La Couronne de Cuivre

Chandara

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Chandara s'était déjà détournée et avait fait quelques pas en direction de ses affaire mais elle s'apprêtait à répliquer d'un ton sévère au nouveau début de provocation de Hans. Toutefois, l'événement stupéfiant qui se produisit alors lui cloua le bec aussi bien qu'à Hans. Fort heureusement, elle n'eut pas le temps de s'inquiéter de ce qui avait pu arriver à Brus et Greta que voilà qu'ils réapparaissaient brusquement, expulsés en même temps que le geyser végétal. Eberluée et avant même de chercher à comprendre ce qui avait bien put se produire avec l'arbre, la jeune femme se précipita vers les deux corps allongés, cherchant à vérifier s'ils avaient été blessés.

Brus recracha une bouchée de terre puis se retourna sur le dos en gémissant. Il ignorait ce qui les avait percutés mais lorsqu'il ouvrit les yeux, il put constater avec soulagement que le ciel était à nouveau au-dessus de lui. Un doux crépitement lui parvint ensuite aux oreilles. Sa chemise, toujours enflammée, gisait à quelques pas. Il n'y avait, semblait-il, rien à faire pour la récupérer. Brus songea qu'avec sa veste, puis maintenant sa tunique, il allait finir cette aventure nu comme un ver. Il se redressa tant bien que mal. Chandara et Hans accouraient vers eux et ils semblaient tous les deux sains et saufs. Le roublard leur indiqua la gamine du doigt :

- Faut vérifier qu'Greta va bien, puis éloignons-nous de c't'arbre carnivore! J'vous expliquerai!

Tout en se relevant, son regard balaya le sol et tomba sur ce qu'il pouvait clairement identifier, parmi les mottes d'herbes et de terre, comme des ossements.

La situation était des plus confuses et Chandara n'était pas certaine d'en comprendre les tenants et les aboutissants pour le moment. Cependant, elle restait une femme d'action, habituée à agir par instinct dans ce genre de situation : Brus ne semblait pas grièvement blessé et il semblait lucide. Elle le verrait donc plus tard. Hans n'avait pas été impliqué directement aussi fallait-il s'assurer qu'il en reste ainsi. Mais c'est Greta qui nécessitait le plus son attention. La paladine s'exprima d'un ton sans appel :

- Hans, reste avec brus et vois s'il a besoin d'aide !

Puis elle se porta au secours de Greta. Dieux, faites qu'elle aille bien !

Heureusement, la fillette paraissait sinon indemne, au moins relativement épargnée par son vol plané spectaculaire et par son atterrissage brutal. Déjà, elle s'asseyait, se massant la tête en grimaçant légèrement et en écarquillant les yeux, incrédule.
-J'ai pas tout compris à ce qui s'est passé, lâcha-t-elle.
A quelque pas de là, aux côtés de Brus, Hans lorgnait la tunique qui achevait de se consumer.
-L'esprit de la foret, il avait dit qu'il fallait pas allumer de feu... commença-t-il, hésitant. C'est ça qui a mis l'arbre en colère ?
L'intéressé, loin de se calmer, battait des branches et des racines d'une manière de plus en plus menaçante.

Chandara espérait que l'arbre ne constituait pas une menace immédiate et n'allait pas se mettre à se déplacer pour les chasser de la clairière. Elle comptait aussi sur Brus pour éclaircir quelque peu sa lanterne même si l'expression était sans doute mal choisie. Avait-il mis le feu aux poudres en embrasant sa tunique ? Non, ce n'était pas non plus une expression à prononcer à haute voix en pareille circonstance. Elle se sentait impuissante à agir et craignait la réaction de l'esprit des bois sur lequel elle avait tant compté pour leur permettre de poursuivre leur périple vers Arthur. Alors, autant pour se rassurer que pour réconforter la fillette, la paladine se pencha et passa délicatement un bras autour des épaules de Greta pour la soutenir.

- Vous vous sentez en état de marcher ? Je crois qu'il vaut mieux prendre un peu nos distances tant que cet arbre ne redevient pas de bois.

Mince !

"Oui, écartons-nous, ça d'vient chaud... Il faut récupérer les affaires."

