La Couronne de Cuivre

" Il sera sûrement très intéressé par cette curieuse mission qui vous est confiée. Enfin, à mon avis... C'est tout de même très particulier."
Gwenaël sourit.
" Mais je parle, je parle... et vous êtes sûrement fatigués par le trajet, et les enfants ont besoin de dormir...
- On n'est pas des enfants !
- Hum... Parfois je l'oublie, excusez-moi. Et pour en revenir à vous deux... Vous souhaitez dormir ici ou dans la cabane de Sylvia ? Il doit y faire plutôt frisquet, puisque vous n'avez pas fait de feu ce soir... Donc je peux vous héberger au chaud si vous préférez, ce sera un plaisir !"

Une nouvelle fois, Kasumi se tourna vers Sylvia pour lui laisser la décision. Il n'avait pas vraiment de préférence pour sa part : dans un cas comme dans l'autre il serait ravi. Mais peut-être était-il plus sage et plus poli d'accepter cette généreuse invitation dans la famille de la jeune femme. Ils avaient bien le temps de demeurer entre amoureux dans les jours et les années à venir.

Sylvia semblait tentée par une nuit au chaud, d'autant qu'au-dehors, la pluie s'était muée en une bruine humide et glaciale. Elle accepta donc en souriant l'invitation de son oncle.
La cabane était petite, mais ils n'avaient pas besoin de beaucoup d'espace après tout. Joris et Amish ne se firent pas prier pour leur laisser leur "chambre", déménageant quant à eux sur une paillasse de fortune dans la pièce principale. Certes, leur chambre n'était en réalité qu'une alcôve, tout comme celle de Gwenaël, mais elle était fermée d'un rideau et leur donnait l'illusion de l'intimité. A condition de rester discrets bien sûr... On ne les voyait pas mais on les entendrait, et les adolescents n'avaient pas forcément besoin de "leçon de choses" dans la soirée...

Ce n'était bien entendu pas dans les intentions de Kasumi : il était ravi d'accepter l'invitation cette fois-ci. Et il était tout aussi heureux de se contenter de dormir aux côtés de sa compagne. Après avoir accepté l'hospitalité de sa propre famille, il avait ainsi l'impression que leur couple était en train de franchir une nouvelle étape. Tous sourires, il laissa la rôdeuse le guider après avoir souhaité chaleureusement la bonne nuit à leur hôte d'un soir.

Les chants des oiseaux, le lendemain matin, et la luminosité filtrant à travers les volets, lui apprirent que le beau temps était de retour. Sylvia, à ses côtés, émergeait lentement, elle aussi, lui dédiant un sourire embrumé.
Une bonne odeur de pain et de thé s'insinuait jusqu'à eux, et les bruits de vaisselle leur indiquèrent qu'ils étaient certainement les derniers levés. Ou, en tout cas, pas les premiers : apparemment, Amish dormait encore, elle aussi, et son frère s'employait à sa réveiller sans douceur. Elle n'avait guère le choix, en l'occurrence, vu le bruit qu'ils feraient en déjeunant tous à un mètre de sa paillasse.

Kasumi n'avait pas envie d'être le dernier levé surtout alors qu'ils étaient invités chez l'oncle de Sylvia et qu'ils devaient donner l'exemple à ses deux cousins. Le demi-elfe se contenta donc d'un rapide baiser et d'une caresse affectueuse dans la chevelure un peu en désordre de sa compagne avant de se lever et d'enfiler promptement ses bottes pour rejoindre la compagnie.

Au passage, il souhaita la bonne journée aux premiers levés avec enthousiasme : la lumière qui filtrait par la fenêtre de la cabane promettait en effet une magnifique journée d'automne.

Le petit déjeuner fut rapidement expédié - avec la présence d'une Amish particulièrement mal embouchée-, puis Gwenaël s'éclipsa au-dehors : la saison était propice aux cueillettes de fruits sauvages, tubercules et châtaignes, et chacun contribuait à rassembler autant de provisions que possible pour faire face à la rigueur de l'hiver. Même les chasseurs laissaient un peu de côté leurs arcs pour aider aux cueillettes. Les deux adolescents s'en furent très vite, à leur tour, prêter main-forte aux différentes tâches du campement. outre la cueillette, il y avait la salaison et la fumaison de viandes, des réparations en tout genre d'armes, d'outils et d'habitation.
Sylvia, quant à elle, semblait désireuse de retrouver enfin son propre logement, dans lequel elle pénétra avec une mélancolie visible. Rien n'avait bougé depuis qu'ils l'avaient quitté, ou presque : quelques toiles d'araignées, quelques crottes de rongeurs, un peu de poussière déposée partout, des cendres froides dans la cheminée. L’alcôve servant de chambre abritait un lit tout prêt. Mais l'endroit avait indéniablement un air d'abandon.

