La Couronne de Cuivre

Thibault parut hésiter, coula un discret regard en direction de ses coreligionnaires, se contenta finalement d'acquiescer.
-A demain, Hubert.
Les paladins lui souhaitèrent également bonne nuit et, tandis qu'il s'éloignait, il entendit qu'ils devisaient déjà de l'expédition à venir. Éliminer le mal - et la laideur - du magnifique écrin que constituait la cité, c'était dans leurs cordes, après tout.

Hubert remonta vers les étages passablement mal à l’aise. Finalement ses préparatifs lui avaient pris une bonne heure et il ne savait pas où il dénicherait Albérich. Pendant un moment, il songea à ne pas le chercher. Le Luménien avait peut-être besoin d’air, il ne pouvait pas se montrer envahissant.
Il alla jusqu’à leur chambre, la trouva déserte, reprit les escaliers, erra un moment, incertain, puis poussa jusqu’au bureau du Luménien et l’y découvrit, penché sur ses documents, la mine concentrée.
« Je rêve. » dit-il.
Albérich leva les yeux et sourit.
« Désolé. J’ai passé la journée à me promener dans les couloirs et à bavarder avec les uns et les autres… Je me disais qu’il fallait quand même que j’en garde des traces.
— C’est le soir…
— Je sais. Et il n’y a aucune mention, dans la charte de la communauté, de l’interdiction de travailler le soir.
— Misère. »
Il s’assit sur la table de pierre.
« C’est le moment où je viens te débaucher, traditionnellement.
— Il serait grand temps que nous instituions une taverne. La grande salle est agréable, mais l’ambiance n’y est pas tout à fait.
— Et ça manque cruellement de bière.
— Et de bon vin. »
Il se leva et reboucha son encrier.
« Mine de rien, nous sommes prisonniers d’un écrin magnifique… loin des possibilités d’une véritable ville. Toi et moi n’y sommes plus habitués. »
Hubert acquiesça tandis que le Luménien s’approchait.
« Je ne veux pas te déranger… Si tu avais du travail…
— Je t’attendais. »
Il sourit, Hubert l’attrapa au passage et l’embrassa doucement.
« Tu as pu rassembler ton équipe ?
— Oui.
— Et ?
— Tout le monde a répondu présent. »
Albérich le dévisagea. Il n’avait jamais été très doué pour dissimuler ses émotions — à une exception près.
« Mais encore ?
— Thibault n’a pas eu l’air enchanté. Mais quand j’ai offert de le libérer, il n’a pas non plus voulu reculer. Je ne sais vraiment pas quoi faire, le concernant. »
Le Luménien pinça les lèvres.
« Que t’a-t-il dit, au juste ?
— Là maintenant ?
— Non. Me concernant.
— Ah. En fait, c’est Giovanni qui m’a prévenu le premier… que Thibault revenait vers toi. Mais je n’ai rien dit à Thibault, j’ai même été affable.
— Vous avez été très civils, tous les deux. J’espérais que vous seriez bons amis.
— Je sais… mais compte tenu des circonstances…
— Oui... Que t’a-t-il dit, alors ?
— Qu’il me laissait le champ libre. Si et seulement si je me déclarais. Et qu’il le faisait parce que c’était ce que Sunie lui imposait, mais que c’était une décision plus que douloureuse. »
Albérich soupira, un instant perdu dans ses pensées.
« Je dois lui parler.
