La Couronne de Cuivre

"Maman, maman, pourquoi les pavés sont alignés horizontalement ?
- Je ne sais pas Michael ? Tu es sûr que tu ne veux pas retourner dormir ?
- Oui, je suis sûr. Je voulais voir les pavés
- Oui, mais après tu dors. Est ce que je me suis bien fait comprendre ?
- Oui papa ...
- Bon, la nounou devrait être là"

Oriane n'avait rien perdu de ce petit dialogue. Une carriole bâchée, tirée par quatre chevaux de trait déboucha sur la place. Trois personnes étaient montées sur le banc à l'avant du véhicule. Un homme assez grand et râblé, dans la force de l'âge, les cheveux roux tirait les rênes. Il avait un air calme, plutôt affable. A coté de lui, une femme encore plus grande que lui, avec les mêmes cheveux couleur carotte, le nez retroussé en une expression hautaine, les cheveux remontés en un chignon stricte. Le petit garçon assis à coté d'eux sur le banc à l'avant du véhicule avait aussi les cheveux roux et le visage constellé de tâches de son.

L'homme leva le bras en apercevant Oriane. La carriole vint jusqu'à elle et s'immobilisa dans la lueur matinale.

"Vous êtes bien notre nouvelle nounou ?, demanda l'homme avec un sourire, je suis Théon et voici ma femme Bérénice et voici notre fils Micheal"

Le petit garçon considéra Oriane d'un oeil méfiant.

Oriane avait écouté avec amusement les paroles de l’enfant, avant de se souvenir qu’elle aurait sans doute à répondre à ce genre de questions dans les prochains jours. Peut-être finirait-elle par ne plus les trouver aussi drôles. Enfin...ce ne serait sans doute pas pires que celles que son petit frère posait lorsqu'il était petit...pourquoi le ciel est-il bleu…où partent les nuages quand il ne pleut pas…Il lui semblait soudain qu'une éternité s’étaient écoulées depuis...
Réprimant un soupir, la jeune femme ferma les yeux un instant, tâchant de chasser ses souvenirs. Lorsqu'elle les rouvrit, l'homme qui conduisait la carriole était en train de lever le bras dans sa direction. Elle répondit au signe par un sourire, puis elle se baissa pour ramasser son sac.
Quelques secondes plus tard, le véhicule s'immobilisait devant elle, et l'homme qui la conduisait lui adressa un sourire qui la mit tout de suite à l’aise.

"Vous êtes bien notre nouvelle nounou ? Je suis Théon et voici ma femme Bérénice et voici notre fils Micheal"

Toujours souriante, la jeune femme inclina brièvement la tête avant de répondre :

"C’est bien moi. Je me nomme Oriane, enchantée de faire votre connaissance."

La dame avait poussé un soupir courroucé avant de cacher son nez dans un mouchoir. L'homme avait fait mine de la regarder quelques secondes mais n'avait pas bronché. Il s'était tourné vers Oriane avec un grand sourire. Micheal, quant à lui avait ôté son pouce de sa bouche d'un air décidé avant de demander à la jeune femme, sans préambule.

"Dis, tu sais toi pourquoi la ville elle s'appelle Linceul ? C'est un drôle de nom hein ? Un linceul, c'est pour recouvrir les morts, c'est ma maman qui me l'a dit. Mais pourquoi la ville s'appelle Linceul ?"

Theon eut une légère grimace mais trouva tout de même la force de sourire.

"Je vois que vous allez bien vous entendre avec nos enfants. Si vous voulez, vous pouvez monter à l'arrière du chariot. Emmenez donc Micheal avec vous. Il a besoin de dormir"

Comme Oriane s'avançait vers le petit garçon, le petit garçon croisa les bras et lui souffla à l'oreille.

"J'aimerais bien que tu me dises ..."

Oriane avait retenu de justesse une expression de surprise en entendant le nom de la ville. Linceul. Voilà qui était pour le moins original. Et pas forcément des plus rassurants...La jeune femme garda néanmoins cette pensée pour elle, et s’approcha du garçon pour l’emmener avec elle à l’arrière. Celui-ci, plutôt que de faire mine de descendre du véhicule pour la rejoindre, croisa les bras et lui souffla :

"J’aimerais bien que tu me dises…"

La jeune femme interrompit son geste et fit mine de réfléchir un instant.

