La Couronne de Cuivre

L'herboriste avait passé le relais aux gardes du chancelier c'étaient eux qui désormais "tenaient compagnie" aux filles Lentemort.
La remarque du chancelier lui fit prendre conscience à quel point il était fatigué. Il devait impérativement remettre de l'ordre dans ses idées. Il s'accorda donc une courte pause avant de répondre à Mornagest.

Shsss, mon avis est que la fille a perdu toute ssssa valeur en vous-zattaquant, il n'en tirera plus rien, aucun clan de la ssscité n'accssseptera de marier un filsss à quelqu'un qui a provoqué ouvertement La Chancellerie...
Ssssi "on" avait voulu nous livrer un coupable idéal "on" ne ssss'y sssserait pas pris autrement. Ssssans le ssssupport des ssssiens csssette fille ssssera miszzze à mort après un jugement rapide, non ? De plussss comme sssson desssstin est csssertain, même ssssi elle nous dézzsignait sssses complicssses ils n'auraient qu'à prétendre qu'elle affabule pour sssauver sssssa vie, ils sssseraient innossscentés.
Je ssssuis ssssûr d'une choszzze elle est asssssez "éveillée" pour ssssavoir ssssa tentative ridicule, il y a donc de forte chances qu'elle ssssoit sssous-zinfluence magique ou alchimique. Notre ennemi inviszzible ssssemble apprécsssier l'alchimie, je peux esssssayer de déterminer ssssi elle est ssssous l'empriszze de drogues, mais pour l'empriszze magique je ssssuis trop las pour pouvoir faire quelque choszzze, le prêtre de tout à l'heure pourrait peut-être nous-zaider....

Le guerrier hocha la tête. La possibilité d'un charme magique ou alchimique pouvait expliquer le comportement suicidaire de la jeune fille, qui autrement n'aurait sans doute pas perdu la tête de la sorte ; d'après les témoignages des autres protagonistes, elle semblait juste ambitieuse, pas folle, du moins, pas encore.

Le chancelier demanda donc au prêtre de déterminer s'il décelait une influence magique sur la personne de BruneHaut. Il s'exécuta aussitôt, de bonne grâce. Les gardes surveillaient la fille Lentemort de près.

Hrp : je pense que l'autre fille reste libre.. ? pour l'instant elle n'a rien fait de mal...

[HRP] Pour moi les deux sont impliquées, je t'avais annoncé que deux jeunes filles étaient coupables....

Une fois que le prêtre eut rempli sont office, l'herboriste s'avanca, il sortit une bouteille multicolore de sa besace. C'était un étrange objet en verre épais, cela avait la forme d'une bouteille sous laquelle un petit foyer était aménagé, le bouchon, lui ressemblait à l'embout d'une flute . Il y glissa un petit cube de gélatine, qu'il enflamma à l'aide d'un briquet. Une flamme bleutée apparu dans le foyer, il fit souffler la jeune noble dans la bouteille. Une fois l'opération terminée il recula jusqu'au Chancelier...

Voilà, sssi le contenu vire au rouge, elle est ssssous l'influencssse d'une drogue, ssssi il vire au bleu, non, enfin ssssi elle resssste limpide cssss'est qu'il y a un doute...

Mais la potion de l'alchimiste vira au bleu, et la clerc secoua la tête avec une grimace de dépit.
" Si vous voulez mon opinion, Chancelier, il s'agit juste d'une folie adolescente des plus normales. C'est un âge où l'on ne contrôle pas toujours très bien ses actes quand on est poussé à bout..." murmura le Talosien à mi-voix.
La jeune Lentemort sanglotait de plus belle, alignant des syllabes incompréhensibles, et finit par tourner de l'oeil et s'évanouir. Sa cadette, plus pâle que la neige, tourna alors son regard hanté vers les enquêteurs.
" On... On n'a jamais pensé... C'était... On a juste fait ce qu'il nous a dit de faire... On n'imaginait pas... Je ne savais pas... Je n'ai rien brûlé..." lâcha-t-elle.

Le mélandien en avait plus qu'assez de ces minauderies. Quand ce n'étaient pas ces dandys prétentieux de DouceChute, c'étaient les filles Lentemort qui bredouillaient, mentaient, ne terminaient pas leurs phrases... il aurait eu plus vite fait de faire enfermer tout le monde et obtenir des réponses avec le fer rouge... il choisit cependant de conserver son calme lorsqu'il parla :

"Vous en avez trop dit... et pas assez. Qui vous a dit de faire cela ? Parlez. Votre vie est en jeu, cette fois."