Dans le feu de l'action, Brus en oublia sa chemise qui allait probablement finir par se consumer d'elle même. Mais il était inutile de s'attarder, il ne tenait de toute façon pas à voir de quel bois l'arbre se chauffait. Il saisit Hans par la main et l'attira avec lui, tandis qu'il espérait que Chandara en ferait autant avec Greta. Quand ils se furent rapprochés de la lisière de la clairière, là où ils avaient dû laisser leurs affaires le matin même Brus ralentit et se retourna vers la paladine :

"Faut pas qu'vous croyiez que j'ai mis l'feu à l'arbre comme ça, sans raison. On était dans l'abri, avec Greta, et puis l'sommeil a commencé à v'nir. Greta s'est endormie, puis, je l'avoue... moi aussi. L'envie était si forte, et maint'nant j'me dis qu'elle était pas tout à fait naturelle. J'me suis réveillé à peine un moment après, et on était enfermés dans l'arbre, la sortie avait complèt'ment disparu! Heureusement j'avais planqué mon briquet sur moi. Oui, c'est vrai, l'esprit avait interdit ça... Mais l'arbre a essayé de nous avaler! Le sol a commencé à s'creuser et puis il y a eu carrément un trou. C'est là que j'ai mis l'feu à ma ch'mise et que j'lui ai balancé dans l'goulot, en m'disant qu'ça allait lui faire drôle, et qu'il allait nous recracher. La suite, vous l'avez vue."

Brus marqua une pause tandis qu'il regardait l'arbre se débattre, pour le coup, l'effet du feu avait dépassé ses espérances. Il reprit d'une voix plus calme :

"J'crois qu'j'aurais dû vous en parler plus tôt m'dame Chandara mais... Quand on est allés sauver les enfants, quand j'me suis approché d'l'esprit, j'ai senti comme une aura malfaisante, et au moment où j'l'ai surpris, ça a disparu. Je n'savais pas dire si c'était sa vraie nature ou si c'était comme un mécanisme de défense, alors je n'vous en ai pas parlé. Le doute m'est resté ensuite, c'pour ça qu'j'avais gardé le briquet. Regardez c'qui est sorti du ventre de l'arbre avec nous, vous les voyez? Brus montrait les ossements qui avaient jailli avec le geyser végétal. Je n'sais pas à qui ça appartient mais c'qui est arrivé n'était sûrement pas un accident et c'est l'esprit qui nous a conseillé l'abri. On devrait prendre quelques provisions et partir..."

Chandara avait rapidement constaté que le petite fille pouvait se déplacer sans mal - et sans soutien -, et toutes deux avaient rapidement rattrapé leurs compagnons.
-Peut-être que les os ils appartenaient à des gens qui ont pas respecté les règles de l'esprit des bois ? avança Greta. Et peut-être que si vous aviez pas désobéi en gardant votre briquet, l'arbre il nous aurait pas attaqués ?
-Peut-être, intervint Hans. Mais si ça se trouve, tout ça, c'était rien qu'un piège. Si ça se trouve, l'esprit il nous aime pas parce que notre père, il est bûcheron. Moi, ça m'a étonné qu'elle dise qu'il est forestier, même si je sais que c'est un nom qu'on utilise parfois. Et même s'il fait gaffe à pas trop en couper et à en replanter, ben, notre père, il coupe des arbres. Et l'esprit il doit pas aimer... Hé, laisse-moi tranquille !
Le gamin, d'un geste vif, chassa une grosse guêpe venue bourdonner autour de sa tête. L'insecte se replia promptement puis s'immobilisa, comme deux, pois quatre, puis dix de ses congénères le rejoignaient.
Manifestement, un essaim était en train de se constituer, tandis que le chêne se démenait au point d'en faire trembler le sol.

Les révélations de Brus avaient trouvé la paladine muette : cela faisait beaucoup d’informations à absorber d’un coup surtout quand on venait de passer quasiment une nuit blanche. Toutefois, le ton pressant de Brus et la confiance qu’elle lui portait l’incitait à tenir compte de son avis et à se fier à son intuition. Indépendamment, chaque événement pouvait aisément s’expliquer mais leur concordance ne pouvait pas être le fait d’une simple coïncidence. Certes Brus avait désobéi mais l’agression était antérieure à l’incendie. Tout compte fait, il fallait se rendre à l’évidence : l’esprit les avait attirés dans ce petit paradis. Les ossements que Brus désignait devaient appartenir aux précédents voyageurs qui avaient eu moins de chance qu’eux-mêmes et cela suffisait à expliquer que l’endroit semble être resté aussi préservé.