"Et bien…peut-être pourrons nous demander aux habitants de cette ville quand nous serons arrivés, qu’en penses-tu ? Eux doivent sans doute savoir pourquoi leur ville s’appelle comme ça."

Puis elle lui glissa, sur le ton de la confidence.

"Et tu sais ? Si tu dors, le voyage passera bien plus vite, et tu n’auras pas à attendre trop longtemps pour avoir ta réponse..."

Micheal fit mine de protester, mais la fatigue aidant, il finit par gagner l'arrière du chariot où deux matelas vacants semblaient les attendre.

"Toi, tu dors là, marmonna Micheal sans lâcher son pouce en montrant une couche vacante, c'est à coté de moi. Maman dit que tu vas devoir surveiller que je ne saute pas du chariot pour aller explorer la campagne. Moi, je sais pas. Et j'aimerais bien savoir pourquoi ça s'appelle comme ça. Moi, ça me fait peur"

Mais la fatigue aidant, il finit par s'endormir. Le chariot s'ébranla. Par une ouverture à l'arrière du chariot, Oriane vit défiler la ville, puis les portes, et enfin la campagne alentour. Le trajet, entrecoupé de plusieurs haltes pour que les enfants puissent se dégourdir les jambes (mais aussi pour éteindre un début d'incendie car Jeanne avait trouvé un briquet d'amadou et que les rideaux étaient un bon combustible, et cela dans son sommeil) parut durer très longtemps. Ce n'est qu'au crépuscule qu'apparurent les portes de Linceul. Une brume opaque s'était levée, donnant un coté sinistre au paysage.

hrp : Oriane, je poste dans les terres désolées. Tu pourras répondre après.

Elle s'était sentie soudain stupide comme au sortir d'un cauchemar où vous vous réveillez trempé de sueur et que vous vous rendez compte que vous avez réveillée la maisonnée en hurlant. Devant les gardes, sa terreur nocturne lui avait semblé irréelle, immatérielle.

Elle leur fit le même récit qu'elle avait fait à Corwin, passant sur un peu plus de passages concernant ce qu'on lui avait fait subir. Mais son corps moulu et ses yeux effrayés avaient parlé pour elle.

Elle avait parlé d'un filet de voix enroué, d'une façon presque monocorde. Une voix qu'elle ne reconnaissait pas. Et malgré à tous ses efforts, elle n'avait pu s'empêcher de trembler.

"Il est peut être encore là bas, avait elle conclu, ou peut être en ville. Je ne sais pas. Dans tous les cas, je pourrais le reconnaître entre mille"

Un des gardes fronça les sourcils à ce récit, perplexe.

"Mais pourquoi diable ces types-là s'imaginaient-ils que vous aviez la moindre information utile sur le conseiller ?"

Cette réflexion trop hâtive lui valut un écrasement de pied miséricordieux de la part de son collègue et un regard foudroyant de son supérieur. On avait beau être dans la garde, il n'était pas interdit d'être intelligent ni délicat, semblait stipuler la colère hiérarchique.

"Je n'ai jamais entendu parler de ces tunnels, répliqua enfin l'officier, en se retournant vers la bretteuse. Il faudrait que vous nous en indiquiez les issues afin que nous puissions les surveiller. Peut-être s'y sera-t-il perdu ? Mais s'il en est déjà sorti, il n'y a plus grand espoir de le rattraper, je le crains... Dans ce cas, nous prendrons son signalement et pourrons vous proposer une protection rapprochée."

Il n'aurait sans doute pas été aussi prévenant avec la première venue, mais il pensa bon pour sa carrière de ne rien faire ou omettre de faire que puisse lui reprocher le conseiller Lothringen à son retour.

