La Couronne de Cuivre

" Qu'ai-je d'autre à faire, dans ce trou ? demanda-t-il, acide. J'ai réfléchi et je me suis dit que ma réponse n'avait pas grande importance. Ils verront que vous êtes passée... Vous devez laisser des traces partout, et ils poseront des questions, et je n'ai pas l'intention de me laisser torturer pour garder des petits secrets dont vous ne me révélez rien, hormis que vous voulez mettre mes compatriotes à la porte de leur village en les menaçant d'un cataclysme imprécis ! Mettez-vous dans mes bottes ! Enfin... Si j'avais des bottes, imaginons. Pourquoi troquerais-je ce que je connais contre votre mystère ? Vous m'en demandez beaucoup trop. Et vous savez que vous m'en demandez trop."

Astrée soupira. Elle n'arriverait jamais à le convaincre, c'était peine perdue. Avait-elle laissé tant de traces ? Elle avait ôté ses vêtements plein de suie, elle marchait en chaussettes... non, il n'y aurait pas tant de traces. Pas plus que d'habitude, après tout : il y avait de temps en temps des personnes qui circulaient ici. Peut-être que personne ne poserait de question. Et qu'il n'aurait pas à parler...
" J'espère bien n'avoir pas laissé tant de traces que ça... Et je suis sincèrement désolée de ne pouvoir vous en dire plus."
Il était hors de question qu'il ait la moindre information complémentaire sur ce cataclysme.
" Je comprends bien que je vous en demande trop. C'est votre village, vos amis, votre vie, vous voulez préserver ça à tout prix. Mais... Qu'est-ce qui fait l'âme d'un village, d'une communauté, pour vous ? Les gens qui y vivent ou les murs qu'ils occupent ? Moi je considère qu'il vaut mieux sauver les vies, plutôt que risquer de les perdre en croyant pouvoir sauver des murs. Parce que les murs, on peut les reconstruire, ailleurs, peut-être tout simplement de l'autre côté de la muraille. Les vies, on ne peut pas... Mais bon, ça n'est que mon opinion, et je sais que les gens d'ici sont farouchement attachés à leur village."
Ils l'avaient défendu contre les orques, étaient fiers d'avoir vaincu, sans guère se soucier du coût en vies humaines apparemment. Jamais ils n'abandonneraient. Pouvait-elle espérer que cet homme-là ne partage pas complètement cet attachement tenace aux murs ?

" Vous ne comprenez pas qu'il ne peut pas y avoir de paix sans la destruction complète d'un des deux camps, dit l'humain. Mais je réalise aussi que je ne pourrai pas vous en faire prendre conscience."
Il resta silencieux un instant.
" Avez-vous du papier ou du parchemin ? Une plume ? Vous savez lire ?"

" Oui, je sais lire... Mais effectivement, je ne suis pas d'accord avec vous. La destruction complète de l'un des deux camps n'est pas nécessaire. Il suffit que l'un des deux camps s'en aille. Ils ne vous poursuivront pas si vous leur laissez leur vallée, en tout cas j'espère l'obtenir... Et eux, en revanche, ne peuvent pas partir, puisque leur harde est liée à cette vallée."
Papier et plume... il fallait remonter là-haut ? Elle aurait mieux fait de prendre son sac... mais elle ne pouvait pas prévoir...
" Bon, papier et plume ça va être compliqué, ils sont dans mon sac sur le toit. Sinon, si vous avez retrouvé ma bougie, je pourrais voir s'ils ont ça dans l'une des deux petites pièces que j'ai vues tout à l'heure... ou bien je peux trouver facilement un bout de charbon et de tissu. Ça vous suffirait ? Enfin, s'il faut vraiment que je refasse un aller-retour jusque là-haut, je le ferai...
Il y avait certainement des restes de combustibles charbonnés dans la cheminée. Et il pouvait écrire sur l'un des bouts de lin dans lequel elle enveloppait ses herbes. Elle avait heureusement sa sacoche de secours. Mais ce serait tout de même bien plus simple sur du papier.

" Les gens que vous allez chasser de chez eux ne pardonneront jamais. Ils reviendront mieux armés. Et les choses reprendront là où elles en étaient, souffla le prisonnier. Mais soit. Revenez demain nuit avec de quoi écrire. Je vous ferai la liste des gens à contacter et faire sortir de Montequine avant votre soi-disant catastrophe. C'est la condition de mon silence."

