La Couronne de Cuivre

Quête : association de bienfaiteurs

Ha non ! Rien à faire ! Rien à faire, il n’allait pas y arriver ! Et le temps, seconde après seconde, s’écoulait. Il lui en restait encore, mais déjà moins. Combien au juste ? Quelques minutes, un quart d’heure peut-être... Silmandel se découragea. Il enfouit à nouveau son visage dans ses mains, soupira. Quel crétin ! Il n’aurait jamais dû s’entraîner dès cette nuit ! Seulement, il pensait n’être convoqué que tard dans la mâtiné, voir dans l’après-midi, quand ses papiers seraient prêts. Faux sur toute la ligne !

Il se leva, s’approcha de la porte. Le son feutré de ses pattes lui était insupportable. Il tendit la main vers la poignée. Il ne devait y avoir personne dans le corridor. Il pouvait aller voir Clémentine, lui demander son aide. Il hésita, se ravisa. Il se tourna, fixa son sac et songea enfiler le manteau de nain, qu’il ait au moins ça sur le dos. Pour être présentable ? Quelle différence ! L’ensorceleur fut accablé par sa propre bêtise. Peu importait sa tenue. Ni Clémentine, ni Alexandre ne pouvait l’aider. Il devait se débrouiller seul. Mais comment ? Il avait déjà essayé. Ne pouvait-il pas se servir d’un sort de déguisement ? Pas avec sa taille ridicule. Pas avec son élocution foireuse. La conviction d’être piégé l’écrasa. Il eut envie de fuir, ce qui le fit se diriger vers la fenêtre. A nouveau, il se ravisa. Il repensa alors à Séluné et il se sentit encore plus idiot. Comme si une déesse allait le sortir de sa mouise où il s’était lui-même mis. L’elfe n’avait jamais été très pieux, c’était le moins qu’on puisse dire. Alors, il se rassit et, encore une fois, il tenta de toute ses forces de reprendre cette satanée forme elfique ! Les autres lycanthropes y arrivaient, pourquoi pas lui ? Il chercha tout de même à voir si la lune était là, au cas où.

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En regardant par la fenêtre, il n'eut pas la chance d'apercevoir la lune : elle était peut-être trop bas, à l'horizon, à moins qu'elle n'ait déjà disparu derrière celui-ci. Et s'il eut l'impression que l'aube ne tarderait plus, ce ne fut guère réconfortant : même si elle survenait dans moins d'une demi-heure, ce serait déjà trop pour lui...
Il revint s'assoir sur son lit, se concentra à nouveau pour tenter de reprendre forme elfique. En vain.
Il entendit alors une porte s'ouvrir, tout près : Clémentine était probablement en train de quitter sa chambre.

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Silmandel se releva aussitôt. En quelques pas, il fut devant sa porte, de nouveau tenté de l’ouvrir. Clémentine était dans le couloir. Il n’avait qu’à l’appeler, lui faire signe. Vite ! Dans quelques secondes, elle se serait trop éloignée. Mais non, non il n’osa pas. Elle allait peut-être prendre peur. Et puis, il se refusait de l’impliquer. Etre le complice d’un lycanthrope, ce n’était pas bien vu. S’il se faisait prendre, il n’aurait qu’à affirmer qu’elle n’était pas au courant. A lui d’assumer seul son imprudence. Il se détourna de l’entrée. Il allait se rassoir sur son lit, essayer encore de se retransformer, mais il n’y croyait plus du tout. Il n’allait pas y arriver, c’était certain. Où était donc passé son optimisme ? Il n’aurait su le dire. Il sentait juste le piège se refermer, piège qu’il s’était lui-même tendu. C’était tellement idiot ! Un instant, rien qu’un instant, il songea à la réaction de Maître Fagin lorsqu’il allait apprendre... A quoi fallait-il s’attendre ? Exécution sommaire ? Séjour dans une cage chez un prêtre ? La trouille le submergea. Il pouvait toujours fuir. N’en demeurait pas moins qu’il aurait tout gâché. Il se tourna vers la fenêtre, fixa le ciel. Il resta quelque secondes ainsi, immobile, avant de tomber à genoux, de joindre les mains et de se mettre à prier Séluné. Seule la Déesse d’Argent pouvait encore peut-être changer quelque chose. Présentement, il était avant tout un garou, c’était sa déesse...

