qui le bordaient le dissimuleraient efficacement des regards.

[Cendres]

Sans plus attendre, Gabriel se met en route avec prudence en marchant sur la tourbe. Le milieu est instable par la présence des sables mouvants qui peuvent se liquéfier en quelques secondes sous la contrainte d'un corps lourd. Il suit le lit du cours d'eau en s'arrêtant régulièrement pour épier les bruits. Le son de l'écoulement de l'eau s'élève. Le cours d'eau rejoint par d'autres ruisseaux, grossit et s'élargit. Le reflet argenté des poissons se nourrissant près de la surface de la rivière réveillent douloureusement son estomac vide. Il se place sur une des rives et d'un seul geste vif, il attrape avec sa main une truite-taureau, reconnaissable par une tête cornue imposante, fendue d'une grande bouche. Il l'éviscère, l'écaille et lève deux grands filets avec sa dague. Immédiatement, il mâche la chair crue. La peau est visqueuse, pas très agréable en bouche mais elle apaise sa faim. Après s'être nourri, il se tapit dans un coin des grands bosquets ; très vite la fatigue le rattrape.
Gabriel s'assoupit.

[Voyageuse]

Il fut réveillé un peu plus tard par une sensation diffuse de danger. Il était incapable de juger s'il avait dormi quelques minutes ou plusieurs heures, mais il se retrouva instantanément tous les sens en éveil. Quelque chose le mettait mal à l'aise. Il n'entendait pourtant pas le moindre bruit. Il y avait toujours la même odeur putride légère, et une légère brume montait du sol, obscurcissant sa vision : tout semblait flou et indistinct.
Puis il crut percevoir un léger bruit, une sorte de sifflement, et il tourna la tête. Le silence se fit, à nouveau, mais il aperçut, dans la brume, une pâle lueur tremblotante, peut-être la lumière d'une torche ou d'un petit feu, à moins d'une centaine de mètres de sa position.

[Cendres]

"Un bruit ? "
Gabriel se réveille, les sens aux aguets. Dans la brume dense, il distingue une lueur pâle et tremblotante.
"Est-ce une guenaude ?"
Un vieux soldat qui en avait combattue, décrivait des attaques frontales difficiles à parer. En effet, la guenaude, aveugle sa proie avec sa salive et la frappe avec de larges griffes.
"Non c'est autre chose...Un feu-follet ?"
Gabriel frissonne.
On dit de cette créature maléfique, qu'elle prend l'aspect d'une lanterne, pour attirer sa victime dans les sables mouvants et ainsi se délecter de sa mort lente.
"C'est peut- être un feu de camp ?"
Se dit-il avec espoir.
Immobile, en éveil, Gabriel attend.

[Voyageuse]

Il vit la lueur se déplacer, de quelques mètres, puis s'immobiliser. Ce n'était donc pas un feu de camp, mais ce pouvait être une torche. Ou bien un feu-follet. Il était impossible de le déterminer de là où il se trouvait.
Puis il crut entendre une voix appeler, et crut reconnaître une voix aiguë d'enfant, mais à peine audible, comme étouffée par la brume.
" A l'aide..."

[Cendres]

Un feu-follet ou un enfant ? Lequel des deux ?
Les sables mouvants sont sur la gauche de la rivière, le cri provient de la droite.
Décidé mais prudent, Gabriel se dirige en zigzaguant vers la probable lumière d'une torche.

[Voyageuse]

L'appel se fit à nouveau entendre, plus faible, presque un souffle. Il semblait venir de la même direction que la lumière, mais ce n'était pas certain : la brume brouillait les sons. Puis ce fut le silence tandis qu'il s'avançait, précautionneusement, sur une croûte de terre brune qui lui semblait un peu trop souple sous ses pas. C'était une zone de tourbière, mais peut-être dissimulait-elle des sables mouvants. Elle semblait supporter son poids. Pour le moment.
La lueur restait immobile, tremblotante, mais trop loin et trop masquée par la brume pour qu'il puisse l'identifier. Le sol redevint ferme et solide durant quelques pas, puis, à nouveau, il eut la sensation d'un sol souple sous ses pieds, comme si la croûte de terre solide était posée sur quelque chose de plus liquide.