Il les regardait tour à tour, sourcils froncés et regard de colère noire. Nul doute que cela risquait de les faire trembloter un peu plus encore, mais sa patience avait des limites restreintes.

HRP : Fossy, il ne reste qu'une Lentemort, l'autre est dans les vapes... Mais la plus jeune peut parler, tu as de la chance

L'adolescente jeta un dernier regard terrifié à son père, puis poussa un profond soupir.
" C'est à cause... c'est à cause de l'elfe. Il est venu nous parler. Il disait que les fils DouceChute étaient... qu'ils étaient... qu'ils voulaient être certains que nous étions prêtes..."
A côté d'elle, Hulven se mit à gronder, un son très bas, comme le feulement d'un animal sauvage. Elle frémit mais continua.
" Que nous étions prêtes à couper les liens avec notre famille... parce qu'ils voulaient bien de nous mais pas... et donc... L'elfe nous a donné la potion à mettre dans le puits, mais nous pensions... que c'était comme un test, que c'était un jeu..."
Ses yeux débordaient.
" Nous ne savions pas ce que la potion allait faire. Alors quand les esclaves ont commencé à mourir... "
Elle jeta un coup d'oeil furtif, embué, au Chancelier, puis rebaissa les yeux.
" On ne pouvait rien faire, on ne savait pas où trouver l'elfe. Et on pensait que les fils DouceChute viendraient nous trouver mais... mais ils ne sont jamais venus."
Elle se remit à trembler.
" Je vous jure qu'on ne sait rien pour l'incendie. On était parties... On... On... C'est l'elfe qui nous a dit de mettre la potion dans l'eau, pour que les fils DouceChute sachent qu'on était dignes de confiance !"
Puis elle éclata en sanglots.

Quelle surprise, la donzelle rejetait tout sur l'elfe qu'il soit son complice ou son homme de main, peu importait....

"Shhs j'ai csssertainement dû mal comprendre, cssset elfe est au sssservice de l'une de vous deux sssselon sssses propres déclaratsssions, vu les cssssirconsssstancssses de cssselles-cssssi, et les recoupements je dirais que vous mentez assssez mal. Fort heureuszzzement, le Chancsssselier et moi-même commencssssions à nous-zennuyer, il est plaizzzsant de pensssser que vous vous-zoffrez pour nous "divertir" ainssssi. Je connais toute une gamme de disssstractions plus plaiszzzantes encore mais toutes impliquent des sssséquelles permanentes... Comptez vous nous divertir plus longtemps ?

Il commençait à apprécier ce jeu du méchant monstre, ainsi Mornagest allait pouvoir "protéger" la jeune fille, et construire une relation avec elle...

La jeune fille éclata en sanglots.
" Je vous en prie... Je vous jure... Il ment ! Il ment ! Il disait qu'il travaillait pour les DouceChute ! Demandez à Brunehaut !" s'exclama-t-elle.
Hulven avait l'air interdit, furieux aussi, bien sûr, mais surtout interdit.
" Je dois dire que je ne comprends pas bien pourquoi... " commença-t-il. " Pourquoi pensez-vous que mes filles auraient manigancé toute cette histoire ? Je les crois stupides et crédules, volontiers, et certainement retorses au point de vendre leur famille pour une ascension sociale factice, qui voudrait se retrouver lié à une famille aussi pathétique que les DouceChute, mais... si les DouceChute ne sont pas responsables... Je ne vois pas le mobile de mes filles."

Le chancelier haussa les épaules. Un mobile ? N'importe lequel, si elles étaient aussi gourdes qu'il le prétendait - ce qu'il n'était pas loin de croire, d'ailleurs. Attirer les bonnes grâces de ces prétentieux de DouceChute, braver les interdits, ou simplement tenter de s'amuser aux dépens des autres, quelle importance ? Il répondit cependant d'un ton posé.

"C'est assez simple, pourtant... la parole de cet elfe contre celle de vos filles. Et, n'ayez crainte, je n'aurai aucun scrupule à laisser Led Shark expérimenter certaines choses sur les suspects, si cela peut permettre de découvrir la vérité. Mais, bien entendu, nous ne sommes pas obligés d'en arriver là. Pas encore..."

