[Ambre] Huis'Adra

[Galathée]

Ils sont là qui ? songea Harold en reconnaissant la voix d'Eleina.
Sa vue était bouchée par d'innombrables individus dans des tenues éblouissantes. Il dévisagea les plus proches d'entre eux, sans savoir ce qu'il cherchait. Des musiciens de jazz ? Des chiens à longs poils ? Les sbires d'Heldulfal (si tel était bien son nom) ? Quoi qu'il en soit, il fallait se tenir sur ses gardes — une seconde nature, en ce qui concernait Harold, son corps réagissait toujours avant son esprit — et il essaya de repérer où se trouvait sa cousine, ce serait déjà un premier pas. Il regretta pour la millième fois de ne pas avoir fait le détour par l'armurerie du palais. Mais au pire, il se servirait de ses crocs, de ses griffes, de ses cornes ou de ses tentacules, peu importe ce qui viendrait. Ce serait un beau bordel. Eventuellement.
Pour l'heure, "ils" étaient là et il fallait faire "attention". Il était bien avancé.

[Vel Cheran]

En entendant l'avertissement d'Eleina, Dominic tenta de se frayer un chemin à travers la foule pour la rejoindre, mais les passagers ne lui facilitaient pas la tâche, peu désireux de perdre leur place dans la file d'attente. Soudain, un coup de feu retentit dans la station de métro, ce qui eut pour effet de créer un mouvement de panique. Dans la cohue, l'un des individus à la peau grise se jeta sur Eleina avant qu'elle n'ait eu le temps de dégainer et tenta de la plaquer au sol. Son acolyte tentait de remonter le flot de passagers mais il reculait plus qu'il n'avançait et son dos se retrouva à quelques mètres de Harold.

Luonto sentit une douleur dans la hanche gauche, mais l'adrénaline prit le dessus. Au dernier moment, Missou était parvenu à mordre le pouce qui tenait le revolver, déviant suffisamment le coup pour sauver sa maîtresse. Son assaillant était désormais plié en deux et tentait de se reprendre après le coup de dague judicieusement placé qu'il venait de recevoir, mais déjà il cherchait des yeux son arme.

[Féérune]

Le sang... Douleur...

Luonto se reprit. Ce n'est qu'une petite blessure, Missou m'a sauvée !

Elle eut la présence d'esprit de murmurer à Eleina en thari - avec l'espoir que personne de l'assistance ne comprenne la langue :

- Ne le tue pas, il faudrait que nous puissions le faire parler...

[Voyageuse]

Eleina était trop occupée avec son propre agresseur pour se concentrer sur les paroles murmurées par Luonto, peu audibles dans la foule. Elle était furieuse de n'avoir pas dégainé plus rapidement, mais elle n'allait pas se laisser mettre en difficulté par ce genre de créature étrange : celles qu'elle avait affrontées en Utopia ne lui avaient posé aucune difficulté.
Elle fit mine de perdre l'équilibre, se laissant à demi tomber vers le sol comme son adversaire l'y incitait, puis elle pivota brusquement pour surprendre l'homme au teint gris et le déséquilibrer : elle comptait bien inverser leurs positions respectives et le plaquer au sol sous elle. Sa main droite serra un peu plus la boucle de sa ceinture, pour qu'elle devienne le sabre court qu'elle était en réalité. Idéalement, il fallait juste maîtriser l'individu, le tenir en respect avec sa lame sur la gorge, pour le capturer et le faire parler... Mais s'il s'avérait trop difficile à maîtriser physiquement, s'il devenait réellement dangereux, elle trancherait dans les chairs sans hésiter.

[Galathée]

Un coup de feu. A cause de son écho dans cet espace confiné, il était difficile d'en deviner la provenance exacte, mais juste après le cri d'Eleina, ça ne pouvait pas être une bonne chose. Peut-être Dominic avait-il été armé, mais Harold n'en savait rien. Les gens fuyaient, désormais, sans se soucier de bousculer ou renverser leurs voisins. Progresser à contre-courant était probablement la chose à faire. C'était incertain mais il n'y avait pas mille options. Harold carra donc les épaules, renforçant sa structure musculaire, et tenta d'avancer. Il lui fallut quelques secondes pour réaliser qu'un autre individu — un étranger — était en train de faire la même chose, quelques mètres devant lui. C'était peut-être un policier ou un médecin, mais il avait la peau curieusement grise, dénotant parmi les autres Ombriens. A tout hasard, Harold décida d'essayer de le rattraper. Une main sur son épaule suffirait pour en savoir davantage quant à ses intentions.

