La Couronne de Cuivre

Kasumi était submergé d’émotions contradictoires mais celle qui dominait toutes les autres était la gêne de se retrouver ainsi au centre de l’attention des deux femmes qui semblaient prendre à peine conscience de sa présence alors qu’elles échangeaient les anecdotes embarrassantes le concernant. Et pourtant, il n’était pas mécontent du tour qu’avait pris la conversation, glissant sur un sujet gênant mais bien moins sérieux. L’évocation de l’épisode cocasse dont il avait été victime le détournait un instant de son analyse de la réaction de la rôdeuse à sa révélation et de ses propres sentiments la concernant. La gouvernante avait-elle évoqué l’anecdote dans ce but ? Le rôdeur la soupçonnait bien plus sagace qu’elle ne voulait bien le laisser transparaître et l’hypothèse n’était pas inconcevable. Et même si ce n’était pas le cas, voir Astrée si joyeuse était une compensation à son humiliation du moment.

Il ne savait pas trop quoi répondre et soupçonnait que, dans leur état d’esprit actuel, ses deux tourmenteuses se serviraient de ses protestations pour nourrir un peu plus leur hilarité à ses dépens. Il choisit donc de tenter de dévier la conversation vers un sujet terre à terre et en amadouant Madame Ogg :

- Vos biscuits sont toujours aussi bons Madame. S’il faut vraiment chercher des héros, vous y seriez en bonne position Messire Artwin et vous pour ce que vous faites pour les enfants et pour vos bons soins. Il me semble que vous cherchez toujours à minimiser la teneur de vos exploits en accroissant celle des autres. Ce qui est arrivé avec Madame Paluche n’a pas réveillé *toute* la maisonnée. Vous exagérez toujours.

Cette fois-ci, le demi-elfe s’était laissé aller à sourire lui aussi de l’épisode qui l’avait tant fait rougir.

Madame Ogg lui rendit son sourire.
-Oui, heureusement, la plupart des petits sont restés bien sagement endormis... Et ils en avaient besoin. Certains font encore des cauchemars, mais ils s'apaisent, peu à peu...
Une soupçon de tristesse passa dans son regard, mais, déjà, il n'y paraissait plus, et elle reprenait de son ton jovial.
-Pour ce qui est des héros... Le seigneur Artwin refuserait qu'on lui donne ce titre. Il estime avoir simplement fait son devoir. Même si je suis d'accord avec vous et ne saurais jamais dire à quel point je trouve beau ce qu'il a fait. Quant à moi, traitez-moi d'héroïne, et je raconte d'autres histoires à cette petite dame. Ou bien, je vous tire les oreilles pour vérifier que vous vous êtes bien lavé derrière ! Je fais juste ce que je dois faire, et j'y prend un immense plaisir. Qu'y a-t-il d'héroïque là-dedans ?
Elle sourit.
-Des héros, cherchez-en parmi vos amis de la résistance. Tenez, madame Galathée. La dame aux corbeaux ! Si jeune... et qui a accepté de s'occuper d'un enfant qui n'était pas le sien. Oh, ça n'a sans doute pas été simple, et elle a eu d'autres choses à régler, d'abord. J'étais dubitative quand elle est venue reprendre Victor, mais... Elle était sincère, alors, je n'ai rien dit. Et j'ai eu raison. Elle l'a adopté il y a quelques semaines. Et pour avoir revu le petit depuis, je vous jure que c'est le jour et la nuit. Il revit. Offrir ça à un enfant, quand on est soi-même à peine sorti de l'adolescence, qu'on a souffert plus que de raison pour une cause qui à la base n'est pas la sienne... Cela, c'est héroïque, à mon sens. Et ça lave toute les souillures, toutes les horreurs de la dictature.

Le rôdeur fut replongé dans ses souvenirs de l’époque. Galathée avait été entraînée dans le conflit bien malgré elle et avait du faire face à des situations déchirantes et effroyables sur lesquelles elle ne s’était jamais épanchée. Kasumi lui avait appris à tuer et l’avait entraîné dans les situations les plus périlleuses et pourtant elle avait su faire face. Elle avait recueilli le courageux orphelin et prit soin de l’élever comme son propre fils. Aujourd’hui, il était heureux de penser que tous deux avaient trouvé le bonheur en compagnie de Taliesin. Poussé par la curiosité, il invita Madame Ogg à en dire davantage :

- Ainsi, vous les avez revus récemment ? J’ai appris qu’elle avait trouvé un emploi au fort et je l’y ai même croisée une fois ou deux. Vous avez raison, nous avons tous bien changé depuis cette époque, vous excepté ce dont je me réjouis.