Il n'avait pas tort. Les humains allaient vouloir se venger, revenir... Il faudrait pouvoir fermer tous les accès à la vallée, en découvrir un nouveau qu'ils garderaient secret. Impossible. Non, décidément, la situation était sans issue. Quoique, si Neffen parvenait à ramener à la harde les centaures domestiques, ils seraient alors plus nombreux, peut-être trop, désormais, pour que les humains osent les menacer. Cela lui semblait la seule issue. L'inconnu ne pouvait évidemment pas savoir ce détail.
La requête de l'homme la prit un peu de court.
" Je ne comptais pas faire sortir uniquement les gens d'une liste, fit-elle remarquer. Mais si c'est la condition pour votre silence, je reviendrai demain soir.
Quelle étrange idée. Il avait dit, plus tôt, qu'il ne voulait la mort de personne. Alors... pourquoi une liste ? Aucune des explications qui lui venaient ne lui paraissait convenir. Voulait-il lui tendre un piège ? Non, après tout elle aurait pu avoir du papier sur elle. Et bien sûr, il ne croyait pas à cette catastrophe. Cela dit, elle ne pouvait guère l'en blâmer.
Elle hésita un instant, puis demanda.
" Pourrai-je connaître votre nom ? Si ce n'est pas trop indiscret ? Vous devez connaître le mien déjà j'imagine, Astrée."

La requête d'Astrée fit rire l'homme.
" Ne m'en veuillez pas, Astrée, mais si vous ignorez qui je suis, j'aimerais autant que les choses en restent ainsi. Contrairement à vous, je ne suis pas un étranger perdu dans une contrée lointaine, et je n'ai nul désir que vous approchiez ma famille ou mes amis au nom de votre bienveillance, ou je ne sais comment vous appelez le sentiment qui préside à vos actions... La justice peut-être, terme galvaudé s'il en est."
Elle l'entendit se rasseoir.
" A présent, laissez-moi. Je regrette déjà de m'être engagé à votre égard. Vous ne le méritez pas. Mais de nos jours, plus personne ne mérite grand chose, de toute façon."

" Je vous trouve bien désabusé. Mais vu les circonstances, je peux le comprendre j'imagine."
Elle soupira.
" Croyez-moi, j'aurais préféré ne pas faire peser ce poids sur vos épaules. Mais je reviendrai demain soir. Passez une bonne fin de nuit. Enfin, pas trop mauvaise...."
Il ne lui restait plus qu'à poursuivre son programme nocturne... et au minimum, rejoindre Neffen. Elle referma le volet et s'éloigna, à tâtons, pour se diriger vers la cheminée. Elle avait du mal à estimer le temps qu'elle avait passé dans cet endroit sinistre. Deux heures ? La moitié de la nuit ? Non, tout de même pas tant ?
A tâtons, elle rechercha sa corde, ses chaussures, son manteau roulé en boule posé dessus, quelque part dans la cheminée. Il fallait qu'elle veille à ne pas laisser de traces de suie aux alentours. Rien d'impossible. Elle n'avait guère dû laisser de traces de pas, et de toute façon, il devait faire assez sombre, même de jour, par ici.
Elle aurait bien voulu savoir qui il était. Il la connaissait... mais tant de personnes l'avaient entraperçues que rien ne prouvait qu'ils se soient déjà adressé la parole. Elle fouilla néanmoins dans sa mémoire, encore une fois, essayant de se remémorer une voix similaire.

La remontée fut, comme Astrée l'avait craint, beaucoup plus compliquée que la descente. La rôdeuse ne pouvait, en effet, plus s'aider de son poids pour progresser et elle glissa plus d'une fois. Le conduit semblait s'être resserré à certains endroits qu'elle trouva plus difficiles à franchir, et elle devina qu'elle terminerait l'ascension avec un certain nombre de bleus. Quand elle déboucha à l'extérieur, passablement exténuée et couverte d'une nouvelle couche de crasse graisseuse, le ciel était plombé, gris sombre, et il lui fut impossible d'estimer combien de temps s'était déroulé depuis sa descente. Mais de nombreuses lampes à huile étaient éteintes, dans la rue en contrebas, signe que la nuit devait être bien avancée.

Astrée décida de remettre à la nuit suivante son exploration d'autres quartiers de la ville. Il lui faudrait repérer, sans doute, les autres étables, peut-être dans le quartier est, longer les remparts pour essayer de visualiser la position des gardes et leur nombre. Cela dit, peut-être serait-ce inutile si Neffen parvenait à rallier à eux les centaures de la garde : eux sauraient tout ça. Ce qui allait rapidement devenir urgent, en revanche, c'était de trouver quelque chose ressemblant à un lavoir, ou au moins un point d'eau, pour essayer de débarrasser son manteau cette horrible odeur... et se laver elle-même, les cheveux en particulier. Il serait particulièrement malvenu de se faire repérer à l'odeur... Et elle devait remplir sa gourde, également. Et ses provisions ne dureraient pas indéfiniment. Mais elle verrait sur le chemin du retour. La priorité était de retrouver Neffen et de faire le point avec lui.
Elle secoua et frotta vigoureusement ses chaussures, ses chausses, son manteau, pour se débarrasser du maximum de suie, avant de redescendre du toit. Puis, avant de reprendre sa route en direction du quartier résidentiel où se trouvait Neffen, elle prit le temps d'explorer les environs de la prison, à la recherche d'une cachette d'où elle pourrait, le lendemain, surveiller l'entrée de la prison. Il y avait peut-être, ici aussi, des réserves de pailles non loin. A la rigueur, un hangar ou un entrepôt quelconque, même s'ils n'offraient pas le même confort.