[Cendres]

Gabriel évalue la situation. La lumière est son seul repère. Le sol instable suppose des sables mouvants.
Il se souvient d'un des conseils du vieux soldat donné aux jeunes recrues : "Si vous devez traverser des lises ! Marchez en piétinant rapidement sans relâche ! Cette technique empêchera de vous y enfoncer !"
Le pari est risqué. Sa main gauche touche la poignée de son épée pour le rassurer. La torche est peut-être l'appât d'un feu-follet.
Gabriel s'élance les jambes fléchies, en adoptant la technique du vétéran, vers l'unique clarté du mur de brume.

[Voyageuse]

La technique sembla fonctionner, au début. Gabriel avançait rapidement, et le contact entre son pied et le sol, à chaque foulée, était trop court pour que le sol se liquéfie sous ses pieds. Mais avancer rapidement signifiait ne pas prendre le temps de regarder où il mettait les pieds. Et sa jambe gauche s'enfonça soudain jusqu'aux genoux dans un liquide noirâtre -ou peut-être verdâtre, la nuit n'aidant guère à distinguer les couleurs.
Le pas suivant fut impossible à faire : sa botte semblait collée au fond de l'eau comme par une ventouse. Mais il y avait plus grave : il eut la nette sensation qu'il commençait à s'enfoncer.
Devant lui, la lueur paraissait un peu trop grande pour être celle d'une torche. Et il n'entendait plus le moindre bruit.

[Cendres]

Gabriel sort l'épée de son fourreau pendant que son corps s'enfonce. Pris au piège, il ne peut compter que sur son arme.
Cette épée était le seul lien qui l'unissait à ses parents décédés. Forgée par deux forgerons de races différentes, elle représentait la force de l'union. Sa longue lame en acier damassé à pans creux, permettait de frapper d'estoc et de taille. Une devise était gravée en lettres capitales sur une des gouttières : "PAS DE VERTU PLUS GRANDE QUE LA CLEMENCE". La garde était très large, légèrement incurvée et deux ergots étaient placés devant elle pour amortir les coups. La fusée faite pour deux mains, se terminait par un pommeau biconique. Un serpent enroulé autour de celui-ci, symbolisait la réincarnation de l'esprit d'un ancêtre.
Il respire lentement et se couche sur le dos en présentant son épée en garde haute.
Gabriel est prêt à se défendre.

[Voyageuse]

Les sables mouvants sous ses pieds étaient recouverts d'eau, et se coucher sur le dos aurait pu le noyer. Heureusement, il était assez grand pour que sa tête et le haut de son torse atteignent le sol plus ferme où il se trouvait l'instant d'avant. Il s'agissait malheureusement, là aussi, d'un sol mouvant, mais le fait d'être à demi-allongé l'empêchait de s'enfoncer davantage. Pour l'instant, du moins. Il sentait cependant que le moindre mouvement aggraverait sa situation.
La lumière s'approcha, légère, dansante, il entendit un léger sifflement, presque mélodieux, et il finit par distinguer un globe de lumière blanchâtre qui resta prudemment à bonne distance de lui et de son épée.

[Cendres]

Pour l'instant, la chose n'attaque pas, elle semble attendre. Gabriel garde autant d'air que possible dans ses poumons. Il flotte sur le dos, fait des petits mouvements circulaires avec ses jambes, pour les extirper de la lise. Il sait que les feux-follets regardent patiemment l'agonie de leur proie, ils la regardent s'user et se perdre terrifiée. Mais Gabriel est capable d'endurance physique et morale.
Prudemment, il continue ses petits gestes invisibles dans le bourbier.