-Vous en réjouissez-vus vraiment ? fit-elle, malicieuse. Si j'avais changé, peut-être n'aurais-je pas raconté ces histoires sur votre compte ! Je crois que certains des enfants aimeraient bien que je change, eux, histoire que j'oublie, de temps en temps, de vérifier qu'ils se soient bien lavé les mains avant de manger ou qu'ils aient fini leur assiette... Mais pour en revenir à dame Galathée, je n'ai pas eu de ses nouvelles récemment, non. Elle est passée il y a plus de deux veilles, avec le garçon, pour remercier le seigneur Artwin - vous savez qu'il gérait les biens de Victor, comme il le faisait pour tous les orphelins n'ayant pas encore été adoptés, et pour donner des nouvelles. Son compagnon, un barde qui officie à la Bienveillance, était en voyage hors les murs, si j'ai bien compris... En tout cas, j'étais heureuse de les revoir. Non pas que je m'inquiétais, mais... Elle paraissait douter un peu de ses capacités à élever un enfant si jeune... Elle s'en tire très bien, et le petit va de mieux en mieux. Vous parliez de héros, tout à l'heure ? Et bien, ces gosses en sont, à mon avis. Ils ont vécu des choses affreuses et se relèvent, peu à peu. Envers et contre tout.

Astrée se contentait d'écouter en silence. Kasumi ne lui avait jamais vraiment parlé de la guerre civile qui avait ravagé Luménis, ni de la résistance et du rôle qu'il avait joué. Ni de Galathée qu'il semblait avoir bien connue, d'après ce qu'avait dit Taliesin : ils étaient tous deux des héros de la résistance, et combattre ensemble forge des liens. N'empêche que ça avait dû être une période difficile pour tous... Elle se promit d'aller voir Taliesin et sa femme avant la fin de son séjour. Kasumi serait certainement d'accord pour l'y accompagner.
Elle écouta avec intérêt le discours de la cuisinière. Ainsi, certains des enfants orphelins trouvaient une nouvelle famille, d'autres restaient à l'orphelinat, mais tous reconstruisaient leur vie et grandissaient envers et contre tout. Elle se dit que sa fille à elle n'aurait jamais la chance de grandir...
La tristesse l'envahit, malgré elle. Elle dut se faire violence pour ne pas la laisser transparaître.

Elle hocha la tête à l'attention de la cuisinière.
- Oui, vous avez raison. La capacité de résilience des enfants est étonnante. Et cette Galathée a l'air d'être quelqu'un de bien. Taliesin m'a dit que tu la connaissais très bien, ajouta-t-elle en se tournant vers Kasumi. On pourrait peut-être leur rendre visite avant que je ne reparte ? Je serais ravie de faire sa connaissance...

Kasumi dégusta son thé et reprit un gâteau. Il avait bien mangé ce matin mais ses efforts et surtout le goût des pâtisseries invitait à les manger sans faim. Kasumi se demanda un instant si la question de la rôdeuse était liée à sa révélation précédente. Il écarta néanmoins cette idée, décidant de répondre si elle l’interrogeait directement mais pas s’épancher davantage que nécessaire sur sa relation passée. Revoir Taliesin et Galathée, surtout en compagnie d’Astrée, était une idée qui le réjouissait néanmoins :

- C’est une excellente idée ! Je serais ravi de leur rendre visite cet après-midi. Je suis certain que Galathée te plaira, vous avez de nombreux points communs je pense. Madame Ogg, quand les enfants ont-ils récréation, j’ai apporté quelques jouets qui pourraient plaire aux plus jeunes.

-Des jouets ? Mais, messire Kasumi, vous savez bien que cette maison n'est dédiée qu'au travail ! s'exclama madame Ogg avec un sourire et un clin d'œil qui démentaient ses propos et montraient, si besoin en était, que le geste était apprécié à sa juste valeur.
Le rôdeur n'eut cependant pas le temps de répondre : Artwin venait d'entrer dans la pièce d'un pas alerte. Qu'il eut beaucoup de travail, personne n'en doutait. Mais celui-ci, étrangement, ne semblait en rien l'affecter, et il était toujours aussi fringant que la dernière fois où Kasumi l'avait vu.
-Messire, fit-il en venant serrer la main du demi-elfe. Madame...
Il s'inclina courtoisement et prit place sur un siège, tandis que madame Ogg lui servait une tasse de thé avant de s'esquiver vers ses fourneaux.
-Cela faisait bien longtemps que nous ne nous étions vus... reprit le vieil homme après avoir bu une gorgée de thé.

Kasumi sourit à l’entrée du maître des lieux et se leva pour serrer la main qu’il lui tendait. E vieil homme n’avait pas semblé affecté par la quantité de travail que devait représenter la charge de l’orphelinat. Bien au contraire, son action semblait le rendre plus fringant signe qu’il en tirait une grande satisfaction personnelle. L’homme avait été le premier du quartier à accepter les résistants et les réfugiés, mettant en péril non seulement sa fortune mais aussi sa sécurité. Kasumi était étrangement joyeux à l’idée de lui présenter Astrée et s’empressa de sacrifier à cette règle élémentaire de courtoisie :

- Messire Artwin, c’est un plaisir de vous revoir et croyez bien que je regrette de n’être pas venir plus souvent. Laissez-moi vous présenter Astrée. Elle est de passage en ville. C’est une rôdeuse de talent et grâce à elle, je dois avouer, je suis de retour à Luménis en un seul morceau encore une fois.

