La Couronne de Cuivre

Le combat, clairement en défaveur du rat-garou, poussa ce dernier à reculer. Les sabres sifflaient dans l’air. Les pirates n’avaient pas peur du monstre car ils côtoyaient des monstres et, sans doute, étaient-ils eux même des monstres. Le Drow eut tout le loisir de se relever, de boire une petite fiole, puis de récupérer son glaive en argent. La situation, déjà critique, allait le devenir encore plus sous peu. Mais tout d’un coup, l’assassin entendit à son oreille la voix de Kededric. Ce devait être dû au sortilège pour communiquer.
« Blancbouillon est mort. On se rejoint où vous savez. »
Si Rowan voulait fuir, ce devait être encore possible. Mais il fallait le faire tout de suite.

« Un assassin... Hummm les Lames Pourpres n’est-ce pas ? Ou une guilde subalterne ? » répondit Griscieux avec un intérêt renouvelé.
Il fit signe à ses sbires de fouiller les quartiers du magicien. Ceux qui s’apprêtaient déjà à fondre sur Kededric se détournèrent. Le capitaine n’avait pas peur et il était aisé de comprendre pourquoi. Il savait se défendre. D’un geste élégant, il rengaina son sabre.
« J’ose espérer que cet intérêt soutenu pour Blancbouillon n’était pas excessif. Il se murmurait qu’il pouvait créer de l’or. Savez-vous quelque chose à ce sujet ? »

Ignorant que l'altercation qui avait lieu entre elle et ces quatre pirates n'avaient pas lieu d'être, Rowan continuait d'éviter du mieux qu'elle pouvait les attaques de ses adversaires. Sa réponse à son complice fut bref:

"Aux prises avec 4 pirates, je vais faire de mon mieux. Si je sais"

Ces derniers mots étaient suffisamment éloquents, si Kededric ne la voyait pas arriver il devait quitter les lieux sans penser à elle, tant que la mission était accomplie le reste importait peu dans leur métier. Profitant d'une seconde d’accalmie, elle renversa plusieurs ustensiles posés sur le meuble contre lequel elle avait été acculée sur le sol où ils se brisèrent avec fracas. L'instant d'après, redevenue rat elle filait en direction de la porte.

L'homme n'était pas un perdreau de l'année. Tout le monde savait qu'il existait une guilde d'assassins, mais rien que son nom demeurait inconnu d'une certaine partie de la population mélandienne... néanmoins, le capitaine était probablement un faquin qui avait ses entrées dans les milieux des malandrins, et qu'il eût des connaissances à ce sujet restait logique.

Kededric fit la grimace lorsque Griscieux évoqua la richesse de Blancbouillon.

"J'ai ouï dire cette rumeur, mais, si l'on excepte la richesse évidente qui s'étale sous nos yeux, j'ignore si elle est fondée. En revanche, j'aurais voulu en savoir davantage sur ses recherches en magie profane... pourquoi ne pas partager nos découvertes ?"

Il serait quasiment impossible de subtiliser les manuscrits de Blancbouillon au nez et à la barbe des pirates, mais il pourrait au moins découvrir leur existence, et ensuite les récupérer d'une autre manière... voire simplement en réaliser une copie, si Griscieux se montrait d'humeur joviale.

Sous sa forme animale, Rowan parvint à passer le seuil. Elle se retrouva dehors, dans un parc, apparemment assez vaste. Des arbres s’alignaient le long d’allées gravillonnées. L’entretien laissait un peu à désirer. Ici et là, les mauvaises herbes s’installaient, donnant à la végétation un côté anarchique, sauvage. C’était encore la nuit noire. Le calme contrastait curieusement avec ce qui se passait à l’intérieur.
« Rattrapez-là », beugla le Drow.
Les pirates n’étaient pas bien loin derrière l’assassin.

Kededric reçut la réponse de sa collègue :
« Aux prises avec 4 pirates, je vais faire de mon mieux. Si je sais. »
Le capitaine Griscieux considéra l’assassin avant de déclarer :
« Pourquoi pas. Venez. »
Il se dirigea vers le laboratoire d’un pas pressé. Ses sbires finissaient d’achever les serviteurs de Blancbouillon. Certains s’adonnaient déjà au pillage. Toutefois, les jumelles armées de fouets firent en sorte que personne ne touche aux manuscrits et au matériel du magicien. Quelques mains brutales auraient pu tout ravager en un rien de temps. Griscieux considéra la table de travail avec perplexité. Même si rien n’avait été touché, Blancbouillon était visiblement quelqu’un de désordonné. Ses notes manuscrites étaient quasiment illisibles et tellement raturées qu’on aurait pu croire qu’un gamin les avait gribouillées. Le capitaine en observa quelques-unes et eut une grimasse.
« Des recherches sur la téléportation... et il n’a même pas été capable de se téléporter pour nous échapper. Quelle ironie. Assassin, je n’ai pas le temps pour déchiffrer tout cela. Si vous me laissez votre nom et un moyen fiable pour vous contacter, je vous abandonne ces papiers. Mes relations en ville sont quelques peu diluées depuis que je passe ma vie en mer. Retrouver quelques contacts est nécessaire. »

