La Couronne de Cuivre

Thibault se remettait de ses émotions à une vitesse impressionnante, du moins en apparence, mais c'était ce dont Albérich avait besoin et il ne chercha pas à savoir si son ami était plus affecté par la situation qu'il ne semblait le montrer. Il l'attrapa cependant par le coude et l'attira un moment à l'écart des deux autres.
" Excuse-moi d'avance pour cette brutalité... Je suis vraiment heureux de te voir, je ne plaisante pas, mais... j'ai besoin de savoir si tu as retrouvé ton contact avec Sunie. C'est important pour la suite."

Le clerc grimaça.
-Je ne sais pas... murmura-t-il. Depuis que je me suis réveillé à Dansedunes, que j'ai compris qu'on m'avait laissé dormir plutôt que de me permettre de t'accompagner, j'ai eu une seule chose en tête : te rattraper avant que tu ne fasses une bêtise. Je n'ai pas essayé de lancer de sorts, pas prié, mais...
Il soupira.
-Je crois que je suis un peu moins troublé qu'avant. Je n'ai jamais perdu le contact. Jamais absolument, même si ça a failli.. Je la sens en partie... Mais je ne peux dire si ça sera suffisant pour puiser dans son énergie..

Albérich lui décocha un sourire soulagé, et sincère, puis lui serra doucement l'avant-bras.
" Je suis heureux qu'il en soit ainsi." fit-il.
Mais l'urgence reprit le dessus.
" Aubin est un tout jeune clerc. D'après ce que Bastien m'a décrit, il maîtrise à peine plus d'énergie qu'un novice... Mais c'est toujours plus que moi. Et il a son métier de barde derrière lui, ce qui le rend fatalement dangereux..."
Il réalisa qu'il abordait les choses dans le désordre.
" Quand je l'ai appris, j'ai juste... pensé que je devais le tuer. Mais à présent... J'hésite. Je ne sais pas quoi faire, à vrai dire. C'est mon demi-frère. C'est un Sharite. Mais d'après Bastien, c'est une conversion récente... Des événements difficiles... Je ne sais pas quoi... Mais... résister à Shar... Quand on a souffert, quand on a été trahi, torturé... Je sais combien c'est difficile. Même pour quelqu'un de mon expérience, avec la maîtrise que j'avais de moi-même... Alors lui... Je ne peux pas m'empêcher de me dire que s'il n'est qu'au début de son parcours... Il y a peut-être une chance de le sauver."
Il le dévisagea.
" Est-ce que ça te semble illusoire, ridicule ?"

Thibault secoua la tête.
-Non, ça ne me paraît pas ridicule, surtout s'il n'est pas Sharite depuis longtemps... Sa foi, comme toute autre, peu vaciller, disp...
Il s'interrompit, grimaça.
-Enfin, il peut revenir. Oui. Et certaines choses que j'ai pu observer, à son insu, sans le faire exprès, me donnent bon espoir. Des choses qui montrent qu'il est plus humain, moins mauvais que ses actes ne le laissent supposer. Je les avais oubliées, mais... Elles me sont revenues en mémoire, durant le trajet. Toutefois...
Il se fit grave.
-Je ne sais pas si nous pourrons l'y aider, à nous deux. C'est une démarche difficile... Le mieux serait de le capturer, de le ramener en un lieu où on le tiendrait enfermé jusqu'à ce qu'il guérisse.

L'approbation de Thibault détendit Albérich d'une manière qu'il n'avait pas anticipée. Le Sunite était providentiel.
" C'était mon intention, mais je ne sais pas bien où l'emmener... A Erhedun... J'ai peur qu'ils aient l'exécution facile... Je pourrais peut-être prendre le risque de le ramener jusqu'à Luménis. Ce ne serait pas un service que je rendrais au Temple... d'autant qu'ils recueilleraient un fugitif... Si les choses se savent, cela pourrait mettre les relations entre Erhedun et Luménis en péril... et fragiliser la position du sanctuaire qui est déjà très précaire depuis ma défection. Mais sinon... Je ne vois pas bien où... D'autant qu'il lui faudra des conditions de détention douces et humaines... Un environnement propice à la rédemption, pas au plongeon... Nous ne pouvons pas le garder dans les bois... Nous devons fatalement nous en remettre à quelqu'un de confiance..."
Il s'interrompit.
" A moins que tu ne pensais... t'en charger toi-même ? Je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée... pour toi. Même s'il revenait sur ses convictions... Enfin, je n'y connais rien, c'est toi le spécialiste."