Secouer ses vêtements n'eut aucun effet : de la graisse noire les imprégnait, vestige de mille cuissots de porc rôtis dans une cheminée qui ne devait être ramonée que tous les dix ans. Elle vit aussi que ses bottes laissaient des traces nettes dans la rue. S'il ne pleuvait pas rapidement, on pourrait la suivre facilement pendant un certain temps. Si emprunter des chemins boueux ou terreux était possible à certains endroits, la majeure partie des rues du village était couverte de pavés qui ne lui offriraient pas cette facilité. Il était déjà probable que des empreintes maculent la cour de la prison, peut-être même les murs. L'un dans l'autre, un change complet était nécessaire si elle voulait conserver un minimum de discrétion.

Astrée grimaça en voyant les premières traces, et s'arrêta aussitôt. Elle n'avait malheureusement pas de bottes de rechange. Et ses vêtements dégageaient une odeur perceptible à des mètres à la ronde, qui ne partirait qu'avec de l'eau et du savon. Le plus urgent, avant de se trouver une cachette, était de remédier à tout ça.
Frissonnant dans le froid de la nuit, elle ôta rapidement ses habits les plus sales, enfila une tenue propre et fit un paquet de tous ses vêtements imbibés de suie, y compris son manteau, roulés en boule à l'envers pour essayer d'en dissimuler l'odeur et de ne pas salir le reste de son paquetage. A défaut de manteau, elle avait une cape, à peu près étanche mais pas très chaude, et un gros pull de laine. Mais les nuits étaient fraîches à cette altitude. Si ça ne suffisait pas... et bien elle pouvait toujours percer sa deuxième couverture, celle achetée à Rohan pour protéger Prince des regards, d'un trou pour la tête, et s'en faire un vêtement de fortune. Elle préféra ne pas imaginer l'allure qu'elle aurait. L'essentiel était d'avoir chaud, et puis de toute façon personne ne la verrait.
Quant aux bottes, il lui faudrait simplement, comme elle l'avait fait pour les sabots de Byron quelques nuits plus tôt, enfiler par-dessus ses chaussettes les plus larges, ou à défaut les envelopper dans un bout d'étoffe, jusqu'à ce qu'elle trouve de l'eau.
Une fois propre, débarrassée de l'odeur et de la saleté, elle s'efforça de nettoyer les traces les plus visibles, puis se mit en quête d'une cachette pour installer son point de guet pour le lendemain.

Les petites granges ne manquaient pas, mais aucune ne donnait directement sur la prison et ne constituerait de point d'observation adéquat. Il y avait bien le grenier de l'atelier d'un menuisier, mais il était manifeste qu'il y travaillait quotidiennement, et elle ne pouvait pas savoir à quelle fréquence il montait à l'étage. Une des maisons proches avait aussi un toit plat, mais elle serait alors exposée aux intempéries. La dernière possibilité semblait être un hangar de stockage, où des fenêtres paraissaient placées à la bonne hauteur, mais il était fermé d'un cadenas et Astrée devrait chercher un moyen de s'y introduire si elle voulait tenter sa chance.

Les granges seraient parfaites... pour faire une sieste dans la journée comme la veille. Ou pour achever sa nuit. Mais elle ne savait pas s'il lui serait possible de gagner un meilleur point d'observation en début de matinée, donc mieux valait trouver tout de suite l'emplacement idéal.
Le toit plat ne l'enthousiasmait pas : il suffisait que quelqu'un lève les yeux pour la voir, et peut-être était-il visible depuis d'autres maisons placées un peu plus en hauteur. Elle décida de rechercher en priorité un moyen de s'introduire dans le hangar de stockage, en espérant y trouver une cachette sûre au cas où quelqu'un y entre dans la journée. Peut-être y avait-il également moyen de se cacher dans le grenier du menuisier : il fallait vérifier ce qu'il contenait, s'il s'agissait de vieux objets sans utilité il était peu probable que l'homme y monte tous les jours. En dernier recours, elle tenterait le toit.

Toutes les issues classiques du hangar étaient fermées, mais il y avait plusieurs fenêtres, dont deux entrouvertes, qu'il n'était pas impossible d'atteindre au prix d'un peu d'escalade ou en empilant des caisses et des tonneaux de manière artistique. Une fois à l'intérieur, la rôdeuse trouva principalement des étoffes et des peaux, nombreuses, soigneusement rangées, empilées, enroulées, empaquetées, par couleur et matière, sur de nombreuses étagères. Il n'y avait qu'un seul étage, mais certaines des structures en bois sur lesquelles étaient placées les rouleaux de tissu montaient à plus de trois mètres de hauteur. Des échelles étaient adossées au mur près de l'entrée, afin de pouvoir y accéder.
L'endroit était propre et sain, et de nombreux matous y rôdaient, traquant le rongeur trop gourmand. Des pièges visant le même genre de visiteurs étaient disposés un peu partout.