[Vel Cheran]

La tactique d'Eleina fonctionna parfaitement et pris son adversaire au dépourvu : il tomba lourdement au sol et se retrouva avec une lame de wakizashi sur la gorge. Mais se rendre ne semblait pas faire partie de ses prérogatives et il se débattit pour tenter de se libérer.

Son acolyte, sentant une main se poser sur son épaule pour l'arrêter, se retourna brusquement pour faire face à Harold. Avec un sourire, il lui lança un coup de griffes au visage tout en fouillant dans son imperméable avec l'autre main.

Malgré la douleur lancinante qui pulsait à sa hanche, Luonto parvint à se reprendre et à apercevoir Dominic, une rapière à la main, aux prises avec deux autres créatures. Il semblait s'en sortir plutôt bien, les tenant à distance toutes les deux tout en les empêchant de se saisir de leurs armes à feu - tout du moins pour l'instant.

[Voyageuse]

Eleina n'hésita qu'un instant. Elle ignorait combien ils étaient, et, dans sa position, elle ne pouvait pas savoir si ses camarades avaient besoin d'aide ni si les autres créatures étaient encore vivantes. Elle en avait repéré trois, et ils étaient suffisamment nombreux pour leur faire face, mais il n'était pas exclu qu'ils soient beaucoup plus nombreux. Elle ne pouvait pas s'éterniser à maintenir ainsi en respect l'un de ces êtres alors que ses cousins pouvaient avoir besoin de renfort.
D'un geste brusque, elle agrippa ses épaules, les souleva et lui frappa violemment la tête contre le sol, espérant l'assommer et non le tuer. Elle voulait pouvoir l'interroger plus tard. Il s'agissait simplement de le mettre hors d'état de nuire pour pouvoir aller se battre contre l'un de ses acolytes.

[Féérune]

Luonto ne réfléchit pas : elle lança la dague encore rouge du sang de son adversaire sur un des agresseurs de Dominic.

[Galathée]

Pas sympa, la bête.
Il était trop tard pour esquiver volontairement mais la métamorphose était un réflexe et Harold sentit la peau de son visage se modifier en un éclair pour le protéger du pire. Pour le reste, consciemment, il balança un coup de genou au hasard. Ce genre de rixe, ce n'était vraiment pas son genre... mais cela semblait être appelé à se répéter. Il espérait qu'il pourrait conserver forme humaine, cependant. Le contraire serait des plus embarrassants.

[Vel Cheran]

Malgré la violence du choc, l'adversaire d'Eleina continua de se débattre avec l'énergie du désespoir tout en crachant du sang. Au deuxième coup, ses yeux devinrent vitreux et il sombra dans l'inconscience.

La dague de Luonto fusa dans les airs et alla se ficher dans le dos d'une des créatures, qui se retourna avec un cri de fureur. Dominic profita de cet instant pour se fendre et lui transpercer la gorge. Il n'eut cependant pas le temps de dégager son arme et empoigna son second assaillant à mains nues.

De son côté, Harold put opérer une transformation - mais un peu tard. Il sentit sa peau se durcir juste après que les griffes de l'individu qui lui faisait face lui eût labouré la joue. Son coup de genou porta, en revanche, et il eut la satisfaction de voir sa cible se plier en deux, preuve que son anatomie n'était pas si éloignée de celle d'un humain.

[Voyageuse]

Eleina se redressa aussitôt, après un dernier regard pour s'assurer que son adversaire était bel et bien inconscient.

Un rapide coup d'oeil lui montra Dominic en train d'empoigner l'une de ces créatures. Il lui semblait de taille à se débrouiller seul. Harold était aux prises avec une autre, mais ne semblait pas, lui non plus, en position délicate vu la position de son adversaire. Luonto... la princesse semblait indemne et sans adversaire immédiat.

Elle chercha du regard une autre menace éventuelle : d'autres monstres pouvaient converger vers eux. Si elle n'en trouvait pas, elle irait prêter main-forte à Dominic ou Harold. Le premier avait peut-être davantage besoin d'aide dans l'immédiat, puisque l'adversaire d'Harold était déjà plié en deux.