Le demi-elfe adressa un clin d’œil à sa compagne qui avait gardé le silence depuis l’entrée d’Artwin.

Celui-ci sourit à la jeune femme.
-Et bien, dame, je suis enchanté de faire votre connaissance. Les deux derniers rôdeurs a être venus ici se sont révélés des gens de bien, et il semble fort que ce soit également votre cas... Inutile de dire que vous serez ici la bienvenue à chacune de vos visites. Oh, et avec un tel trio de coureurs des bois pour nous accompagner, j'ai comme dans l'idée que nous pourrons un jour séjour en nature pour les enfants, lorsque la belle saison sera venue !

Astrée avait rougi sous le compliment de Kasumi, même si elle n'aimait guère penser aux circonstances dans lesquelles elle était venue en aide à son homologue. Elle avait été obligée de tuer un homme...
La tirade du Seigneur Artwin, tout aussi élogieuse alors qu'il ne la connaissait pas, augmenta encore sa gêne, et c'est d'une voix mal assurée qu'elle prit la parole.
- Je suis moi aussi ravie de vous connaître. Kasumi m'a dit beaucoup de bien de vous, et m'a raconté ce que vous faites pour les enfants... C'est vrai qu'un séjour en plein nature serait une bonne idée d'activité pour eux, mais malheureusement, je ne suis que de passage à Luménis, je n'aurai certainement pas l'occasion de vous accompagner. Mais Kasumi sera sans doute heureux de vous aider, ajouta-t-elle avec un regard interrogateur vers le rôdeur.
Et puis c'était mieux ainsi... Si elle devait accompagner un groupe d'enfants de l'âge de sa fille... Cela lui ferait trop mal.

Kasumi fut un peu déçu de la réponse de la rôdeuse. Evidemment, ils savaient tous deux qu’elle ne resterait que quelques jours en ville. Cependant, le refus poli de la rôdeuse était un rappel de son prochain départ. Le demi-elfe tenta de ne pas montrer la tristesse que cette évocation provoquait en lui. Après tout, ils avaient prévu de se revoir au printemps, qui savait si la rôdeuse n’accepterait pas de le revoir encore pendant l’été. Kasumi se rendit alors compte que pour la première fois depuis bien longtemps, il se surprenait à faire des projets pour l’avenir et non pas seulement pour les quelques heures ou jours à venir.

- Ce serait une joie pour moi d’accompagner vos protégés. J’espère d’ailleurs que vous ne m’en voudrez pas de leur avoir quelques présents.

Le rôdeur désigna fièrement son sac et une joie à peine contenue transparaissait dans son expression.

Le vieil homme haussa un sourcil surpris puis sourit largement.
-Vous en vouloir, mais pourquoi donc ? C'est très généreux de votre part..
Il jeta un regard à la cantonade et reprit, d'un ton de conspirateur.
-Ne les montrez pas à madame Ogg, elle serait capable de les garder pour elle toute seule et de s'amuser avec au lieu de faire les repas... Hum, non, je plaisante, bien sûr. Mais elle conditionnerait leur prêt aux enfants à quelques menues tâches comme... Prendre un bain auquel on a voulu échapper, mettre la table, faire son lit... Moi, je vous promets de les mettre à leur disposition sans conditions. Après avoir prélevé une ou deuxpièces pour mon usage personnel...

Le rôdeur partir d’un rire bon enfant au ton de conspirateur et aux paroles du vieil homme. Elever des enfants lui réussissait bien et Kasumi pouvait imaginer le maître des lieux racontant des histoires à ses pensionnaires et se plaisant à les voir reprendre goût à la vie sous son regard bienveillant. Le demi-elfe se leva et, après avoir débarrassé la table, il farfouilla dans son sac pour en sortir les cadeaux qu’il destinait aux enfants. Il aligna les petites merveilles sur la table qui était tout juste assez grande pour les exposer toutes. Le demi-elfe avait sculpté des petites figurines représentant des animaux de toutes sortes réels ou issus de contes. La finition de chaque pièce avait été réalisée avec grand soin et donnait une telle impression de réalité que les animaux semblaient devoir prendre vie à tout instant. Il y avait bien une quinzaine d’objets et le rôdeur continua à retirer des cadeaux de son sac. Une petite flûte en bois trouva place à côté d’un ensemble de sachets contenant de nombreuses petites pièces peintes dont chacune était destinée à s’emboîter à un endroit précis. Le rôdeur certifia qu’une fois assemblée correctement, une carte d’Hellona et Dorrandin apparaissait.