Astrée fit le tour des lieux, et estima qu'il lui serait assez facile de se dissimuler derrière des étagères en cas d'arrivée impromptue d'un visiteur. En outre, les fenêtres lui offraient une issue de secours en cas de besoin... enfin, pour peu qu'elles donnent sur une ruelle peu fréquentée. Pour le reste de la nuit, elle s'installerait tout au fond de la pièce, en se dissimulant soigneusement. Et elle se posterait, le lendemain matin, à un endroit depuis lequel elle pourrait apercevoir l'entrée de la prison.
Puisqu'elle savait désormais où elle passerait la nuit, elle pouvait se concentrer sur son objectif suivant : rejoindre Neffen. Et éventuellement repérer un point d'eau qu'elle pourrait utiliser au retour pour laver ses vêtements, au moins son manteau. Elle allait de toute façon se salir à nouveau dès la nuit suivante.

Elle ressortit de l'entrepôt par la même fenêtre qu'à l'aller, et se dirigea vers le quartier résidentiel où Neffen était hébergé. Si toutefois il y était toujours. Il fallait qu'elle lui explique les événements des dernières heures. Qu'elle avoue qu'elle en avait trop dit, que ses paroles mettaient en danger la harde. Mais avait-elle eu réellement le choix ? Elle aurait dû, peut-être, ne rien dire, se laisser dénoncer, et fuir. Peut-être aurait-elle réussi à revenir avant l'arrivée des orques pour les prévenir, au dernier moment, et leur permettre de sauver leurs vies. Mais comme le disait l'inconnu, ils seraient revenus, ensuite, se venger, et la guerre aurait continué. Et puis, on l'aurait certainement empêchée de revenir donner l'alerte. Non, plus elle y réfléchissait, plus elle se disait qu'elle n'avait pas vraiment d'autre possibilité que de lui annoncer la catastrophe, si elle voulait espérer parvenir à sauver des vies humaines... Ce qui n'était pas forcément l'objectif de Neffen. Quoiqu'il en soit, elle avait eu bien de la chance que l'inconnu accepte de ne pas parler. Il changerait peut-être d'avis. Ils devaient faire vite...

Astrée retourna donc jusqu'à la maison où avait logé Neffen la veille, cheminant le long des rues endormies, dans une Montequine silencieuse où n'erraient que les souris, les chats et les oiseaux de nuit. Il ne pleuvait pas mais le ciel restait couvert. Arrivant devant la bâtisse, la rôdeuse la trouva plongée dans l'ombre. Elle pouvait à nouveau gagner le jardin arrière, retrouver le chien et tenter l'escalade... Mais cette fois, Prince était avec elle et le shaman dormait probablement, il lui faudrait donc d'abord trouver le moyen discret mais efficace de le réveiller.

Astrée se glissa sans bruit derrière la maison, réfléchissant aux moyens de réveiller Neffen. L'idéal serait que Prince puisse entrer dans la maison, bien sûr, et parvenir à la chambre, mais vu la configuration des lieux, cela risquait d'être difficile. A moins que Neffen ait mal fermé sa fenêtre en prévision de sa visite ? Peu probable.
Elle décida néanmoins d'envoyer d'abord Prince en reconnaissance, si toutefois il y voyait suffisamment pour ça. Il trouverait peut-être une ouverture au grenier. Et même s'il ne pouvait pas entrer, il pouvait tenter de gratter à la fenêtre, en rongeant un peu le bois par exemple. Si Neffen avait le sommeil suffisamment léger, peut-être que ça suffirait... Sinon, il ne lui resterait plus qu'à lancer un bout de bois contre la fenêtre, en espérant que le bruit mat le réveillerait.... et ne réveillerait que lui. il fallait qu'elle se tienne prête à déguerpir, discrètement, en laissant Prince sur place pour que Neffen comprenne.
Elle expliqua à Prince ce qu'elle attendait de lui : trouver une entrée, ou au moins grimper à la fenêtre pour y gratter, s'il y voyait assez. Quant à elle, elle allait se préoccuper d'empêcher le chien d'aboyer trop fort, en cherchant à établir le contact avec lui, peut-être avant même qu'il se réveille si elle y parvenait.

Astrée apaisa donc le chien endormi, le ferrant d'une course au lièvre au creux de ses rêves, tandis que Prince escaladait la corniche. Elle l'entendit bientôt couiner dans les hauteurs et dut dégager son esprit de celui du molosse pour retrouver celui de son compagnon. La fenêtre était, contre toute attente, entrouverte, et l'écureuil s'y glissa donc aisément. Quelques secondes plus tard, elle distinguait imparfaitement une silhouette derrière la vitre, le mouvement d'un rideau, puis la fenêtre s'ouvrit plus grande et Neffen parut. Il lui fit signe, elle lança sa corde, et constata avec horreur que celle-ci était tout aussi imprégnée des vestiges de la cheminée que ses vêtements. Parvenue sur l'appui de fenêtre, elle fut accueillie d'un reniflement éloquent.
" Coprin, tu empestes ! s'exclama le shaman à voix basse. Surtout ne touche absolument rien ! Je ne vois pas comment je pourrais expliquer cette crasse à mes hôtes demain."