Il fallait agir et renoncer à un repos pourtant si mérité mais ce qui chagrinait le plus la paladine était qu’ils étaient plus ou moins revenus à leur point de départ et même pire : elle avait espéré que l’esprit leur indique un raccourci vers Arthur mais cela aussi avait dû être un mensonge pour les inciter à baisser leur garde à se reposer. Pire encore donc car Brus et elle ne pouvaient plus compter sur l’aide de Gaspard Hurlegloire, de sa troupe et de ses chevaux.

Restait encore à espérer que les enfants sauraient les aider en partie à trouver leur chemin dans les bois. Rien n’étant moins sûr hélas. La jeune femme avait aidé Greta à la se relever doucement mais elle avait senti qu'elle n'avait pas besoin d'un soutien plus envahissant pour suivre les garçons vers leurs affaires. En espérant qu’elles n’aient pas disparues.

Les enfants avaient fait le même cheminement de pensée qu'elle à propos de ce qui venait d'arriver et tous étaient d'accord pour quitter la clairière une fois leurs effets récupérés. Chandara s'apprêtait à proposer sa seconde tunique à Brus : elle n'était plus très présentable ni très propre mais elle lui irait à peu près...

Elle fut cependant interrompue par ce qui se produisit alors : un nouvel élan dans l'assaut de l'arbre et un danger plus pressant encore. D'instinct, elle rechercha l'arme à sa ceinture mais elle ne s'y trouvait pas, évidemment. Alors, d'un ton péremptoire, elle s'adressa à ses trois compagnons :

- Courrez vite ! Filez vers les bois, je vais récupérer nos sacs !

Son armure allait rapidement lui manquer, elle en était certaine mais elle ne pouvait pas décemment risquer de laisser les enfants se faire piquer et Brus non plus, lui qui n'avait pas même une pièce de tissu pour se protéger.

HRP : Désolé, Dhast, mais on ne peut vraiment plus attendre, il est nécessaire de boucler la quête. Pour que la logique soit respectée, ton personnage va continuer à accompagner Chandara et, évidemment, il survivra à l'aventure. Tu pourras le reprendre quand tu le souhaiteras.

Bientôt, ils étaient à nouveau tous réunis. Ils avaient quitté la clairière devenue hostile avec leurs possessions et sans blessures, si l'on exceptait quelques douloureuses piqures de guêpes.
Comme l'esprit de la nature risquait d'être fort courroucé à son retour, s'attarder dans les parages était inenvisageable. Mais, dès lors, une question cruciale se posait : où aller ?
Vers le nord, tranchèrent spontanément Hans et Greta. C'était par là que se trouvait le château près duquel ils avaient vécu et où Arthur était aujourd'hui retenu captif. De surcroit, en dignes héritiers de leur père bûcheron, ils rappelèrent que c'était toujours sur la partie nord des troncs que poussait la mousse. Bref, s'orienter et ne pas s'égarer serait peut-être moins difficile que prévu...
Ils se mirent donc en route à travers la forêt. Avant longtemps, il fut nécessaire de porter les enfants qui n'avaient pas pris le moindre repos depuis sans doute une journée et demi. Cela ralentit encore l'allure : les adultes eux-mêmes étaient épuisés... Néanmoins, ils continuèrent à avancer vaille que vaille.
La journée s'écoula ainsi, ponctuée de rares pauses dont une un peu plus longue aux alentours de midi, durant laquelle ils soufflèrent et se restaurèrent. Enfin, alors que le crépuscule s'annonçait, les gamins déclarèrent avoir l'impression que l'orée des bois était toute proche, à présent.

Chandara se sentait totalement épuisée : elle n’avait que peu dormi depuis les blessures qui avaient failli lui être fatales et près d’une journée s’était encore écoulée depuis la dernière fois qu’elle avait pris du repos. Et pourtant, elle avait montré bonne figure devant les enfants, avançant vaille que vaille en portant Greta : Hans aurait protesté si ce n’était pas Brus qui le portait. La paladine se sentait prise de crampes, presque incapable d’avance plus loin et encore moins de se battre si les hommes ou les créatures du nécromancien rôdaient alentours.

