La Couronne de Cuivre

Kasumi ne se laissa pas impressionner par cette invite des plus abruptes et s'avança devant le groupe pour répondre d'un ton courtois qui tranchait avec celui du vendeur :

- Bonjour. En effet : nous souhaitons nous renseigner sur les prochains départs à destination d'Helonna ou de Dorrandin. Pour deux personnes.

Autant aller droit au but étant donné que l'homme ne semblait pas très enclin aux conversations ou autres badineries.

" Le prochain départ est demain. Le suivant, dans une veille et demie. Ils ne sont pas complets, ni l'un ni l'autre."
La réponse était donnée sur un ton blasé.
" Le navire de demain fait escale dans trois comptoirs au sud de Maztica, avant d'aller à Anarelis, Luménis, puis Manost, retour par les îles de Zakkhara. Le prochain fait l'itinéraire en sens inverse. C'est un voyage de presque trois mois jusqu'à Manost, deux bons mois pour Luménis. Compte tenu des frais de nourriture, d'hébergement, il vous en coûtera cent pièces d'or chacun."
Sylvia pâlit : la somme était conséquente. Solehad intervint :
" Je peux vous amener jusqu'à l'un des comptoirs de Zakkhara ou de Maztica par téléportation, j'imagine que Dan vous l'a dit... Avez-vous les dates de passage des navires précédents dans ces secteurs ?
- Je n'ai que des dates approximatives. Le navire du mois précédent devrais arriver à Maztica ces jours-ci, normalement, et il doit y passer trois jours. Ensuite, il lui faut un mois pour rejoindre Luménis, et deux bonnes veilles pour Manost. Alors que celui parti il y a un mois et demi..."
Il consulta la carte, sortit un parchemin couvert de chiffres, fronça les sourcils.
" Je pense qu'il doit en ce moment commencer la tournée des comptoirs des îles de Zakkhara. Il y passe une demi-veille. Ensuite, il lui faudra moins de deux veilles pour rejoindre les côtes est d'Hélonna, puis il partira sur Manost, Luménis, Anarelis, Maztica...."

Un départ de Chult était donc à exclure tant la somme était considérable et surtout parce que ce ne serait pas le trajet le plus court ou le plus rapide au vu des informations livrées par le vendeur de billets. Non, il semblait même que la chance soit avec eux et qu'ils puissent atteindre le navire en partance depuis Zakkhara, la meilleure option depuis le début en réalité.

- Combien coûte un trajet de deux places de Zakkhara aux côtes est d'Helonna ?

Cette destination avait en effet sa préférence : ils auraient ainsi le loisir de découvrir une partie de l'île des plus charmantes ou éventuellement reprendre un transport à partir de là si leurs finances le permettaient et au choix de Sylvia.

" Des îles de Zakkhara jusqu'à la côte est d'Hélonna, cela devrait coûter... je dirais aux alentours de vingt-cinq pièces d'or chacun, peut-être un peu moins. Mais ce n'est pas un trajet répertorié sur mes tableaux de tarifs : en fonction de ses cargaisons et de son besoin de ravitaillement, le navire ne fait pas obligatoirement escale dans les ports est d'Hélonna, il arrive qu'il rejoigne directement Manost. Bref, ce sera à négocier avec le capitaine une fois à bord, mais je ne pense pas que ça pose problème de rajouter une étape même s'il ne l'a pas planifiée...
- Je connais le comptoir de la Nouvelle-Athkatla, intervint Sohelad. Je suppose qu'il y passe en dernier ?
- Oui, c'est le plus grand et le plus à l'ouest des comptoirs Fééruniens. Il n'y est probablement pas encore arrivé, mais je ne peux pas vous dire la date exacte de son passage."

Il n'y avait donc pas vraiment de temps à perdre car le risque que le bateau quitte la péninsule s'aggravait à chaque jour qui passait. Kasumi se tourna vers le gnome :

- Apparemment, nous pourrons acheter nos billets directement en Zakkhara. La Nouvelle- Athkatla serait une destination idéale mais quand pensez-vous pouvoir nous mener là-bas ? Je m'en voudrais que nous manquions le passage du prochain navire...

