La Couronne de Cuivre

" Je ne te pensais pas si soucieuse de l'apparence physique d'un potentiel partenaire... On ne le devinerait pas, comme ça : tu n'as pas l'air du genre à passer une heure devant ton miroir au grand matin..."
Elle haussa les épaules.
" Mais bon, on devrait peut-être aller se coucher... Histoire de profiter vraiment de ces dernières journées confortables... A moins que tu ne veuilles approcher quelqu'un dans la salle. Pas pour des raisons sentimentales, hein ! Mais il y en a sûrement, dans ce tas, qui connaissent un peu les montagnes."

Astrée hésita, balaya la salle d'un regard, et haussa les épaules.
" C'est pas écrit sur leur visage, et je me vois mal aller faire le tour de la salle pour débaucher l'un ou l'autre, ni lancer un appel à la cantonade. Puisqu'il y a une guilde dans la cité, j'irai demain, c'est bien plus simple !"
Elle étouffa un baillement.
" Mais tu as raison, allons profiter de notre lit confortable, on n'en aura plus tellement... En altitude, la roche est dure."

" Je suis sûre qu'il y aura de l'herbe. L'intérêt d'être un halfelin, c'est qu'on a besoin de moins de place !"
Sur ces belles paroles, elles allèrent toutes deux se coucher et la nuit fut tranquille. Elles furent réveillées tôt, par le mouvement des premiers voyageurs qui quittaient les lieux. Félicie opta pour garder le lit encore un moment mais Astrée trouva l'auberge déjà en activité et on lui servit son petit déjeuner. Kalju la rejoignit peu après, venant du dehors.
" J'ai trouvé Eyri. Dès que vous êtes prête, on peut aller voir votre amie."

Astrée s'était réveillé l'esprit serein, bien qu'elle se soit endormie d'humeur vaguement mélancolique : penser à Nremyn ne pouvait que la rendre nostalgique. Mais ce matin, elle avait l'esprit tourné vers l'avenir : le soleil brillait et elle ressentait au fond d'elle l'appel des montagnes, qu'elle avait hâte de retrouver, comme Prince certainement.
Elle adressa un sourire joyeux à Kalju.
" Je finis mon thé et j'arrive... enfin, sauf si Félicie veut venir. Je vais passer lui demander son avis avant de filer, tout de même, pour qu'elle ne soit pas surprise. Je me dépêche !"
Elle avala rapidement le fond de sa tasse de thé et s'en retourna vers leurs chambre pour demander à l'intéressée si elle voulait se joindre à eux.

Mais Félicie n'était pas particulièrement motivée à l'idée de quitter son lit alors qu'ils étaient, pour une fois, en vacances. Astrée partit donc avec Kalju. Eyri les rejoignit un peu à l'écart de l'auberge, sans réellement s'approcher, caracolant sur son cerf à quelques arbres de distance. Le genasi laissa Astrée prendre la tête pour les guider jusqu'à Jill. La cité bruissait d'activité mais, curieusement, on n'y voyait pas grand monde : sans doute était-ce parce qu'il se passait des tas de choses plutôt dans les arbres qu'au sol. Evidemment, pour les elfes, le "matin" n'était pas aussi balisé que pour les créatures qui devaient dormir.
Ils traversèrent le pont sur la Sylvestre puis gagnèrent les quartiers plus terrestres des elfes lunaires. A voir Eyri, son attitude, les regards qu'il échangeait avec les résidents des lieux, Astrée devina qu'il n'était pas en territoire plus connu qu'elle. Il y avait de fortes chances qu'il ne soit jamais venu jusqu'à Belred, et sans doute même n'avait-il jamais quitté le confort rustique de sa tribu forestière. Les lieux devaient lui paraître particulièrement étrangers. Il se rapprocha d'ailleurs insensiblement de Kalju et d'elle. Les rues, plus nettement marquées, et le nombre élevé de constructions diverses ne lui permettaient de toute façon plus de circuler à distance sans les perdre de vue.

