La Couronne de Cuivre

La neige avait continué à tomber pendant la nuit et elle formait désormais une mince couche qui masquait partiellement les mornes teintes du marécage. Autour du paladin, le campement était toujours aussi silencieux : sans doute certains colons commençaient-ils à s'activer, mais ils le faisaient en toute discrétion.
Alban le rejoignit en un temps record, sautant du chariot avant même d'avoir fermé son manteau. Il paraissait mortifié.
-S'il vous plait, messire, ne vous vengez pas d'Edgar, souffla-t-il d'un ton suppliant. Je vous jure qu'il plaisantait et qu'il disait ça affectueusement. Parce qu'il vous aime beaucoup, vous savez... En plus, il m'en voudrait énormément s'il savait que je l'ai trahi, ce qui n'était pas très honorable de ma part...
Bien évidemment, il était cramoisi, sans que le froid mordant soit réellement en cause.
-Si vous voulez, je lui dirai mine de rien que vous vous êtes réveillé super tôt... Du coup, il pensera que si vous vous levez tard les autres jours, c'est juste parce que les Académiciens vous y obligent, sous peine de vous imposer d'écrire des poèmes... Edgar comprendra que vous n'ayez pas eu le choix...

Hubert grimaça.
« Hum. C’est bien pour que tu n’aies pas d’ennuis. Marmotteval. Non mais, il mériterait que… je vais résister. Et ne vas pas lui inventer n’importe quoi. La seule raison pour laquelle je me réveille tard est que personne ne me signale que l’aube est venue. Ça fait des années que je ne dois plus me réveiller seul. J’ai toujours eu une enseigne pour venir frapper à ma porte de bon matin. A la Commanderie, c’était un mouvement de groupe, on ne pouvait pas le manquer… »
Il secoua la tête.
« Piètres excuses, tu as raison. Mais je vais essayer de reprendre de bonnes habitudes ! »

-Pourquoi ne demandez-vous pas à Ruth de vous réveiller, messire ? s'enquit l'écuyer tandis qu'ils se mettaient en marche. Elle se lève toujours très tôt et elle serait ravie de vous rendre ce service. Moi aussi, d'ailleurs, mais je ne voudrais pas la priver de ce plaisir.
Ils atteignirent la lisière orientale du bivouac, entre deux postes de sentinelles aux pieds desquelles brûlaient deux feux mourants. Face à eux, par-delà la plate et monotone étendue des maris, le ciel était un peu plus clair qu'ailleurs mais tout aussi gris. Hormis, peut-être, pour une très légère teinte pourpre...

" Tu as raison, je n'y avais pas songé. Je lui en parlerai tout à l'heure. Maintenant... Je ne t'en voudrai pas si tu files faire autre chose. Mais j'ai pris du retard sur mes dévotions, ces derniers temps, et je ne voudrais pas me mettre en froid avec mon dieu."
Pas au moment où nous sommes perdus au milieu de nulle part, dans cet environnement hostile, et que l'espoir nous est plus que jamais indispensable.
Il sourit à l'enfant, puis marcha jusqu'à la limite autorisée et ferma une seconde les paupières pour faire le calme en lui-même. Un Lathandrite ne pouvait prier les yeux fermés, bien sûr, car il devait contempler la merveilleuse lumière de l'aube, l'intégrer au fond de lui-même, et y puiser courage et sens.

Il n'entendit pas Alban s'éloigner. N'entendit pas non plus parler les sentinelles qui, l'ayant aperçu, devaient respecter ce moment pour lui précieux.
Il n'entendit rien, en fait, sinon parfois le craquement ténu du bois achevant de se consumer, le gémissement d'une subite bourasque de vent...
Puis, derrière lui, des sons discrets commencèrent à retentir : le campement s'éveillait.
Quand il ouvrit les yeux, il remarqua que l'écuyer n'avait pas bougé : il avait choisi de respecter la demande qu'il lui avait faite dans le chariot, même s'il devait s'ennuyer ferme. Il remarqua également Gabriel, venu prier à quelque distance, par-delà un duo de guetteurs.

