[Lieu] Le Comptoir sur la Sombre

[Voyageuse]

Il avança, tant bien que mal, avec l'impression que ses pieds restaient collés à la terre moite, que la boue cherchait à le retenir. Il se sentait anormalement fatigué, un peu somnolent, et la musique des herbes avait repris de plus belle, envoûtante.
" Pourquoi t'es si pressé ?"
Une voix fluette venait de s'adresser à lui, semblant venir du sol, peut-être même d'un brin d'herbe. On aurait dit la voix d'un enfant, mais son propriétaire était invisible, au premier regard. Son ton était taquin, joueur.

[Cendres]

Les déplacements pour sortir des herbes lui demandèrent des efforts et de la volonté. La voix enfantine ne sembla pas hostile, mais plutôt malicieuse et vive. Curieux, Gabriel hésita et lui répondit tout en continuant à marcher vers l’appel du cor.
« Qui es-tu ? »

[Voyageuse]

" Moi ? Je suis... "
S'ensuivit un nom d'une longueur incroyable, avec tant de K et de X que Gabriel aurait bien incapable de le prononcer ou même de se le remémorer -il lui sembla d'ailleurs qu'il l'oubliait à l'instant même où il l'entendait.
" Et toi, tu es qui ? Et qu'est-ce que tu viens faire dans ma prairie ? Et pourquoi tu veux partir ?"
Le cor s'était tu. Du moins... il ne l'entendait plus. La musique de l'herbe se poursuivait, obsédante.

[Cendres]

Gabriel s’immobilisa, enchanté par la mélodie des herbes.
« Je suis Gabriel…je suis là parce que…je recherche…quatre jeunes gens. »

[Voyageuse]

" Oh... Et tu crois qu'ils sont dans la prairie ?"
La voix cristalline se mit à rire.
"Au milieu de tout ce vert, vois-tu un autre homme que toi ? Ou alors, peut-être qu'ils sont devenus verts comme l'herbe ? Peut-être que toi aussi tu vas devenir vert... Tu l'es déjà un petit peu, regarde-toi ! Bientôt, on ne te verra plus dans cette prairie ! Approche, je vais te dire un secret... "
Un souffle d'air un peu plus fort vit vibrer toute la prairie, et la voix lui sembla osciller. Le vent lui apporta, à nouveau, le son du cor, plus faible, à peine audible. Puis à nouveau un peu plus fort.

[Cendres]

Gabriel attiré par la petite voix enfantine et son secret amorça un déplacement. Dans un même temps, il entendit très distinctement le signalement sonore du cor qui le fit soudain réagir en le sortant de la transe hypnotique. Que faisait-il dans les herbes ? A qui parlait-il ? Le pied suspendu, il cria.
« Jules ! Continue à faire sonner ton cor, j’ai besoin de ton aide…une créature m’attire au milieu des herbes…la vois-tu ?… »

[Voyageuse]

Personne ne lui répondit. Juste le son du cor, à nouveau, un tout petit peu plus fort, mais tellement loin. Toujours sur sa droite. Cependant, son cri eut un effet notable : la musique des herbes s'atténua subitement, et lui parut moins belle, presque un peu dissonante. Et la prairie lui parut moins infinie : il devinait le monde au-delà du vert, de tout côté.
" Tu dois pas crier ! Tu fais mal !", s'exclama la petite voix enfantine d'un ton outré. Elle provenait... de nulle part. De l'herbe à ses pieds, d'un vert uniforme, vif, devant lequel son regard se brouillait sans qu'il puisse distinguer la présence d'un éventuel petit être dissimulé.

[Cendres]

Gabriel s’aperçut qu’il s’était de plus en plus éloigné du sentier. Il comprit que la créature invisible à la petite voix enfantine l’attirait certainement vers un piège. A cette pensée, il frissonna de peur. Il sortit l’épée magique pour balayer devant lui les herbes avec sa lame, tout en criant.
« Montre toi ! Je continuerai à crier jusqu’à que tu te montres devant-moi !!! »

[Voyageuse]

Il y eu des cris... du moins, c'était sûrement ainsi qu'il fallait interpréter le crissement aigu des herbes tout autour de lui. Mais la voix se tut. Et la prairie verte parut un peu plus terne... et moins vaste.
Le son du cor était plus net, moins lointain, et se déplacer devenait plus facile.
Il lui fallut quelques minutes seulement pour atteindre la bordure du pré, et il se dirigea, se fiant à son ouïe, vers le son du cor, qui s'était tu. Dans son empressement, il manqua s'enfoncer dans une mare de boue suspecte, mais il finit par apercevoir le groupe de ses compagnons dans le lointain, au-delà d'un terrain couvert de terre grise craquelée qui lui parut des plus suspecte. Il dut contourner, par prudence. Jules l'aperçut et l'encouragea à passer plus à droite encore... puis il finit par les rejoindre. Il était visiblement le dernier arrivé.