Althéa avait croisé les bras et s'était rapprochée instinctivement de Corwin. Le cauchemar n'était pas prêt de s'arrêter. Comme l'avait si bien dit le garde, l'homme pouvait être sorti des tunnels. A l'heure qu'il était, il pouvait très bien errer dans Manost. A sa recherche. Et il pouvait très bien la retrouver. Si ce n'était pas maintenant, ça pourrait être un jour ou l'autre, quand elle s'y attendrait le moins. Il pourrait aussi s'en prendre à Leodacya. Pendant un bref instant, elle pensa à quitter la ville avec sa fille sans rien emporter. Mais ce n'était pas la bonne solution. Elle ne trouverait pas la paix tant qu'elle n'aurait pas vu l'homme derrière les verrous. Non, elle allait rester et prêter main forte aux gardes autant que possible.

Mais pour l'instant, elle n'avait qu'une seule idée en tête. Avant, elle ne serait pas en paix.

"Je vous donnerai tous les renseignements, dit elle doucement, mais avant ... si cela ne vous gêne pas, j'aimerais voir si ma fille va bien."

Une réponse qui prit l'officier de cours. la jeune femme avait l'air de souhaiter voir l'homme hors d'état de nuire au plus vite, mais sa décision risquait fort de lui laisser plus de temps que nécessaire pour mettre les voiles... Sauf si le spadassin tenait vraiment très fort à son médiocre stratagème.

"Hum, bien sûr... Edmond va vous accompagner."

Edmond, c'était manifestement le nom du garde qui parlait trop vite. Il encensait d'ailleurs d'un air penaud, comme s'il venait de subir une lourde sanction disciplinaire.

"Je l'accompagne déjà", répliqua Corwin, un rien défiant.

"Deux précautions valent mieux qu'une."

Edmond les rejoignit donc, leur affirmant qu'il était prêt à les suivre. Même s'il ne semblait pas briller par son intelligence, c'était un homme robuste et jeune : un secours non négligeable en cas de complications.

Leodacya dormait encore quand elle était passée au Loyal paladin. Elle l'avait regardé, souriant dans son sommeil, étrangère à tout. Elle avait caressé les fins cheveux clairsemés et les joues rebondies. L'espace de quelques instants, elle se laissa gagner par le calme alentour. Mais elle se reprit vite. Dehors rôdait peut être l'assassin, et il risquait de trouver tout seul le chemin du palais des murmures si on ne l'arrêtait pas.

Elle sortit de sa chambre et rejoignit Corwin et le garde qui attendaient en bas. Aussitôt, l'angoisse vint de nouveau s'attacher à ses pas.

"Je vais vous montrer les principales entrées et sorties, dit elle d'une voix qui tremblait malgré elle, ensuite, je pourrai vous donner son signalement. Mais attendez ..."

Elle s'interrompit soudain.

"Il y a les corps là-bas. Si on ne les enlève pas, vous risquez d'avoir quelques soucis"

Elle imaginait les corps l'un à coté de l'autre sous la lune, commençant à sentir et les mouches voleter autour d'eux inlassablement ...

"Excusez-moi", dit elle en se retournant brusquement. Son estomac dérangé rendit un filet de bile qui lui brûla la gorge et l'estomac. Elle s'essuya maladroitement la bouche avec un pan de la chemise, honteuse de souiller la chemise de Corwin. Les corps ... Elles les aurait roués de coups ...

Devant le spectacle, Corwin se mordit brièvement les lèvres, avant d'incanter :

Corwin Balder = = > aide = = > Althea

Le sort conférait un regain de vigueur et de moral fort bienvenu dans le contexte.

Le garde préféra ne pas intervenir tout de suite. Il attendait patiemment qu'on lui dise quoi faire, après quoi il irait faire son rapport à son supérieur. On lui avait dit qu'il y avait un sale type à neutraliser si possible, moyennant quoi les cadavres frais du jour étaient le cadet de ses soucis.

"Dites toujours où ils sont, mais les corps pourront bien attendre demain matin", répliqua Edmond gauchement. "Les vivants sont un problème plus urgent à traiter, je crois. Sauf votre respect, m'dame."

Elle hocha la tête, rappelée de nouveau à la réalité. Tant que tout ne serait pas fini, on ne la laisserait pas en paix. Les corps resteraient morts mais celui qui restait était en liberté. Mais elle se sentait un peu mieux.