Astrée se souvenait que Garahel avait paru impressionné et plein de déférence envers la Dorée, et même envers les elfes lunaires, et se demandait si ce n'était qu'une question d'âge ou s'il y avait aussi une sorte de hiérarchie entre les différentes races d'elfes. Peut-être Eyri serait-il intimidé par Jill...
Elle avait pris la tête du trio et se dirigea sans hésiter vers les trois sources, en longeant la rivière, jusqu'à apercevoir l'étrange bâtiment qui semblait fait de verre, et dont elle ignorait le nom.
" C'est ici. Ils n'aiment pas trop voir des humains entrer dans leur auberge, ça se devine quand on y entre, expliqua-t-elle à Kalju en se dirigeant vers l'entrée. Mais ils ne nous jetterons pas dehors. Cela dit, si vous préférez attendre ici, vous pouvez..."
Il ne restait qu'à espérer que Jill soit là.

Kalju et Eyri préférèrent effectivement rester dehors plutôt que d'entrer dans l'étrange bâtiment. A l'intérieur, Astrée s'attira les regards des elfes, comme la veille, qui ne s'habituaient décidément pas à la présence d'un humain dans leur domaine. Jill était installée à sa table, en train de lire, et elle lui sourit lorsqu'elle s'approcha.
" Déjà sur le départ ? Je te reconnais bien là !"

Astrée lui rendit son sourire.
" Non, pas tout à fait. Ce sera plutôt demain matin... ou cet après-midi si on s'ennuie trop. Mais j'ai un petit service à te demander ce matin. J'ai besoin d'expliquer des choses à un elfe qui ne parle pas le commun. Un elfe sauvage. Est-ce que tu aurais un peu de temps pour jouer les interprètes ?"

HRP : désolée, je suis malade, fatiguée et j'ai une semaine de dingue, jours et soirs... ça ira mieux... sûrement bientôt

Jill grimaça, les sourcils haussés.
" Un sauvage ? Bah... Ils parlent généralement un charabia à peine audible..."
Elle sourit.
" Mais je veux bien essayer, si ça te rend service. Ne t'attends pas à des miracles, cependant. Ils sont généralement butés comme des blaireaux. Qu'est-ce que tu dois lui raconter ?"

Pas de souci, tu fais comme tu peux, ma grande

Ça arrive à tout le monde d'être débordé ou crevé... On a le temps ! Repose-toi ! (de toute façon, j'avais moi aussi une semaine de dingue)

" Je vais t'expliquer le contexte pour que tu comprennes. Il y a un souci à propos d'une faille rocheuse. Une faille qui serait apparue, ou se serait agrandie peut-être, à cause de l'exploitation minière. Ça concerne à la fois le génasi que j'ai rencontré en chemin, Kalju, qui vit près du canyon de Kahn'ym et qui enquête sur cette faille apparue près de son village, et cet elfe sauvage qui a le même souci sur le territoire de sa tribu. C'est pour cela qu'il nous accompagne dans le massif. Il s'appelle Eyri. Bref..."
Elle haussa les épaules.
" On aurait surtout besoin de lui expliquer que sa monture n'est pas adaptée à la montagne. C'est un cerf, sa monture. Il faudrait qu'il le laisse en Lorien... Et aussi lui suggérer de s'équiper en vêtements chauds. Il n'a jamais quitté la Lorien, je ne sais pas s'il sait à quoi s'attendre, là-haut. Et si tu y arrives, on pourrait aussi lui expliquer l'itinéraire qu'on compte suivre, les informations que Kalju a pu obtenir... mais c'est secondaire."

Jill l'écouta, la mine interdite, puis ne put s'empêcher de rire.
" Je te reconnais bien là, Astrée, à passer d'un truc compliqué à un autre. Je veux bien essayer d'expliquer à ton Sauvage qu'il doit laisser sa bestiole derrière, mais il est fichu de s'y accrocher juste pour le principe, tu sais. Vous pourriez songer à acheter une bonne couverture au cerf... Ce sont des animaux avec un pied... presque plus ou moins sûr... et ça passerait nettement mieux. Il est jeune, ton Sauvage ?"

Astrée acquiesça.
" Oui, il est jeune. Enfin, il me semble, c'est difficile à dire chez les elfes."
Elle haussa les épaules.
" Et en plus d'avoir froid, sa monture ne lui servira à rien : Kalju, le génasi, avance à pied, et on se cale sur son rythme. On peut charger les sacs sur son animal de bât, une espèce de bovidé très costaud. Après... effectivement, si Eyri ne veut pas se séparer de son cerf, on résoudra le problème avec une couverture. J'imagine que la compagnie du cerf le rassure, en quelque sorte, en territoire inconnu. Mais il faut qu'on en discute avec lui... Et c'est compliqué quand on ne parle pas la langue."