[Cendres]

Gabriel se mit au milieu du groupe et apprécia la présence de ses compagnons. Il se détendit. Il sourit à Jules et le remercia.
« Merci Jules, de m’avoir sorti du charme des herbes…sans toi…sans vous, j’étais perdu. »
Il s’adressa au capitaine.
« Avez-vous trouvé la piste des compagnons d’Augustin ? »

[Voyageuse]

Ils le regardèrent avec une certaine inquiétude.
" Quelles herbes ?..., commença Jules. Je n'ai rien fait....
- Peu importe, le coupa le capitaine. L'endroit rengorge de dangers... mais on n'a pas le temps de s'y attarder. Apparemment, ils ont pris une embarcation... "
Il désigna, à quelques pas plus au sud, quelques buissons épineux qui contrastaient avec la terre marécageuse à la végétation rare. Ils bordaient un petit cours d'eau. Un détail coloré attira le regard de Gabriel : quelques fils de laine de couleur rouge sombre s'étaient accrochés dans les ronces.
" Ici, le sol a été piétiné et quelque chose de lourd a été poussé, raclant la boue, jusqu'à l'eau, expliqua Jeanne.
- J'ai remonté un peu le cours d'eau. Vu la faible profondeur en amont, ils sont forcément allés vers l'aval... donc au sud, intervint Yvan. Ils cherchent sûrement à rejoindre le fleuve..."

[Cendres]

Déboussolé et interrogatif face aux événements récents, Gabriel s’adressa brusquement au capitaine et à Augustin.
« Combien d’empreintes de pas différentes avez-vous distinguées ? Étaient-ils seuls ou accompagnés ? Augustin… parmi vos compagnons lequel porte un vêtement de couleur rouge sombre ? Capitaine…ont-ils pris une embarcation de leur plein gré ? »

[Voyageuse]

" Swan et Judicaël sont toujours vêtus de rouge, oui...," répondit Augustin.
Il ne quittait pas le morceau de tissu des yeux.
" Il n'est pas vraiment possible de savoir combien ils étaient... Mais je dirais une petite dizaine, au maximum, sans doute moins. Il n'est pas possible de savoir s'ils agissaient de leur plein gré.
- Et puis, ça ne veut rien dire, de leur plein gré, observa le capitaine. Avec de la magie on fait faire n'importe quoi à n'importe qui...
- Il y a un autre morceau de tissu, là," remarqua Jules.
Il s'agissait cette fois de laine verte. Du même vert discret que les vêtements d'Anita.

HRP : désolée du retard... boulot puis malade...

[Cendres]

En avançant, Gabriel vit le morceau de vêtement d’Anita et releva effectivement une dizaine d’empreintes. «*Mais comment déterminer si c’était une fuite ou un enlèvement ?*»
« C’est un bout d’étoffe de la tunique d’Anita ! Il faut suivre la piste…Capitaine, où mène ce chenal naturel ? »



HRP : Voya, je comprends, ne sois pas inquiète. J’en profite pour t’envoyer plein d’énergie positive et un sort de protection.

[Voyageuse]

" Aucune idée...
- Il rejoint probablement le fleuve. Je ne sais pas s'il est navigable partout.
- Il l'est sans doute pour le genre d'embarcation en fond plat qu'ils semblent avoir utilisée...
- Vu la direction approximative, on peut imaginer qu'on rejoint le fleuve assez loin en amont du Comptoir... Enfin, sauf si le cours d'eau bifurque. Mais en tout cas, ça fait une bonne trotte d'ici, s'ils sont allés jusque-là.
- Ils auraient pu rejoindre Ithillion ? s'alarma Augustin.
- C'est impossible à savoir. Rien ne dit même qu'ils soient allés au bout du cours d'eau."