- Je gage que Madame Ogg se satisfera de penser que ces objets pourront avoir un rôle aussi éducatif que ludique.

Il était en tous cas évident que le rôdeur avait du passer des heures à leur confection… Il sourit devant l’air ébahi dus seigneur et ajouta d’un ton malicieux :

- Je parie que vous vous demandez comment j’ai faire tenir tout ceci dans mon sac mais c’est un secret de rôdeurs que je ne révèlerai jamais !

Le vieil homme, pensif, se frotta un instant la barbe tout en contemplant les objets apportés par Kasumi.
-Et bien, ma fois, seriez-vous mage que j'évoquerais la possibilité d'un sac de grande contenance où quelqu'autre artefact du genre, mais comme ce n'est pas le cas... Enfin, rien ne vous empêcherait d'avoir découvert l'une de ses merveilles.. Très utiles, ma foi. Ma fille en avait un...
Il se tut, fit tourner entre ses doigts l'une des statuettes, puis la reposa délicatement sur la table.
-Merci, en tout cas. Je suis certains que ces jouets rencontreront un franc succès. Et pas forcément qu'avec les enfants, au demeurant... Et je crois que vous avez une voie de reconversion toute tracée, si un jour vous veniez à vous lasser de vos errances.

Astrée admira sans réserve les magnifiques objets sculptés par Kasumi. Il était réellement doué pour la sculpture. Un véritable artiste. Elle repensa à la statuette qu’il lui avait sculptée, tellement vivante… Et à sa grande surprise, elle se sentit presque… jalouse ? Non, ce n’était pas tout à fait ça…
Tu n’imaginais quand même pas être la seule pour qui il ait créé une sculpture ?
Peut-être qu’il avait offert des tas de statuettes, pas seulement à des enfants. Peut-être que ce geste n’avait pour lui aucune signification particulière. Elle avait cru, pourtant…

Elle chassa ces pensées égoïstes de sa tête. Il avait dû passer un temps fou à sculpter ces petits objets pour des orphelins, et c’était un geste admirable.
Elle lui sourit :
- Oui, je pense moi aussi que tu peux sans problème te reconvertir dans la sculpture. Tu es vraiment un artiste.
L’admiration qui perçait dans son ton était sincère. Ses yeux brillaient en contemplant les objets. Elle ne put résister, elle non plus, à l’envie d’en prendre un dans ses mains. Une magnifique figurine en forme de loup. Presque vivante.

Kasumi sourit sans réserve en constatant que ses amis admiraient ses œuvres. Il répondait à la suggestion d’Artwin mais ce fut Astrée qu’il regardait :

- Peut être un jour, si je veux m’installer mais je ne suis pas au bout de mes découvertes. La plupart de ce que je sculpte m’a été inspiré par ce qui m’a été donné de voir au cours de mes voyages. Je dois vous avouer que chaque pièce est un peu spéciale pour moi et que je ne m’en sépare que pour les confier à des gens que j’apprécie. Je réfléchirai néanmoins à votre suggestion.

Le rôdeur n’avait pas quitté des yeux Astrée pendant sa tirade qui était aussi destinée à lui faire comprendre qu’il n’avait pas oublié la statuette qu’il lui avait sculptée. La joie que la rôdeuse avait manifestée lorsqu’elle l’avait découverte lui apportait encore du plaisir.