Une fois les yeux ouverts, Hubert pria un moment, laissant venir les paroles au rythme de ses envies, de ses élans, formulées simplement, comme elles éclosaient à son esprit, sans structure, limite ou ordre consacré. Il n'avait jamais été féru des louanges toutes faites, des textes connus que l'habitude vidait de leur sens, des dévotions obligatoires. Il n'était pas clerc et sa relation à Lathandre était strictement privée. Il voyait la lumière poindre à l'horizon, en devinait l'éclat derrière les nuages, et il sentait l'énergie croître en lui à chaque seconde, au rythme du soleil.
S'il avait eu des doutes ou des craintes, des angoisses, des tourments, des peurs, des regrets, tous furent avalés par l'avènement de ce nouveau jour.
L'aube formidable.
Il expira, laissa un sourire bourgeonner sur ses lèvres et plein d'entrain, il fit volte-face vers le campement, comme régénéré, prêt à affronter tout et n'importe quoi.

Les bruits s'étaient encore accru, et il distingua sans doute possible la voix tonitruante d'Edgar, affairé à son fort peu populaire rôle de clairon matinal.
-Prier vous fait quelque chose, constata Alban qui l'observait avec attention. Ça se voit.
Il jeta un regard par dessus son épaule, en direction des chariots.
-Puis-je me retirer à présent, messire ? Messire Robert aura sans doute besoin de moi. Bon, d'accord, pas réellement besoin, mais...
Des bottes crissant dans la neige. Gabriel s'approchait, radieux.

" Je suis sûr qu'il a un réel besoin de toi, au contraire. File donc. Bonne journée à toi, si je ne te recroise pas avant la nuit."
Le paladin lui sourit puis, le voyant détaler, se tourna vers Gabriel qui approchait.
" Bonjour à vous, Gabriel. J'espère que l'aube vous a ravi, vous aussi. Mais vous semblez moins sensible que moi... Votre énergie se défie des heures."

-Oh, j'ai passé une soirée reposante, j'ai dormi comme un bébé la moitié de la nuit et j'ai consacré l'autre à guetter paisiblement des battements de tambours et les prémisses de l'aube. Les premiers ne sont pas venus, contrairement à la seconde... Un excellent début de journée, somme toute !
Soit il était particulièrement résistant, soit prier l'avait transcendé, car il semblait littéralement déborder d'énergie.
-Et vous, vous êtes tombé du lit ? C'est bien la première fois que je vous croise si tôt... A moins qu'il n'y ait eu un souci avec Alban ? C'est bien la première fois, aussi, que je le vois si matinalement à vos côtés et non à ceux de Robert.

Hubert ne put s'empêcher de grimacer à la mention de ses réveils tardifs. Décidément, il était temps de redresser la barre.
" J'ai dormi auprès d'Alban, oui, mais plutôt bien, je dois dire. Attendez-vous à me voir tôt tous les jours, désormais. Je ne peux pas vous laisser la primeur de l'aube chaque matin !"
Son expression se fit plus sérieuse.
" Mais vous avez parlé des tambours. Savez-vous précisément ce qu'il en est ? On m'a raconté que leur son était signe de danger, en ces contrées."

-Apparemment, les tribus de Paludiers cannibales ont pour habitude de jouer longuement et frénétiquement du tambour avant de partir en guerre ou en chasse. Par conséquent, nous avons tous été mis en garde sur ce bruit de sinistre augure. Mais si j'ai bien compris, une seule des sentinelles de la première vague l'a perçu : aucun de ses collègues ni aucun d'entre nous n'avions rien entendu de semblable. Peut-être le malheureux s'était-il à demi endormi ? Quoi qu'il en soit, nos officiers nous ont recommandé d'être plus attentifs que jamais, et ils ont eu bien raison : un excès de prudence ne nuit pas et vaut bien mieux qu'une négligence.

" Je suis bien d'accord, dit Hubert. Savez-vous si des tribus résident dans les environs ? Je dois dire que je sais peu de choses de ces gens... Sont-ils généralement sédentaires ? Varamyr a-t-il pu nous informer de... leur organisation, leurs armes ? Je sais que vous n'êtes pas officier, c'est à Robert que je devrais sans doute poser la question, mais... J'ai souvent l'impression d'avoir une longueur de retard sur la plupart des gens... C'est le problème quand on rejoint une expédition sur le point de partir."