"Ils sont dans la rue, à coté de l'herboristerie la Vierge d'Argent. Quant à l'autre, attendez ..."

Elle entra en vitesse, le temps de prendre son carnet de croquis et son fusain, oubliés sur une table. Lorsqu'elle ressortit, elle griffonna à la va-vite le portrait de l'homme, le plus fidèle qu'elle put.

Elle détacha sa feuille et la tendit au garde.

"Voila, c'est lui. Il vous dit quelque chose ?"

"Euh, absolument ri-en. J'ai pas beaucoup de connexions avec la pègre, faut dire."

Edmond se sentait de plus en plus stupide. Qu'attendait-on de lui, au juste ? Il reprit sur un ton un peu plus encourageant :

"Mais au moins, je le reconnaîtrai, maintenant. Vous me la laissez ? Pour mes collègues. Vilaine bobine. "

On pouvait même affirmer que la brute dessinée par Althea avait tout à fait la tête de l'emploi. Corwin y jeta un coup d'œil à son tour.

"Tout à fait d'accord. Bon, voyons maintenant quelles sont les issues de ces souterrains ?"

Le vieux prêtre était assez curieux de les connaître, lui aussi. Pas plus que l'officier, il n'en avait connaissance, et il avait pourtant la prétention de bien connaître sa cité. Il était temps de parfaire son éducation...Corwin serrait toujours nerveusement sa masse, bien que les chances de capturer cet homme se fassent d'instant en instant plus chimériques.

Althéa fut prise dans un dilemme durant quelques secondes. Taire ou signaler les entrées. En parlant, c'était la Vierge d'Argent qu'elle compromettait, en se taisant elle donnait à l'assassin une chance de rejoindre Lothringen. Elissa lui en voudrait peut être, sûrement si elle découvrait un jour un garde dans les souterrains. Mais à sa place, n'aurait elle pas fait la même chose ?

"Je veux bien vous montrer les entrées, finit elle par dire, mais les souterrains peuvent être très dangereux si vous vous y aventurez seul et sans guide. Des passages sont même encore inexplorés. Alors, vous n'irez pas tout seul si je vous montre, promis ?"

Elle se tourna aussi bien vers le garde que Corwin. Après avoir vu le vieux prêtre courir après la relique, rien ne la surprenait plus.

Edmond fut le premier à répondre, et ce fut le cri du cœur.

"Beuh... Tout seul, certainement pas, surtout pas s'il y traîne des gars dans ce genre-là", précisa-t-il en agitant la feuille de dessin.

Corwyn mit plus de temps à répondre. Il n'aimait pas faire des promesses sans savoir à quoi il s'engageait. Si des souterrains gangrenaient la ville, alors il y avait de bonnes chances que cela se sache, et qu'ils deviennent tôt à tard un vrai nid à malfrats. Et ce jour-là, peut-être que le vieux prêtre aurait à reprendre du service ; sait-on jamais comment peut tourner l'avenir...

"Je ne fais jamais rien à la légère", finit-il par grommeler. Et il s'abstint d'un commentaire qui lui brûlait les lèvres, à propos de l'écervelée qui était en train de lui recommander la prudence.

Elle l'avait fusillé du regard. A son âge, se ruer sur le danger en accélérant si c'était possible était plus que déraisonnable. Il y avait dans son comportement un coté émouvant, mais un revers exécrable. Un jour, il allait revenir en quatre morceaux. L'espace d'un instant, elle faillit lui dire tout ce qu'elle pensait mais se ravisa à temps. Elle n'avait aucune envie de se chamailler avec lui, surtout pas maintenant. Il risquait de se braquer et d'aller jouer tout seul à l'explorateur.

"Comme vous voudrez, souffla-t-elle, alors promettez-moi simplement de venir me voir avant d'aller là bas"

Corwyn haussa les épaules avec impatience. Où voulait-elle en venir ? Il n'entrait pas dans ses intentions immédiates de s'amuser à jouer les justiciers des égouts, et tant qu'à se parfumer dans un coupe-gorge, il préférait l'idée d'avoir de la compagnie. Mais sur le principe, il n'aimait pas qu'on veuille lui arracher des promesses : justement parce qu'il était helmite, et qu'il savait combien il pouvait vous en coûter de les tenir.