" D'accord, allons voir ça. Mais tu dois savoir que les Sauvages... n'ont pas particulièrement d'atomes crochus avec les Lunaires..."
Elle eut un sourire.
" Au cas où tu imaginais encore qu'il y avait une superbe nation elfe, ou je ne sais quoi."

Astrée sourit.
" J'ai bien compris que vous êtes très différents, et qu'il n'y a guère de points communs entre lunaires et sauvages... Mais vous avez la même langue, et puis, il préfère sûrement une elfe lunaire à une humaine. Donc on va voir ce que ça donne."
Tout en parlant, elle entraînait Jill vers la sortie.

Kalju attendait à l'extérieur, Eyri un peu plus loin. En l'apercevant, Jill eut un léger rire.
" Astrée, tu ne vas jamais pouvoir lui prendre son cerf. Il en a besoin... bien davantage que toi ton cheval bizarre. Je crois que c'est peut-être plutôt à ton gros bonhomme gris que tu devrais l'expliquer."
Le genasi s'approcha de deux jeunes femmes, tandis qu'Eyri gardait ses distances.
" Comment expliquer ça... Il n'est pas adulte. Il a besoin de son cerf. Vous ne pouvez pas le lui prendre : rien ne le remplacera."

Astrée acquiesça.
" Tu veux dire... que son cerf est encore plus proche de lui que le compagnon animal d'un rôdeur ?"
Elle comprenait fort bien ce que cela impliquait : elle aurait détesté qu'on l'oblige à laisser Prince en arrière, pour quelque raison que ce soit, même si elle pouvait l'accepter quand c'était nécessaire.
Elle se tourna vers le génasi.
" Kalju, je te présente Jill. Elle a probablement raison, elle connaît mieux les elfes que nous... Donc je crois qu'il faut qu'on explique à Eyri le problème, qu'on lui dise que son cerf aura bien trop froid là-haut et qu'il sera très dépaysé, et qu'il devrait peut-être rester en arrière. Mais s'il s'avère qu'il est aussi attaché au cerf qu'elle le pense, s'il veut le garder, je crois qu'il ne faut pas insister pour les séparer. On pourrait contourner le problème avec une bonne couverture, non?"

" Je n'y avais pas pensé, dit Kalju. Et c'est vrai qu'a priori, nous n'allons pas quitter les chemins... Je suppose qu'il passe aux mêmes endroits qu'un cheval."
Il opina du chef, pensif, tandis que Jill l'observait d'un air malicieux.
" Je vais aller sonder le Sauvage, proposa-t-elle. Enfin, s'il me laisse l'approcher... Il s'appelle Eyri, tu disais ?"
Elle quitta le genasi pour se diriger vers le jeune elfe qui, très clairement, n'était pas ravi de la voir venir. Il esquissa un geste qui aurait d'ailleurs pu passer pour une sorte de malédiction.

Astrée les observa avec intérêt. Elle n'imaginait pas que Eyri puisse montrer autant voire plus de défiance envers une elfe lunaire qu'envers une humaine. Bien sûr, ils étaient très dissemblables, d'après le peu qu'elle savait d'eux : ils étaient probablement les deux natures d'elfes les plus opposées qui soit, l'ouverture des lunaires contrastant fortement avec le conservatisme des sauvages. Mais l'humain n'était-il pas l'ennemi commun, en l'occurrence ?
Elle adressa à Eyri un sourire qu'elle voulait rassurant, consciente que c'était parfaitement inutile. Et attendit le verdict.