[Voyageuse]

L'efficacité de ses petits gestes n'était pas flagrante. Il ne s'enfonçait pas, c'était l'essentiel. Mais il ne parvenait pas à s'extirper du bourbier. Il n'avançait pas. Et le feu follet semblait avoir l'éternité devant lui...
Au bout d'interminables minutes, ou peut-être plus d'une heure, il avait la sensation que sa jambe gauche était enfoncée moins profondément, mais son torse, lui l'était presque davantage. Il lui semblait avoir bougé de quelques pouces vers l'arrière. Le feu-follet n'avait toujours pas bougé. Et la brume s'épaississait.
Et c'est alors qu'il entendit, assez nettement, des voix provenant de l'autre côté de la rivière. Elles étaient trop éloignées pour qu'il comprenne quoi que ce soit à ce qui se disait, et trop assourdies, mais il s'agissait, indéniablement, de deux voix différentes, a priori humaines, au moins pour l'une d'entre elles.

[Cendres]

Gabriel regarde le halo lumineux impassible et froidement patient. Il comprend qu'il est le sujet, pris au piège, de l'histoire horrifique racontée par le vieux soldat. Sa pauvre tentative de fuite, lui rappelle sa fragilité malgré son exceptionnelle vitalité. Sa seule issue, sont les voix formées par de vraies cordes vocales, entendues pas loin.
Gabriel, toujours en garde, appelle en criant fort et plusieurs fois :
"A l'aide, à moi, ici un feux-follet !"

[Voyageuse]

Il n'entendit rien, aucune réponse, et resta plusieurs minutes à se débattre encore, progressant infiniment lentement vers la terre plus ferme qu'il devinait toute proche, et qui semblait pourtant inaccessible.
Puis il entendit un murmure de voix plus proche, marmonnant des paroles qu'il ne comprenait pas, rythmées. Quelque chose passa au-dessus de sa tête et alla se ficher en plein coeur du globe de lumière. Il n'identifia pas l'objet mais cela ressemblait à une petite dague. Le feu-follet, dans un sifflement de colère et de douleur, s'éloigna brusquement. Puis disparut d'un coup.
" Il est sûrement resté dans les parages, mais il devrait nous laisser tranquille, vous faites pas de souci ! On va vous aider à sortir de là. Bien sûr, vous finiriez par y arriver seul, vous n'êtes vraiment pas loin du bord... Mais j'parie qu'vous n'avez rien contre un coup de main pour aller plus vite ?"
La voix appartenait à un homme d'âge mûr et de grande taille, portant un gilet de cuir clouté sur des vêtements usagés. Il était accompagné d'une silhouette plus fluette, dont le capuchon dissimulait les traits, et d'un loup. Il tenait un long bâton, dont il lui tendit une extrémité.

[Cendres]

Le feux-follet disparaît soudain.
Gabriel entend une voix profonde et rassurante avec un accent rocailleux. Il agrippe le bâton tendu. Il apprécie la force de l'homme et l'utilise pour se hisser hors du bourbier. Enfin debout, il voit le visage souriant de l'homme qui vient de le secourir. A côté de lui, une personne cachée sous un manteau à capuchon, puis des yeux fixés sur lui, ceux d'un loup. Déconcerté par ce trio improbable, Gabriel dit enfin :
"Merci... Sans vous, sans votre aide, j'étais mort."

[Voyageuse]

" Oh, peut-être pas, répondit l'homme en haussant les épaules. Vous étiez tout près du bord, et vous aviez la bonne stratégie pour flotter. Vous aviez des chances d'en sortir... enfin, sauf si cette espèce de boule lumineuse se décidait à vous attaquer, peut-être. Mais ils le font rarement."
Il sourit plus largement.
" Pardon, je ne me suis pas présenté. Je m'appelle Noah, et voici mon apprentie, Anita. "
Il lui tendit une main chaleureuse, tout en précisant.
" Elle a bien failli se laisser piéger par ce feu follet elle aussi. Ils savent tellement bien s'y prendre... J'étais en train de lui expliquer quand on vous a entendu appeler."
La dénommée Anita avança d'un pas, tendant elle aussi la main.

[Cendres]

La jeune femme n'avait toujours pas parlé. Gabriel pense qu'il l'avait certainement entendue appeler à l'aide et que la dague lui appartenait. Ce geste de solidarité lui fait ressentir un sentiment de gratitude.
Il lui serre sa main en disant : "Moi c'est Gabriel ! Je vous remercie sincèrement."
Puis, il se tourne vers l'homme. "]e me suis perdu dans ces sables mouvants, c'est la première fois que je me confronte à un à feu-follet." Dit-il en saisissant sa main.

