La Couronne de Cuivre

Le sylvanien n'émit aucune objection : dans la journée, les risques d'attaque étaient moindres que durant la nuit, surtout si les malarites étaient bien partis. Et il comprenait parfaitement la nécessité de s'équiper davantage pour gagner en efficacité.
Kasumi put donc reprendre la route de Peyregorde un peu avant midi.

Il traversa des secteurs de forêtqu'il commençait à bien connaître : ceux fréquentés par les bûcherons, puis la forêt ordinaire, avant d'arriver dans la zone où les arbres étaient plus grands et plus anciens. L'endroit respirait le calme et la sérénité, même si cette sensation ne durait guère : la résurgence, dont il approchait, puait le maléfice. Il put néanmoins constater, à son grand soulagement, que rien ne s'y était passé en son absence.
Poursuivant son chemin au milieu de la désolation laissée par l'incendie, en direction du chêne qui dépassait des buis alentours, il s'arrêta soudain, sans pouvoir expliquer clairement ce qui mettait ainsi ses sens en alertes. Il lui semblait cependant avoir détecté un mouvement dans la clairière.

Le rôdeur avait appris à faire confiance à son instinct au point de le considérer comme un sens à part entière : il y avait quelque-chose, une anomalie qui l'avait alerté. Et pourtant l'arbre ne lui avait pas signalé de danger cette fois. Il se raccrocha à cette idée au moment d'abandonner sa brouette et son sac de vivres frais pour être plus libre de ses mouvements et surtout s'approcher le plus discrètement possible de la clairière...

Il s'approcha sans un bruit, se courbant légèrement pour se dissimuler dans les buis brûlés, tentant de voir sans être vu, guettant un bruit suspect. Le soleil était couché, et malgré ses capacités de vision nocturne, la pénombre ne l'aidait guère. Mais indéniablement, il y avait quelqu'un, probablement humanoïde, mais qui se fondait dans le décor au point qu'il ne le distingua que lorsqu'il fut en bordure de la clairière.
Il finit cependant par apercevoir une silhouette aux cheveux longs, d'un rouge cuivré mêlé de fils argentés. L'inconnu était tout simplement assis sur une des roches qui entourait la source, appuyé au tronc du grand sorbier. Et malgré tous ses efforts pour être discret, il avait apparemment détecté sa présence. Il tenait lui aussi un arc en main, une flèche enclenchée, mais parut se détendre légèrement en le voyant.
" Bonjour..., fit-il d'un ton doux. Les visiteurs sont rares dans ces bois."
Malgré son apparente amabilité, il demeurait sur ses gardes, les yeux rivés sur le rôdeur. C'était un elfe à la peau presque aussi cuivrée que ses cheveux.

Pour le coup, c'était une rencontre parfaitement inattendue. Mais l'attitude de l'inconnu à son égard lui laissait entrevoir que ce ne serait pas forcément une mauvaise surprise. Conscient d'être jaugé par l'elfe, Kasumi garda ses mains bien en évidence pour lui signifier qu'il ne représentait pas une menace. Il répondit en tous cas d'un ton courtois :

- Bonsoir. Je suis d'accord avec vous : je n'ai pas croisé grand monde depuis les semaines où je m'occupe de cette clairière.

Les mots et l'attitude de Kasumi eurent pour effet immédiat de détendre visiblement l'elfe, qui sourit.
" Vous vous... occupez de cette clairière. Hum... Cela me semble une affirmation bien présomptueuse. Comme si la Nature n'était pas capable de s'occuper d'elle-même..."
Le ton était un peu narquois, mais sans agressivité.
" Même si je reconnais que les environs sont particulièrement hostiles. Mais venez donc ! Peut-être voudriez-vous partager mon repas ?"
Posés sur l'une des pierres servant de margelle naturelle se trouvaient plusieurs galettes roulées, fourrées sans doute.

Un repas partagé était une excellente occasion pour nouer connaissance aussi le rôdeur accepta-t-il la proposition sans hésiter :

- Avec plaisir ! Mais si je puis me permettre de répondre à votre remarque, la nature ne rechigne pas à recevoir un peu d'aide quelques fois. Surtout quand il s'agit de tenir à distance l'engeance qui infeste certaines parties de cette forêt. Il manque depuis bien trop longtemps la présence d'un rôdeur ou d'un druide pour aider à maintenir les équilibres naturels.

L'inconnu eut un petit rire.
" C'est là aussi bien présomptueux de croire qu'un humain -ou un elfe- puisse faire une réelle différence dans ces équilibres. Ce sont des forces qui nous dépassent... Même si je reconnais qu'on peut parfois apporter une petite pierre à l'édifice. D'autant qu'une toute petite action peut avoir des conséquences insoupçonnées.... mais là aussi, nous ne les maîtrisons guère. Il arrive que les Dieux se servent de nous mais avec ou sans notre intervention, la Nature finit toujours par reprendre ses droits, par recréer un équilibre, quel qu'il soit. Parfois très différent de celui qu'on aurait voulu."
Il porta un regard un peu rêveur sur la source.
" Et l'eau finit toujours par retrouver un chemin... Surtout lorsqu'elle porte une telle force en elle"

Le demi-elfe ne se laissa pas intimidé et répondit sur le ton de la conversation tout en regardant à son tour la source qui donnait tant de vigueur au jeune chêne et à la nature environnante.

- J'ai bien conscience de ce que ma présence est éphémère et peut-être même anecdotique mais je m'efforce d'accomplir au mieux la mission que m'a confié un sage sylvanien. Et ce d'autant plus volontiers que ma déesse m'a guidé en ces lieux. Si je peux contribuer à ses plans, j'en suis heureux. Mais vous-même, si je puis encore une fois me permettre de poser la question, est-ce la source qui vous a attiré ici ?