Sohelad sourit.
" Oh, je peux vous amener là-bas à peu près n'importe quand. En mémorisant deux sorts de téléportation, je fais l'aller-retour dans la foulée. Ce ne sera pas pour aujourd'hui, toutefois : j'avais besoin d'autres sortilèges et je n'ai mémorisé qu'un seul sort. Mais je peux vous y amener dès demain matin si vous le souhaitez. et si Dan est d'accord...
- Pour ma part, je repars demain matin pour chez moi, également. Donc ne te sens pas tenu de retarder le départ pour me tenir compagnie...
- Demain matin ! Oh mais dans ce cas, on a des tonnes de choses à faire cet après-midi... Ca vous dérange si on vous laisse en tête à tête, jeunes gens ?"

Assurément, cela ne le dérangeait pas le moins du monde et il le fit savoir en se retenant bien de sourire de cette aubaine : dès le lendemain, ils se remettraient déjà en route et dans quelques jours ils pourraient prendre la mer pour Helonna... Quand les deux mages eurent pris congé, Kasumi saisit les deux mains de Sylvia, lui sourit et lui demanda joyeusement :

- Alors, qu'aurais-tu envie de faire sur ce petit bout de terre perdue entre la jungle et l'océan ? Veux-tu aller à la plage ? Ou au marché ?

" Hum... La plage, j'en rêve, surtout par cette chaleur, mais je ne suis pas sûre qu'il y en ait une. On est au bord de l'embouchure d'un fleuve, on ne peut approcher de la mer que sur des pontons par ici. Et j'ai l'impression que la jungle est très proche, au sud du village, et qu'elle va jusqu'à la mer. Peut-être qu'on aurait plus de chance vers le nord, en sortant de la ville... Et sinon, on se rabattra sur le marché ! J'espère juste qu'il n'y a pas de faune trop dangereuse dans les parages. Des serpents par exemple..."

Kasumi passa un bras autour de sa taille et l'entraîna tranquillement en direction du nord de la ville.

- Nous serons prudents et s'il n'y a pas de plages, ce ne sera que partie remise : Helonna en compte des centaines toutes magnifiques, tu verras !

La perspective d'être dérangés par des serpents était bien présente toutefois et il ne prendrait aucun risque dans cet environnement inconnu. D'autant qu'il avait préféré laisser ses armes dans la chambres du magicien.

Le front de mer était entièrement bâti sur pilotis, et ils durent sortir de la ville pour retrouver la terre ferme. De ce côté-ci de la ville, la jungle n'arrivait pas jusqu'à la mer, laissant la place à une vaste zone vierge de toute construction, à la végétation luxuriante et au sol traître : on s'enfonçait, par endroits, dans la boue jusqu'aux genoux. Il y avait fort à parier qu'il s'agissait d'une sorte de marécage, différent de ce à quoi ils étaient habitués.
Ils décidèrent de longer la mer au plus près, à la recherche de quelque chose ressemblant à une plage. Il y avait bien, quelques centaines de mètres plus loin, une fine bande de sable léché par les vagues, mais rien de vraiment spectaculaire. Kasumi comprit qu'ils étaient tout bonnement à marée haute et que la mer, en se retirant, laisserait apparaître le sable peu à peu. Ils pouvaient se baigner, cependant : l'eau était d'une clarté incroyable et à une température idéale.

Kasumi était quelque peu déçu de l'absence de jolie plage mais il n'était pas vraiment étonné : si le nord du fleuve avait été praticable, les colons y auraient certainement construit des cabanes plutôt que de s'en tenir à des constructions sur pilotis à même le fleuve.

Cependant, il y avait tout de même de quoi se rafraichir et passer un bon moment près de l'eau : le demi-elfe retira ses bottes et posa un pied dans l'eau pour éprouver la densité du sable. Avec une eau aussi pure et claire, il ne redoutait pas la présence de parasites : ils les verraient de loin.