Les notes de Blancbouillon semblaient bien être un bazar indescriptible. Le temps allait manquer pour tout relire à l'aise, et ils n'étaient pas là pour se livrer à d'intenses recherches sur les pratiques arcanes. Le temps manquait toujours, de toute manière...

Kededric haussa les sourcils lorsque le capitaine lui proposa de garder les notes. Il était franchement étonné, et ne s'en cacha guère.

"J'avoue que votre proposition me prend de court. Je n'aurais pas imaginé que vous fassiez confiance au premier tueur venu..." Il fallait imaginer que Griscieux connaissait beaucoup de monde en ville, ce qui semblait être le cas. Kededric restait perplexe malgré cette explication plausible. Mais il fallait prendre une décision, et la sagesse le guida aisément.

"J'apprécie les allées et venues sur le port, et je m'y promène souvent. J'ai pour habitude de siroter de bonnes bières au Luménien Noyé lorsque je ne suis pas en mission. J'y séjourne sous le nom de Telmer le Taiseux. L'aubergiste pourra vous dire si je serai de retour rapidement ou non."

Rowan n’eut aucun mal à se fondre dans la végétation anarchique du parc. Elle faillit par contre plonger tête la première dans une fosse hérissée de piques et adroitement dissimulée sous les herbes. Elle ne dût sa survie qu’à ses réflexes. Un instant plus tard, elle échappait à un piège à ours qui aurait aisément pu la couper en deux. Tout compte fait, Blancbouillon avait bien un jardinier, mais celui-ci faisait pousser des plantes en acier pleine de lames et de mécanismes mortels. Les pirates devaient le savoir car ils ne cherchèrent pas à la poursuivre. Le Drow sembla très déçu. Il s’attarda un instant de plus avant de suivre ses compagnons à l’intérieur. Voilà l’assassin tranquille.

« Et bien, Telmer le Taiseux, embarquez vos notes. Je n’aurais pas pu en tirer un réel profit. En revanche, je pense que nous allons bien nous entendre. »
Il se pencha et ajouta sur le ton de la confidence :
« J’ai l’instinct pour ce genre de choses. Et mon instinct ne me trompe jamais. Pour preuve, je suis encore en vie. »
Il se redressa.
« Ha, si, je me suis trompé une fois ! »
Il montra son crochet.
« Et j’aime m’en souvenir. »
Décidément, le capitaine dégageait quelque chose de particulier. Il y avait peut-être plus qu’un charisme d’exception, peut-être plus que quelque chose d’humain. Il faillit se détourner, mais dit encore :
« Ho, une question, tant que j’y suis. J’ai perdu un membre de mon équipage cet après-midi. Vous ne seriez pas quelque chose, par hasard ? »

HRP : pour rappel, Bérelda à tué un pirate quand tu étais caché sous son lit. Le corps a fini à l’eau.

La roublarde pouvait donc profiter d'un bref répit tant qu'elle restait dans cet environnement dangereux mais elle ne se voyait pas rester ici toute la nuit non plus. Si le jardin dans son entièreté était un piège mortel qui la protégeait momentanément de ses poursuivants, il était tout aussi dangereux pour elle qu'il ne l'était pour les pirates. Mais au moins elle se trouvait dans une position plus appréciable que quelques instants auparavant.
Persuadée que le drow allaient revenir avec d'autres complices pour la déloger - et toujours dans l'ignorance de la bonne marche des événements à l'intérieur de la bâtisse - Rowan se demandait bien comment elle allait sortir de ce mauvais pas sans risquer de finir hachée menue.
Peut-être que le sort de communication de Kededric était encore actif, cela ne coûtait rien de vérifier:

"Me reçois tu camarade?"

HRP : tes messages sous-entendent que tu lis les spoiler de Kededric. C’est un peu dommage. Tout l’intérêt des spoiler est de cacher des choses aux joueurs.

L’assassin reçu un message de la part de sa collègue.
« Me reçois tu camarade? »

HRP : plus la peine de répondre en spoiler.