Du bruit se fit alors entendre, à l'étage : un joyeux vacarme de chaises poussées, tirées, de conversations animées, de pas dans les couloirs et l'escalier...
-Oh, je crois que c'est l'heure du repas... fit Artwin. Je vous inviterais bien à rester manger, mais je crains qu'une invitation soit superflue. Madame Ogg n'accepterait pas que vous vous esquiviez sans avoir mangé un morceau en notre compagnie...
Il avait à peine achevé sa phrase que la salle à manger était envahie par une foule d'enfants. Il y en avait une vingtaine, au total, de tous âges et de toute taille : le plus jeune ne devait pas avoir trois ans, les plus âgés... n'étaient plus vraiment des enfants. Il s'agissait des jumeaux Fred et George que connaissait bien Kasumi et qui vinrent lui parler avec entrain. Le reste de la troupe, après avoir poliment salué les visiteurs, se massa autour de la table, admirant les merveilles qui y étaient exposées, certains n'osant pas y toucher, une poignée, plus hardie, s'emparant avec précaution de l'une ou l'autre pièce pour l'examiner de plus près.
Le joyeux désordre qui régnait dans la salle à manger cessa sitôt que madame Ogg apparut sur le pas de sa cuisine. Trois gamins, dont ce devait être le tour, disparurent dans l'antre de la gouvernante et revinrent un instant plus tard chargés de couverts qu'ils disposèrent soigneusement sur l'immense table. Quelques autres s'empressèrent de filer vers la salle d'eau, à l'étage, pour procéder à un lavage de mains malencontreusement oublié, histoire de ne pas être recalés lors de l'inspection qui ne tarderait plus guère.
Quelques minutes plus tard, toute la maisonnée était installé pour le repas. Astrée put noter que l'on ne faisait aucune différence entre les enfants, les employés ou le maître de maison : tous mangeaient à la même table, et les conversations, animées, allaient bon train. Kasumi put reconnaître d'autres visages familiers, dont celui - immense - de Banjo, qui était resté travailler à l'orphelinat où il semblait comme un poisson dans l'eau.
Mais, au final, le terme d'orphelinat paraissait quelque peu inapproprié. On traitait les enfants avec attention, avec affection, même. Artwin, notamment, qui ne retenait pas ses gestes de tendresse pour ses petits protégés. Les visiteurs le virent même prendre le benjamin sur ses genoux et l'aider à manger. Sa mine était lumineuse, souriante, et il ne fallait pas être grand clerc pour deviner à quel point il était heureux, au milieu de cette marmaille.
Le repas en lui-même fut aussi copieux que délicieux. Certains pensionnaires eurent droit à quelques "plats particuliers" - une petite fille enrhumée dut ainsi ingurgiter, sous le regard impitoyable de madame Ogg, une mixture qui, à voir ses grimaces, devait être proprement abominable au goût. Puis la cuisinière reprit son service, refusant de s'assoir pour manger, veillant à ce que chacun finisse bien son assiette, remplissant les verres vides, invitant chacun à se resservir selon son appétit. Et même au-delà.
Le tout dans un vacarme assourdissant, dans un bourdonnement de voix, de rires... Après avoir passé une heure dans la maison du seigneur Artwin, on ne pouvait s'empêcher de se demander s'il existait lieu plus vivant et chaleureux en toute la cité de Lathandre. Pourtant, les ombres étaient là. On les surprenait au hasard d'un regard, d'un silence, traces fugitives d'horreurs pas si lointaines. Mais les ombres passaient. Chacun les combattait de concert, ici, et nul doute qu'il y avait toujours, pour chacun, une oreille attentive pour entendre, une main tendue, une épaule contre laquelle s'épancher.

Il faisait bon vivre ici. Quelle chance avaient ces enfant d’avoir pu trouver un tel havre de paix pour se reconstruire. Et en plus, les repas étaient absolument délicieux.
Astrée restait un peu en retrait, silencieuse. Elle regardait les enfants, joyeux et bruyants. Elle observait Kasumi, qui semblait ici comme un poisson dans l’eau. Il connaissait visiblement plusieurs personnes, et ses jouets rencontraient un franc succès. A la fin du repas, certains des jeunes enfants s’étaient approchés d’eux, et une petite fille avait même grimpé sans vergogne sur les genoux d’Astrée, puis sur ceux de son compagnon. Le rôdeur s’était lancé dans un récit abracadabrant, une histoire dont le héros était un jeune garçon. Il savait raconter. Les enfants étaient suspendus à ses lèvres et elle-même prenait plaisir à l’écouter. Pour un peu, elle se serait presque sentie en famille, du temps où Gwendal racontait des histoires à Aurore… A nouveau, un sentiment oppressant de tristesse l’envahit. Elle laissa son regard errer sur l’assemblée. Cette petite fille, là-bas, elle ressemblait tellement à Aurore… Mêmes boucles blondes coiffés en tresses rebelles, mêmes yeux gris… Elle lutta contre les larmes qui menaçaient de lui monter aux yeux. Sa fille lui manquait tant…
Puis elle se souvint que tous ces enfants, eux, n’avaient plus de parents. C’était tellement injuste. Un instant elle caressa l’idée que peut-être, elle pourrait accueillir l’un d’eux. Puisqu’elle avait perdu sa fille et eux leur maman… Mais non, c’était une très mauvaise idée. Aucun d’eux ne pourrait pas remplacer Aurore, aucun ne le devait. Ce ne serait bon ni pour l’enfant, ni pour elle. Elle le savait parfaitement.

Perdue dans ses pensées, elle replia machinalement ses jambes contre elle et les entoura de ses bras. Oubliant qu’elle était dans une maison huppée de Luménis, assise sur une chaise, et sensée bien se tenir devant les enfants... Il fallut le regard sévère de Madame Ogg pour la rappeler à l’ordre.
Elle tenta de se donner une contenance, fit semblant d’écouter la suite du récit de Kasumi, mais le cœur n’y était plus. Elle avait mal, tellement mal... C’était une erreur d’être venue ici. Sa fille lui manquait trop.
Elle tenta de ne plus y penser, de concentrer sur l’instant présent. Ferma les yeux pour ne plus voir. Puis les rouvrit… Ces enfants avaient les yeux brillants, ils étaient heureux. Malgré les ombres qui parfois passaient dans leurs regards… Eux aussi avaient tout perdu. Mais ils savaient saisir le bonheur qu’on leur offrait à nouveau. Si seulement elle aussi avait en elle cette foi, cette innocence, cette capacité à jouir de l’instant présent, à rêver… Dons bénis de l’enfance… Pourquoi tout semblait tellement plus difficile lorsqu’on était adulte ?