-Spécialiste ? Je n'y connais rien, moi, en la matière ! Le peu que je sais, je l'ai entendu dire : je n'ai jamais assisté ou participé à une telle rédemption... Et non, je ne pensais pas prendre ça en main : je suis encore sous le coup de ce que j'éi vécu. Je ne serai donc pas un très bon guide...
Il se frotta le menton, pensif.
-Quant à ceux auxquels on pourrait le remettre... Les Sunites d'Erhedun sont très embarrassés, prêts à m'accorder beaucoup de choses. Mais je ne sais pas s'ils iraient jusqu'à m'accorder ça... Ton mentor, peut-être, pourrait te dire s'il connaît un lieu... Sinon, oui, Luménis. Je ne vois rien d'autre. Et je t'y escorterai, au besoin.

Albérich avait pendant un instant pensé que peut-être le Sunite pourrait vouloir renouer sentimentalement avec son amant déchu, afin de le ramener vers la lumière. Mais Thibault n'avait pas relevé. C'était sans doute mieux.
Le Luménien grimaça et étouffa un soupir.
" Comment allons-nous trimballer un prisonnier aux quatre coins du pays..." souffla-t-il.
Puis il se fendit d'un sourire.
" Heureusement, tu es là. Je n'ai plus besoin de mettre des villageois dans la confidence. Nous nous débrouillerons..."
Il se tourna vers Bastien et le cousin, qu'ils avaient abandonnés un peu plus loin.
" Reste le problème de le capturer. Mon père ne doit pas savoir ce qui se trame... et pour ça, il faut qu'Aubin quitte volontairement Combeloup. Je comptais essayer de l'intimider pour qu'il prenne ses cliques et ses claques. Après tout, il t'a stupidement révélé où il comptait se rendre, et l'arrivée de la garde erhedine devrait être crédible... J'ai de plus reçu une lettre m'en avertissant. Merveilleux. Mais toi et ton cousin devez l'intercepter sur la route."
Il leva les mains dans un geste défensif.
" Je n'ai pas de meilleur plan."

-C'est vrai que la lettre rendrait la menace crédible... murmura le clerc. Mais... Il pourrait t'attaquer, après que tu lui aies fait cette révélation. Il faut s'attendre à tout, de la part d'un Sharite. Et puis... N'as-tu pas peur que, s'il s'enfuit, il nous file entre les doigts ? Il connaît bien la région, pas nous : ça lui donne donc un gros avantage. Il pourrait emprunter des itinéraires détournés... La traque ne serait pas aisée, alors. Sans compter que nous ne saurions rien de ses intentions. Qui sait s'il ne se terrera pas dans les parages, attendant la venue puis le départ des soldats pour revenir frapper à sa guise ? Se venger ?

" Je ne suis pas forcé de l'intimider... Je peux le prévenir parce que je veux qu'il s'en tire... et me tuer ne fera pas disparaître la menace. Mais ça ne résoudra pas le problème de la direction qu'il empruntera, tu as raison... Simplement... Je ne vois pas comment l'amener à partir... Il est bien, ici. Il peut torturer Bastien à loisir, séduire la baronne de ses roucoulades, il est nourri, blanchi, tout le monde l'apprécie... Or il est impératif que mon père ignore ce qui se passe. Il n'est plus de prime jeunesse et les événements de l'hiver... l'ont affecté... S'il apprend que son fils est un Sharite, qu'il a fait du mal à Bastien... C'est un risque que je ne peux pas prendre. Or Aubin ne partirait pas sans en avertir César. Je n'ai pas le choix, je dois le convaincre qu'il ne peut plus rester ici... C'est la seule manière pour que sa disparation paraisse logique. Ou alors... J'en reviens à ces idées farfelues d'empoisonnement... Mais ce sont des idées farfelues. Il s'en rendra compte et les choses deviendront beaucoup plus problématiques."