— Tu crois que tu vas pouvoir atténuer quoi que ce soit ? Qu’est-ce que tu vas lui dire ?
— Je ne sais pas. Mais c’est malhonnête de le laisser dans le noir. C’est mon ami. Si je ne savais pas tout ceci, c’est la première personne à laquelle je m’en serais ouvert… »
Hubert acquiesça.
« Tu ne dois pas craindre que cela me fasse reconsidérer notre situation, Hubert. Je ne regrette rien. Et si le chagrin de Thibault est immanquablement… douloureux pour moi… Je ne peux pas lui donner ce qu’il veut, et il le sait. Nous avons peut-être eu notre heure autrefois, et nous l’avons laissée passer. C’est ainsi. Les regrets ne sont pas lathandrites. Mais je ne peux pas faire l’économie de cette conversation. Thibault est mon ami.
— Je sais. Je sais bien. Excuse-moi. »
Le Lathandrite lui toucha la joue et ils gagnèrent le couloir. Ils marchèrent un moment en silence, puis montèrent sur les remparts. La nuit était couverte et froide, ils restèrent en mouvement.
« Pas de bons conseils pour demain ? demanda finalement Albérich.
— Tu pensais que je t’écarterais ?
— Oui.
— Je ne crois pas que nous courrions de risques. J’ai toute confiance en Ezéchiel et en son repérage. Et tu es notre meilleur chasseur de morts-vivants.
— Tu ne m’as jamais vu à l’œuvre.
— Non. Mais ce serait faire insulte à Lathandre que de ne pas compter sur le pouvoir dont il te gratifie. »
Il soupira.
« Je vis de toute façon avec la hantise qu’il t’arrive quelque chose. Je suis conscient que tu n’es pas aussi démuni qu’hier. Et la meilleure façon pour que je l’assimile, c’est de voir comment tu te débrouilles. D’autant que je serai là, moi aussi. Je te protégerai en cas de besoin. C’est mon métier. »
Le Luménien rit doucement.
« Ton métier. Il a bon dos, le discours sur le garde du corps.
— La situation présente n’y change rien. J’ai la chance de pouvoir joindre le devoir à l’envie. »
Ils s’arrêtèrent à distance de deux sentinelles. Profitant de l’ombre, ils s’embrassèrent dans l’air glacé.
« Mais donc, pour en revenir à ta question, mes bons conseils sont… d’abord, impressionne-moi… et ensuite, souviens-toi que, quels que soient nos rapports par ailleurs… en cours d’opération, c’est moi qui commande. »
Le prêtre sourit.
« Ça a le mérite d’être clair.
— Je te promets de ne pas me montrer inutilement protecteur. »
Ils continuèrent à arpenter les remparts, discutant des prochaines expéditions à mener. Les abords du lac semblaient prometteurs, et la plupart des personnes avec lesquelles ils avaient parlé paraissaient motivés par la perspective des trésors que renfermaient peut-être ces bâtiments somptueux. Hubert continuait à s’inquiéter des remparts, cependant, qu’il estimait prioritaires pour garantir l’intégrité de la cité. Et il y avait la question des parcs et des jardins à ensemencer. Bref, trancher cette question ne serait pas évidente et leur promettait bien des débats.
Ils finirent par gagner leurs appartements où ils se couchèrent rapidement. Albérich était gelé, Hubert le réchauffa de son mieux, et ils s’endormirent sans tarder, sans trop songer au lendemain.