L'herboriste se laissait prendre au jeu, il jubilait, et il essayait de faire tout son possible pour que ça ne se voit pas trop. Quand à savoir si il y parvenait...
La petite pouvait très bien dire la vérité et l'elfe mentir, il y avait une façon toute simple de le savoir, une bonne vielle confrontation, mais pour ça il fallait avoir les deux sœurs sur pied. D'ici là autant se détendre...
Il dû se baisser pour mettre son visage à seulement quelques centimètres de celui d'une certaine humaine dont on se demandait comment elle tenait sur ses jambes tant ces dernières tremblaient.
Mais le druide avait semble-t-il changé de tactique.
"Hum ssstupides csssertainement, il faut l'être pour ssss'attaquer ainssssi au Chancssselier, et défier les-zédits-zimpériaux comme elles l'ont fait... Mais crédules au point de tomber dans-zun traquenard ausssssi évident ? J'ai bien plussss de mal à y croire...
Quoi qu'il en ssssoit je propose de réveiller l'autre noble née, et de confronter cssses deux-là à un certain elfe..."
Puis en se retournant vivement vers le Chancelier un large sourire (toutes dents dehors) illuminant son visage.
"Ssssi çssa ne marche pas, on peut toujours ssse rabattre sssur des réjouisssssancssses plus classsssiques. Une goute d'acssside de roche dans le maitre-œil donne généralement de bons részzultats, les nains les plus részzissstants craquent en moins d'une heure, pour les sssemis-hommes il sssuffit de faire une démonsssstration sssur la première bessstiole qui passssse pour qu'ils ssse mettent à table. Sssinon on peut toujours improvizzser avec les-zépineux du domaine...."

HRP / mais vous faites quoi, au juste ?

Hulven Lentemort se contenta de hausser les épaules. Il était manifestement dépassé par ce qui se jouait sous ses yeux, ce petit ballet de sous-entendus obscurs et de railleries teintées d'ironie. Brunehaut gisait toujours, inconsciente, entre les mains d'un garde. Sa soeur, en larmes, n'était pas loin de la rejoindre dans les vapes de la terreur. Plus loin, les deux femmes de Lentemort, ainsi que son fils valide, montraient des signes d'agitation, mais étaient retenues par d'autres soldats mélandiens. Un groupe se trouvait près de la muraille intacte, au sud du domaine, là où Led Shark et Mornagest avaient laissé la petite esclave et l'elfe étourdi. Siméon était toujours debout, à quelques mètres, hypnotisé par le manoir en flammes, mais certainement soulagé de ne plus être pris à parti par les accusations des deux enquêteurs improvisés.
Il fallait prendre des décisions : l'interrogatoire des différents protagonistes n'avait jusqu'ici fournis que des mobiles plutôt obscurs et des versions relativement diverses.

Ce post clôture cette quête interminable... Merci d'avoir participé !!!

Comme ils manquaient de matériel sur place, le Chancelier et son co-équipier improvisé finirent par faire escorter tous les suspects et autres intéressés jusqu’aux prisons mélandiennes. Ils remirent les interrogatoires au lendemain, la journée avait déjà été longue, et chacun avait à cœur de déconnecter quelques heures de cette sinistre affaire.

Malheureusement, Mélandis étant Mélandis, la nuit ne se déroula pas exactement comme on pouvait l’espérer. Lorsque le Chancellier et l’herboriste revinrent le lendemain, il ne leur restait plus que deux des quatre témoins. Siméon et Brunehaut avaient survécu à une nuit agitée, mais la cadette des Lentemort ainsi que l’elfe incendiaire n’étaient plus de ce monde pour raconter leur version de l’histoire. Reconstituer les événements fut simple pour la fille, moins clair pour le roublard. Deux geôliers passablement avinés avaient eu envie de passer du bon temps avec les petites bourgeoises en jolie robe et fanfreluches, avec des dégâts que l’on imagine aisément et une brutalité parfois mal maîtrisée qui en avait envoyé une dans les limbes. L’elfe, on le retrouva égorgé dans la cellule qu’il partageait avec huit autres prisonniers, voleurs, assassins, hérétiques et autres paladins. Personne n’avait rien vu, rien entendu.