[Cendres]

Gabriel répondit précipitamment.
« Il faut en avoir le cœur net…nous devons les retrouver, il n’est peut-être pas trop tard…on peut les rattraper… Trouvons une embarcation ! »
Le jeune homme commença à chercher en regardant autour de lui.

[Voyageuse]

Autour de lui... il n'y avait pas grand-chose. De la boue marécageuse, de l'eau, des herbes sèches, une haie de buissons. Pas la moindre trace de civilisation, d'habitation, de vie, ni d'embarcation.
" On devrait suivre le chenal à pied, suggéra Jules. On ne sait pas où il va, de toute façon...
- Ils n'ont pas dû aller bien vite. Naviguer là-dessus, ça doit être compliqué. On ira presque aussi vite à pied, à mon avis.
- On irait plus vite avec les chevaux...
- On n'a aucune garantie que le terrain soit praticable pour eux. Est-ce que ça vaut la peine de retourner les chercher ?
Un corbeau vint se poser sur le bras de Jeanne.
" Le cours d'eau bifurque un peu plus loin. Il n'a vu personne, mais il semble y avoir, au-delà, quelque chose qui pourrait être habité, il devine une présence humaine. Il ne sait pas me dire à quelle distance ni me décrire ce que c'est...."

[Cendres]

Gabriel se demanda pourquoi Anita et ses compagnons avaient pris une embarcation au lieu de poursuivre à pied. Il garda son questionnement pour lui mais il répondit.
« Nous devrions laisser les chevaux et continuer à avancer sans perdre de temps jusqu’à l’habitation aperçue par le familier de Jeanne. »

[Voyageuse]

Le reste de la troupe partageait son point de vue, et ils se mirent aussitôt en route.
" Ça risque d'être loin, remarqua simplement le capitaine. Vu le temps mis par le corbeau....
- Il n'est pas capable de me dire."
Ils ne purent pas suivre le ruisseau très longtemps. Très rapidement, Yvan, qui cheminait en éclaireur, leva un bras pour les arrêter : devant eux se trouvait un sol de terre sèche craquelée à l'aspect peu engageant. Quelques coups de bâtons dans le sol firent craquer la mince couche de terre séchée, révélant, au-dessous, un sol extrêmement meuble dans lequel ils risquaient de s'enfoncer.
" Je ne connais pas cet endroit, soupira Jules. Je ne sais pas où trouver un passage... Peut-être qu'il faut traverser le cours d'eau... Ou juste contourner ce secteur. Ton corbeau ne sait pas mieux ?
- Il a du mal à deviner si le sol est dangereux, n'étant pas concerné par ce genre de problème...
- On doit bifurquer de quel côté, plus loin ?
- A droite... donc de l'autre côté de l'eau.
- Alors on traverse. L'eau n'est pas très profonde ici, trancha le capitaine.
Ce qu'ils firent, se mouillant jusqu'à la taille dans une eau saumâtre. Jules était passé en tête, sondant le fond à chaque pas pour ne pas risquer de s'enfoncer dans des sables mouvants, et ils le suivaient scrupuleusement, tâtant précautionneusement le sol sous l'eau.
Le terrain au-delà n'était guère plus praticable, et ils durent opter pour un long détour avant de retrouver un sol ferme.

HRP : désolée, toujours compliqué au boulot...

[Cendres]

Gabriel émit tout haut une hypothèse
« Capitaine, je pense qu’ils ont fait le choix d’utiliser une embarcation…parce qu’ils connaissent le terrain…et très certainement la région. Je crains que ce soit un enlèvement… »

HRP : avec le pic épidémique, je suis aussi prise par le travail

[Voyageuse]

Le corbeau s'envola à nouveau en éclaireur, et disparut à leurs yeux. Mais sa présence permettait à Jeanne de garder une bonne idée de la direction à suivre, qui leur était bien utile : le terrain les obligeait à de nombreux détours.
Ils finirent par arriver en vue d'une petite construction de terre séchée et de roseaux, dissimulée au milieu de quelques buissons. Le corbeau voleta vers eux et se posa sur le bras de Jeanne.
" Il n'y a personne en vue, traduisit-elle. Mais il ne sait pas ce qu'il y a à l'intérieur. Il n'y a aucune ouverture. Juste une porte, fermée, de l'autre côté de la cabane. Il n'a vue personne entrer ni sortir depuis qu'il est là."