Le front plissé, la mine concentrée, Thibault demeura silencieux.
-Ne quitte-t-il jamais le village ? demanda-t-il enfin. Pour faire... je ne sais pas, moi, une promenade, un tour à cheval ? Si tu connaissais son itinéraire à l'avance, on pourrait lui tendre une embuscade... Les risques qu'il nous échappe seraient moins grands...

" Si bien sûr mais... Aubin ne va pas faire une promenade de trois mois. S'il s'absente pour quelques heures et disparait, César va fatalement s'inquiéter. Il avertira le village, ils organiseront une battue, pisteront son cheval, que sais-je... Et l'angoisse fait des ravages sur les coeurs fragiles... A la limite, ça pourrait être pire. Non. Si Aubin ne part pas pour une longue durée, cela ne fonctionnera pas."
Il secoua la tête.
" Je ne le connais pas assez pour imaginer autre chose..."

Thibault fit une grimace dépitée.
-Et si... Et si nous disions la vérité à ton père ? Enfin, une partie de la vérité... Je pourrai aller le voir, lui expliquer qu'Aubin est... malade, et que cela le pousse à agir parfois de manière... inconsidérée. Que cela lui a attiré des ennuis, à Erhedun, et que je veux lui éviter la prison en l'emmenant dans un lieu où il pourrait être soigné. Que cela impliquera... que nous le capturions par surprise... Ce ne serait pas un mensonge : après tout, vénérer Shar, c'est être malade, quelque part. On lui cacherait juste le plus sombre. S'il pense qu'on agit pour son bien, que la guérison est possible, si on l'assure qu'on ne lui veut aucun mal... Peut-être la nouvelle serait-elle moins douloureuse pour lui.

" Toi ? Aller le voir ? Thibault, si Aubin te sait ici, il va... Et César... Je ne suis pas certain qu'il me ferait suffisamment confiance pour croire à cette histoire, alors toi... Il voudra savoir ce qu'a Aubin... Où nous comptons l'emmener... Ce n'est pas exactement un fermier comme les autres. Il a un passé plutôt aventureux. Je ne l'imagine pas nous laisser emporter son cadet comme si de rien n'était... Et pourtant... Les dieux savent combien je voudrais recourir à cette possibilité... Juste aller le trouver, lui parler... J'ai l'impression d'un homme raisonnable... Peut-être devrions-nous demander à Bastien. Je sais que ce n'est qu'un gosse, et c'est sans doute injuste de le charger avec cette affaire, mais c'est aussi lui qui connait le mieux César... qui est le plus à même de pouvoir nous dire quoi faire..."

Le Sunite soupira.
-Pauvre gosse... souffla-t-il. Mais oui, demandons-lui. Et s'il pense que ça ne marchera pas, il ne nous restera plus qu'à tenter ton plan. Et à prier pour qu'Aubin passe benoîtement à l'endroit exact où nous l'attendrons.

Le sarcasme contenu dans cette dernière remarque n'échappa pas au Luménien, mais il ne releva pas. Thibault avait raison : cette option était vouée à l'échec. Mais en rejoignant Bastien et le cousin toujours anonyme, Albérich réalisa qu'il était inutile de poser la question à l'enfant : il s'en tiendrait à son opinion, à sa crainte de voir son grand-père blessé. S'il ne le gratifiait pas d'un "comme vous voudrez, mon oncle" éteint, ce qui serait encore pire.
" Bastien. Thibault et moi avons examiné nos options et nous pensons... que la meilleure solution, si nous voulons pouvoir peut-être arracher Aubin aux griffes de la déesse qui l'a piégé... est de parler à ton grand-père de la situation. Peut-être pas de Shar, ni de ce qu'il t'a fait, mais... du fait qu'Aubin a besoin d'aide et que pour cela, nous devons le capturer."