La jeune femme avait été trop préoccupée par la nécessité de progresser droit vers le nord pour échapper à l’esprit des bois pour repenser à ce qui s’était produit sous l’arbre ou pour songer à ce qu’elle et Brus allaient maintenant pouvoir faire : ils risquaient d’être repérés et tués – ou pire – dès qu’ils auraient quitté la protection illusoire de la forêt. Et pourtant ils ne pouvaient pas non plus renoncer. Trouver un abri pour les enfants, sauver les captifs du fort. L’un d’entre eux plus que les autres. Cette perspective raviva une dernière étincelle d’énergie chez l’ancienne paladine. Elle posa Greta à terre et déclara :

- Les enfants, cachez-vous un instant : Brus et moi devons savoir si la voie est libre avant de se risquer hors des bois. Et nous devons profiter des derniers rayons du soleil pour y voir quelque chose. Vous pensez pouvoir grimper dans un arbre ou vous dissimuler dans un de ces buissons jusqu’à notre retour ?

Être ballotés au fil de leur progression dans le sous-bois n'avait pas empêché les jumeaux de dormir, signe de leur extrême épuisement. Et ce somme inconfortable leur avait rendu à la fois énergie et allant : ils acquiescèrent donc sans hésiter et, l'instant suivant, se lançaient à l'assaut d'un arbre, pour aller se dissimuler au milieu de son dense feuillage.
La paladine et le roublard repartirent alors de l'avant, plus précautionneusement que jamais. Quelques dizaines de mètres plus loin, Brus les fit s'immobiliser : il avait cru entendre du bruit. Il abandonna donc temporairement Chandara pour se couler en toute discrétion dans la direction d'où lui avait semblé provenir les sons et, lorsqu'il revint, il était porteur d'une bien surprenante nouvelle.
Selon toute vraisemblance, ils étaient tombés sur le nouveau bivouac établi par Gaspard Hurlegloire et son escouade.

Chandara dut se faire répéter l’information pour en prendre toute la mesure. Cela semblait tout à fait inespéré d’avoir retrouvé le groupe de Gaspard mais ce n’était pas si étonnant au final étant donné qu’ils avaient la même destination, le même objectif. Au final, ce qui était le plus imprévu était de les avoir rattrapés avant qu’ils n’aient entrepris de libérer Arthur. Après tout, ne disposaient-ils pas de chevaux ? De chevaux oui mais la forêt avait dû réduire à néant cet avantage à moins qu’ils ne se soient heurté à davantage de difficultés : les mélandiens étaient censés être installé dans un château et les quelques hommes entourant le clerc étaient bien insuffisants pour espérer le prendre d’assaut avec succès. Quoi qu’il en coûte cependant, même si cela n’avait que peu de chance de faire la différence, la paladine avait l’intention de rallier la troupe du lieutenant. C’était de loin leur meilleure chance de se rendre utiles. Si Gaspard était susceptible de lui faire encore confiance à défaut de passer l’éponge sur leur altercation de la veille. Un peu pâle à l’idée d’affronter le géant patibulaire qui avait toutes les raisons de lui en vouloir, Chandara n’en prit pas moins les devants :

- Je vais parler au lieutenant. Si ça doit tourner mal, je te charge de protéger les enfants.

Elle doutait que la colère du colosse le pousse à quelque geste irréparable mais elle ne souhaitait prendre aucun risque. Bien qu’épuisée et ayant besoin de sommeil pour trouver ses mots, Chandara s’avança donc dans la direction indiquée par Brus. Elle garderait les mains bien en évidence et ne chercherait pas à être discrète pour éviter d’être prise pour une espionne : si près de la base du nécromancien, les manostiens devaient être un peu nerveux.

Chandara s'avança donc sans plus faire aucun effort pour dissimuler son approche. Brindilles et branches mortes craquaient sous ses pas, sons qui semblant tonitruants dans le relatif silence de la forêt. D'abord, elle ne vit rien de particulier, sinon des arbres, des buissons : le décor habituel du sous-bois. Puis elle commença à discerner des silhouettes. Enfin, elle n'eut plus aucun doute : l'escouade manostienne se tenait devant elle, sur ses gardes, épées brandies, arbalètes pointées dans sa direction... Encore quelques instants, et la rencontre aurit lieu.

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[Quête] Guerre des plaines brûlantes : UCGPLM - Chandara & Dhast