Lendemain qui les rattrapa pourtant, quoiqu'il eut la bonté de leur offrir un réveil en douceur. Ils s'en allèrent prier sur les remparts et sous un ciel gris moucheté de bleu, aux côtés d'un Gabriel plus joyeux que jamais. Ensuite, ce tuf la salle commune et ses convives plus ou moins réveillés mais tous pleins d'entrain. Le combat du jour ne semblait inquiéter personne, pas plus ceux qui y participeraient que les autres et, de fait, se ronger les sangs outre-mesure n'aurait pas eu de sens : la Communauté avait déjà triomphé de pire. De bien pire.

Hubert était probablement un des moins détendus. Il savait par expérience qu'il était trop facile de sous-estimer l'adversaire, et vu qu'il était responsable de la sortie, il craignait d'avoir constitué une équipe trop maigre par rapport à l'épreuve. Du surcroît, Albérich accompagnait, ce qui l'inquiétait fatalement un rien. Bref, plus vite ils se seraient mis en route, mieux ce serait.
Il avait l'intention de vérifier que tout le monde était bien équipé, puis Ezéchiel prendrait la tête des opérations jusqu'au site de leur intervention.

Moins de deux heures plus tard, ils étaient sur les lieux.
Le groupe avait d'abord emprunté les souterrains, ce jusqu'aux portes nord. De là, émergeant à l'air libre et mené par le rôdeur, il avait remonté la longue avenue incurvée qui longeait l'intérieur des remparts : large et dégagée, l'artère rendait impossible toute embuscade, toute mauvaise surprise. Enfin, il avait fallu s'engager dans une rue perpendiculaire.
A présent, leur destination était en vue : un édifice élégant mais austère d'allure vaguement militaire. Une poignée de minutes encore et ils l'atteindraient.

Hubert prit son courage à deux mains et s'approcha d'Albérich qui devisait tranquillement avec Gabriel.
" Je peux te parler une minute ?"
Le Luménien parut surpris mais acquiesça, et ils marchèrent un moment côte à côte, sans plus rien échanger.
" Mais encore ?" finit par dire le clerc, un peu décontenancé.
Le paladin lui attrapa le poignet et plaça un petit objet dans sa main, puis le relâcha aussitôt.
" Je voudrais que tu portes ça." murmura-t-il sans le regarder, conscient qu'il s'était empourpré.
Albérich demeura silencieux une seconde, découvrant ce dont il s'agissait. Un anneau de platine. Il savait fatalement quel était son usage.
" Est-ce vraiment nécessaire ? demanda-t-il.
— S'il te plait.
— Si ça peut te rassurer...
— Oui. Grandement.
— Je ne serai pas blessé, Hubert.
— Alors ça ne te coûte rien."
Le paladin s'éloigna ensuite à grands pas pour rejoindre Ezéchiel, à la fois soulagé et mortifié.

Ils s'étaient rapprochés de la caserne et ils perçurent, provenant de l'intérieur, déchirant le silence ambiant, une longue et sinistre plainte.
Ézéchiel expliqua brièvement au paladin qu'outre l'entrée principale - qu'ils pouvaient tous deux apercevoir -, l'édifice rectangulaire comprenait une porte de derrière et deux issues latérales. Il lui dit également de ne pas hésiter à les utiliser, lui et ses éclaireurs - tous de bons archers.
Désormais, c'était à Hubert de prendre les commandes.

Mais Hubert était bien conscient de ne pas être un expert dans ce type d'interventions, aussi fit-il immédiatement appel à Guillermo, qui était autrement plus expérimenté que lui. Il semblait nécessaire de bloquer toutes les issues, histoire de s'assurer d'éliminer l'intégralité du groupe. Si les morts-vivants ne fuyaient pas volontairement devant l'ennemi, le sortilège de renvoi leur imposait parfois un tel comportement. Cela dépendrait du rapport des forces.
Il fit revenir l'éclaireur.
" Quelle est la taille des passages latéraux ? Un tir de barrage pourrait-il suffire à bloquer les éventuels fuyards ?"

-Oui oui : ce sont des issues secondaires, un seul homme peut y passer à la fois. Si tu le souhaites, je positionnerai mes hommes face à elles. En revanche, la porte de derrière est plus large, je ne sais pas si la couvrir de la sorte serait efficace. Sans compter que cela me forcerait à disperser davantage mes troupes...
-Bah, il suffit d'y placer quelques fantassins ainsi qu'éventuellement un lanceur de sorts. Cela me semble d'autant plus adéquat que si nous entrons tous dans le bâtiment, nous risquons de nous marcher quelque peu sur les pieds, à moins de constituer des escouades opérant séparément.

Hubert resta songeur une minute.
" Nous pouvons entrer par l'avant et l'arrière... Il faudra laisser des hommes en faction une fois que nous serons entrés. Mais est-ce qu'il y a des étages ? Si oui, constituer des escouades plus ou moins indépendantes pourrait se révéler approprié... J'imagine que vu ce que nous avons découvert ailleurs, il y a au moins des caves. La plupart des morts-vivants sont stupides, mais il suffirait d'une créature plus futée pour que le groupe nous échappe..."