L’après-midi était déjà avancé lorsqu’ils prirent congé de leurs hôtes, presque avec regrets. Devant la grille, deux montures les attendaient. Prince des Frelons avait finalement décidé de réapparaître… Astrée sourit, le caressa longuement. D’un bond, elle fut sur son dos et suivit Kasumi en direction du quartier où vivaient Galathée et Taliesin.

Quête : Equité

L'orphelinat n'était pas très loin de l'herboristerie, mais Astrée prit son temps pour flaner, ses pensées allant de cette drôle de plante issue d'un si lointain passé, à la petite mission qu'on allait peut-être lui confier hors des murs de la ville. Elle se sentait le coeur bien plus léger, et -comment Isudë avait-elle dit? Ah oui...- elle "profitait de la brise légère qui ne soufflait que pour elle". Elle en oubliait presque les demeures cossues aux allées bien entretenues qui l'avaient tant choquée lors de sa première visite en ville.

Elle suivit le conseil de l'elfe et se laissa guider par les cris et les rires. Lorsqu'elle fut en vue de l'entrée du domaine, les souvenirs lui revinrent d'un coup. Elle se rappelait l'étrange mélange de joie de vivre et de mélancolie des orphelins, leurs cris de joie parfois entrecoupés d'un silence lorsque le vide de l'absence s'imposait à eux. Et elle se rappela aussi, le coeur soudain serré, de l'absence enfouie au plus profond de son coeur. Celle de sa fille. Elle avait si fortement ressenti ce vide lors de sa première visite ici...
La culpabilité l'envahit lorsqu'elle réalisa qu'elle n'avait plus vraiment pensé à Aurore depuis de longues semaines. Ses souvenirs étaient comme enfouis en elle, ne remontant qu'en de rares occasions : lorsque le jeune Léo avait tenté de se suicider sur l'île mystérieuse, par exemple ; ou maintenant, devant les portes d'un orphelinat. Le reste du temps elle n'y pensait plus du tout...
Tu as fait ton deuil... songea-t-elle.
Mais alors pourquoi se sentait-elle donc si coupable de ne plus y penser, comme si elle trahissait sa mémoire en l'oubliant trop vite ?
C'était sans doute normal...

Elle observa un moment les enfants jouant dans le parc, prenant le temps d'évacuer ces idées négatives, avant de se décider à pousser le grand portail.

Quête : Equité

Environ une quinzaine d'enfants s'ébattaient sur le gazon bien entretenu de la propriété. Le plus âgé ne devait pas avoir plus de douze ans, et les plus jeunes, une paire de jumeaux aux cheveux carotte, en avaient apparemment trois ou quatre. Ils couraient derrière leurs aînés en poussant des cris de protestation, incapables de les rattraper. Astrée n'eut cependant pas le temps d'essayer de comprendre les règles complexes de leur activité : une jeune femme vint à sa rencontre, s'essuyant les mains dans son tablier. Elle fleurait bon les odeurs de cuisine.
" Bien le bonjour, dame, fit-elle avec un sourire timide. Puis-je vous renseigner ? Je crains que Messire Artwin ne soit absent cette veille, mais Madame Ogg le supplée pour certaines choses... J'espère que ce n'est pas à cause du concert d'hier soir. Nous avions prévenu le voisinage..."
Elle s'interrompit et prit un teint rosé.
" Mais je suis bête. Vous n'avez pas l'air d'habiter par ici."

Quête : Equité

La mention de Mme Ogg fit instantanément surgir dans la mémoire d'Astrée l'image de délicieux petits gâteaux, entraînant instantanément un grondement de son estomac. Il faut dire qu'elle n'avait pas songé à manger à midi...
La dernière remarque de la jeune femme la fit sourire : non, elle n'avait certainement pas la tenue habituelle des gens de ce quartier. Et elle en ressentait presque de la fierté, au fond.
- Non, je ne suis pas d'ici, effectivement, donc je n'ai aucune remarque à faire au sujet d'un quelconque concert. Je verrais Mme Ogg avec plaisir, je l'ai déjà rencontrée par le passé et elle connaît bien mon compagnon. Mais je suis avant tout à la recherche d'une jeune personne nommée Miranda.