[Féérune]

Luonto tâtonna ses poches, trouva son puukko et l'envoya dans la même direction que la dague, mais sur l'autre assaillant de Dominic.

- Eleina, ne bouge pas !

Il ne manquerait plus que j'atteigne une cousine trop pressée d'en découdre, pensa t-elle.

[Galathée]

Harold, lui, essaya de mettre son adversaire hors d'état de nuire. Il n'avait pas d'idée préconçue sur la méthode, mais il supposait qu'il pouvait déséquilibrer l'importun puis lui flanquer un bon coup de poing dans le visage (en essayant de ne pas le tuer... il n'allait pas tuer un type sous prétexte qu'il lui avait griffé le visage, c'était quand même un peu excessif). Quant à la balafre en question, bien qu'elle fut douloureuse, il ne s'en inquiétait pas outre mesure : il était capable de guérir de ce genre de blessures en quelques heures.
Ce que les autres faisaient, il ne s'en soucia guère.

[Vel Cheran]

Eleina ne vit personne d'autre dans les environs : les passagers avaient maintenant tous déguerpi, et aucun autre individu belliqueux ne s'était joint à eux.

Le corps-à-corps entre Dominic et son adversaire ne permit pas à Luonto de viser correctement, et elle manqua la cible. Mais Dominic parvint finalement à prendre le dessus et, dans un cri de rage, il prit son adversaire à bras le corps et le jeta violemment sur les rails, en contrebas.

Pour Harold, en revanche, la tâche s'avérait un peu plus ardue car, même s'il parvint à allonger une droite à son agresseur qui s'allongea de tout son long, celui-ci sembla reprendre un peu ses esprit et plongea la main dans sa gabardine pour saisir son revolver.

[Voyageuse]

Apparemment, Harold était le plus en difficulté de ses cousins -même si, en l'occurrence, la difficulté était certainement toute relative : il devrait se débarrasser de son agresseur sans trop de mal, de l'avis d'Eleina. Cependant, celui-ci semblait armé : elle le voyait plonger sa main dans sa poche.
Elle s'approcha rapidement, son sabre à la main, prête à trancher sans hésiter cette main qui sortirait l'arme, mais en veillant avant tout à ne pas blesser son cousin. Elle n'agirait que si elle s'apercevait qu'il ne réagissait pas rapidement : il serait stupide de le blesser en voulant l'aider. Il était certainement de taille à faire face seul : c'était un ambrien, après tout.

[Galathée]

HRP : on est si proches les uns des autres que ça ? Je pensais que la foule nous avait séparés...

Harold vit le mouvement de son adversaire et essaya de lui bloquer le poignet avant qu'il ne puisse réellement saisir l'arme, tout en pesant de tout son poids sur lui. Le type avait vraiment l'air d'avoir envie qu'on lui fasse mal. Peut-être qu'un deuxième coup de poing s'imposait, un peu plus fort. Ou alors il pouvait aussi lui arracher la gorge. Hum. Inapproprié.

[Féérune]

Luonto perdit un moment le fil de la bagarre, occupée à localiser son précieux puukko. Missou s'était désintéressé de la lutte, en apparence, mais il eut la présence d'esprit d'aller fienter sur l'un des assaillants. Peu de chances que cela change la face du monde, mais sait-on jamais... Le petit oiseau avait une haute idée de la faculté du monde animal à perturber l'activité humaine.

[Vel Cheran]

HRP : @Gal c'est pas forcément déconnant, quand il n'y a plus que vous sur le quai c'est rapide de couvrir la distance.


Avant qu'Eleina n'eût besoin d'intervenir, le deuxième coup de Harold allongea son adversaire pour le compte, distrait un instant par la fiente de Missou qui lui était tombée dans l’œil. Son revolver lui échappa et tomba sur le quai. Le silence retomba sur la scène, seulement entrecoupé par les halètement des quatre Ambriens, seuls à être encore debout.