C’était la première fois de toute sa vie qu’il priait avec autant d’implication. Avant, lors des grosses galères, il avait pu compter sur ses compagnons d’aventure, toujours là pour lui. Mais là, il se sentait seul, perdu. Il marmonna, tout bas, des phrases maladroites, ne sachant pas du tout comment procéder. Il jugea bon de commencer par se présenter, tout en s’excusant. Il ne voulait surtout pas... déranger. Il évoqua Clémentine, grâce à qui il savait à qui s’adresser. Il confessa être imprudent. Il admit que ce qui risquait de lui arriver était uniquement de sa faute et que, peut-être, il le méritait. Il expliqua qu’il avait toujours eu du mal à se prendre en main, qu’il avait toujours compté sur les autres pour lui mettre les limites. Il assura vouloir changer, mais c’était difficile. Il détailla son problème, supplia une solution, n’importe laquelle. Bien sûr, il ne cacha pas qu’il avait peur pour sa peau, mais il reparla encore de Clémentine, mentionna Alexandre, il ne voulait pas qu’ils pâtissent de ses erreurs. Il jura de faire de gros efforts, que jamais plus il serait imprudent, mais qu’il avait vraiment, vraiment besoin d’un petit coup de pouce.

Et il continua ainsi ses propos désordonnés mais sincères.

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Cependant, Silmandel n'eut l'opportunité ni de savoir s'il avait été entendu, ni de poursuivre longtemps ses silencieuses suppliques. En effet, on ne tarda pas à toquer énergiquement à sa porte.
-Te serais-tu rendormi ?
C'était Clémentine. Elle avait dû s'immobiliser un moment devant le battant pour vérifier qu'il s'activait bien.
-Allez, dépêche-toi ! reprit-elle. Arriver en retard ne ferait pas très bonne impression...

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Ho, par tous les dieux ! Persuadé qu’il s’agissait de Guilbert, les nouveaux coups sur la porte avait littéralement tétanisé Silmandel. Mais c’était Clémentine... Perturbé, il ne sut ni quoi faire, ni quoi dire. S’il gardait le silence, la jeune femme allait croire qu’il s’était rendormi et donc elle allait insister, puis certainement entrer. S’il parlait, quoi qu’il dise, elle allait entendre sa voix, son ton. Elle le connaissait assez et elle en savait assez pour comprendre. Il était dos au mur. L’ensorceleur, indécis, se redressa. Pour cela, il dût s’aider de ses mains car ses jambes vacillaient. Il jeta un regard appuyé sur la fenêtre. Déjà dans son esprit, il s’imaginait l’ouvrir et la franchir. Il demeura dans cette position, visible de profil depuis l’entrée, lorsqu’enfin il articula :
« C’est que... j’ai un petit problème. »

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Il avait à peine terminé sa phrase que la porte s'ouvrait et que la lueur d'une bougie envahissait la pièce. Clémentine fit deux pas en avant. Lorsqu'elle aperçut l'ensorceleur, ses yeux s'écarquillèrent et elle lâcha un cri de surprise... qu'heureusement, elle étouffa aussitôt de sa main libre. Encore un instant et elle s'était ressaisie.
-Oh mais c'est pas vrai...lâcha la jeune femme.
Elle referma le battant derrière elle puis darda sur Silmandel un regard furibond.
-Tu n'as pas pu t'empêcher de faire joujou avec la métamorphose... Comment as-tu pu être aussi stupide ? Même mon frère n'y arriverait pas, et les dieux savent pourtant que quand il s'y met, il bat des records !

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« C’est que... » commença Silmandel, sur la défensive.
Il avait enfin tourné la tête vers Clémentine. Dans son esprit, les justifications se bousculaient. Même lui, qui n’était pas spécialement orgueilleux, avait du mal à admettre ouvertement ses erreurs. Se confesser à une déesse, ok, mais face à la jeune femme, c’était une autre histoire. Il manqua faire preuve de mauvaise foi, prouver par A+B que sa décision avait été totalement responsable et précautionneuse. Mais ce n’était pas le moment de nier en bloc l’évidence. Après une brève hésitation, il fit complètement face à Clémentine et reprit la parole avec un ton et des gestes qui montraient bien à quel point il était dépassé.
« Je sais ! Je sais que c’était stupide ! Je l’ai su dès que j’ai eu l’idée ! Je suis comme ça, je fonce avant de réfléchir ! Et je sais qu’on peut pas se le permettre, ici encore moins qu’ailleurs ! C’est dur de changer ! Avant j’avais mes compagnons d’aventure ! Avant, c’était tellement différent ! Je m’en veux, j’ai tout gâché ! L’aube arrivera trop tard ! »