Imaginons rien qu'un instant que ce type enlève sa Leodacya et que je sois le seul à réussir à le poursuivre et qu'il s'engouffre à nouveau dans le dédale des souterrains... Si je ne le suis pas immédiatement, qui retrouvera jamais sa trace ? Elle est folle. Gentille, mais fofolle. Et tyrannique, en plus.

"Comme vous voudrez. Je reviendrai vous voir avant"

De mauvais grâce, le rictus en prime.

"On peut y aller maintenant ?"

Sans vraiment se douter des tergiversations du vieil helmite, Althéa avait hoché la tête.

"En fait, je pourrais tout aussi bien vous dessiner les plans", avait elle conclu avant de se remettre en route.

Elle s'arrêta plus loin quelques minutes plus tard. Si l'aide de Corwin avait fonctionné pendant quelque temps, c'est la peur qui revenait au grand galop. Elle voyait presque la porte du souterrain s'ouvrir et l'homme déboucher dans la ruelle, son épée au poing.

Elle réprima avec peine un tremblement. La gorge soudain sèche, elle parla avec difficulté.

"Une des issues est tout près d'ici", chuchota-t-elle.

"Est-ce par celle-là que z'êtes sortie ? Ou est-elle proche de l'endroit où vous l'avez semé ?" demanda Edmond, un peu mal à l'aise à l'idée d'avoir peut-être à utiliser ses armes.

Quant à Corwin, il avait noté l'exténuation de la voix et l'élocution laborieuse, et il murmura à son tour.

"Demeurez pour l'instant en arrière et dans l'ombre. Inutile de vous exposer à nouveau."

Faisant signe au garde, il s'avança un peu dans la ruelle, lorgnant les murs, à la recherche d'une fort peu discrète porte de souterrain entrouverte.

Le poing levé

Ils avaient pourtant tout prévu.

Une nouvelle fois, leur scénario semblait se dérouler à merveille. Elle, Moesha, jeune femme de la noblesse, poupine et gracieuse. Morgan, son fiancé dans ses habits de gueux. Ils s'étaient promis l'un à l'autre mais Morgan n'appartenant pas à une classe assez élevé, ses parents lui avaient refusé la main de sa belle. Ils avaient donc fui pour vivre leur amour.

Pour survivre, ils avaient mis au point un numéro presque infaible. Moesha marchant dans la rue tombait accidentellement sur la dague qu'elle portait en bandouillière. Elle se blessait grièvement. Les gens émus par une si belle personne si proche de la mort s'arrêtaient invariablement pour profiter du spectacle. Survenait alors Morgan qui, incantant avec passion la sauvait. L'assistance émue se délestait alors de petites larmes et de menue monnaie.

Ce que les spectateurs ignoraient, c'est que Morgan était prêtre helmite. Il avait montré très vite de grandes dispositions pour servir le dieu sentinelle. Adolescent, et sous l'impulsion de Moesha, il avait quitté le temple et n'était jamais revenu jusqu'à ce jour.

De retour à Manost, il avait bouclé la boucle. Sur la place du temple, ils jouèrent de nouveau leur sempiternel rôle. La lame de la dague s'enfonça cruellement dans le flanc de Moesha. Comme à son habitude, elle surmonta la douleur et attendit patiemment que son amant la sauve. Il s'accroupit près d'elle et commença à incanter. Mais cette fois, rien ne vint soulager ses souffrances. Sur le point de perdre connaissance, elle leva les yeux vers Morgan. Le jeune homme secoua la tête, impuissant. Elle se sentit perdre pied, dériver. Il incanta de nouveau. En vain. Quelques secondes plus tard, elle mourrait dans ses bras.

Ils arrivèrent donc à la place du temple. Une foule de badauds bloquait l'accès au lieu de culte. Ils avaient l'air totalement horrifiés, regroupés autour d'un jeune homme tenant une femme morte dans ses bras.