Les interrogatoires des deux survivants ne donnèrent pas beaucoup de nouvelles indications. Sous une torture légère, ils conservèrent leur premier récit : Siméon ne savait rien sur rien, et Brunehaut accusait l’elfe désormais trépassé d’avoir servi de messager aux DouceChute. Ces derniers, convoqués à nouveau, ne changèrent pas davantage leur discours. Lorsque la torture se fit plus incisive, le Chancelier et Led Shark obtinrent alors tout et son contraire. En échange d’une mort rapide, Brunehaut était prête à avouer n’importe quoi et c’est ce qu’elle fit. Elle avait empoisonné le puits, s’était procuré le poison auprès de l’elfe rencontré sur le marché, qu’elle avait vu deux fois, puis l’avait payé pour qu’il boute le feu au manoir. Elle avait fait tout ça de sa propre initiative, sans le conseil ou la pression de personne. Ce n'était pas vraiment satisfaisant, mais le Chancelier et l'Herboriste avaient d'autres chats à fouetter, bien plus cruciaux, et Hulven Lentemort semblait désireux de mettre toute cette affaire derrière lui au plus vite. On consigna donc cette version dans les registres légaux de Mélandis et Brunehaut Lentemort fut condamnée au supplice de la roue, sur laquelle elle mourut quatre jours plus tard.

Hulven Lentemort mit son domaine familial en vente peu après, et de nombreux acquéreurs se présentèrent, d'autant que le prix n'était pas très élevé pour un morceau de terrain aussi bien situé. Les tractations durèrent un certain temps, des curieux plus ou moins intéressés arpentèrent les pelouses et les ruines en soi-disant connaisseurs, plusieurs quidams se révélèrent plus sérieux. On en retrouva, curieusement, quelques uns morts dans les rues mélandiennes, pour des raisons aussi variables qu'une chute de cheval, un étouffement par brocoli ou un coup de couteau visant à faciliter le vol. Au bout d'un mois, une certaine Moline Ferglareth se retrouva finalement propriétaire des vestiges de la gloire Lentemort. Grande dame récemment arrivée en terre melandienne, elle avait un petit air démoniaque à peine déguisé, qui mit mal à l'aise plus d'un voisin, peu habitué à frayer avec des rejetons des plans. A ce jour, le manoir n'a pas été reconstruit et Dame Ferglareth ne semble pas résider dans les quelques cailloux noircis qui en marbrent encore la pelouse. Les Lentemort se sont, quant à eux, définitivement retirés à la campagne.

Quête : Les Squelettes du Placard
Chapitre 9. Sauvetages (suite)

Abandonnant la rue, Taliesin se réceptionna au pied des sapins, dans un fouillis de branchages, d'épines et de pommes de pin. Kerun était à un mètre de là, immobile, une main levée pour lui indiquer d'attendre. Au delà des arbres s'étendait une immense prairie déserte, où affleuraient ça et là les vestiges calcinés d'une grande maison. Un seul mur semblait avoir survécu, presque au centre de l'espace, et, dans son ombre, il y avait une lumière. C'était elle qu'observait Kerun, aux aguets. La pluie semblait lutter contre cette lueur, manifestement un feu solide, et de temps en temps, le vent portait des bribes de conversation dans leur direction. Impossible de comprendre quoi que ce soit, cependant mais au ton, Taliesin eut la sensation qu'il s'agissait de femmes ou peut-être d'enfants.

En apercevant le feu, Taliesin avait spontanément pensé à des pillards venus explorer le sous-sol peut-être intact de la maison disparue afin d'y trouver un trésor éventuel. Mais, en percevant les voix, il changea aussitôt d'avis. S'agissait-il de femme ou de jeunes filles férues d'occultisme et de mystères ? De gamins de la bonne société amateurs de sensations fortes et d'histoire de fantômes ? Enfin, peu importait, au fond. Il faisait nuit, Kerun et lui demeureraient dans l'ombre de la haie - la pelouse était piégée, le Luménien l'en avait informé - et comme tous deux portaient une sombre vêture et se déplaçaient discrètement, les chances pour qu'ils soient repérés étaient minces, pour le moins. Toutefois, il respecta les consigne, demeurant immobile et attentif, prêt à se remettre en route dès que le signal serait donné.