-En l'occurrence, vous n'avez aucun retard. En tout cas, aucun sur moi. On nous a dit que certains étaient sédentaires, d'autres semi-nomades, d'autres totalement itinérants. On nous a expliqua que la majorité étaient méfiants, que quelques-uns étaient bienveillants, que quelques autres étaient irrémédiablement hostiles. Pour le reste, je ne sais rien de leurs méthodes martiales, sinon qu'ils aiment à tendre des embuscades, qu'ils sont doués à l'arc et que ce sont des guerriers à ne pas sous-estimer. Bref, des généralités ! Mais je suis certain que si la route devait nous amener à traverser le territoire d'une tribu de Paludiers, nos éclaireurs auraient repéré leurs traces et nous en auraient informés.

" Bien sûr. Il est certain qu'avec le type de terrain qui nous entoure, un coup de vent peut transporter le bruit sur de longues distances... et métamorphoser les sons. Pour autant, que vous le disiez, que cette sentinelle ait réellement entendu quelque chose. Scruter la nuit sans rien y voir est quelque chose d'épuisant, même pour l'esprit le plus tranquille... Alors pour peu qu'on ait l'âme fantasque..."
Il jeta un regard au campement.
" Mais nous parlons et le jour s'est levé. Je vous souhaite bon voyage aujourd'hui, Gabriel. Je vais me mettre en mouvement."
Il avait l'intention d'aller s'habiller convenablement — il portait après tout toujours sa tunique de nuit, puis de petit-déjeuner rapidement, enfin de retrouver Robert. Avec un petit passage par les écuries, pour voir si Ruth avait répété l'expérience de la veille.

Une fois n'est pas coutume, il arriva pour être servi parmi les premiers - et non les derniers - des colons. Il y avait là les sentinelles du groupe ayant pris ses fonctions au milieu de la nuit mais également beaucoup de familles, ainsi que plusieurs des conseillers. Il vit Ruth, mangeant aux côtés de sa mère, mais sitôt que celle-ci le repéra, elle termina son gruau d'une traite et fila ventre à terre. Ce que remarquant, Alban, qui se trouvait près de son maître, s'empressa de faire à son tour, laissant le chevalier pantois.

Hubert vint s'asseoir à côté de Robert, souriant et plein d'énergie. L'aube... Comment avait-il pu laisser passer tant d'aubes, alors qu'elles étaient vitales et fantastiques, l'emplissant d'une vigueur qu'il ne s'expliquait même pas ? Mais il en parlerait à Ruth dès qu'elle lui amènerait Grand Vent et plus jamais il ne serait le dernier à table.
" Bien le bonjour, Robert. J'espère que vous avez bien dormi et que vous êtes d'attaque pour cette nouvelle journée en selle. Alban vous a sans doute entretenu de notre nuit. Je pense que nous retenterons l'expérience dès ce soir. S'il est d'accord."

-Vous faire démolir le menton et l'entrejambe vous a plu, dirait-on ! fit joyeusement un Robert qui avait meilleure mine. Parce que vous imaginez bien que c'est la première information que m'a transmise Alban, avant de préciser qu'il avait attendu l'aube pour ce faire. Le reste, il n'a pas eu besoin de le dire : il avait l'air reposé et d'excellente humeur. Votre présence fait vraiment des miracles, Hubert, j'en serais presque jaloux ! Mais donc, si vous voulez dormir à nouveau avec lui et s'il le souhaite également, je n'y vois aucun inconvénient. Il faudra juste que je trouve comment vous rendre service à mon tour.
Il reposa sa tasse de thé.
-Sinon, j'ai dormi comme une souche, et l'idée de chevaucher à nouveau m'emplit d'entrain. Si ça n'était pas absolument irresponsable, j'aurais presque envie que quelques cannibales viennent nous dire bonjour, histoire de leur montrer de quel bois je me chauffe.