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-Ça, c'est fort possible, répondit-elle sans s'émouvoir. Mais ça n'est pas une raison pour ne rien faire.
Au moins ne perdait-elle pas son sang-froid.
-Il faut trouver une solution. Une solution qui ne soit pas la fuite. Car si tu te carapates, il te soupçonneront d'avoir essayé de les piéger, te retrouverons où que tu ailles et t'infligeront les dieux seuls savent quoi. Quant à mon frère et moi, nous serions dans de sales draps, soupçonnés de complicité... Et bien sûr, il est inenvisageable que tu te montres à eux dans cet état.
Elle déposa sa bougie et se mit à faire les cent pas, concentrée.

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Silmandel pouvait faire une croix sur la fuite. Elle allait nuire à Clémentine et Alexandre, ce qui était hors de question. Il se rassit sur son lit, la tête dans les mains, sans mot dire. Pour le coup, il ne valait pas mieux qu’un môme. Etait-ce si étonnant pour quelqu’un qui était toujours un peu gosse dans sa tête ? Cette pensée lui fit mal. Il était grand temps d’être adulte. Tout d’un coup, il releva le regard et déclara, sûr de lui :
« Ecoute. Sors d’ici. Fais comme si de rien n’était. Ton frère et toi, vous ne saviez rien de ma nature ! Je vous l’ai caché. C’est ce que je dirai lorsqu’ils me trouveront. C’est ce que vous direz quand ils vous interrogeront. Je suis peut-être un gros idiot, mais je refuse que vous en pâtissiez ! C’est à moi, à moi seul d’assumer ! Plus tu restes ici, plus vous vous mettez en danger ! Vas-t-en, c’est la seule solution. Si je ne t’ai pas appelé à l’aide, c’est pour cette raison ! »
Ce n’était pas des paroles en l’air. Si au moins il savait que Clémentine et Alexandre ne seraient pas inquiété, cela lui donnerait le courage d’affronter la suite des événements.

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-C'est gentil de ta part, mais tu te doute bien que je ne vais pas accepter, répondit-elle tout net. Et ne te fatigue pas à protester : de toute façon, je ne suis pas certaine que ton plan marcherait.
Elle jeta un regard à la porte, derrière-elle.
-Voilà ce qu'on va faire. Je vais rejoindre Fagin et essayer de gagner du temps : s'il ne nous a pas attribué la même mission, ce qui me semble probable, ça devrait assez bien fonctionner. De ton côté, rejoins Alexandre : les artefacts dont l'avaient affublé les cultistes sont liés à Séluné et ont déjà démontré leur puissance. Il y a donc peut-être une solution de ce côté là.

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« Ouais... peut-être. »
Il fallait espérer. Cela pouvait marcher. S’il y avait une solution, elle était là, dans l’usage de ces objets d’exception. Silmandel, après quelques dernières secondes de réflexion, se leva. Il attrapa ses habits qu’il mit sous un bras et saisit ses bottes qu’il tint à la main. En cas de succès, il pourrait se vêtir sans à nouveau changer de chambre.
« Sors en première. Fais-moi signe si c’est libre. »
Si c’était le cas, il se glisserait sans bruit jusqu’à la porte voisine.

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Tout se déroula sans anicroche. Enfin... au début. La jeune fille sortit silencieusement, laissa s'écouler quelques secondes puis lui souffla qu'il pouvait la rejoindre. Ce qu'il fit, gagnant le couloir, faisant les quelques pas qui le séparaient de la chambre voisine... Et c'est alors que, plus loin dans le corridor, une porte s'ouvrit. Clémentine réagit au quart de tour, saluant le nouveau venu et s'enquérant de sa nuit pour détourner son attention. Quant à Silmandel, il n'eut pas le choix : il lui fallut entrer sans s'annoncer.
La pièce était plongée dans le noir. Alexandre, s'il était toujours couché, ne dormait pourtant pas. Et, manifestement, il crut que sa sœur était de retour.
-Oh mais c'est bon, je t'ai déjà dix mille fois que j'avais compris tes consignes et que je les respecterai ! grommela-t-il, de mauvaise humeur. Maintenant, laisse moi dormir !
Et d'enfouir sa tête sous son oreiller.