Tandis que Dominic dégageait son épée du corps où elle était fichée, Missou parvint à localiser le puukko de sa maîtresse, qui avait rebondit contre un pilier avant de tomber au sol. L'arme étant de bonne facture, elle semblait intacte. Son cousin inspecta la sienne, en essuya la lame, puis toucha la poignée de sa main libre : la rapière rapetissa alors subitement et l'Ambrien n'eût plus en main que son harmonica, qu'il rangea dans sa poche.

[Voyageuse]

Comme Dominic, Eleina redonna immédiatement à son sabre son autre forme : il redevint une banale ceinture de cuir enserrant sa taille. Jetant un coup d'oeil circulaire autour d'elle, elle se détendit en constatant qu'ils étaient seuls, et apparemment tous indemnes.
" Est-ce que... tout le monde va bien ? ", demanda-t-elle, plus par acquis de conscience que par réelle inquiétude.
Tout en prononçant ces mots, elle se rapprocha de l'individu qu'elle s'était contentée d'assommer, et qui gisait au sol. Elle s'accroupit pour vérifier qu'il vivait encore. Il fallait espérer qu'il reprenne connaissance assez vite.
" Hum... on devrait peut-être l'emmener ailleurs... je ne sais pas ce que vous en pensez..."

[Féérune]

- Oui. Faisons ça. Il faut l'interroger.

Luonto récupéra son puukko et sa dague. Les mêmes êtres que ceux qui m'ont attaquée à Vehka... On l'a échappé belle, si ma mère n'était pas intervenue je ne sais quelle aurait été l'issue de cette attaque... Elle sourit à son petit oiseau.

- Tu vois, Missou, pas de corneilles cette fois-ci...

Missou haussa les épaules ; les rémiges supérieures de ses ailes frémirent. Il jeta un regard digne et légèrement ennuyé à sa maîtresse.

[Galathée]

" Le mien est vivant aussi, signala Harold en se relevant. Enfin je crois. J'ai essayé en tout cas."
Il haussa les épaules. Les autres avaient l'air habitués au massacre mais ce n'était pas son cas. Il avait toujours essayé de sauver les gens, pas de les occire. Mais bon, oeil pour oeil, tout ça, chacun avait son petit parcours, il n'allait pas chicaner. Mais il ne fallait pas compter sur lui pour achever un homme inconscient et à terre, même s'il était bizarre et qu'il avait de mauvaises intentions. Peut-être pouvait-il se contenter de l'attacher et de l'abandonner là. A bien y réfléchir, c'était sans doute mieux que d'être secoué par une Eleina revancharde qui voulait des réponses.
Diable, pourquoi avait-il fallu qu'il appartienne à cette famille de barbares ?
La violence appelait la violence, c'était assez évident vu leur situation.
Cela étant dit, il s'attribua le révolver qu'avait porté son agresseur. Pour l'auto-défense et la tranquillité d'esprit.

[Vel Cheran]

L'être qu'Eleina avait assommé semblait encore en vie. Dominic hocha la tête.

"Vous avez raison, prenez-en un et suivez-moi, avant qu'un métro n'arrive."

Sans attendre, il les entraîna dans le couloir, et manipula légèrement les ombres pour y créer une petite pièce où ils purent s'isoler. Il y avait plusieurs chaises et une table, éclairées par un faible néon au plafond.

"J'ai fait au plus simple", précisa-t-il, comme pour se justifier.

[Galathée]

Au plus simple, ou alors au plus cliché ? On aurait dit une salle d'interrogatoire dans un polar glauque, pas chez les policiers mais chez les truands. Harold n'était pas certain de savoir quelle méthode leur cousin avait l'intention d'utiliser, mais il était plus ou moins sûr qu'il n'allait pas aimer ça. Il se garda bien d'intervenir, cependant. Peut-être Luonto aurait-elle le pouvoir d'aller chercher l'information directement dans le crâne de la créature ? Elle semblait avoir un don pour les choses mentales.
Le Rebman n'y entendait rien. Il s'adossa au mur, bras croisés, et se demanda s'il était le bon flic, le mauvais flic, ou celui qui irait simplement chercher le café. Au besoin, il pouvait faire médecin légiste, mais ça n'aurait sans doute pas grand usage. Il poussa un bref soupir. Avec un peu de chance, au milieu du sang et des cris, il y aurait de l'information. Avec encore plus de chance, elle serait fiable. On pouvait toujours rêver.

[Féérune]

Le nez délicat de Luonto se froissa légèrement.