La jeune femme sourit.
" Miranda est nettement plus difficile à localiser que Madame Ogg... Mais je connais une bonne technique."
Elle se tourna vers la marmaille qui courait en tous sens quelques mètres plus loin et frappa trois fois dans ses mains. Aussitôt, un escadron de galopins se rassembla autour d'elle.
" Des brioches ! Des brioches ! Gina, des brioches ! clamèrent-ils en choeur.
— Hmm... Une brioche à celui qui remportera le défi du jour.
— Une brioche comment ?
— Pourquoooooi ?
— C'est quoi le défi ?
— Et si personne gagne ?
— Et si on est deux à gagner ?
— Moi, j'joue pas, c'est nul.
— Est-ce qu'on peut échanger la brioche contre un verre de lait ?
— C'est quoi une brioche ?
— Pourquoi y'a un défi ? C'est quoi un défi ? C'est quoi un jour ? C'est quoi le défi du jour ?
— Mais taisez-vous, elle peut même pas parler.
— C'est qui la dame ?
— Tais-toi, on t'a dit !"
Gina sourit.
" Le défi du jour est : retrouvez Miranda."
Ils se figèrent, yeux agrandis, muscles tendus, souffles bloqués.
" A vos marques... Prêts ? Partez !"
Et aussi vite qu'ils étaient arrivés, les enfants se dispersèrent. La jeune femme revint vers Astrée.
" En attendant... Voulez-vous que nous trouvions Madame Ogg ? Ou préférez-vous profiter du beau temps ?"

Quête : Equité

Les deux, eut envie de répondre Astrée. Mais après tout, elle venait de passer une bonne partie de la journée à vagabonder dans les bois, donc le besoin de soleil n'était plus si vital. Tandis que l'envie de pâtisserie...
- Je veux bien rendre une petite visite à Mme Ogg. C'est la moindre des choses, il me semble, de me présenter à elle.
Elle devina que son estomac approuvait, et se morigéna intérieurement : il n'y avait pas forcément tous les jours des gâteaux à déguster, surtout en l'absence du seigneur du domaine, qui donnait à sa gouvernante un surcroît de travail.
Restait à espérer qu'elle n'aurait pas de question indiscrète sur une mission dont elle ne savait rien et que la dénommée Miranda ne souhaitait peut-être pas ébruiter.

Quête : Equité

Astrée fut donc conduite dans les imposantes cuisines de la maison. Elles étaient encore tranquilles, à cette heure de la journée, mais on devinait sans peine l'intense activité qui ne tarderait pas à s'y déclarer. La tâche en cours dégageait une odeur délicieuse : on cuisait du pain. Une imposante quantité de miches rondes, encore fumantes, s'entassait déjà sur la table centrale. Contemplant ce trésor doré, Madame Ogg discutait avec un mitron qui paraissait minuscule à côté de sa stature formidable. Elle leva cependant les yeux à l'entrée de Gina et d'Astrée et son visage se fendit d'un sourire.
" Mais voilà une petite visite sympathique." s'exclama-t-elle.
Elle se dirigea vers la rôdeuse de son pas de charge et l'invita à s'asseoir sur un banc.
" Que nous vaut votre visite, ma chère ? Vous m'avez l'air un peu maigrichonne, dites-moi. Vous nourrit-il assez, ce preux Kasumi ? Gina, trouve-lui donc des gâteaux, veux-tu ?"

Quête : Equité

La rôdeuse sourit. Si ses souvenirs étaient bons, Mme Ogg lui avait déjà fait la même remarque la fois précédente. Elle ne pensait pas avoir maigri depuis... Mais peut-être que toutes les cuisinières se font un devoir de faire prendre un peu de poids à leurs invités ?
- Ne vous inquiétez pas, je ne manque de rien. Mais je ne refuserai certes pas l'un de vos délicieux petits gâteaux ! Quant à la raison de ma visite ici... Je cherchais quelque chose d'utile à faire pour occuper mes journées, et une herboriste de ma connaissance, dont la boutique est juste à l'entrée du quartier est, m'a dit que je pourrais peut-être rendre un petit service à une jeune personne nommée Miranda.

Quête : Equité

HRP : si Mme Ogg se répète, c'est qu'elle se fait vieille. Ou alors Astrée est vraiment maigrichonne !

Gina reparut et posa un plateau de petits gâteaux fourrés à la crème et de tartelettes aux pommes parsemées de cannelle sur la table. Madame Ogg le poussa immédiatement en direction d'Astrée avec un regard gourmand qui contenait également une forme d'invitation...
" Oh, je peux déjà te dire ce que cherche Miranda. Des potions magiques et des chimères. Surtout des potions magiques. Mais c'est peut-être la même chose.
— Vous êtes dure, Madame Ogg, intervint Gina.
— Enfin, moi je n'y connais pas grand chose. Certains disent que les chimères existent !
—*C'est surtout que vous ne jurez que par les oignons coupés en rondelles posés sous le matelas.
— Un remède d'une grande efficacité !"
Gina sourit.
" Miranda est un peu notre guérisseuse à domicile. Elle s'occupe de la santé des enfants. Avant, elle avait plus de facilités, en fait...
— Mais son petit dieu s'en est allé...
— Madame Ogg... Ce n'est pas drôle... Bref. Elle doit sûrement avoir besoin d'une plante spécifique."