-Il y a un étage. des caves me paraissent également probables et si ce bâtiment était bien utilisé à des fins militaires, comme tout semble l'indiquer, elles sont reliées au réseau souterrain.
-Si nous opérons par petits groupes, l'un d'entre eux pourrait tenter de leur couper la retraite en cherchant en priorité l'entrée de ces fameuses caves.
-Oui. et au pire, si quelques monstres nous éhcappent, mes hommes et moi nous en chargerons ultérieurement : nous avons déjà éliminé plusieurs petites bandes.

" Bon, faisons comme ça. Ezéchiel, place deux de tes hommes à chaque issue latérale, avec chaque fois deux soldats ou mercenaires. Guillermo, vous entrerez par devant avec moi, Albérich et Gabriel. Les deux paladins sunites et Thibault prendront l'arrière, avec la moitié du contingent armé et l'ensorceleur. Guillermo, formez votre équipe pour trouver les caves. En fonction des besoins, nous pouvons vous adjoindre un clerc. Ezéchiel, tu restes à l'extérieur. Misère, j'aurais dû compter plus large. Tant pis, c'est trop tard."

Quelques minutes plus tard, tout le monde était en ordre de bataille. Placé au pied des marches menant à l'entrée principale, Hubert avait de quoi être satisfait de l'état d'esprit de ses troupes : sur tous les visages, il lisait la même concentration, y compris sur celui de Gabriel qui, pourtant, piaffait manifestement d'impatience. Un peu à l'écart, Guillermo achevait de donner quelques consignes à son escouade - laquelle, comme l'on pouvait s'y attendre, était exclusivement composée de mercenaires.
Bref, le moment fatidique était venu.

Hubert prit une profonde inspiration. Il se sentait parfaitement calme. Massacrer des morts-vivants était son métier.
" Je passe devant. Albérich, il faut que tu avises d'emblée. S'ils sont suffisamment nombreux dans un rayon proche, tu opères un renvoi tout de suite. Gabriel, n'épuise pas ta puissance avant cette première salve : vous devez absolument vous coordonner tant que vous êtes près l'un de l'autre. Et j'aimerais autant que vous le restiez. Maintenant, si vous avez des incantations préliminaires, c'est maintenant."
Il ne tarda pas de son côté, tandis que le Luménien en faisait de même.

Hubert -> Protection d'autrui -> Albérich

Albérich -> Bénédiction -> le groupe qui l'accompagne

" On y va. Pas d'initiative malvenue. On reste groupés, on protège les lanceurs de sorts. C'est parti."

En groupe bien ordonné, ils gravirent les marches, franchirent le seuil et pénétrèrent dans un vaste hall à colonnes. La lumière se déversant par la porte et par les fenêtres leur permit, en un instant, de constater qu'il était complètement désert. Néanmoins, la neige portée par le vent et entrée par le même chemin était piétinée, constellées d'empreintes se dirigeant vers la grande ouverture au fond de la pièce et vers celles, plus petites, ménagées dans les murs droit et gauche. De surcroit, il leur semblait entendre, provenant de plus loin dans le bâtiment, des grognements, des marmonnements, des frôlements...

Se diviser aussi rapidement en trois équipes ne semblait pas la meilleure idée du monde, aussi le paladin décida-t-il de procéder par étapes. Il laissa deux hommes en arrière pour surveiller le hall, leur recommandant de se replier à leur suite en cas de pépin, et envoya le reste du groupe vers la gauche. Il était peu probable qu'ils parviennent à nettoyer les lieux petite poche par petite poche, sans donner l'alerte, mais les morts-vivants n'étaient pas forcément très futés et ils comprendraient peut-être trop tard ce qui leur était tombé dessus. Il prit à nouveau la tête, couvrant les deux clercs dans son sillage. Il se doutait que Guillermo ne tarderait pas à faire cavalier seul, mais il se fiait à ses initiatives.