[Voyageuse]

Noah eut un sourire compatissant.
" C'est le cas de la plupart des voyageurs... Et ce secteur est particulièrement traître. Même en faisant abstraction des feux-follets ou autres créatures malfaisantes, l'endroit est truffé de sables mouvants. A moins de bien connaître les lieux, on a toutes les chances de finir enlisé au moindre pas hors des sentiers. On conseille toujours aux voyageurs de louer les services d'un guide, s'ils doivent s'enfoncer dans les terres... Enfin, quand on a des voyageurs. Ce qui n'arrive en réalité jamais."
La jeune fille qui l'accompagnait eut un rire cristallin.
" Ce que mon mentor veut dire, c'est qu'il se demande bien ce que vous pouvez faire tout seul perdu par ici ! fit-elle d'une voix étrangement rocailleuse.
- Anita... On ne t'a jamais appris la discrétion ?"
La jeune fille ne répondit rien et Gabriel la vit sourire sous son capuchon.

[Cendres]

Surpris et profondément heureux, Gabriel a le sentiment d'avoir rencontré deux personnes dont il peut devenir l'ami. La franche spontanéité de la jeune femme lui plaît tout de suite.
Déstabilisé par la question directe d'Anita, il se sent obligé de fournir des explications. Il n'aime pas les mensonges et encore moins de mentir. Il aurait pu se décharger du souvenir de la mort altruiste de sa soeur d'armes dans ses bras et en parallèle celui de l'envahissement de cette étrange jouissance guerrière révélée dans les combats. Mais il ne veut pas lui imposer cette image angoissante par son incontrôlable violence mêlée de douleur par la perte de son amie protectrice.
Noah, judicieusement, lui tend encore une perche, comme si une aptitude à pénétrer à sentir le tempérament des êtres, le renseignait sur son intention.
"Je suis luménien, j'étais engagé dans son armée. Mon régiment a combattu les morts-vivants à l'Est d'Hélonna. Je suis le seul survivant." Dit Gabriel.
Soudain, il se sent épuisé.

[Voyageuse]

Anita étouffa une exclamation, et Noah grimaça.
" Je suis sincèrement désolé pour vos compagnons... et pour vous. Cela a dû être affreux. C'est le combat dont nous avons entendu les échos ce matin, je présume. Comme tous ceux qui connaissent la région, je savais qu'il y avait un tumulus par là-bas, avec une puissante magie maléfique. C'est une bonne chose que Lumenis se soit enfin décidée à y envoyer l'armée... mais si vous êtes le seul survivant, c'est mauvais signe. Cela veut dire que vous avez été défaits et que l'entité malfaisante est toujours là-bas ? Est-ce qu'ils ont mal évalué la menace ? Ou peut-être qu'ils manquaient de paladins ? On dit qu'il y a pénurie depuis la dictature... "


HRP : jolies musiques (je n'avais pas pris le temps de lire ta signature jusque-là...)
La dictature dont il est question a eu lieu à Lumenis et s'est achevée 2 ans 1/2 plus tôt : un groupe de réfugiés de Mélandis, mené par un certain Morphea Nwalk, avait pris le pouvoir, et fait arrêter ou tuer la plupart des opposants ; ils sont restés un peu moins d'un an (voir chronologie)...

[Cendres]

"Lumenis n'a pas envoyé de Paladins, seulement de jeunes recrues. Notre avant-garde avait décimé leurs troupes avancées et nous pensions avoir gagné la bataille. J'étais intendant dans l'arrière-garde et nous fêtions notre victoire. Au cours de la soirée, alors que je préparais notre départ, des morts-vivants sont apparus dans le camp, comme par enchantement. Ce fut un massacre..."
Gabriel frissonne. Il se ressaisit.
"Je ne peux pas penser que Luménis nous a envoyés à la mort. Pourtant, nos forces n'étaient pas de taille, face à cet ennemi."





HRP : merci Voya !