L'édifice, lui-même semblait grouiller d'une foule perturbée et hagarde. Chacun prêtait l'oreille, tentant d'entendre quelques rumeurs, de comprendre. Pourquoi les prêtres helmites n'étaient ils pas arrivés à soigner la jeune femme si près de leur lieu de culte ? Ne l'avaient-ils pas vue ?

"Y a du vilain ici", chuchota Nils.

"Ca m'en a tout l'air. Je me demande ce qui a bien pu se produire ici. Mais tout cet attroupement risque de nous retarder pendant un long moment"

Soupirant, il se rapprocha de l'attroupement, curieux d'en savoir plus sur la raison de cet attroupement; de toutes façons, il semblait qu'il ne pourrait pas accéder au temple pour le moment. Demandant aux autres ce qu'ils savaient sur cet incident, il apprit qu'une femme venait de mourir, et qu'apparemment personne n'avait pu ou n'était venu la secourir, alors qu'elle avait agonisé à 2 pas du temple. Cela ne pouvait rien présager de bon.

Non loin de lui, on enlevait effectivement un corps sur un brancard. Une main blanche pendait mollement hors du drap. A coté d'elle, un jeune homme pâle comme la mort se tenait hagard. Il semblait être assommé, comme frappé à plusieurs reprises. Il n'avait plus l'air de comprendre où il était, ni ce qu'il faisait là.

Puis, tout d'un coup, il se jucha sur un tonneau et se mit à hurler.

"Je vais vous dire la vérité braves gens. Helm est un mauvais dieu. Helm n'aime pas les manostiens !"

Venant du cimetière de Manost

Elanor arriva à bout de souffle sur la place du temple. Elle avait couru sur tout le trajet après avoir confier son armure et son sac au gardien du cimetière pour ne pas être ralentie. Elle se trouvait face au temple de helm enfin. Maintenant elle devait quérir un prête. Elle fit quelque pas et se figea, un doute venait de lui traverser l'esprit. Avec son maitre Théoden, ils avaient été incapable de se servir de leur pouvoir divin. Était-ce seulement lié au tombeau ou cela concernait-il tout les helmites? Théoden était en danger, elle ne pouvait prendre ce risque, suffisamment de temps allait déjà s'être écoulé avant qu'elle ne revienne à son chevet. Son regard balaya la place et s'arrêta sur le temple dédié à Thorm.

Direction le temple de Thorm

Althéa a écrit :Non loin de lui, on enlevait effectivement un corps sur un brancard. Une main blanche pendait mollement hors du drap. A coté d'elle, un jeune homme pâle comme la mort se tenait hagard. Il semblait être assommé, comme frappé à plusieurs reprises. Il n'avait plus l'air de comprendre où il était, ni ce qu'il faisait là.

Puis, tout d'un coup, il se jucha sur un tonneau et se mit à hurler.

"Je vais vous dire la vérité braves gens. Helm est un mauvais dieu. Helm n'aime pas les manostiens !"

Tul fut surpris que quelqu'un ose critiquer Helm juste devant son temple. Mais c'était apparemment quelqu'un de très proche de la jeune femme décédée, et le fait qu'elle soit morte à cet endroit l'avait probablement brisé et rendu fou. Il allait en tout cas l'écouter: s'il savait quelque chose d'important sur Helm ou ce temple, cela pouvait se révéler important dans la situation actuelle, vu qu'il comptait sur les prêtres pour sauver Nils.

"Ce n'est pas bon signe tout ça.", miaula doucement Nils.

Il s'étira paresseusement, passa sa patte sous son oreille et se mit doucement à ronronner.

"Si ça continue, tu vas devoir m'emmener avec toi. Au fait, c'est normal que ces deux là bas te suivent depuis tout à l'heure ?"

Tul se retourna. Dans la foule, à quelques pas de lui, il distingua deux visages étrangement familiers. Mais ceux-ci furent vite noyés dans la foule.