- Cousin Dominic ! la simplicité oui, le misérabilisme non !

Le rire aigrelet de Missou retentit avant de se figer : on tirait un des agresseurs dans la petite pièce. Que ces êtres sont laids ! il lissa pensivement les rémiges de son aile droite.

- Je suggère que l'on s'asseye et que l'on tente d'expliquer ces agressions... J'ai déjà été agressée, à Vehkataipale - je veux dire en Finlande terrestre du début du XXIème siècle selon les dates de ce temps - par de tels êtres. Ma mère, Flora, m'a sauvée... Je n'aurais très probablement pas pu m'en sortir sans elle, ou en tous cas pas si bien.

Luonto s'assit précautionneusement sur une des chaises et continua :

- Il semble que nous ayons tous été agressés, mais je crois que je suis la seule à l'avoir été par ce type d'individus. Interrogeons donc celui-ci !

[Voyageuse]

L'endroit rappela à Eleina la cache un peu glauque dans laquelle la Résistance se réunissait, quelque part au-dessus d'un centre commercial. Cela ne ressemblait en rien, en revanche, aux salles d'interrogatoire qu'elle avait connues : en Utopia, les services secrets interrogeaient leurs prisonniers dans des chambres d'hôpital immaculées avec tout le matériel nécessaire pour les contraindre à coopérer, tant physiquement que psychiquement. Elle se souvenait encore des seringues... et de l'immense difficulté de résister à l'envie de tout raconter, même pour elle. Heureusement, ils posaient rarement les questions qu'elle craignait le plus.

" On va l'interroger, oui, fit-elle sobrement. Les êtres bizarres qui se sont introduit dans mon ombre ne ressemblaient pas à celui-ci, mais ils avaient sûrement le même objectif, et la même origine."

L'interroger, c'était bien beau... mais comment ? Elle n'avait jamais fait ce genre de chose, s'étant plutôt retrouvée une fois ou deux du mauvais côté de la situation. Et elle était plus ou moins persuadée que Luonto ne saurait pas s'y prendre non plus. Harold, en revanche... peut-être. Il était taiseux, discret, mais pouvait très bien cacher un fond de brutalité. Et Dominic ? Bah, de toute façon, ses trois cousins étaient princes d'Ambre, et, à ce titre, ne devaient pas avoir un grand respect pour la vie des humains ordinaires. Mais elle pouvait peut-être leur suggérer une méthode sans brutalité excessive.

" Hum... il nous faut de l'eau glacée pour le réveiller... et puis... Dans mon ombre, on utilise une seringue avec un produit très efficace pour faire parler les gens. Je peux tenter de conjurer tout ça," fit-elle avec un haussement d'épaules.
Était-ce vraiment possible ? Elle n'en savait fichtrement rien, n'ayant jamais bien compris comment marchait son pouvoir, qu'elle n'avait guère expérimenté jusque-là. Et puis, le prisonnier pouvait être immunisé aux médicaments de son ombre. Mais elle décida qu'il valait mieux afficher une conviction absolue. Il n'avait pas besoin de savoir que le produit serait potentiellement inactif : l'effet psychologique pouvait suffire à délier les langues.

Sans attendre les réactions, elle se mit à conjurer un pot d'eau fraiche, puis se concentra sur ses souvenirs, évoquant mentalement le souvenir de la grosse seringue et du petit flacon de liquide à injecter, avec sa petite étiquette rose.

[Féérune]

Luonto et Missou s'impatientaient. La princesse jeta un coup d'oeil à ce qui semblait être un calendrier-horloge : 07/05/2021, 18h26

Elle compta mentalement 13 jours révolus et décida que 13 jours, c'était non seulement beaucoup, mais que c'était également un nombre porte-malheur.

Lentement elle leva la tête et matérialisa une porte. Et sortit, Missou sur l'épaule.

HRP : départ définitif de Luonto et Missou, désolée.

[Vel Cheran]

L'ombre présente ne semblait qu'assez peu éloignée d'Utopia technologiquement, ce qui sembla faciliter la tâche d'Eleina : en quelques minutes, elle parvint à matérialiser les produits désirés. La seringue, en particulier, était assez impressionnante, son aiguille mesurant presque la taille d'une main. À sa vue, leur prisonnier, réveillé après s'être pris de l'eau fraîche en plein visage, se mit à bafouiller, toute assurance envolée.