Kasumi était resté un instant sur le pas de la porte pour permettre à Sylvia de reprendre ses marques. Il s'approcha ensuite d'elle, conscient de son trouble et de sa nostalgie et l'enserra tendrement de ses bras :

- Je vais t'aider à remettre de l'ordre : on sera content de retrouver ta cabane pour nos prochains séjours ici.

Peut-être Sylvia avait d'autres idées en tête pour son logement mais il savait l'attachement qu'on pouvait avoir de son chez soi. D'ailleurs, il en venait à espérer avoir bientôt un endroit qu'il pourrait tout à fait considérer comme tel et partager avec elle.

Sylvia secoua la tête.
" Non. Je ne veux pas que cette cabane soit abandonnée pendant des mois ou des années et qu'on la retrouve encore plus froide et poussiéreuse qu'aujourd'hui... Ca ne fait pas envie... Il faut qu'on la range, oui, et qu'on fasse quelques petites réparations, mais je veux la débarrasser de tous les objets personnels. Je vais garder ceux auxquels je tiens le plus, bien sûr, et donner les autres. Il faut laisser les meubles, la vaisselle, le linge de maison. Cela servira tôt ou tard à des jeunes, peut-être à Amish ou Joris, qui sait... Ou à quelqu'un qui rejoindrait la communauté dans les mois à venir. En tout cas, je vais la mettre à disposition.

Kasumi respectait sa décision. D'autant plus qu'elle dénotait un sens pratique et la notion de partage qui était l'un des fondements de la communauté sylvestre. Il répliqua d'un ton tranquille :

- Tu as raison, ma douce. Nous avons quelques jours pour ça et aussi contribuer à la préparation de l'hiver pour ta famille et le reste de la communauté. Je crois que ça me plairait beaucoup de le faire sauf si tu voudrais faire autre chose de ces quelques jours ici...

" Non. Reprendre les bonnes vieilles habitudes ne nous fera pas de mal, au contraire ! On trouvera peut-être le temps de s'entraîner avec Hef ou Eliah, avec un peu de chance... tu sais que ça va me manquer de n'avoir plus de si bons instructeurs à qui demander conseil ? En fait... c'est presque comme si je devenais adulte pour de bon, en prenant mon indépendance. A mon âge, c'est grand temps !"
Elle secoua la tête.
" Bon, organisons-nous... Connaissant ton don pour le travail du bois, est-ce que je peux te charger de réparer cette étagère et les volets pendant que je fais du tri dans mes affaires ? On aura tout le temps d'aider au-dehors dans les jours à venir..."

Le programme lui convenait parfaitement d'autant qu'il pouvait s'installer dehors et profiter de l'ambiance besogneuse du campement pour ce qui était de réparer les volets et même l'étagère.

A première vue, il n'y avait rien de bien méchant à faire, preuve que Sylvia avait soigneusement entretenu son chez soi durant ces dernières années. Il pourrait remplacer une ou deux planches pour vraiment les remettre à neuf mais l'essentiel du travail consisterait avant tout à poncer le bois et lui réappliquer un traitement pour qu'il résiste aux prochains frimas. En tous cas, il ne tarda pas à se mettre au travail dans la joie et la bonne humeur.

Autour de lui, le campement était presque une fourmilière, et Kasumi retrouvait des souvenirs oubliés de ces automnes d'autrefois où lui aussi avait réparé des toitures, récolté des fruits sauvages, salé de la viande, confectionné des armes. Petits actes d'un quotidien sans histoire et un peu monotone, sans doute.

Le ciel s'était peu à peu voilé, et la pluie menaçait à nouveau, l'obligeant à s'activer plus efficacement. Elle se mit à tomber vers la fin d'après-midi, alors qu'il avait enfin achevé les tâches assignées par Sylvia. La rôdeuse, quant à elle, était toujours occupée à trier ses affaires. L'activité l'emplissait visiblement d'un peu de nostalgie, mais elle préférait le faire seule et l'envoya rejoindre le reste de la communauté, promettant de le rejoindre très vite. Un repas commun avait été organisé pour célébrer leur retour, et on commençait à faire circuler des verres de vin cuit. Gwenaël était présent, de même que la majorité des membres de la communauté, et l'ensemble du conseil des anciens. Plusieurs personnes l'abordèrent avec simplicité, demandant des nouvelles de son père, évoquant quelques souvenirs du bon vieux temps... et on lui servit de l'alcool sans compter.