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L’ensorceleur avait bien cru que tout était fichu. Adossé à la porte qu’il venait tout juste de refermer, il sentait encore des frissons le parcourir. Heureusement que Clémentine était réactive et que lui, sous cette apparence, était discret. Il retrouva son calme et répondit enfin à Alexandre. Il parlait bas :
« C’est moi, Silmandel. Chut, fais pas de bruit. »
Le garou s’avança dans la chambre et déposa ce qu’il portait. Puis il poursuivit :
« J’ai un p’tit souci. Il va peut-être falloir que tu m’aides. Mais je suis sûr que ça va te plaire. »
Il était probable que le garçon comprenne avant même de regarder. De tous, c’était lui qui connaissait mieux les étranges intonation de l’hybride chat.

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-Hein ?!
Alexandre s'était redressé et, guidé par sa voix, regardait approximativement dans sa direction.
-Tu t'es... transformé ?! J'ose pas imaginer le savon que t'a passé Clémentine quand elle s'en est rendue compte !
Il eut un sourire fugitif.
-Bon, mais je vois pas trop comment je pourrais t'aider. J'y connais rien, moi, en lycanthropie...

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« Heu, ouais, elle m’a un peu sermonné. Une chance que le temps presse, sans quoi elle m’aurait aussi tiré les oreilles, ou pire. »
On sentait Silmandel embarrassé, mais plus tant que cela. En présence d’Alexandre, la situation devenait presque amusante. Cela n’enlevait rien au fait qu’il fallait se dépêcher. Le garou chercha une bougie à allumer. Ensuite, il reprit la parole.
« Clémentine pense, et je suis de son avis, que la robe et la couronne peuvent nous servir. Reste à savoir comment, mais ce sont des artéfacts attribués à Séluné. Ils ont déjà prouvé qu’ils étaient magiques. Je te suggère de les revêtir, ce sera un bon début. En plus, tu pourras te prendre pour le dieu que tu voulais être. »
Gentille taquinerie.

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-Je ne prétendrai pas : j'affirmerai et ce sera la pure vérité, répondit le garçon, exagérément sérieux. Et bien sûr, tu devras te prosterner et implorer humblement ma divine assistance !
Il s'arracha à ses couvertures puis entreprit de fouiller son sac.
-Par contre, j'ai déjà porté la robe et la couronne et j'ai rien ressenti de particulier. J'ai rien pu faire de particulier non plus. Le seul truc que j'ai constaté, c'est que les sorts me rebondissaient dessus. C'est tout.

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« Ha ! Tu parles d’un dieu ! Même pas capable d’utiliser sa divine magie ! » se moqua Silmandel, qui avait croisé les bras et bombé le torse.
Il se dégageait de sa posture une fierté tout aussi exagérée. Comme quoi, elfe ou chat, il pouvait toujours autant faire le couillon. La seconde d’après, il retrouva son sérieux.
« Parfois, la magie d’un objet ne se manifeste que si on la sollicite. Une fois prêt, tu pourrais, par exemple, me toucher et désirer me redonner forme originelle. Ce peut être aussi simple que ça. Parfois encore, il y a un mot de commande à prononcer, mot qui peut être écrit quelque part sur l’objet. »

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-Hum, je les ai bien examinés mais j'ai rien vu d'écrit dessus. Ou alors c'était tout petit ou dans une écriture qui ressemblait vachement à de la décoration...
Il brandit enfin les artefacts qui se mirent à chatoyer doucement à la lueur vacillante de la chandelle.
-Et si tu les mettais toi ? Y a des objets magique qui fonctionnent juste en les portant et sans qu'on ait besoin de rien faire d'autre, non ?
Il eut un sourire en coin.
-Bon, en même temps, j'sais pas si t'en ai digne. Et j'sais pas non plus si je te fais assez confiance. C'est vrai, quoi : quand on était dans les cryptes, tout le monde les voulait, alors tu pourrais très bien t'enfuir avec !