Ils purent profiter un moment de la baignade. L'eau était à température idéale, si claire qu'on voyait les moindres détails du fond marin. Sylvia s'extasiait de tout, nageant et plongeant pour récolter des coquillages multicolores, tous plus beaux les uns que les autres. Personne d'autre ne se baignait, et ils avaient la mer pour eux tout seuls.
Ils finirent par avoir un début d'explication à l'absence totale de baigneurs : au bout de quelques dizaines de minutes, Kasumi vit apparaître un aileron triangulaire, nageoire d'un poisson de taille imposante, qui semblait se diriger vers eux. Rien ne prouvait que la bestiole ait des intentions belliqueuses, mais il était peut-être risqué de rester dans l'eau pour s'en assurer...

La baignade avait été en tous points agréable et rafraîchissante. Malgré les multiples distractions – dont Sylvia était bien évidemment la source principale – Kasumi était tout de même resté vigilant pour que sa compagne puisse profiter pleinement de la baignade, pour qu’ils ne soient pas dérangés, pour éviter tout danger. Cela ne l’empêcha pas de s’amuser lui aussi mais il fut donc le premier à repérer le poisson de grosse taille. Et même s’il n’était pas vraiment familier de l’environnement marin, il en avait assez appris pour savoir qu’il n’était pas dénué de prédateurs parfois dangereux. Il rappela donc Sylvia pour lui désigner l’animal et l’inciter à sortir ou au moins à se rapprocher du bord. De toute façon, une bonne partie de l’après-midi s’était écoulée et la jeune-femme voudrait peut-être profiter d’autres activités.

- J’ai bien peur de ne pas avoir amené de serviettes pour nous sécher, quel dommage !

" Pfff... Je suis sûre que tu l'as fait exprès," rétorqua la jeune femme avec bonne humeur.
Heureusement, ils était complètement seuls et pouvaient s'asseoir tranquillement sur la plage en attendant de sécher. La marée avait quelque peu baissé pendant leur baignade, leur laissant une bande de sable suffisamment large pour s'étendre s'ils le souhaitaient. Mais Sylvia semblait vouloir profiter un moment du marché. Et pour les dissuader de rester trop longtemps nus, des nuées d'insecte, dans les herbes hautes toutes proches, semblaient guetter une occasion de se ruer à leur rencontre. Même si l'aileron menaçant avait disparu à leur vue, ils ne tardèrent donc pas trop à s'habiller.

Le marché était coloré et exotique. On y vendait absolument de tout : des poissons fraîchement pêchés, des fruits aux formes et aux couleurs étranges, des céréales inconnues, des grains de café torréfiés, des graines de cacao, également, dont on leur fit découvrir la saveur douce-amère. Il y avait également des textiles de coton et de lin aux couleurs vives, des vêtements amples et fonctionnels, des instruments de musique étranges, des amulettes sensées protéger contre les maléfices ou les poisons, des statuettes et diverses sculptures, des outils, des ustensiles de cuisine en tout genre. Et également les produits fééruniens auxquels ils étaient habitués. le tout dans une joyeuse cohue où se mélangeaient les autochtones venus vendre leur production, reconnaissable à leur peau sombre et à leurs vêtements colorés, et les colons aux tenues plus sobres.

Le marché était en tout point dépaysant et Kasumi fut tenté d'acheter quelques colifichets en souvenir de leur bref passage à proximité des jungles de Chult.

- Comme ça nous pourrons instaurer comme tradition de rapporter quelque chose de chaque contrée que nous traversons !

Qu'importe que ce ne soit ni particulièrement utile ni franchement dans leurs standards esthétiques habituels : les prix étaient vraiment abordables et son regard fut attiré par un pendentif représentant un perroquet multicolore, un oiseau typique de cette contrée d'après ce qu'il en savait.