Kasumi prit garde à modérer sa consommation tout en se privant pas de participer à la fête et échanger quelques mots avec chacun des convives venus lui demander des nouvelles ou simplement le saluer. Il chercha un peu plus activement à se rapprocher de Cewyn, désireux de s'entretenir avec le druide de la mission confiée par Celd et de la meilleure manière de l'accomplir. Ce serait aussi une première approche d'un des notables du conseil de la communauté pour lui apprendre qu'elle allait perdre l'une des leurs. Quoique la nouvelle ait certainement déjà circulé, selon toute vraisemblance : les nouvelles ne mettaient guère de temps à faire le tour d'une si petite assemblée.

Ensuite seulement, il se sentirait vraiment libre de participer à la fête en compagnie de Sylvia et avec le cœur léger.

Cewyn devisait avec deux autres druides, mais il parut deviner que le rôdeur souhaitait lui parler. Se détachant de ses interlocuteurs, il s'approcha du rôdeur.
" Alors, jeune Kasumi... Te voilà de retour auprès de tes racines ? Comptes-tu rester un moment par ici ? Ou vas-tu plutôt nous arracher notre chère Sylvia ?"
Il avait de longs cheveux d'un blanc argenté, trahissant son âge avancé, des yeux verts, et le teint un peu mat des elfes des bois. Son ton était chaleureux, plein d'une curiosité sincère, et même d'une certaine empathie.

Le demi-elfe avait l’habitude de la façon un peu mystique de s’exprimer du druide âgé aussi fit-il un effort pour répondre sur le même mode. Une sorte de petit jeu entre eux qui durait depuis des années que Cewyn remportait toujours haut la main :

- Un peu des deux et ni l’un ni l’autre en réalité : je ne compte pas couper Sylvia des siens mais elle a accepté de m’accompagner, oui. Quant à moi, je ne peux pas rester plus de quelques jours cette fois mais je compte bien revenir beaucoup plus régulièrement maintenant que j’ai goûté au plaisir de revoir mes terres natales, la communauté et ma famille.

Il marqua une pause pour lui laisser prendre la mesure de sa réponse avant d’enchaîner sur le sujet qu’il avait compté aborder avec le druide :

- Mais avant de m’en allait, j’espérais bien avoir l’opportunité de demander un conseil à un homme aussi sage que vous : Celd, un Sylvanien vénérable m’a confié un gland à planter dans un ancien bosquet sacré d’Helonna. J’ai conscience de l’honneur qui m’est fait et de la responsabilité que cela implique aussi je ne voudrais pas commettre d’erreur…

Celd eût l'air surpris par sa requête, puis lui sourit.
" C'est une bien belle responsabilité, en effet. Il est rare qu'un rôdeur soit chargé d'une telle mission. Ce sont plus souvent des clercs ou des druides.... Mais dis-moi, quelle erreur crains-tu de commettre ? Si le sylvanien t'a jugé apte à mener cette tache à bout, c'est que ton âme, ton coeur, suivent les voies de Mielikki. Il te suffira donc de suivre ton instinct..."

Kasumi répondit d'un ton parfaitement sérieux cette fois-ci :

- Je ne doute pas de ma foi et ma faculté à faire prévaloir les préceptes de Mielikki... Enfin, je ferai tout pour les interpréter correctement. Non, j'ai surtout peur de faire des erreurs, de ne pas planter le gland à l'endroit idéal, de ne pas en prendre soin comme il faudrait. Je n'ai pas vos connaissances en botanique...