Kerun ne tarda pas à le lui donner, et ils repartirent, précautionneusement, dans le sous-bois qui craquait sous leurs pas. La pluie était leur alliée, noyant le son de leur déplacement qui, sinon, se serait probablement répercuté dans tout le domaine, amplifié par le mur voisin. De temps à autres, l'agent s'immobilisait, lorgnait le feu distant, puis reprenait sa progression. Taliesin devina bientôt le mur du fond, qui formait un angle droit avec celui qu'ils suivaient. Kerun alla se placer dans l'angle, en bordure des arbres, et attendit qu'il le rejoigne.
" Bon. Ils ne peuvent ni nous voir, ni nous entendre, mais si la pluie s'intensifiait, ils battront en retraite dans cette direction pour se mettre à couvert. Nous allons donc faire vite. Je comptais emprunter la porte de service, qui nous aurait amenés à l'endroit propice pour franchir le mur des Aigremont, mais c'est trop risqué. Nous allons passer ici. Le mur est facile à franchir, mais le dessus est truffé de piques métalliques... Fais très attention en passant. Arion pense qu'elles ne sont plus empoisonnées, mais il en suffirait d'une seule, sans compter la rouille et les miasmes qu'elle transmet... Le tissu de ton costume est solide, cela dit, et tu es adroit. Prends ton temps. Mieux vaut rester perché au sommet un moment, sous les branches des sapins, que de sauter trop rapidement dans la rue et déchirer tes vêtements ou surprendre un homme en maraude. Il y a des ruffians dans ces rues, malheureusement... L'appât du gain est trop important pour qu'ils renoncent et nous ne devons pas tomber sur eux."
Il lâcha un bref soupir.
" Nous allons arriver dans la ruelle de service, qui longe le domaine des Aigremont. Nous n'allons pas emprunter la porte arrière, mais nous allons passer par une sorte de bosquet. Dès que nous atteignons les arbres, il faut grimper. Pas haut : les grosses branches basses suffiront. Ensuite, tu te calques sur moi. Nous allons entrer tout de suite par le premier étage, sans passer par les zones plus critiques du rez de chaussée. Je vais probablement devoir désamorcer quelques pièges, que je réamorcerai juste après notre passage."
Son regard se plissa.
" Est-ce que ça va ?"

-Oui oui, acquiesça-t-il, rassurant. Pas d'improvisation ou de tergiversation, uniquement de l'imitation et... beaucoup de concentration. De surcroit, avec mon attention focalisée sur toi et sur les environs... Pas de place pour mes habituels ressassements. Bref, une mission dans mes cordes.
Ce n'était pas tout à fait vrai. Se déplacer discrètement, escalader des arbres ou des murs, éviter des piques de métal acérées, voilà autant de choses dont il n'avait pas forcément l'habitude, surtout avec l'impossibilité de recourir à ses si utiles sortilèges. Toutefois, avec un guide tel que Kerun, l'opération ne lui semblait pas infaisable. Et puis, éviter le parc et ses gardes, c'était une perspective plutôt réjouissante.

" Très bien. Quand nous allons franchir le mur des Aigremont, je vais lancer deux leurres. Cela signifie que leurs chiens vont, progressivement, converger vers eux. Il ne faut pas t'en inquiéter, et leur nature est indétectable... Pour eux, il s'agit simplement de l'odeur d'un gibier goûteux, et leur attitude ne paraîtra pas étrange à leurs maîtres. Ils vont simplement emprunter une trajectoire que je peux anticiper."
Il lui donna une petite tape sur l'épaule.
" Courage, nous y sommes presque."
Il fila aussitôt vers le mur qu'il entreprit d'escalader. Il atteignit le sommet, fit signe au barde, puis disparut. Taliesin put l'imiter une seconde plus tard. L'ascension fut simple, bien que le mur soit plus haut, et le barde rencontra quelques araignées qui lui rappelèrent, très curieusement, un rêve qu'il avait fait quelques nuits plus tôt. Une fois parvenu au faîte, il découvrit les piques rouillées dont lui avait parlé Kerun mais aussi une vue sur le domaine des Aigremont, juste en face, de l'autre côté d'une ruelle, puis d'un second mur. C'était une bâtisse imposante, mais il n'en voyait qu'un côté latéral. Le gros de la maison était au-delà, caché à la vue. Il put cependant déterminer que l'entrée principale était sur la droite et qu'il y avait deux étages en plus d'un rez-de-chaussée brillamment éclairé. Ça et là, il y avait de la lumière dans les étages, également. Comme l'avait annoncé Kerun, un bosquet de douze arbres alignés, minutieusement taillés, jouxtait la partie arrière de l'aile la plus proche.
Taliesin enjamba précautionneusement le mur, sans se blesser, sans abimer sa tenue, puis sauta au sol. Kerun lui fit signe depuis l'autre côté de la petite rue et il se retrouva au pied d'une nouvelle enceinte. Nettement mieux entretenue, cette fois. Mais l'agent jeta un grappin sur le mur et l'arrima avant de grimper à la corde. Il disparut en un éclair. Le barde l'imita et, quelques secondes plus tard, il sauta sur le gazon du domaine des Aigremont.

La Couronne de Cuivre

[Bâtiment] Domaine des Lentemort

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Re : [Bâtiment] Domaine des Lentemort

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