" C'est très irresponsable, Robert, car si les cannibales viennent, ils seront probablement trois cents. Mais je ne vous jette pas la pierre, je me sens moi aussi plutôt invulnérable, ce matin. J'espère que ce sentiment va se dissiper, cependant... Il ne faudrait pas qu'il nous rende téméraires..."
Il sourit.
" Mais si dormir avec Alban me garantit de contempler l'aube chaque jour, je suis amplement récompensé pour le service que je vous rends, et à lui. Surtout ne vous en inquiétez pas."

-Les amitiés solides se bâtissent et se perpétuent dans l'équité, et si vient un soir où vous êtes trop occupé ou trop fatigué, je m'assurerai que Ruth puisse malgré tout s'exercer.
Il s'étira.
-Ce soir, réunion d'état-major : il nous faut, par acquis de conscience, refaire le point sur notre organisation lorsque nous aurons pénétré en territoire inconnu. Sur les précautions à prendre, aussi, au cas où la neige se ferait plus présente. Aujourd'hui, pas de risques, mais demain... Qui sait.

" Excellente idée. Je pense que cela sera aussi bon pour le moral des hommes, de manière générale, de pouvoir se retrouver pour échanger dans un cadre un peu plus formel. Nous nous croisons beaucoup, à cheval, entre deux chariots, à la cantine, mais... Il sera bon d'écouter les doléances, les observations et les bonheurs de chacun."
Vu l'heure, les chances de croiser les membres de l'académie étaient nulles, mais Hubert ne put s'empêcher de les chercher un moment du regard, presque par réflexe. Il en revint cependant à son supérieur.
" Savez-vous quand nous nous pencherons sur ce trésor ? A présent que le vote a été proclamé, je dois avouer que je serais un peu dépité d'apprendre que l'objet qui pourrait nous sauver la vie croupit quelque part dans la pénombre d'un chariot."

-J'en serais également dépité, et pas qu'un peu. Mais il n'y a aucun risque cela arrive : les bardes et les mages sont réquisitionnés par Ignace pour procéder à l'inventaire et à l'examen de tous les objets magiques que nous avons ramenés du tumulus. Quant à la répartition, le Conseil la décidera ce soir ou demain soir, selon le temps que les opérations prendront.
Il observa Hubert et eut un sourire en coin.
-Une certaine personne avait proposé de vous offrir une sorte d'horloge, afin que vous puissiez être plus matinal. Elle va être déçue que ce ne soit plus de mise. Vous voir debout à l'aube va même la désespérer... L'honneur m'interdit de la dénoncer, mais je puis vous dire qu'elle pensait avoir trouvé votre seul réel défaut.

" Si vous saviez, Robert... Des défauts, je n'en manque pas. Mais ce vil personnage anonyme qui ose médire de moi ne paie rien pour attendre... Il a de la chance d'être protégé par des êtres puissants, sans quoi je lui aurais déjà botté l'arrière-train."
Il croisa les bras.
" Tout ça, c'est à cause de vos fichues réunions du conseil, qui m'ont forcé à monter la garde en début de nuit ! Si les rôles avaient été inversés, c'est vous qu'on traiterait de Robert le Loir Blanc, ou je ne sais quoi !"

-Ça sonne bien. Mais moins bien qu'Hubert de Marmotteval...
Il croisa les bras à son tour.
-Ceci dit, il me semble qu'il y a deux nuits, nos officiers nous ayant forcés à nous reposer, vous n'étiez pas de garde en début de nuit. Qu'est-ce qui vous a empêché, dès lors, d'être debout avant l'aurore ? Sont-ce des menaces des Académiciens ? Ou un naturel de lève-tard, comme le suboddore le fameux individu dont vous ne connaîtrez jamais le nom ?

" Je dois avouer que je ne me souviens plus vraiment de mon naturel... Mais je crains que l'infâme scélérat auquel vous faites référence ne voit juste. Cela dit, une fois que je suis debout, il me suffit d'un peu de lumière pour retrouver toute mon énergie, mais... s'extirper des draps glacés... avant le lever du soleil... Tous les jours... En hiver, ça va, mais en été, vous n'avez pas idée de l'heure indue à laquelle on arrache les paladins novices de leur couche. Je ne veux même plus y songer."
Il frissonna.
" Mais toute cette paresse est remisée aux oubliettes. Je me lèverai désormais tôt. Et pour éviter d'avoir à souffrir d'un réveil douloureux, je ne me coucherai plus du tout. Comme ça, plus de problèmes !"