Astrée grimaça.
" Je sais, désolée... et je me suis changée pourtant ! J'ai été obligée de jouer les ramoneurs pour rejoindre Sheldon. Mais attends, je vais améliorer encore les choses..."
Elle fouilla dans son sac pour en sortir un bonnet dans lequel elle s'appliqua à emprisonner soigneusement tous ses cheveux. Elle rajusta ses chaussettes autour de ses bottes, et poussa jusqu'à trouver des moufles pour ses mains. Plus une seule parcelle de saleté ne devait désormais être visible, à l'exception de son visage... ah, si, ses chausses et son pull avaient récupéré un peu de la suie imbibant la corde. Misère, elle n'arriverait jamais au bout de sa lessive...
" Normalement, je ne devrais rien salir accidentellement comme ça., soupira-t-elle. Bon, dis-moi, quoi de neuf de ton côté ? Ta journée s'est bien passée ? Est-ce que tu sais maintenant si tu vas rester là plusieurs jours ?

Neffen la dévisagea, un peu interdit.
" Ramoneur ? Qu'est-ce que c'est qu'un ramoneur ? demanda-t-il. Quelqu'un qui se roule dans la suie et la graisse de porc ?"
Il paraissait franchement dégoûté.
" Mais tu ne t'en tireras pas à me demander ce que j'ai fait de ma journée en éludant la tienne. Tu es crasseuse, tu débarques chez moi... A toi l'honneur des longs discours."
Il huma l'air devant elle.
" Je sens l'odeur de Sheldon, sous cette couche de... de monstruosité... Il y a un broc d'eau par là... mais là encore, je ne sais pas comment je vais expliquer la couleur qu'il va prendre..."

Neffen avait décidément l'odorat aussi sensible sous forme humaine que sous forme centaure.
" Laisse tomber, pour le broc d'eau, à moins que l'odeur ne te soit vraiment trop insupportable. Ou alors il faudrait le vider par la fenêtre... Mais je m'arrangerai plutôt pour trouver une fontaine ou un puits en repartant. Simplement, comme je n'avais aucune idée du temps qu'il me restait, j'ai préféré te rejoindre avant de m'occuper d'un brin de toilette."
Elle faillit s'asseoir machinalement sur le lit avant de se souvenir qu'elle ne devait toucher à rien.
" Et, oui, j'ai vu Sheldon, je lui ai dit que tu étais là. Il est enfermé dans une prison, plus ou moins au centre du village. J'ai du passer par la cheminée pour le rejoindre, d'où l'odeur et la crasse... un ramoneur c'est quelqu'un qui nettoie les cheminées. Mais donc, je lui ai expliqué ce que tu voulais tenter de faire et qu'il te fallait quelques jours pour y parvenir, et pour qu'on mette au point une stratégie. Apparemment, pour gagner du temps, ça dépend de Caribert, le débourreur : tant qu'il a un fragment d'espoir de parvenir à le dompter, il échappera à la castration ou à la mort. Je lui ai expliqué tout ça. Il n'a pas pu répondre, il est bâillonné, mais il m'a écoutée."
Il fallait maintenant qu'elle explique... tout le reste. Elle ferma les yeux un instant. Elle avait besoin de s'asseoir. Il fallait qu'elle s'assoie.
Elle fouilla dans son sac, en sortit une couverture propre qu'elle étala au sol et s'y assit en tailleur.
" Mais c'est pas tout, avoua-t-elle d'une voix sombre. Il y a aussi une mauvaise nouvelle : il y a quelqu'un qui m'a vue, un Montequin. Il m'a reconnue. Et ça complique la situation. Il est enfermé en prison à ma place en fait, on l'accuse d'avoir libéré Byron parce qu'il est ouvertement contre l'esclavage des centaures. Il s'est bien sur imaginé que je comptais libérer Sheldon, et il parlait de me dénoncer et de faire en sorte que Sheldon soit rapidement castré ou tué pour éviter tout risque. Il cherchait à savoir ce que je comptais faire, mais je ne pouvais rien lui dire... Et pourtant, s'il me dénonçait, il allait tout ficher en l'air. J'ai essayé de le convaincre de se taire, mais bien sur il avait peur que mon action, quelle qu'elle soit, finisse par mettre des vies en danger... Alors je n'ai pas trouvé mieux à dire qu'au contraire, c'était si je n'agissais pas qu'il y aurait des morts. Donc il a déduit qu'une menace planait sur Montequine, il voulait en savoir plus..."
Elle soupira.
" J'aurais mieux fait de me taire, peut-être, de simplement fuir... Sheldon aurait été fichu, mais au moins je n'aurais pas mis en danger la harde. Sauf que ça allait se terminer par un massacre avec les orques... J'aurais peut-être pu revenir les avertir au dernier moment pour leur dire de fuir, tenter de sauver quelques vies, mais on ne m'aurait peut-être pas laissé revenir, et puis la guerre aurait continué, encore... Bon, en fait, pour être honnête, je n'ai pas vraiment eu le temps d'analyser tout ça, j'ai parlé sans vraiment réfléchir. Ça m'énervait trop de me dire qu'il était en train de tout ficher en l'air par ignorance, donc j'ai finit par lui lancer que oui, il y avait une menace qui planait, que dans quelques veilles son village serait rayé de la carte à moins que je ne parvienne à convaincre Sheldon d'annuler l'ordre qu'il avait donné. Et que le seul moyen pour cela était de libérer tous les centaures et de vous rendre votre vallée. Je suis resté floue bien sur, j'ai essayé de laisser croire à quelque chose de magique, un cataclysme quelconque contre lequel ils ne pourraient rien. Mais même ça c'est trop. S'il parle, les autres essaieront de se préparer contre une menace indéfinie, et ils gagneront la guerre. Moi qui avais promis à Dymphéa et Byron de ne rien dire ou faire qui mette en danger la harde, je n'ai pas été capable de tenir ma promesse. Ils avaient raison, finalement, de ne pas avoir confiance..."
Elle entoura ses jambes de ses mains.
" Enfin, l'essentiel c'est qu'il m'a crue et que pour le moment il accepte de se taire. A condition que je revienne demain, pour qu'il me donne une liste des personnes à évacuer en priorité en cas de survenue du cataclysme. Requête que je trouve un peu étrange... mais je n'ai pas le choix, j'irai."
Levant les yeux vers le shaman, elle ajouta.
" Je suis désolée, Neffen. Je sais qu'avoir parlé à cet homme met en danger les centaures. Je voulais juste ne pas gâcher déjà notre seule chance de trouver une autre issue."