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Alexandre avait peut-être eu une bonne idée. Après tout, les artéfacts pouvaient fort bien avoir un effet positif sur un lycanthrope. Et quoi de plus positif que de contrôler ses transformations ? Silmandel ne perdait rien à essayer.
« Ho, oui, je vais te les piquer ! Ha ha ha ! Et après, je vais me balader avec dans la guilde et même dehors, et même devant l’école du Nécronomicon, juste pour voir la tête que font les gens à la vue d’un gros chat hybride en luxueuse tenue de Sélunite ! »
Il s’imagina brièvement la scène. Que ce serait drôle ! Quoi que non, c’était un coup à se faire tuer ou torturer. Autant éviter. Il tendit les mains pour que le garçon lui donne les objets, tout en ajoutant, de nouveau sérieux :
« J’essaie de les mettre, puis de me retransformer. Si ça ne marche pas, ce sera à ton tour d’essayer. »

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-Ouais, enfin, j'irai d'abord les laver. Non, parce que me retrouver avec des poils de chat de partout, beurk !
L'ensorceleur se para donc des artefacts. Cela ne lui rendit pas pour autant son apparence normale, il ne ressentit rien de particulier et, quand il essaya de se métamorphoser, il essuya un nouvel échec cuisant.
-T'as vraiment une drôle de touche avec ça... souffla Alexandre, hilare.

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« Ha oui, tu trouves ? »
Silmandel réajusta la couronne sur sa tête, prit la pause, puis...
« Bon, ben, chao ! Heureux de t’avoir connu ! Et merci pour le cadeau ! »
Il fit quelques pas vers la porte, comme s’il allait s’enfuir. La plaisanterie n’alla pas plus loin. Sans perdre d’avantage de temps, il se déshabilla et tendit les artéfact à Alexandre.
« Ça marche pas avec moi. Vas-y, montre ta toute puissance. »
Derrière l’amusement de façade, l’inquiétude reprenait doucement sa place. Si même les objets de Séluné ne pouvaient l’aider, ce serait fichu. Et pourquoi est-ce qu’ils marcheraient avec le garçon ? Parce qu’il était un vrai Sélunite ? Il fallait y croire.

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Après avoir ostensiblement secoué la robe et épousseté la couronne, Alexandre enfila la première par dessus sa tunique de nuit puis ceignit la seconde. Il adopta alors une attitude aussi crâneuse que l'avait fait Silmandel et, bien que les artefacts soient trop grands pour lui, il était indéniable qu'ils lui conféraient une belle prestance.
-Voyons ce que nous pouvons faire pour toi, humble mortel...
Il se tint bien droit.
-Par la grâce de Séluné, nous te rendons ta véritable apparence !
Et, cérémonieusement, il lui toucha la main.
Ce qui n'eut pas le moindre effet.

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Cette fois, Silmandel ne plaisanta pas. Ils devaient réussir ou ce serait une catastrophe ! Une catastrophe dont il serait l’unique responsable !
« Essaie de te concentrer, d’imaginer, de visualiser ce que tu cherches à faire. Il faut y croire, le vouloir. Je vais moi-aussi me concentrer, faire de mon mieux. Maintenant, c’est du sérieux. »
Alexandre avait effectivement une belle apparence dans cet accoutrement. L’ensorceleur voulait croire que c’était plus que cela. N’avait-on pas cherché à sacrifier le garçon avec ces objets ? Il devait bien être un peu particulier pour qu’on le destine à ce rôle ! A moins que tout simplement les cultistes aient été informé de sa religion.

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-Le souci, c'est que je suis pas sûr de vouloir que tu te retransformes ! Je t'aime bien, moi, en grosse peluche !
Il se fendit d'un sourire désarmant.
-Ah, oups, on avait dit que c'était sérieux, maintenant. Désolé !
Tous deux se concentrèrent alors. Et le gamin y mit du sien : il n'y avait qu'à voir ses mimiques pour en être convaincu.
Les secondes s'écoulèrent.
Tout à coup, l'ensorceleur se sentit parcouru par un étrange picotement.
L'instant suivant, il y eut comme des étincelles argentées au bout des doigts de l'enfant.
Puis...
Puis plus rien.
Et toujours pas de métamorphose providentielle.
-Ouah, c'était mieux, non !
Alexandre était tout sourire.
-Mais c'était pas encore ça, d'accord... Hum, peut-être que ça marcherait mieux si tu te prosternais devant moi ?
Soit il n'avait pas vraiment conscience de l'urgence, soit il s'efforçait de détendre l'atmosphère...