HRP : à un an et demi d'intervalle, elle pourrait se répéter non ?

Mais sinon t'as raison, ça doit être qu'Astrée est trop maigre

Quête : Equité

- Oui, ce doit être ça, acquiesça Astrée. C'est en tout cas ce que l'herboriste m'a laissé entendre...
Cette Miranda semblait être un bien étrange personnage. Et la curiosité de la rôdeuse, déjà éveillée lorsque l'herboriste lui avait parlé de rechercher une plante dont elle-même ne disposait pas - jamais elle n'aurait cru cela possible - tournait presque à l'impatience...
- Votre guérisseuse semble quelqu'un de peu banal. Je dois dire que je suis curieuse de la rencontrer.

Quête : Equité

Astrée n'eut pas à attendre bien longtemps, car une paire d'enfants bruyants déboucha dans la pièce, traînant une jeune femme derrière eux.
" C'est moi qui l'ai trouvée ! s'écria un petit garçon d'environ six ans, furieux
— T'es qu'un menteur, c'est moi !" rétorqua une gamine à peine plus petite.
Miranda, car c'était probablement elle, était une jeune femme d'environ trente ans, les cheveux noirs courts et les yeux très sombres. Elle portait une tablier sur une robe grise à la coupe austère. Elle grimaça en se voyant ainsi propulsée sur le devant de la scène.
" Je vous l'avais dit, fit Gina, fièrement.
— Gina ! Une brioche ! J'ai gagné !
— Non, c'est moi, t'es rien qu'un sale tricheur ! Il m'a suivi !
— Je vais m'occuper d'eux. Vous pourrez discuter. Par ici, les vainqueurs !"
Gina s'éclipsa, suivie par les deux marmots, tandis que Miranda s'installait, embarrassée.
" Bon, je vais vous laisser aussi... Venez me dire au revoir avant de partir, ma chère, je vous ferai un petit paquet de douceurs..."
Sur ces entrefaites, Madame Ogg retourna à ses fourneaux et laissa Astrée en tête à tête avec Miranda. Celle-ci la dévisagea avec une curiosité mâtinée de gêne.
" Et vous êtes, heu... ? Mes ravisseurs ne m'ont pas exactement expliqué... Ils ne m'ont rien dit, en fait."

Quête : Equité

Astrée sourit à la jeune femme, un brin amusée pas son "kidnapping". Elle fut légèrement surprise de constater que celle-ci avait à peu près son âge,-e qui n'était pas exactement ce qui était venu à l'esprit quand l'elfe avait mentionné une "jeune personne"... mais sans doute fallait-il avoir quelques centaines d'années pour ne pas être qualifié de jeune par Isudë.
- C'est normal qu'ils ne vous aient rien dit. Ils ne savaient rien, Gina les a envoyés à votre recherche avant qu'ils n'aient eu le temps de me soumettre à un interrogatoire en règle... Mais donc... Je me nomme Astrée et... -par où commencer ?- C'est l'herboriste, Isudë, qui m'envoie vers vous. Elle m'a juste dit que vous êtes à la recherche de simples, et comme j'ai quelques connaissances dans ce domaine, et que je m'apprête à partir en cueillette, elle pense que je pourrais vous rendre service...

"Oh... fit Miranda, et un sourire illumina son visage. Ce serait... Oui, ce serait formidable, mais... Je n'ai pas exactement besoin de n'importe quelle plante, voyez-vous... Vous devez le savoir, car Isudë... Elle a déjà tout, et plus encore, n'est-ce pas ? Quand j'étais prêtresse, j'avais tendance à négliger sa boutique, je me disais... Tout ça ne sert à rien, nous avons plus radical, plus efficace, toute cette pharmacopée est obsolète... Mais bref, maintenant... C'est un endroit incroyable, n'est-ce pas ? Enfin, je n'y suis allée que deux fois, à vrai dire... Elle n'avait pas la plante que je cherche. C'est normal, parce que ce n'est pas vraiment une plante... et certains disent qu'elle n'existe pas. Mais on la mentionne dans d'anciens récits... des légendes hélonniennes qui datent d'avant la colonisation de l'île par les humains. Je vous en parlerai davantage si vous pensez que... En fait, on ne la trouverait, si elle existe, que dans les Pics des Orcs... C'est un massif montagneux, près de la Trouée des Chevaux... Pas la porte à côté, vous voyez... Vous imaginiez aller aussi loin ? Il y aura une rétribution, bien sûr, Sire Artwin est d'accord d'y contribuer, mais... C'est quand même très loin."

La Couronne de Cuivre

[Bâtiment] L'orphelinat du seigneur Artwin

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