La salle qu'aperçut le paladin par la porte grande ouverte était plus petite et plus simple que la précédente.
Plus peuplée, aussi.
Une poignée de morts-vivants y erraient de leur démarche gauche. Six, peut-être sept. Des squelettes et des zombies, quoi que la chair s'accrochant encore aux ossements de ces derniers était si rare qu'elle les rendait difficilement discernables des premiers.
L'un d'entre eux aperçut Hubert.
Il poussa un grondement et commença à avancer vers lui, mains tendues, bientôt imité par le reste de la bande.

Du menu fretin, en apparence du moins. Il était tentant de demander à Albérich de les renvoyer, mais c'était du gaspillage. Le paladin préféra une élimination à l'ancienne, prompte et efficace, quoique salissante. Ils étaient assez nombreux pour se débarrasser chacun d'un adversaire, et c'était un bon test pour les moins expérimentés d'entre eux. Au pire, s'ils s'avéraient un peu coriaces, Gabriel devrait pouvoir faire usage de son renvoi avec suffisamment de force pour renverser la tendance.
Il dégaina donc sa lame et fit signe au petit groupe de passer à l'action.

L'affaire fut réglée en seulement quelques instants.
Il avait choisi pour l'accompagner des hommes expérimentés et entraînés. Quant à leurs adversaires, ils n'avaient rien en commun avec ceux qui avaient composé les troupes du défunt Seigneur des Tombes : il s'agissait de morts-vivants tout ce qu'il y a de plus ordinaires, qu'aucune magie ne semblait renforcer. Bref, on les passa en un tournemain par le fil de l'épée.
Le dernier venait de s'écrouler lorsque, du cœur du bâtiment, retentit un cri strident, inhumain.

" On bouge." fit Hubert.
Il les entraîna directement vers la source du cri. Il n'était pas impossible que les Sunites soient arrivés tout de suite face au groupe le plus difficile et ils avaient peut-être besoin de renforts. Quoi qu'il en soit, il faudrait affronter la créature au cri hanté. Autant le faire quand l'escouade était encore en possession de tous ses atouts.

Grognements, grondements.
Cliquetis d'ossements, de griffes sur le pavement.
Râles, frôlements.
Ils étaient encore à quelques mètres de l'issue choisie lorsqu'en surgirent des goules, nombreuses, avides...
Derrière lui, le paladin entendit Guillermo lancer un ordre : manifestement, des monstres venaient également de sortir par la porte de droite.

" Albérich." dit simplement Hubert, sans bouger de l'endroit où il se trouvait, l'épée au poing.
Le clerc derrière lui n'avait pas besoin d'un autre signal. Le paladin le devina brandissant le disque de quartz rose qui symbolisait leur dieu commun.

Albérich -> Renvoi des morts-vivants

En fonction de la réaction des goules, il faudrait ensuite les éliminer, puis pousser plus avant. Guillermo pouvait aisément protéger leurs arrières.

La réaction des goules fut spectaculaire : elles tombèrent en poussières, réduites à néant par la puissance que Lathandre conférait à son ancien aubemestre.
-Hé, tu pourrais en laisser aux copains... grommela Gabriel.
Derrière eux, les mercenaires réduisaient leurs adversaires en charpie.

Hubert s'était attendu à ce qu'Albérich soit efficace, mais peut-être pas à ce point. En même temps, ce n'était pas complètement surprenant : c'était un clerc expérimenté, spécialisé en magie lathandrite, laquelle tournait tout entière autour de la lumière et de l'élimination de la non-vie. Même s'il aimait la poussière de son bureau — quoi qu'il prétende, il était taillé pour la chasse aux morts-vivants.
Mais ce n'était pas le moment de s'émerveiller des compétences de son amant : ils devaient poursuivre leur progression.
" Ne t'inquiète pas, il y en aura sûrement assez pour tout le monde." dit-il cependant, à l'intention de Gabriel.