Le visage du shaman reflétait une émotion étrange, hybride, qu'Astrée ne parvint pas à identifier. Il semblait à la fois stupéfait et résigné, scandalisé et indifférent. Il demeura figé pendant un moment, silencieux, les yeux vides, comme s'il était tourné vers l'intérieur.
" Ce n'est pas surprenant, finit-il par dire. Pas surprenant du tout."
Un sourire passa sur ses lèvres.
" Ce qui est fait, est fait. Nous devons aller de l'avant."
Il la dévisagea ensuite, interrogateur.
" Pourquoi ne pas l'avoir tué ? Cela nous aurait épargné bien des tracas."

Astrée avait observé la réaction du shaman avec angoisse, le cœur lourd. Elle se savait en faute : elle n'avait pas été à la hauteur de sa confiance. Elle avait préféré chercher un moyen de sauver des vies humaines, plutôt que conserver un moyen sûr de sauver la harde. Parce qu'elle était elle-même humaine. Et c'était sans doute pour cela qu'il disait que ça n'était pas surprenant. Elle aurait dû se sentir soulagée qu'il ne se mette pas en colère, mais elle se sentait simplement coupable. Et indigne de confiance.
Sa question ne la surprit pas.
" Je ne me sens pas capable de faire ça, avoua-t-elle. J'y ai pensé, pourtant. Dans l'absolu, je sais bien que tuer un homme pour sauver de nombreuses vies, ce n'est pas un gros prix à payer.... Mais je suis incapable de commettre un meurtre, même avec toutes les bonnes raisons du monde. Je peux tuer quelqu'un pour défendre ma vie, pour défendre la vie d'autres personnes, dans le feu de l'action, au cours d'un combat. Mais pas comme ça, de sang-froid. Et pourtant je sais bien que ça solutionnerait le problème avec un risque minime, c'est sûrement le choix que ferait n'importe qui d'autre. Et il n'est pas trop tard, d'ailleurs, la nuit n'est pas finie, il est facile d'y retourner.... mais je sais d'avance que je ne pourrai pas le faire. C'est déjà à peine croyable que je l'aie envisagé, me connaissant..."
Elle grimaça.
" Je ne suis décidément pas à la hauteur, Neffen. Je fais le contraire de ce qu'il faudrait, j'ai peut-être tout gâché et je ne suis même pas capable de réparer mon erreur. Cela dit, si toi tu décides de le tuer, je ne chercherai pas à t'en empêcher et je n'aurai pas à t'en tenir rigueur. Je sais que c'est la meilleure solution pour protéger ton peuple, que ça solutionnerait bien des choses, que c'est logique, au fond, que tu fasses ça... Mais... ça pèserait quand même sur ma conscience, et je préférerais ne pas avoir à en arriver là. Pour le moment il n'est pas une menace immédiate, s'il tient sa parole de ne pas parler...