Comme l'avait anticipé Albérich, ses mots provoquèrent chez le petit garçon une terreur qu'il eut bien du mal à contenir.
-Il faut pas qu'il sache ce qu'il m'a fait... murmura-t-il. Jamais.
Il se mordit la lèvre inférieure, pour tenter de reprendre contenance, de réfléchir à ce que venait de dire son oncle. Mais il lui fallut un bonne minute avant de pouvoir parler à nouveau.
-Peut-être qu'il vous croirait... Je sais pas... Oncle Aubin a l'air tellement normal, quand grand-père est là, il a rien dû remarquer... Mais il vous aime beaucoup, alors, au moins, il se poserait la question... Enfin, il voudrait en parler à oncle Aubin, quand même... Pour essayer qu'il se rende de lui-même...
-

Albérich s'accroupit devant lui et le prit doucement par les épaules.
" Ne t'en fais pas. Nous ne ferons rien d'inconsidéré. Et nous ne lui dirons rien, je te le promets." souffla-t-il.
Il grimaça cependant.
" Mais s'il parle à Aubin..."
Il se tourna vers Thibault.
" Peut-être faudrait-il le mettre devant le fait accompli... Neutraliser Aubin puis seulement aller le prévenir de ce que nous avons fait... C'est risqué mais... mais c'est sans doute le plus sûr. Il demandera peut-être à le voir, cependant."

-Peut-être que je pourrai... lui dire un peu de ce qu'il a fait ? murmura Bastien à contrecœur. Lui dire que je le trouve bizarre, qu'il a essayé d'être méchant, mais... qu'il a pas pu ? Que je l'ai empêché en discutant ?
Thibault acquiesça.
-C'est sûr que ta parole pèserait lourd... fit-il, encourageant. Et s'il demande quand même à voir Aubin alors que nous l'aurons capturé... Ton oncle sera tellement en colère qu'il risque d'écorner quelque peu son image de gendre idéal. Bon point, là encore.
Il se tourna vers Albérich.
-Mais se pose tout de même la Grande Question : comment va-t-on le capturer ?

Albérich se mordit les lèvres, dévisagea Bastien.
" Je répugne à t'utiliser pour le coincer..." murmura-t-il à l'enfant. " Mais il aura sans doute l'intention de t'emmener demain... Nous pouvons le prendre en chasse, à distance respectable... Et tu es protégé, toi et moi le savons, n'est-ce pas ?"
Il chercha un signe d'assentiment chez l'enfant.
" Ensuite... Nous sommes trois... Il est seul... Je peux l'empoisonner au petit déjeuner. Mettre quelque chose dans son thé qui le rendra malade à retardement... Il ne devrait pas constituer une proie bien difficile une fois qu'il sera en train de vomir ses boyaux."

L'enfant demeura immobile, muet. Puis il acquiesça. Imperceptiblement.
-D'accord... murmura-t-il. Je veux bien... Et... Je vous indiquerai où il veut qu'on aille. Il... Il m'y a déjà emmené, pour me faire...
Il n'alla pas plus loin. Mais, pour compléter les mots qui lui manquaient, il se toucha l'épaule, à l'endroit où la marquait le symbole de Shar.

Albérich prit sa main et l'écarta de son épaule.
" Elle s'effacera. Tout ceci ne sera bientôt plus qu'un cauchemar à oublier... Mais tu devrais nous indiquer l'endroit en question, oui. Thibault et... et son cousin pourront monter leur campement à proximité. Ensuite, nous devrons retourner à la garnison et jardiner, comme nous l'avons prévu... Même si j'ai férocement envie de dormir pour ma part... Mais si Aubin débarque et que nous n'y sommes pas... Nous ne devons pas l'inquiéter."

Bastien s'exécutant, leur décrivant en détail l'itinéraire pour rejoindre ce qui devait être le lieu de son ultime épreuve. Il s'agissait apparemment d'une éminence couronnée d'un petit bois de bouleaux, dominant la forêt, à ses pieds. Il fallait un peu moins d'une heure pour s'y rendre à cheval.
Le cousin de Thibault - il se nommait Clovis - se montra particulièrement attentif. Il était un familier des marais de Dansedunes, habitué à se repérer en pleine nature. Il posa à l'enfant quelques questions précises, puis acquiesça.
Il pensait pouvoir, sans trop de mal, retrouver l'endroit.