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« Alexandre, je ne sais pas si tu le réalises, mais tu étais sur le point de lancer un sortilège. La robe et la couronne fonctionnent avec toi. Ce n’est pas un hasard si les démonistes te l’ont donné, j’en suis sûr. »
A nouveau, Silmandel ne plaisantait pas. L’excitation s’était invité en lui lorsqu’il avait vu les petits éclairs d’argent. Et même si rien ne s’était passé au final, cela prouvait que leurs tentatives n’étaient pas veines. Il jeta un coup d’œil anxieux vers la porte, puis ajouta :
« Maître Fagin m’attend en bas. Clémentine fait de son mieux pour nous gagner du temps, mais celui-ci est compté. On retente et cette fois, ce sera la bonne. »
Il conclut tout de même avec un petit sourire félin :
« Vas-y, prouve au gros minou ta toute puissance ! »

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-Tu vas voir ce que tu vas voir !
Ils recommencèrent donc, plus appliqués que précédemment.
A nouveau l'étrange picotement.
A nouveau, les étincelles argentées.
A nouveau, rien de plus.
-Peut-être qu'il y a quelque chose qu'on fait mal... souffla Alexandre. Ou peut-être que je peux faire que ça, de jolies lumières. Ou peut-être que tu m'as trop mis la pression, je sais pas.

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« Ce ne sont pas de simples petites lumières. Je ressens un picotement me parcourir à chaque fois qu’elles apparaissent. Et la pression, tu la gères très bien, j’en sais quelque chose. Seulement, le recours à la magie, même via un objet, n’est pas forcément simple. C’est normal que tu galères, c’est la première fois. Il suffit que tu prennes le coup. Peut-être devrais-tu aussi... penser à Séluné. C’est ta déesse et ces objets lui sont attribués. Allez, on réessaie ! »
Malgré le temps qui passait et la pression qui allait croissante, Silmandel avait retrouvé son optimisme. La solution était là, à portée de main. Ils allaient réussir, forcément. Il y croyait. Il croyait aussi en Alexandre qui ne manquait pas de ressource.

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-Hé, laisse-moi une seconde pour souffler ! protesta le gamin.
Il grimaça.
-Je sais qu'on est pressés et tout, mais tu l'as dit, c'est pas un truc facile que tu me demandes ! Là, je me suis tellement concentré que j'en ai la tête qui tourne ! Je transpire, même !
Et, presque théâtral, il se laissa tomber sur son lit puis s'épongea le front.

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Mais non ! Mais non ! Comment pouvait-il faire une pause dans un moment aussi critique ? Et bien en fait, c’était sans doute judicieux. Mieux valait récupérer plutôt que de s’acharner en pure perte. Silmandel ne protesta donc pas, malgré l’envie qu’il avait eu sur le coup. Il ne taquina pas non plus le garçon. En fait, le mieux, c’était sans doute de le laisser tranquille. Le chat-garou fit de son mieux pour ne pas céder au stress. Une chance qu’il soit plutôt doué en la matière. Il observa l’enfant dans sa riche tenue. A la lueur de la chandelle, l’image aurait peut-être inspiré un peintre. Il s’observa lui-même, toujours peu habitué à se voir ainsi. Et, malgré lui, il tendait l’oreille aux bruits de l’extérieur.

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Alexandre finit par se redresser. Il rajusta sa robe et sa couronne puis leva les mains comme il l'avait fait précédemment. Toutefois, ce fut pour les rebaisser presque aussitôt.
-Au fait, qu'est-ce que j'y gagne si ça marche ? s'enquit-il, arborant un sourire goguenard. C'est vrai, quoi : tu t'es mis dans la panade tout seul et à cause de ton imprudence, j'ai dû me lever super tôt, me concentrer super fort...
Difficile de dire s'il était sérieux ou non.

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[Bâtiment] La Guilde des Voleurs