" Il est curieux que tu accordes tant de confiance à une promesse humaine, dit-il. Surtout venant de quelqu'un qui ne te doit rien et que tu tiens par la menace. Mais peut-être est-ce cela qui rend sa parole si solide ? La peur ?"
Il secoua la tête.
" Vous êtes étranges, vous autres, humains."
Il s'assit sur le lit et replia les jambes en tailleur.
" Mais je n'irai pas le tuer. Je ne saurais même pas par où commencer. Je ne suis pas encore assez loin de mon état de shaman pour commencer à me métamorphoser de la sorte... Tant pis. Il faudra faire vite et sans."

Astrée acquiesça.
" Oui, il faudra faire vite... Parce qu'il pourrait changer d'avis. Après, rien ne prouve que les autres le croiraient totalement, mais ils ne voudront pas prendre de risque."
Pourquoi donc se fiait-elle à sa parole ?
" Et on ne peut pas dire que je me fie vraiment à sa parole. Passé un temps de réflexion, il pourrait très bien décider de se ranger contre nous. Mais je pense avoir semé suffisamment de doute dans son esprit pour qu'il ne le fasse pas tout de suite, qu'il hésite. Parce que si jamais j'ai dit la vérité, et qu'il me dénonce, il sait qu'il risque d'avoir un massacre sur la conscience. Ses concitoyens ne voudront pas fuir et préfèreront rester et se préparer, peut-être en vain, en tout cas c'est ce que je lui ai dit. Il ne peut pas prendre un tel risque à la légère. Je ne peux pas être certaine, effectivement, que cet état d'esprit durera. Surtout s'il craint que notre action amène trop de morts dans son village. Mais je n'ai pas trouvé d'autre moyen que celui-ci de l'amener à se taire. Il est Montequin, attaché à son village, et même s'il réprouve l'esclavage et déplore la situation actuelle, sa loyauté va à ses concitoyens, quoiqu'il arrive. Il est lucide sur la situation, également, il sait qu'une conciliation aurait pu être possible autrefois, mais plus maintenant. Il le déplore... et me trouve beaucoup trop optimiste, d'ailleurs, d'imaginer pouvoir sauver à la fois le maximum d'humains et la harde. Pour lui, la guerre continuera."
Elle soupira, puis se souvint, avec une grimace, d'un autre détail.
" Il y a une autre raison qui doit nous pousser à agir vite, c'est que certains Montequins connaissent ton pouvoir de transformation en humain. Lui, au moins : il y a fait allusion. Donc on ne peut pas prendre le risque qu'ils te soupçonnent...
Bon, étant désormais près de la prison, elle verrait si on y conduisait Neffen. Mais s'ils le conduisaient ailleurs ?

Neffen l'avait écoutée sans intervenir, les bras croisé en miroir des jambes, les lèvres pincées.
" La personne qui vient le trouver demain matin à au moins autant de chance de l'influencer que tu l'as fait, trancha-t-il. Tu ne peux pas savoir s'il n'a pas dit ce que tu voulais entendre et rien de plus. Si j'étais toi, je m'attendrais à ce qu'ils se mettent rapidement à ta recherche. Et quand ils te trouveront, ils te feront parler. Tu as raison : nous n'avons plus le temps."
Il sourit.
" Estimer que la survie vaut tous les sacrifices est aussi une chose très humaine. Mais qui n'est pas partagée par tous. A l'heure où les dieux tendent les bras pour nous accueillir en leur sein, promesse d'un salut éternel, pourquoi courber l'échine en vain ?"
Il secoua la tête.
" L'état de guerre est parfois l'ordinaire et la paix tellement étrangère que personne n'y croit ni ne la veut." fit-il en haussant les épaules.
Il revint à elle.
" Je ne sais pas si je vais rester ici. Je suis un gentil garçon plein de bonne volonté et j'ai besoin de stabilité. Il n'y a pas de raisons qu'ils me baladent, d'autant que je suis docile et sage. Ils ne savent pas bien quoi faire de moi et je ne sais pas bien quoi faire de moi. Tout se passe comme prévu, en somme."