[Cendres]

« Capitaine…qu’en pensez-vous ? Je crois que la piste du familier de Jeanne est la seule que nous puissions suivre. Nous devrions y aller…et les sauver… »

[Voyageuse]

Le capitaine fronça les sourcils.
" Ne nous emballons pas...
- On n'a aucune certitude sur leur présence là-bas... La cabane est peut-être vide... ou occupée par d'autres personnes.
- Et surtout, on ne sait pas ce qui nous y attend. On ne va pas foncer tête baisser. L'endroit peut être piégé.

[Cendres]

Gabriel était persuadé d’y retrouver Anita et il ne voulut pas passer à côté de l’occasion.
« Capitaine, c’est apparemment la seule piste à suivre…c’est notre seule chance. Je me propose d’y aller en éclaireur ».

[Voyageuse]

Le capitaine jeta un regard éloquent à son armure.
" Vous ne serez pas un éclaireur très discret... S'ils sont là, ils vont vous entendre.
- Je peux y aller, moi aussi. Je suis capable de détecter la magie... et même de me rendre invisible, hasarda Augustin.
- Oui mais... vous êtes un civil. Je ne peux pas vous laisser prendre des risques, répliqua le capitaine.
- Je peux aussi rendre quelqu'un d'autre invisible, insista le barde.
- Moi, je devrais y aller. Je saurais détecter les pièges, et je n'ai pas d'armure bruyante, proposa Jules.
- Ou alors j'envoie mon corbeau examiner les lieux... par la cheminée ?" suggéra à son tour Jeanne.

[Cendres]

« Je me porte volontaire ! Jeanne, votre familier risquerait d’être pris au piège dans une cheminée…Jules, c’est à moi que revient cette responsabilité et de prendre des risques…Augustin me rendra invisible et je vous laisserai mon armure. »

[Voyageuse]

Le capitaine semblait hésiter.
" Jules serait plus discret... Mais si vous y tenez... Il faudra vraiment faire très attention à ne pas les alerter.
- Enfin... S'ils sont là...
- Oui, s'ils sont là. J'espère qu'on ne gaspille pas un sortilège pour rien.
- J'espère surtout qu'il n'y a pas de piège. Avancez prudemment quand vous serez à proximité.
- Mais ne tergiversons pas davantage. Préparez-vous... Et maître Hérault, vous jetez votre sortilège dès qu'il a ôté son armure..

[Cendres]

Gabriel ôta son armure, tendit son épée longue à Augustin et garda l’arme magique plus courte. Il mit son baudrier sur son épaule et rentra dans le liquide saumâtre.
Le jeune guerrier était costaud et lourd, mais dès qu’il fut dans l’eau il ressentit une sensation de légèreté. Sa nage coulée montra sa réelle affinité avec l’eau.

[Voyageuse]

L'eau était particulièrement froide, mais il n'eut pas à nager très longtemps : la maison était toute proche. Une espèce de barque était attachée à un petit ponton de bois, juste devant la bâtisse. Bâtisse était d'ailleurs un bien grand mot : il s'agissait d'une modeste construction de paille et de terre, mi-grotte, mi-habitation, au toit si bas qu'elle devait être à demi creusée dans le sol. A moins qu'elle n'abrite des êtres de petite taille -ce qui n'aurait rien d'étonnant, au fond : les non-humains n'étaient pas si rares.
Quoiqu'il en soit, il n'apercevait aucune fenêtre par laquelle jeter discrètement un coup d'oeil -ce qui signifiait que personne à l'intérieur ne pouvait observer l'extérieur. Cela importait peu, au fond, puisque Augustin l'avait rendu invisible juste avant qu'il s'immerge.
Il n'y avait pour accès qu'une porte de bois, très basse, qui l'obligerait à se courber s'il devait la franchir. La porte était fermée et il n'entendait, depuis la rivière d'où il se trouvait, aucun bruit. Mais la cabane était à une dizaine de mètres de l'eau.

HRP : un petit D20 ?

[Cendres]

Gabriel se dirigea vers le ponton pour examiner la petite barque. Il en déduisit que c’était certainement celle qui avait transporté Anita et les proches d’Augustin. Il décida de s’introduire dans la bâtisse qui ressemblait à un repaire de Gobelins ou de Gnomes. Il retourna devant la petite porte et empoigna la barre de tirage vers lui, l’épée prête à toutes actions offensives ou défensives.


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