Le marchand, qui avait suivi son regard, lui certifia dans un commun un peu approximatif que ce pendentif, non seulement était une véritable oeuvre d'art, sculptée et peinte dans le bois dur et imputrescible de la mangrove toute proche, mais qu'il était en outre un véritable talisman, sensé protéger son porteur contre les venins de serpents. Vu le prix affiché, l'affirmation était douteuse, même si la vie par ici était nettement moins chère que dans leurs contrées du nord. Il restait qu'il s'agissait d'un très beau bijou. Sylvia décréta qu'elle souhaitait qu'ils aient tous les deux le même, affichant ainsi leur amour, et le marchand consentit une ristourne sur le deuxième pendentif.

Entre-temps, le soleil avait commencé à baisser à l'horizon, et le ciel juste au-dessus d'eux se voilait de gros nuages gris. L'heure du rendez-vous avec leur hôte n'allait pas tarder...
Quelques minutes plus tard, alors qu'ils commençaient à se diriger vers l'école de magie, les nuages crevèrent et des trombes d'eau se déversèrent du ciel, en une averse spectaculaire et torrentielle.

Kasumi était absolument ravi par leur achat et avait tenu à enfiler lui-même son médaillon à Sylvia, politesse qu'elle s'était empressé de lui retourner. Ils s'étaient ensuite attardé encore un peu sans prendre garde à la foule des locaux qui semblaient soudain s'être égaillée. C'est ainsi qu'ils se firent surprendre par la plus formidable et subite averse qu'ait jamais connu le rôdeur.

Eclatant d'un rire irrépressible, il entraîna sa fiancée au travers des ruelles de bois à la recherche d'un abri :

- Ce n'est pas faute d'avoir été prévenus ! Malheureusement, je n'ai pas oublié que les serviettes mais aussi le savon !

La remarque du rôdeur était fondée : certains des habitants de la cité ne se privaient pas, en effet, de sortir dans leur jardinet, en petite tenue, pour profiter de la douche providentielle tombée du ciel en se savonnant vigoureusement.
Le temps d'arriver devant la devanture d'un petit bar, Sylvia et Kasumi étaient déjà trempés comme des soupes. On les laissa néanmoins entrer, même si la patronne leva les yeux au ciel en voyant leur état. La plupart des locaux étaient déjà attablés, buvant du thé, de l'alcool, des jus de fruit, et ils durent se contenter d'une place debout, au bar, coincés entre un colosse en armure et un marchand à la peau noire.
La salle étant comble à cette heure -la cause en était évidente-, il leur fallut attendre vingt bonnes minutes leur consommation, et à peine l'eurent-ils entamée que la salle se vida, aussi vite qu'elle s'était remplie. Dehors, le soleil couchant chassait les dernières gouttes de pluie, illuminant l'atmosphère de ses lueurs orangées.

Malgré le rendez-vous, Kasumi prit le temps d'apprécier sa boisson : un cocktail légèrement alcoolisé mais extrêmement fruité et en tous points exotiques. Comme la pluie avait disparu aussi vite qu'elle était survenue et qu'il aurait été dommage de ne profiter ni du coucher de soleil maritime époustouflant, ni de la fraîcheur bienvenue, il entraîna sa compagne sur la petite terrasse devant le bar où ils purent en profiter quelques minutes tous les deux.

- C'est vraiment magnifique, tu ne trouves pas ?

" Oui..."
Sylvia hocha la tête sans le regarder, les yeux fixés sur l'horizon où le soleil, énorme boule rouge à demi masquée par la brume océane, jetait ses derniers rayons.
Elle glissa son bras derrière son dos et posa doucement la tête sur son épaule, rêveuse.
" Je n'ai jamais rien vu de tel... Est-ce qu'il y en a d'aussi beaux, dans ton île d'Hélonna ?"

Kasumi poussa un soupir et appuya sa tête contre celle de sa compagne tout en admirant le magnifique spectacle qu'ils avaient tous les deux sous les yeux.

- Il y en a beaucoup de différents : le ciel est changeant chaque jour de chaque saison. Je ne sais pas si nous en retrouverons d'aussi beau mais cela m'importe peu du moment que nous les regarderons ensemble.

Le soleil acheva sa course derrière quelques nuages s'étirant à l'horizon, puis une légère brise se leva, venant de la mer. Le ciel semblait s'assombrir plus vite que sous les latitudes qu'ils connaissaient mieux, et ils se hâtèrent vers l'école de magie.