Eyri ne lui prêtait aucune attention et il ne remarqua donc pas qu'elle lui adressait quoi que ce soit. Il ne se déroba pas, cependant, lorsque Jill arriva à proximité. Astrée nota qu'elle conservait une distance beaucoup plus large entre eux que ce qui était la norme parmi les humains (du moins sur Hélonna, et les Hélonniens avaient un côté tactile que, Astrée le savait bien, n'avaient pas les Dorrandins de sa région d'origine) et ils ne se saluèrent pas, en tout cas ni par geste, ni par parole. Si quelque chose d'autre était passé entre eux, impossible de le savoir. Elle parla la première, de sa langue flûtée, presque musicale, et il répondit de la même manière. On les entendait à peine, car ils murmuraient, signe que leur ouïe fine se satisfaisait de peu pour qu'ils puissent se comprendre. Il était aussi impossible pour une oreille humaine de détecter en quoi l'elfique de l'un différait de l'elfique de l'autre. Ils parlèrent un moment, sans esquisser le moindre geste, leurs lèvres étant seules à remuer et parfois leurs yeux, en mouvements brefs. Puis Jill se détourna et revint vers l'humaine et le genasi.
" Il va garder son cerf. Vous vous débrouillerez, non ? Ces bestioles sont suffisamment rustiques. Et il lui trouvera la petite laine nécessaire."

Astrée haussa les épaules. Jill avait vu juste, et la réponse n'était pas surprenante. Ils se débrouilleraient, bien sûr.
" C'est comme il veut. Au moins, il est prévenu du problème... et c'est à lui de décider, bien sûr. Est-ce qu'il t'a dit quelque chose d'utile, sinon ? Est-ce qu'il a des questions à poser, par exemple, sur la suite de l'expédition ? Même si j'ai bien vu que le courant entre elfes lunaires et sauvage n'est pas si facile à établir... Il n'a pas forcément envie de communiquer. "

" Il considère que rien de tout ça n'est mon problème, ce en quoi il n'a pas tort, dit Jill avec un haussement d'épaules. Il est sûr de lui pour la montagne... C'est très certainement une pose, mais ça ne change rien à ce qu'il en dira. Crois-moi quand je te dis ceci : tu n'arriveras jamais à le convaincre de rien. S'il n'a pas l'impression qu'il a décidé seul, il s'opposera à tout ce que tu pourras tenter de lui proposer."
Elle tourna les yeux vers Kalju.
" Il est un peu impressionné par le gars gris. Ce que je peux comprendre. Il est bizarre. Je te conseille, si tu veux faire passer des choses à l'elfe, de te reposer sur lui. Même s'il n'en touche pas une, ça passera mieux."

" D'accord", répondit Astrée avec une grimace.
Kalju était impressionnant, effectivement, et ses pouvoirs particuliers de génasi devaient aider à asseoir une certaine "autorité". Et puis, Eyri suivait Kalju, dans cette histoire. Pas elle. Donc rien de ce qu'elle pouvait dire ou faire n'avait la moindre importance pour lui.
Elle se tourna vers Kalju.
" Est-ce que tu as d'autres informations que tu souhaites lui donner... ou des questions à lui poser ? Si ça vient clairement de toi, même par l'intermédiaire de Jill, ça passera déjà un peu mieux..."

Le genasi secoua la tête.
" Pas comme ça. Il sait que nous allons nous rendre dans divers endroits... J'espère qu'il se montrera civil."
Jill rit franchement.
" Civil ? Il y a quelque chose qui n'est pas clair, dans le mot "sauvage" ?"
Kalju esquissa une petite grimace.
" Bah, au pire... on se débrouillera.
— C'est sans doute la plus sage attitude."

Astrée haussa les épaules.
" Jusque-là, il a surtout tenu ses distances dès qu'il y avait d'autres personnes... et même avec nous d'ailleurs. Il n'a pas posé de problème et personne ne lui en a posé. Il n'y a pas de raison que ça ne continue pas sur le même mode... Mais ce qui est compliqué, du fait de ne pas parler sa langue, c'est qu'on ne saura pas lui expliquer ce qu'on découvre, ou ce qui va se décider. Et il ne nous fera pas assez confiance pour s'en remettre totalement à nous. C'est dommage, Jill, que tu ne puisses pas lui expliquer qu'il peut nous faire confiance. De toute façon il n'écoutera rien. Donc, comme tu dis, Kalju... on s'adaptera".
Elle était impressionnée de tout ce que Jill parvenait à savoir -ou deviner- alors même que les elfes ne laissaient rien paraître sur leur visage.