Tul scruta a nouveau la foule, cherchant les visages qu'il venait d'apercevoir, mais ne les retrouva pas. Il était pourtant sûr de ne pas avoir rêvé. Il avait bien aperçu, l'espace d'un instant, le visage de 2 de ses ex-compagnons d'infortune.
Pourtant, ils s'étaient clairement expliqués pendant la traversée en bateau. Ils étaient sensé s'être séparés pour de bons et d'un commun accord, que pouvaient-ils bien lui vouloir? Et ces deux là étaient-ils seuls, où d'autres s'étaient-ils joint à eux?

En tout cas, ceux qu'il avait aperçu faisaient parti des plus dangereux et des plus mauvais. Dur de dire s'ils mijotaient quelque chose d'envergure où s'ils voulaient juste l'espionner pour le moment.
Mais ça ne présageait rien de bon. Se renseigner sur eux paraissait déjà urgent.

-Non, ils ne sont pas sensés me suivre, préviens moi si tu les vois de nouveau, d'accord?

En même temps, il lâcha un soupir. Il semblait maintenant impossible d'entrer dans le temple avec tout cet attroupement. Il essaierai tout de même, mais c'était probablement peine perdue.

Nils scruta attentivement la foule éparse. Il lui sembla remarquer une nouvelle fois les deux visages, puis plus rien. Ils avaient semblé se fondre dans la masse. Mais il ne se sentait pas rassuré pour autant. Bien au contraire.

"J'ai l'impression qu'ils sont là. Vite, vite, mets-nous à l'abri. Maouuuuu !"

hrp : tu peux poster dans le temple si tu veux

La mise en place de la sécurité avait pris beaucoup de temps. Après un assez long débat, les services de protection avaient fini par reconnaître qu’ils n’étaient pas en mesure de garantir la sécurité de Lothringen s’il décidait de parler comme il l’avait prévu, depuis les marches du temple, à cette foule inquiète qui s’amassait. Le passé avait fourni trop d’exemples d’attentats commis dans des circonstances similaires, jusqu’à cette tentative d’assassinat du Grand Émissaire, un peu plus d’un an plus tôt, lors de l’affaire de la Relique…

Alors le conseiller avait dû accepter le subterfuge. A contrecœur.

En haut des marches du temple de Helm, lorsque sa silhouette apparut, la foule agitée fit progressivement silence. Lothringen n’était pas toujours aimé, mais le peuple avait des questions et le semi-drow avait promis de donner des réponses. Peu importait, alors, que ce soit lui qui leur parle, plutôt que le Grand Émissaire.

« Citoyens de Manost… »

Contre toute attente, sa voix portait jusqu'aux plus lointains bâtiments de la place. Un barde lui avait aménagé un sort d’Amplification.

« Citoyens de Manost, votre inquiétude n’a fait que croître ces derniers jours, donnant libre cours à des rumeurs qui nous mettent tous en péril. Vous pensez que l’on vous cache des choses et vous avez raison. Si nous avons différé de vous parler, c’était afin d’essayer de gagner un peu de temps sur nos ennemis. Mais vous avez le droit de savoir. »

… C'est à ce moment-là que Zeddon Khar, prêtre de Torm, et son escorte parvinrent à se frayer un chemin dans la masse jusqu'à portée d'oreille. C'est-à-dire à l'embouchure de l'une des rues latérales. Hugues eut une vague impression de déjà-vu en contemplant cette foule, cette place, Lothringen surs les marches, et ce cordon de paladins autour ; autrefois, n'avait-il pas assisté déjà à une émeute meurtrière, en ce même lieu ?

« ...Comme une partie d’entre vous l’a deviné, le clergé helmite n’est plus en mesure de fournir soins et sorts divins. Ce n’est pas un châtiment. Manost et son clergé ne sont pas en cause. Cela touche l’ensemble des serviteurs de Helm, et pas seulement ceux de notre cité. Nous en avons à présent la confirmation, Helm est mort au cours d’un duel divin, il y a de cela trois jours… »

Inutile de préciser tout de suite que c’était lors d’un affrontement avec Tyr : la foule avait l’air déjà suffisamment bouleversée. Après le premier instant de stupeur silencieuse, vinrent les questions, les hypothèses, l'appréhension de l'avenir. Lothringen laissa le brouhaha enfler et désenfler. Cela dura longtemps.