-Mouais, fit l'intéressé, peu convaincu.
Et la suite lui donna raison.
Ils repartirent de l'avant, croisant trois petits groupes de non-morts que quelques coups d'épée annihilèrent en un rien de temps, puis une nouvelle vague de goules qu'Albérich, en un sortilège, réduisit en charpie.
Il y avait de la lumière, devant eux. Naturelle. Elle provenait d'une vaste cour intérieure complètement déserte.
Elle ne le resta pas longtemps.
Ils entendirent des pas, des cliquetis d'armures, et virent bientôt apparaître, par la porte qui leur faisait face, l'escouade menée par les Sunites.

Les voir débarquer était un soulagement, mais Hubert ne voulait pas croire qu'ils en avaient déjà terminé. Il y avait l'étage dont avait parlé Ezéchiel, et ces fameuses caves. Quelque chose avait hurlé, de surcroît. Cette cour vide ne lui disait rien qui vaille et avant de la traverser pour aller s'entretenir avec les Sunites, il déploya les mains devant lui pour chercher toute trace de maléfice.

Hubert - > Détection du mal

Son sortilège n'ayant rien décelé d'inquiétant, il s'avança, imité par leurs vis-à-vis.
-Nous en avons éliminé vingt-trois, fit Renaud sur le ton d'un rapport fait à un supérieur. Huit squelettes, cinq zombies et dix goules.
-On a fait mieux : vingt-sept. Mais je n'ai pas fait le décompte par type, intervint Gabriel, sur un ton exagérément fanfaron.
-Nous sommes allés tout droit : nous pouvons donc encore nous rattraper sur les salles latérales et à l'étage, intervint Roland.
Toujours vigilant, Hubert nota que les mercenaires ne les avaient pas suivis : ils devaient avoir pris la direction des caves.

Pendant qu'Hubert discutait avec ses homologues, de la meilleure manière de continuer leur opération : vider les salles latérales restantes pour les uns, monter à l'étage — une fois l'escalier découvert — pour les autres, Albérich se mit en quête de Thibault, curieux de savoir comment le Sunite avait traversé ces premières petites échauffourées. Lui-même se sentait empli d'une énergie fantastique, et ce n'était pas qu'une sensation : le pouvoir de Lathandre rayonnait en lui, intact et belliqueux. Il ne devait plus rester beaucoup de morts-vivants, mais sans doute les plus coriaces, et il avait à peine commencé à explorer ses possibilités.

Le Sunite n'avait manifestement pas éliminé tout ses opposants grâce à ses seuls pouvoirs : son armure était constellée de tâches peu ragoutantes, signe qu'il était allé au contact.
-J'ai l'impression qu'au final, ce qui aura été le plus long dans toute cette opération, c'est... le trajet, dit-il, souriant. En fait, c'est tellement simple et rapide que je commence à soupçonner un coup monté : m'est avis que vous avez mis tout ça sur pied pour que les prochaines expéditions s'orientent non pas vers des édifices dédiés à la culture, aux arts ou aux loisirs mais bien vers des bâtiments militaires. Non, décidément, le fait que nous nous trouvions dans une caserne n'est pour moi pas un hasard : je vois clair dans votre jeu !

" Qu'est-ce que tu racontes ? s'exclama Albérich, railleur. Je cherche une bibliothèque, voire un lieu de pouvoir, et tu me parles de casernes ? Qu'est-ce que j'irais faire dans une caserne ? Bon, on pourrait se poser la question de pourquoi les morts-vivants ont trouvé refuge ici plutôt qu'ailleurs, mais à mon avis, c'est un pur hasard... Enfin, ça va sans doute dépendre de la nature des plus retors d'entre eux. Vous avez entendu ce cri ? Ça t'évoque quelque chose ? Un esprit ?"

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Une cité perdue