Le druide sourit.
" Il te faut choisir un endroit ensoleillé, mais pas trop non plus. Si tu es au coeur d'un bosquet sacré, d'autres arbres lui feront de l'ombre, mais il faut qu'il reçoive pleinement la lumière du soleil le matin et le midi. Au besoin, s'il n'y a pas d'autre moyen, tu peux élaguer quelques arbres voisins, en veillant à ne pas les blesser grièvement. S'il n'y a aucun chêne sacré déjà présent dans ce bosquet, ce qui est probable, choisis l'endroit le plus central possible répondant à ces critères de luminosité."
Il réfléchit un instant.
" Idéalement, il aurait fallu le planter pendant l'équinoxe, ou un peu avant. Mais même en tenant compte de l'inversion des saisons là-bas, il est peu probable que tu sois rentré à temps. Essaie tout de même de ne pas trop attendre au-delà de la fin du mois de Mirtul. Sinon il grandirait trop vite et perdrait en vigueur. Ensuite... Une fois planté, puisque ce sera le printemps, il te faudra en prendre grand soin pendant une veille, le temps de sa croissance. mais tu le comprendras par toi-même..."
Il parut le jauger un instant du regard.
" La vraie difficulté n'est pas de trouver comment le planter. Mes conseils sont des conseils de bon sens, et tu aurais agi ainsi même sans que je te le dise. La vraie difficulté sera, pour toi, de trouver le bosquet et surtout son centre. Habituellement, seul les clercs ou les druides ont un ressenti suffisamment fin et précis de l'énergie divine pour le trouver... mais si Celd t'en juge capable, c'est que tu l'es certainement".

Kasumi avait été attentif à toutes ces informations, assuré de les retenir tant elles lui semblaient pleines de bon sens mais ravi de pouvoir bénéficier de ces repères le moment venu.

- Merci Cewyn : j'espère sincèrement ne décevoir ni Celd ni Mielikki. J'ai un peu l'impression de ne pas tout à fait mériter d'accomplir une telle mission et j'ai un peu peur de n'avoir été qu'un choix par défaut compte tenu de ma situation.

Le rôdeur se sentait malgré tout rasséréné par cet échange avec le druide et il lui montra en souriant et en cherchant déjà sa compagne du regard.

" Peut-être, effectivement, que tu étais le seul servant de Mielikki se rendant là-bas... Mais il me semble qu'il doit aussi se trouver quelques clercs de Mielikki présents dans tes terres de l'ouest, veillant sur d'autres bosquets sacrés, et que cette mission aurait pu leur être confiée. Si c'est à toi qu'elle a échu, c'est que tu en es jugé capable. Ne le perds pas de vue, ne te laisse pas envahir par le doute, et reste digne de cette confiance qui t'est faite."
Sur un dernier sourire bienveillant, Cewyn s'éloigna, appelé par l'un des druides de son cercle.
Sylvia quant à elle, n'était pas encore arrivée, sans doute toujours occupée à trier ses affaires. Mais il n'eût pas à l'attendre longtemps. Quelques minutes plus tard, elle se glissait par la porte de la salle commune, trempée comme une soupe : il pleuvait à verses au-dehors.

La conversation avec le druide lui avait retiré un certain poids des épaules aussi Kasumi avait-il davantage le cœur à la fête. Il se dirigea vers Sylvia dès qu'elle fit son apparition et s'inquiéta un peu de la voir trempée :

- Viens vite te réchauffer auprès du feu, ma toute belle : tu es toute trempé ! S'il faut te faire danser pour te réchauffer, je me porte volontaire mais tu veux peut-être manger un morceau avant.

Il la devinait quelque peu nostalgique aussi s'efforcerait-il de lui accorder encore plus d'attention que d'habitude pour ne pas la laisser en proie à ses pensées moroses.

La rôdeuse eût un sourire qu'il jugea un peu forcé.
" Danser, j'aimerais bien, mais je te rappelle que nous ne disposons pas de barde et de musique par ici. Ne me dis pas que toutes ces années passées en ville te l'ont fait oublier ? Ou peut-être que Tilmandil a pu te former à son art en si peu de temps ?"
Son ton était taquin, et son sourire se fit plus large.
" Mais je veux bien manger un bout, oui... Tu as eu le temps de discuter un peu avec de vieilles connaissances ?"

Il la mena vers l'une des tables dressée d'un buffet de plats chauds tout en répondant gaiement :

- Oui, j'ai pu un peu bavarder et ça m'a fait beaucoup de bien ! Cela nous fera une raison de plus de revenir souvent par ici : la communauté est un peu ma deuxième famille, celle qui m'a élevé et m'a appris tout ce que je sais, après tout.

Il laissa Sylvia se servir avant d'en faire de même, mis en appétit par les travaux de la journée et le temps qui fraichissait au dehors.