"Il faut croire que la peur des aiguilles est universelle", commenta Dominic, laconique. "Tu vas nous dire qui t'envoie, ou ça sera l'heure de la piqûre..."

"Jamais !" répondit la créature avec un regard fou.

Dominic haussa les épaules d'un air fataliste et défit sa ceinture, qu'il serra autour du bras du prisonnier. Eleina remplit la seringue comme prévu et en injecta le contenu dans l'une de ses veines saillantes, parvenant à percer l'étrange peau grise et huileuse.

"Je m'en fous de mourir ! J'emporterai mes secrets avec moi !" cracha la créature, mais on sentait à son ton qu'elle était quelque peu décontenancée par le calme de ses interlocuteurs.

"Ça prend combien de temps pour agir, d'habitude ?" s'enquit Dominic à l'intention d'Eleina.

[Voyageuse]

Eleina haussa les épaules.
" Pas très longtemps."
Sur ce genre de créature ? Elle n'en savait absolument rien. Ni même si le produit était efficace. Mais il fallait qu'elle ait l'air convaincue.
Dominic ne semblait pas s'inquiéter du départ subit de Luonto... et ne sachant trop qu'en penser elle-même, elle n'osa pas poser de question. Et puis, le prisonnier était éveillé : ils n'allaient pas parler devant lui de leurs affaires de famille.
" Tu ne vas pas mourir, annonça-t-elle à leur prisonnier au bout de quelques minutes. Tu vas juste nous expliquer d'où tu viens et qui t'a envoyé ici pour nous tuer. Et crois-moi, c'est mieux que tu le fasses maintenant. Si mes deux équipiers, là, se mettent en colère... ils peuvent faire très mal. Je préfère y aller en douceur. Tu crains des représailles si tu en dis trop ?"
Des questions anodines permettraient d'attendre que le produit fasse de l'effet.

[Galathée]

En voyant disparaître Luonto, Harold songea qu'il était désormais clair qu'ils se trouvaient davantage dans un épisode de Wonder Woman que dans les Quatre Fantastiques. Ce qui, d'un point de vue qualitatif, était sans doute mieux.

Eleina aborda le prisonnier de manière très classique — la femme sévère mais raisonnable flanquée des deux mecs prêts à cogner — mais il ne s'en offusqua guère. Si la méthode portait ces fruits, tant mieux. La créature semblait prête à mourir — suite logique des choses, ses compagnons en avaient pâti sur le quai du métro — mais sans doute le produit injecté par la jeune femme aurait-il raison de ses réserves. Ou pas. Il était bien placé pour savoir que la biologie d'un ombrien n'était pas celle d'un autre. Il avait étudié ces questions, pendant plusieurs années, au cours de ses pérégrinations récentes. Les organes n'étaient pas toujours placés au même endroit et n'avaient pas toujours les mêmes propriétés, les mêmes fonctions, les mêmes rythmes. Une hormone vitale pour les uns pouvait être absente du système des autres, un poison agir sur un coeur mais pas sur un autre, avec mille variations.

Mais bon, sans doute les pouvoirs magiques d'Eleina lui permettaient-ils de synthétiser la bonne substance juste parce qu'elle le voulait.

[Vel Cheran]

"Je ne crains rien !" siffla-t-il d'un ton rageur. "Vous pouvez toujours courir pour que je vous dise quoi que ce soit !"

Il semblait reprendre sa contenance au fur et à mesure que le temps passait.

"Jamais je ne parlerai ! Quelle que soit les menaces ! Jamais je ne vous dirai que nous avons été envoyés par Hedulfal pour vous éliminer ! Quant à vous dire que je viens de Tharsis, et que ma véritable apparence n'a rien à voir avec celle-là, haha, vous ne le saurez pas non plus ! Vous pouvez me torturer, me frapper, me menacer, me liquider, vous pouvez même retrouver ma famille et la massacrer, je ne dirai pas un mot ! Et surtout pas que nous savions que vous viendriez délivrer l'Ambrien qui est retenu prisonnier ici !"

Il partit dans un rire de dément, la tête rejetée en arrière. Dominic eut une moue amusée.

"Dommage qu'il ne soit pas coopératif."