Jill ne parut pas aussi désolée qu'Astrée.
" Tu es druide, non ? Tu as l'habitude de composer avec des créatures dont tu ne comprends pas le langage. C'est la même chose avec Eyri. Et d'ailleurs, c'est aussi la même chose pour Eyri. Il ne comprend rien à vos manières, à vos gestes, vos expressions, votre odeur, même. Il est sensible à toutes ces choses, pourtant, et il n'en tire aucune information utile, parce que vos signaux sont... bizarres. Prends le temps de l'observer et tu finiras par le comprendre dans la mesure du possible. Le langage parlé... C'est très humain de se baser là-dessus, et surtout là-dessus. Eyri est nettement plus sensible à ce qui ne se met pas en mots..."
Elle sourit.
" Le... fatalisme... est plus rassurant que l'inquiétude de bien faire, en cela."

" Autrement dit, c'est comme apprivoiser une créature sauvage, conclut Astrée avec un haussement d'épaules. Sans sous-entendre qu'il en est une, bien sûr ! Mais j'avoue que j'ai du mal à décrypter vos signaux non verbaux. Vos visages, vos regards, ne me semblent pas expressifs, vos yeux bougent à peine, vous faites bien moins de gestes que nous.... Je ne sais pas comment tu parviens à savoir qu'il écoutera mieux Kalju, par exemple : c'est évident qu'il ne te l'a pas dit comme ça. En fait, je comprends presque mieux certains animaux..."

" Je le sais simplement parce que Kalju est calme. La plupart des... créatures... sont rassurées par les gens calmes. Ils reflètent une plus grande confiance en eux, même si c'est une façade, sans doute, parfois. Et puis, tu sais... Il n'est pas humain. Pour un elfe, c'est toujours rassurant. Un Sauvage qui a vécu toute sa vie dans un village replié sur lui-même, avec des contes et des légendes colportés par les Anciens comme seule source d'information sur ton peuple... Il ne va pas hésiter longtemps. Je n'ai rien lu dans ses yeux, ou je ne sais pas ce que tu imagines... Enfin, rien lu dans ses yeux à ce sujet."

Astrée ouvrit machinalement la bouche pour demander ce que Jill avait été capable de lire dans les yeux d'Eyri, et sur quels sujets... et la referma. L'elfe lui avait déjà dit tout ce qu'elle savait, y compris la défiance d'Eyri envers elle -ce dont elle se doutait déjà. Il n'y avait rien d'autre à apprendre. Et elle ne se sentait pas particulièrement inquiète. Tout s'était bien passé jusque-là, il n'y avait pas de raison que cela change.
" Il va se sentir insécurisé, dans les montagnes, observa-t-elle en lui jetant un coup d'oeil rapide. C'est trop différent de ce qu'il connaît et il y aura des humains... Ce serait bien qu'on arrive à gagner un minimum sa confiance, pour son propre bien-être. Mais de toute façon, on va se débrouiller et il va s'adapter..."

" Tu vois ce que je disais ? Tu pars du principe que ça va être difficile. Et tu le reflètes, à ton corps défendant. Et il le sent."
Elle secoua la tête.
" Je suppose que l'inquiétude est la mère de la prudence, ou quelque chose comme ça. Vous avez un Dieu des Précautions, chez les humains ? Bref... Oui, vous vous en sortirez. Il s'en sortira aussi bien qu'un autre. Tant que tu lui laisses son cerf."
Eyri les observait d'un air distant, la main posée sur l'encolure de son animal. Ce dernier demeurait vigilant, prêt à bondir. Kalju poussa un bref soupir.
" Bon, dans ce cas, nous allons nous remettre aux préparatifs. Merci de votre temps."

Astrée songea que l'attitude du cerf pouvait peut-être refléter l'état d'esprit de l'elfe. Cela n'aurait rien d'étonnant... et elle lisait peut-être mieux les attitudes des cerfs que des elfes, finalement.
Elle opina du chef aux propos de Kalju.
" Oui, merci beaucoup de ton aide, Jill. Je doute que je te revoie avant notre départ... mais qui sait, peut-être au retour, si tu n'es pas encore repartie. Si je n'en ai pas l'occasion, tu veux bien transmettre mes salutations à Palen ?"

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Belred Luyn