La soirée fut paisible et chaleureuse, et Sylvia se détendit peu à peu, souriant et bavardant joyeusement avec leurs connaissances communes. Le menu était tout simple : soupe, ragoût, tartes aux fruits, mais les aliments étaient savoureux et avaient pour Kasumi le goût de son enfance. Les anciens du campement étaient heureux de bavarder avec lui, de se rappeler leurs souvenirs communs, de parler de leurs projets d'avenir. Quelques-uns étaient partis en mission au loin, dans d'autres territoires, puis revenus. Mais nul n'était allé aussi loin que lui et on le pressait de questions au sujet de ces continents inconnus.
Au milieu des bavardages, la soirée passa sans qu'ils s'en rendent compte. Une liqueur alcoolisée circula à la fin du repas, puis la salle se vida peu à peu. Sylvia se taisait depuis un moment déjà, l'air passablement fatiguée, et elle finit par l'entraîner avec elle au-dehors. La pluie tombait toujours, mais moins fort. Sa cabane n'était qu'à quelques pas et ils s'y réfugièrent rapidement, heureux de se retrouver au sec... et seuls.
Il y régnait un désordre assez spectaculaire, entre objets triés, objets à trier, objets à jeter, à emporter, à garder... Mais le lit était fait, et le feu qu'elle avait allumé dans l'âtre se laissa rallumer sans peine.

Le rôdeur avait passé une excellente soirée, entre nostalgie, simplicité et projets futurs. L’un dans l’autre, il avait été plutôt ravi et fier d’être l’objet de l’attention de personnes qui lui inspiraient le respect et parfois un peu de crainte pour certains instructeurs et maîtres d’autrefois. Sylvia faisaient partie des derniers à se retirer aussi la suivit-il sans hésitation vers sa cabane.

Kasumi écarquilla les yeux en entrant mais se garda bien de faire le moindre commentaire : si Sylvia voulait conserver une grande partie de ce qu’il avait sous les yeux, il leur faudrait probablement plus d’un voyage pour les transporter. En attendant, il ne doutait pas que son oncle se proposerait certainement pour en entreposer une partie chez lui. Dans tous les cas, il appartenait à la rôdeuse de faire ses propres choix et il se garderait bien d’intervenir en dehors de l’aider à empaqueter au mieux ce qu’elle aurait sélectionné au final.

Pour l’heure néanmoins, il n’aspirait qu’à se réchauffer un peu auprès du feu. Et après cette journée bien rempli, gagner le lit bien fait était d’ores et déjà très tentant.

Sylvia jeta rapidement quelques bûches dans le feu puis se déshabilla, sans la moindre pudeur, mais sans jeu de séduction non plus. Elle aussi semblait avoir hâte de dormir. Et Kasumi devinait une certaine mélancolie, à nouveau, dans son regard. Mais elle ne l'exprima pas, se contentant de se glisser sous les couvertures.
" Viens dormir, mon bel aventurier, lança-t-elle avec tendresse. Le lit est trop froid sans toi... Il faut dire que je n'ai plus l'habitude de dormir seule !"

Le lit était petit pour deux mais ils avaient partagé des espaces bien plus exigus lors de leur aventure récente et cela ne gênait pas du tout Kasumi de se trouver une petite place tout contre Sylvia.

- Oui, les draps sont froids alors j'espère que tu ne m'en voudras pas que je me serre contre toi pour me réchauffer. Bonne nuit, ma belle rôdeuse adorée !

Il glissa son bras sous ses épaules et l'attira contre lui avec un soupir d'aise.

- L'autre point positif est que Tilmandil ne viendra pas nous réveiller demain matin !

Ils furent pourtant réveillés, un peu après l'aube, par quelqu'un tambourinant à leur porte. Ce n'était pas Tilmandil, bien sûr, mais Amish.
" Debout là-dedans ! Y'a entraînement ce matin, et Hef compte sur vous... enfin, surtout sur Kasumi... pour lui servir d'assistant et nous entraîner à l'épée ! Il dit qu'il faut être là dans une demi-heure !"
La lumière filtrant à travers les volets leur indiquait que le temps était ensoleillé, mais que le soleil devait être levé depuis une demi-heure seulement.

Kasumi poussa un soupir à fendre l'âme : il avait très bien dormi et se sentait reposé mais il avait espéré pouvoir traîner un peu au lit avant de se mettre au travail. Il prit cependant ce réveil avec philosophie en se disant qu'il serait d'autant plus agréable de se retrouver seul à seule avec Sylvia ensuite et qu'ils auraient bientôt énormément de temps à passer en tête à tête : autant profiter de leur séjour au campement d'une façon différente. Il déposa un baiser sur le coin des lèvres de la rôdeuse avant de déclarer :

- Bonjour ma toute belle ! Une demi-heure, c'est un peu court mais ça me laisse le temps de te préparer un petit-déjeuner digne d'une très jolie princesse des bois !

La Couronne de Cuivre

[Haute-Forêt] Quête : Racines