-Autre solution : devenez paladin de Sunie. Ou de Milil. Il me semble que les suivants de ces divinités ont interdiction formelle de se lever avant midi. Ou de se coucher avant minuit, d'ailleurs : ainsi seriez-vous toujours sur le pont en cas d'attaque nocturne. Cela vaudra mieux que ne plus dormir : nos officiers, lassés d'avoir toujours l'un de nous sur le dos, finiraient par se mutiner.
Il se tourna... et sourit largement.
Suivant son regard, Hubert découvrit Edgar, lequel le dévisageait avec incrédulité. Il battit des paupières, secoua la tête, alla même jusqu'à se pincer mais dut se rendre à l'évidence : le paladin était bien là.
-Bonjour, mon capitaine ! finit-il par lancer.

" Bonjour Edgar ! Attends..."
Il s'éclaircit la gorge dans son poing.
" Mais qui vois-tu de grand matin ?
C'est bien Hubert le paladin,
Il s'est levé avant tes cris,
Trouve autre chose pour tes moqueries."
Il grimaça.
" Je crois que paladin de Milil, ça n'ira pas. Je ne suis pas très doué. Et puis ça n'existe même pas. Mais voilà, j'ai été bon, Edgar. Tu pourras railler mes prouesses artistiques. C'est plus raisonnable."

-Sauf votre respect, mon général... Qu'a bu le capitaine ? s'enquit l'ancien sergent.
-Du thé. Seulement du thé.
-Du thé... à la Maître Giovanni ?
-Non. Ou alors j'en ai bu moi aussi sans que cela produise les mêmes effets.
Edgar revint à Hubert.
-Mon capitaine, c'était très beau, et très bien tourné. Je ne vois vraiment aucune raison de vous railler. D'ailleurs, ce n'est vraiment pas mon genre de faire une chose pareille, surtout vous concernant. Je suis donc très peiné, je l'avoue, par vos insinuations...

" Oh... Mais je ne voulais pas... sous-entendre... Je suis désolé. Ne sois pas peiné. C'est... comme une insolation, je suppose."
Hubert se sentit rougir, réalisant subitement qu'il avait débité un certain nombre de bêtises depuis son arrivée à table.
" Je vais... aller chercher mon cheval... et commencer à superviser la mise en route... Si vous le voulez bien... Hum."
Il sourit à Edgar et se leva.
" Alternativement, je pourrais retourner me coucher une petite demi-heure... Mais ce serait mauvais pour ma réputation."

-Votre réputation est sans tâches, mon capitaine. Tout le monde sait qu'il faut du courage pour côtoyer les Académiciens et, surtout, pour survivre à une nuit dans leur chariot. Alors si on ajoute cela à toutes vos autres prouesses...
Robert, lui, l'observait avec un peu plus de circonspection.
-Si vraiment vous n'êtes pas dans votre assiette, Hubert, il faudra que nous rediscutions de la nuit prochaine.
Il sourit.
-Mais pour l'heure, je vais mettre ça sur les effets euphorisants de l'aube. Et je me réjouis de vous voir de si bonne humeur. Un peu de soleil au milieu des marais, cela ne peut être que bénéfique. Pour le reste... Faites à votre guise.

" Je suis en forme, Robert, ne vous inquiétez pas. Peut-être un peu de contrecoup, mais rien de méchant. Dès que je serai en selle, je serai revenu à moi-même et je serai aussi vigilant que de coutume."
Il avait envie d'ajouter une petite raillerie à l'intention d'Edgar, mais se retint par égard pour le chevalier qui avait l'air déstabilisé par les derniers instants. Il ne pouvait pas le blâmer.
" Je vais me mettre en mouvement. Je vous retrouverai avant le signal du départ."
Puis, sur un salut, il partit en direction des écuries. Une fois qu'il aurait retrouvé Ruth, il ne lui resterait plus qu'à enfourcher Grand Vent et observer les derniers préparatifs depuis son perchoir, avant une nouvelle journée de route, plus loin dans les marais.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une route oubliée