Comme promis, Dan et Sohelad les attendaient à l'entrée de l'école de magie. Apparemment, il existait à l'intérieur une caféteria, qui permettait à ceux qui ne souhaitaient pas cuisiner eux-mêmes de se restaurer pour une somme modique. La cuisine était saine et savoureuse, même si les mets n'avaient pas la finesse de ceux d'Everaska. Et surtout, on pouvait y déguster quelques spécialités locales, qui s'avérèrent pour la plupart assez fortement épicées, pour d'autres des mélanges doux-amer assez improbables, surprenant pour les palais non habitués. La quasi-totalité des convives étaient des mages, de tous âges mais à dominante jeunes, puisque l'école, pour mériter son nom, se devait d'accueillir des élèves débutants en magie...

Kasumi fut quelque peu intimidé de se trouver ainsi mêlé à une dynamique qui n'était pas la sienne dans une institution dédiée à une matière qu'il était loin de comprendre. Mais cela rajoutait quelque part à l'exotisme de cette petite étape improvisée et il n'était pas si mécontent de se retrouver dans des situations où il était aussi inexpérimenté que Sylvia. Il avait suivi les conseils de leur hôte pour ce qui était du choix de plat mais il n'avait pas manqué de picorer dans ceux de ses compagnons juste pour s'en faire une petite idée. Il pouvait donc affirmer que la cuisine n'avait pas grand chose à voir avec tout ce qu'il avait pu connaître jusqu'ici, en Helonna, Everska ou ailleurs...

La soirée ne s'éternisa pas. Dan souhaitait se coucher tôt, et Sohelad lui emboîta le pas. Malgré leur âge, il y avait fort à parier qu'ils allaient discuter dans leur chambre jusqu'à une heure avancée de la nuit, comme des étudiants.
Kasumi et Sylvia n'eurent pas d'autre choix que de les suivre, pour ne pas courir le risque de se perdre dans les couloirs et les escaliers qui semblaient disparaître et réapparaître d'une façon qui échappait à leur compréhension de non-mages.

Leur chambre était petite et spartiate, mais le lit semblait confortable et c'était l'essentiel. Un broc d'eau tiède les attendait -la chaleur ambiante enlevait toute envie de se laver à l'eau chaude-, ainsi qu'une carafe, deux verres, et une corbeille de fruits sur une étagère. Sohelad avait tenu à honorer ses invités.

La journée leur avait largement laissé le temps de transpirer et le bain de mer avait laissé une fine pellicule de sel plutôt désagréable sur la peau de Kasumi aussi ne se fit-il pas prier pour faire bon usage d'une petite moitié du broc d'eau destiné aux ablutions. Il prit bien sûr un plaisir certain à le faire sans se soucier de pudeur bien qu'il ne s'agisse que d'un jeu innocent. Hors de question d'aller plus loin avec les deux mages qui se trouvaient juste dans la pièce d'à côté...

Sylvia ne semblait pas de cet avis... Et c'est elle qui l'obligea à aller plus loin que le jeun initialement prévu, le tout sans un bruit, sans une parole, discrètement, silencieusement. Les cloisons étaient en effet diablement fines, au point qu'ils entendaient le murmure de la conversation voisine, sans en comprendre un traître mot toutefois.
La moustiquaire leur donnant rapidement une sensation d'étouffement, ils se relevèrent ensuite, à tour de rôle, pour boire un peu d'eau, et découvrirent par la même occasion qu'il y avait réellement beaucoup de moustiques et autres insectes piqueurs : la parure de toile de leur lit n'avait pas un rôle uniquement décoratif. Et Sylvia semblait hélas les attirer davantage que Kasumi, à en juger par le nombre de piqûres récoltées durant l'après-midi. Et leur baume apaisant était loin de les faire disparaitre complètement.

La nuit fut donc ponctuée de démangeaisons -et de quelques câlins aussi-, et Kasumi se réveilla avec l'esprit un peu embrumé de celui qui a trop peu et trop mal dormi.