" Pour le moment", répliqua sombrement Astrée.
S'ils continuaient à ne rien soupçonner.
" Si jamais on te déplace, et que tu veuilles me prévenir, je serai près de la prison pendant la journée, au moins pour demain. Attends, je vais t'expliquer où c'est, au cas où tu doives m'envoyer un oiseau. Je ne peux pas bouger en journée, il ne me trouvera pas s'il ne sait pas où je me cache. Bon... Imagine que ma couverture, c'est le village. De ce côté il y a les remparts, comme ça, de l'autre la muraille, avec, là, une maison qui masque le passage vers l'autre côté. Une place devant, avec quatre rues qui en partent, comme ça... là, une sorte de salle des fêtes où ils ont célébré leur victoire l'autre jour. Là, une rue qui part vers la place où ils avaient exposé Sheldon, là l'écurie des centaures capturés, c'est par là-bas que j'ai passé la journée. La prison se trouve plus au centre, à peu près là... Et je vais me cacher aux alentours pour la journée, probablement dans un entrepôt contenant des rouleaux de tissus. Ou j'ai repéré aussi un grenier non loin, je vais voir quelle est la cachette la plus sûre."
Il lui faudrait prendre soin de choisir une cachette avec plusieurs issues, au cas où elle doive fuir. L'entrepôt pouvait être une bonne solution, de ce point de vue.
" Du peu que j'ai appris aujourd'hui, les écuries sont cadenassées, mais Caribert et ses assistants ont les clés. Je ne sais rien, en revanche, de la prison, si ce n'est qu'il y a une salle spécialement dédiée au domptage... et je préfère ne pas imaginer la façon dont il s'y prend. Mais il est donc probable que Caribert ait également les clés de la prison. Il n'est pas forcément le seul. Je vais surveiller tout ça demain, les entrées et les sorties... J'enverrai Prince voir ce qui se passe à l'intérieur, mais aussi aux alentours, pour repérer d'autres écuries. Pour le moment, il a repéré celle des enfants, et celle des centaures de la garde, par là. Je ne sais pas encore où sont enfermées les femmes, par exemple... Et je ne connais rien de la partie est de la ville. Bien sûr, il y a aussi beaucoup de toutes petits écuries pour des centaures domestiques. Ça va être difficile de les voir tous... Est-ce qu'ils te laissent te promener librement dans la ville, ou est-ce qu'ils t'accompagnent ? J'imagine que tu n'as pas encore eu l'occasion de sonder le moindre centaure...

" Je n'aurai pas besoin de les voir tous, dit Neffen avec un sourire un peu interdit. Il me suffit d'en voir quelques uns. Ce que je dois déterminer, c'est s'il reste une essence qui peut se réveiller... Quelque chose de viscéral qui fera que certains se retourneront contre leurs maîtres le moment venu... Une empreinte de la plaine, si tu veux. Mais ceux qui sont des esclaves convaincus, et il y en a, je les ai vus, je ne peux rien pour eux. Nous ne sommes pas des monstres mécaniques, que l'on contrôlerait d'un bouton... Mais si je trouve la voie dans leur essence, je pourrai leur parler dans leurs rêves. Si je n'en ai pas le temps, nous n'avons rien à espérer."
Il soupira et regarda la jeune femme.
" Mais Sheldon doit guider son peuple, c'est une nécessité. Sinon ce sera le chaos et Montequine se consumera, en emportant ses centaures comme ses humains. Je reste cependant dubitatif par rapport aux portes. Ne devrions-nous pas viser une fuite en plein jour ? Ce sera plus facile pour franchir les limites de la ville."

" Je ne sais pas s'il vaut mieux agir le jour ou la nuit. Le jour, nous avons l'avantage que les portes sont ouvertes. La nuit, nous bénéficions davantage de l'effet de surprise, la ville est déserte, et les humains n'y verront rien pour nous poursuivre éventuellement... mais ça n'est peut-être pas si important. Et je sais que Sheldon est la clé de la réussite..."
Elle soupira.
" Mais en fait, je ne sais pas assez comment fonctionnent les centaures. J'imagine que ceux dont tu parviendras à réveiller l'essence, en leur parlant dans leurs rêves, obéiront désormais aux ordres de Sheldon ? Ce qui voudrait dire qu'il peut planifier une attaque, dans ce cas, pour vaincre la garnison, et ouvrir les portes si on choisit d'agir de nuit... Mais en fait, on en revient toujours à l'équilibre des forces. Il faudrait savoir combien de centaures seront sensibles à cet appel, contre combien d'humains armés. Si les centaures sont trop peu nombreux, on devrait effectivement viser une fuite en plein jour, peut-être trouver un stratagème, les gardes réagiront mais on en sauvera un certain nombre... par contre on n'arrêtera pas la guerre comme ça. Je me dis en revanche que si l'équilibre des forces est nettement en faveur des centaures, on peut peut-être obliger les humains à une reddition complète et à quitter la ville ; avoir vu leurs esclaves se retourner contre eux devrait les décourager de recommencer... Et dans ce cas il faut que j'obtienne de Sheldon que ça ne tourne pas au massacre. Mais ce serait trop beau que ça marche aussi bien. Il y a peut-être trop d'esclaves convaincus, qui, en outre, pourraient se retourner contre leurs cousins de la harde et compliquer encore les choses... En fait, on n'a pas assez d'informations encore. Mais peut-être qu'on ne les aura pas. Tu n'as sans doute aucun moyen de savoir combien de centaures montequins tu peux retourner contre leur maître et ramener à la harde ? A part en les rencontrant tous, ce qui sera impossible...
Elle se remémora ce qu'elle avait observé : la plupart des centaures nés en captivité se laissaient monter sans rechigner, mais quelques-uns résistaient. Donc ces quelques-uns pouvaient avec certitude être ramenés. Trop peu, peut-être...

La Couronne de Cuivre

[Quête] Montequine