La présence des deux hommes, leur détermination, leur sérieux, avaient un effet paradoxal sur Albérich, comme un contrecoup après trop d'émotions. Il avait envie de les remercier avec une montagne de superlatifs. Mais il s'abstint. Il était conscient de sa fatigue, exacerbée par ce qu'il s'était passé dans le Domaine de la Dame et dont il ne parvenait pas encore à tirer les conclusions. Quand Clovis eut bien mémorisé le chemin, le Luménien se redressa, un peu réticent, et s'apprêta à prendre congé.

Mais Thibault le retint.
-Comment se retrouve-t-on ? demanda-t-il. Tu comptes vraiment suivre Aubin à distance ? Ne serait-il pas plus prudent de l'attendre avec nous ? Tu pourrais... Te faire repérer. Ou arriver après la bataille, si tu le laisses trop te distancer.

" Je dois pouvoir l'empoisonner avant de vous rejoindre. Je pourrais demander à Bastien, mais j'aimerais autant le faire moi-même... Ensuite... Je tâcherai de me souvenir des explications et je vous rejoindrai à bride abattue. Enfin. Sans me tuer en route."
Il sourit.
" Ensuite... Nous improviserons, je suppose. Mais j'essaierai de bien doser ma mixture... que je devrais être en train de préparer."

Thibault comprit le message.
-Allez, file donc, puisque ma présence t'insupporte à ce point !
Il lui serra le bras.
-Et on se dit donc à demain. Essaie quand même de dormir... Et dis toi que tout va bien. Les projets dans lesquels je me lance ne capotent jamais, c'est bien connu.

" Ta présence ne m'insupporte pas. Je suis vraiment heureux que tu sois là. D'avoir un peu d'aide... dans cette situation..."
Il se sentit inexplicablement ému et secoua la tête. Il ne fallait pas qu'il craque maintenant. Il avait tenu jusque là en s'érigeant protecteur de son neveu. A présent que Thibault était de la partie, il avait l'envie insidieuse de lui remettre les rênes et de se reposer sur lui. Mais c'était stupide. Il devait se reprendre. D'autant que le Sunite était bon comédien mais sans doute moins solide qu'il ne le laissait croire. Les dieux seuls savaient comment il réagirait une fois face à face avec Aubin.
" Mais dis-moi..." ajouta-t-il sur un ton de conspirateur. " Une question me taraude depuis tout à l'heure... Comment se fait-il que ton cousin soit relativement propre et que tu sois si crasseux ?"

Thibault grimaça.
-Ce cher Clovis, chasseur de grenouilles patenté, n'aime rien tant que se laver dans les ruisselets glacés. Pour ma part, faire trempette dans ce genre de cours d'eau, ça ne me tente guère : je préfère garder la boue. D'autant que c'est bon pour la peau.
Il se tourna vers Bastien.
-Si, durant votre jardinage, tu voulais bien enterrer ton oncle sous une pluie de mottes de terre humide, je t'en serai éternellement redevable. Il l'avoue rarement, mais... il adore ça.
L'enfant acquiesça.
-Très bien, monsieur.

Albérich sourit à Thibault tout en lui décochant un regard noir.
" N'écoute pas son bête humour." dit-il à Bastien en l'entraînant vers la jument.
Il avait bien besoin de se laver. Il était surpris que Thibault ne lui ait pas fait de commentaire sur l'odeur âcre des fluides corporels qu'il devait dégager. Sans doute sa propre fange sentait-elle trop. Le Luménien hissa le petit garçon en selle, puis monta derrière lui. Ils firent pivoter Douce vers les deux hommes.
" Est-ce que vous avez de la corde ?" demanda alors Albérich.

-Oui ! répondit joyeusement le Sunite. Un rouleau complet. Si la situation avait été différente, et si tu avais fait ta mauvaise tête, je comptais bien te ramener à Dansedunes pieds et poings liés.
Il lui fit un clin d'œil, puis esquissa un geste d'adieu.
-Allez, filez, à présent. Allez vous adonner aux douces joies du jardinage !

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