Mal dormi peut-être mais il était très loin d'avoir envie de se plaindre de la nuit malgré les désagréables démangeaisons. A leur réveil, Kasumi offrit généreusement à Sylvia de lui appliquer un peu de baume aux endroits les moins accessibles de son dos, parachevant ses soins de quelques baisers qui ne garantissaient peut-être pas une guérison plus rapide mais qui était tout de même bien agréables...

Toujours est-il qu'il n'était pas au mieux de sa forme et de son tonus au moment de rejoindre les deux mages. Les rôdeurs ne dépareilleraient toutefois peut-être pas tant que cela étant donné que les deux mages avaient passé une bonne partie de la nuit à bavarder.

Les deux mages avaient des cernes sous les yeux, Dan surtout : à son âge, les veillées trop tardives étaient plus difficilement récupérables. Sohelad semblait en meilleure forme, peut-être davantage habitué à ce train de vie s'il vivait parmi les étudiants.
Dan comptait partir sitôt le petit déjeuner avalé, et son collègue se proposait de téléporter Kasumi et Sylvia juste après. Ils firent donc rapidement leurs bagages avant de rejoindre, comme la veille, la caféteria où des mets variés les attendaient, classiques ou exotiques.
" Il faudra sortir de l'école de magie pour se téléporter. On risque des interférences, sinon... mais on ira dans le parc qui la jouxte, ça suffira. Bien sûr, si vous voulez prendre le temps de faire autre chose ce matin avant de partir, n'hésitez pas à me le dire. il faut simplement que je sois de retour en début d'après-midi, j'ai un cours à assurer."

Sans vouloir risquer de vexer son hôte, Kasumi était plutôt enclin à partir dès qu'il en aurait la possibilité : ils n'avaient certainement pas visité toute la ville en si peu de temps mais retarder le voyage d'une heure ou deux lui semblait inutile. De fait, il était impatient de savoir ce que la suite du voyage réserverait et de prendre ses dispositions pour l'embarquement en Zakkhara. Le demi-elfe réunit donc leurs bagages et se chargea de la plupart d'entre eux pendant que Sylvia rappelait Vif-Argent pour un nouveau transport qui ne ravirait certainement pas le pauvre faucon.

Il fallut de longues minutes avant que Vif-Argent les rejoigne, venant de la jungle au loin. Dan, de son côté, avait lui aussi rassemblé ses bagages, toujours aussi volumineux.
Ils se retrouvèrent tous à la sortie de l'école, et Sohelad aida son vieil ami à transporter ses affaires jusqu'au parc non loin. Les bagages des rôdeurs, malgré la présence de la toile offerte par Riniel, étaient moins lourds. Le mage, malgré son intention de faire l'aller-retour dans la foulée, emportait tout de même une petite sacoche avec un peu de matériel de secours, des vêtements, de la nourriture, au cas où le sort de téléportation échoue et l'oblige à passer une nuit loin de chez lui.

Dan se téléporta le premier, dans un éclair de lumière aveuglant, après un dernier signe d'adieu au reste de la petite troupe.
Puis ce fut leur tour : ils tendirent chacun une main pour créer le contact physique avec le gnome, tandis que Sylvia maintenait son faucon de son mieux contre son torse, et le mage se mit à incanter.
Quelques secondes après, ils se retrouvèrent devant un paysage tout autre, une plaine désertique évoquant vaguement le désert du calimshan ou l'Anauroch, en plus torride encore. Heureusement, la mer était toute proche, ils l'apercevaient depuis la petite éminence où ils avaient atterri.
" Tout droit devant se trouve le comptoir de la Nouvelle-Athkatla. Il est encore moins grand que celui que vous venez de quitter, car ces îles sont très peu peuplées. Et c'est très différent comme type de construction, ici c'est plutôt la brique... Mais même si c'est tout petit, vous y trouverez une petite auberge. Pour ma part, je vais repartir tout de suite. Bonne fin de voyage !

La Couronne de Cuivre

[Quête]Voyage d'Hélonna à Everaska (quête : Racines)