[Voyageuse]

Noah secoua la tête.
" C'est incroyable qu'ils n'aient pas envoyé des paladins. Cela fait pourtant plusieurs mois qu'on leur dit que la menace grandit et qu'on réclame de l'aide... Ou peut-être qu'ils s'imaginent qu'il n'y a pas de morts-vivants hors de la Forêt Maudite ? Mais il est possible que nos messages ne soient pas arrivés à destination, pas à la bonne personne. Je connais les rouages de l'administration... Ou peut-être que vous étiez destinés à combattre une autre menace, qu'il y a eu confusion..."
Il semblait soucieux, ce qui creusait les rides de son visage. Gabriel jugea qu'il avait probablement une cinquantaine d'années.
" Vous avez eu de la chance de vous en tirer, remarqua Anita, gravement.
- Oui, c'est presque un miracle. Mais je parle, je parle, et vous êtes trempé... Si vous le souhaitez, vous êtes le bienvenu à notre campement. On fera un feu pour vous sécher. Vous allez attraper la mort, sinon : en cette saison les nuits sont fraiches.

[Cendres]

Les paroles de Noah troublent Gabriel.
La guerre des Plaines Brûlantes avait répondu aux intérêts stratégiques et commerciaux de Lumenis, mais l'avait aussi appauvri et affaibli avec de fortes pertes militaires. Son alliée, la Cité bénie de Manost, avait été vaincue et subissait des actes malveillants sans pouvoir y mettre fin. Malgré son apparente victoire, l'empereur Swaren sar Venuma de Melandis avait été forcé de prendre des mesures politiques inattendues, en offrant plus de libertés civiques pour renforcer son trône.
Gabriel s'interroge sur l'hypothèse de Noah d'une administration luménienne corrompue. Il fait le lien avec les évènements factieux que la Cité de Manost supporte actuellement. "Est-ce une machination de Melandis ?" Conçoit' il.
Mais dans l'instant, l'invitation de Noah est la bienvenue.
"J'accepte votre invitation de bon coeur !"

[Voyageuse]

" Suivez-nous... Et mettez bien les pieds exactement aux mêmes endroits que moi."
Noah les guida sur un chemin invisible aux yeux de Gabriel, mais qu'il semblait connaître. Il avançait lentement, prudemment, testant parfois le sol de son bâton, et ils firent quelques détours inattendus, tournant parfois presque le dos à la rivière. Le sol resta ferme sous leurs pieds, sans le moindre signe d'instabilité ou d'élasticité. Au bout de quelques minutes, ils atteignirent les bouquets d'arbre bordant le cours d'eau. Là, une barque à fond plat était amarrée.
" Nous campions de l'autre côté de la rivière, expliqua Noah. Nous y avons laissé une partie de nos affaires. Vous aviez de la chance, nous étions réveillés, en train de discuter... hum... disons que nous débattions de l'opportunité d'aller voir cette source de lumière.
- Oh, ça va...", bougonna Anita.
Si son capuchon toujours rabattu empêchait de voir ses traits, son ton était éloquent.
"D'accord, c'est toi qui avais raison, mais je ne pouvais pas savoir que c'était un feu-follet !
- Par défaut, une lumière dans ces marais est toujours un feu-follet. Personne n'y vit !", énonça Noah d'un ton sentencieux.
Il se tourna vers Gabriel, tandis qu'Anita grimpait lestement à bord.
" Prenez place... Enfin, à moins que vous n'ayez des choses à récupérer de ce côté-ci de la rivière ? Vous campiez quelques part ?"

[Cendres]

Au cours de la lente marche dans le labyrinthe des sables mouvants, Gabriel remarqua qu’Anita cachait son visage derrière son capuchon depuis leur rencontre. Est-ce par timidité ou pour dissimuler une cicatrice ? Pensa-t-il.
Il voit enfin une barque annonçant un lieu plus paisible où ils peuvent discuter en sécurité. Il se détend et sourit en écoutant la tentative de persuasion d’Anita que son mentor pare avec une riposte efficace. Il était évident que leur relation était faite d'un lien intime et confiant.
Noah s’adresse à lui.
«Je n’ai rien d’autre que mon épée, j’ai perdu mon sac dans la lise.»