" Oui et non..."
Il sourit.
" Je réside habituellement à quelques jours de marche vers le nord, en bordure de la forêt mais du côté des hauts plateaux qui bordent la Trouée. J'ai su qu'il y avait eu un feu... Et je suis venu voir. En fait, je cherchais des morilles, en général elles poussent en quantité quelque jours après les incendies. J'en ai trouvé d'ailleurs..., précisa-t-il en montrant sa besace." Et puis, une fois arrivée à l'extrémité de la zone, j'ai vu de loin ce jeune chêne anormalement vigoureux, comme s'il avait été épargné par les flammes... Et en approchant j'ai senti la force de la source qui le protège. Voilà tout."
Il tendit à Kasumi l'un des ses galettes -à l'odeur, elle paraissait fourrée aux fraises et au miel.
" Mais si je puis me permettre à mon tour une question... Quelle est cette mission dont vous parlez ?"

Le demi-elfe goûta la à la galette autant par appétit que pour se donner le temps d'évaluer un peu plus l'inconnu avec qui il partageait le repas. Selon toute vraisemblance, il ne représentait pas de danger tout en étant sensible à la magie particulière des lieux. C'est pour ces raisons que Kasumi répondit honnêtement tout en regardant le jeune chêne avec un sourire :

- Vous avez ma mission sur les lieux : j'ai été chargé de planter ce chêne et de veiller sur lui jusqu'à sa maturité. J'ai l'impression que cela ne devrait plus tarder à présent, grâce en soit rendue à la Dame des forêts.

" Puisse le Seigneur des Feuilles vous bénir. Planter un chêne est toujours une merveilleuse action... Mais si votre déesse vous a confié cette mission, c'est que celui-ci n'est pas un arbre ordinaire, je présume..."
Il sourit.
"Il y a bien longtemps, voyez-vous, se trouvait ici un bosquet druidique. Je l'ai fréquenté autrefois, puis le hasard de la vie m'en a éloigné, et en revenant dans la région, j'ai découvert qu'il n'était plus. Je suppose donc que ce jeune chêne est appelé à lui redonner sa vigueur passée... Ou est-ce que je me trompe, que je me fais des illusions ? J'ai réellement senti un renouveau dans ces lieux..."

Kasumi écouta l'elfe avec une grande attention : ainsi donc il avait connu le Bosquet originel dont lui avait parlé Celd... Il sourit et observa le chêne d'un œil nouveau : cet arbre portait bien des espoirs et pas que les siens, loin de là. Cela redonnait encore plus de sens à ce qu'il avait entrepris. A cette mission un peu folle dont il s'était à peine senti digne mais qu'il avait tout de même entrepris avec enthousiasme.

- Vous ne vous bercez pas d'illusions : cet arbre est effectivement très spécial. Le gland qui lui a donné vie provient d'un chêne sacré situé dans la lointaine Haute-Forêt. Il a donc parcouru des milliers de lieues pour arriver ici il y a à peine plus d'un mois ! Ce site est vraiment miraculeux !

" Un mois... Et il est déjà presque adulte ! "
Il secoua la tête.
" Mais je ne devrais pas être étonné. La magie qui en émane est puissante. Et la Longue Nuit approche... "
Songeur, il avala quelques bouchées d'une de ses galettes.
" Vu l'état des bois alentours, c'est un petit miracle qu'il soit encore en vie, cela dit. Il est encore très vulnérable... Et veiller sur lui ne semble pas si évident. Les forces qui hantent ces bois vous dépassent. N'est-ce pas... un peu inconscient... de croire que vous pourrez l'en protéger ?"

Kasumi demeura un long moment songeur tout en continuant à manger sa propre galette. Oui, il avait plus d’une fois senti qu’il était dépassé par les événements. Mais il avait tenu bon jusqu’ici : il avait repoussé les mort-vivants les nuits précédentes, les malarites avant cela. Bien sûr, il pressentait que les forces maléfiques tenteraient de nouvelles offensives – sans doute plus violentes encore – pour empêcher le miracle de la Longue Nuit.

- Par bonheur, je ne suis pas seul à lutter. Il y a de nombreuses forces à l’œuvre et qui me dépassent mais certaines sont nos alliées. Après, je ne serais pas arrogant au point de refuser une aide supplémentaire si elle se présente.

La porte était clairement ouverte…

L'elfe se mit à rire.
" Donc, si je comprends bien, vous ne seriez pas contre un coup de main ! Mais je n'avais pas prévu de rester au-delà de demain, savez-vous ?"
Il puisa un peu d'eau dans ses mains et la porta à ses lèvres, fermant les yeux à demi comme pour mieux la déguster.
" Je ne pourrai pas rester jusqu'au solstice. Je suis attendue en Lorien pour la Longue Nuit, il faut que j'y sois un jour ou deux à l'avance. Mais y aller est pour moi l'affaire de quelques heures... donc je peux tout de même rester quelques jours si mon aide est utile. Simplement... je ne vois pas en quoi je pourrais vous aider. A part, sans doute, pour neutraliser la malédiction qui agit un peu au sud d'ici, sur la résurgence où se trouvait autrefois le bosquet. C'est pour le faire demain que j'avais prévu de rester cette nuit. Il faut que je mémorise le sort correspondant..."

Kasumi se montra à la fois absolument ravi de l'aide que l'elfe se proposait d'apporter et un peu gêné de l'avoir sollicitée si ouvertement. Sa curiosité était en tous cas piquée par les compétences que son interlocuteur révélait posséder :

- Depuis le départ de ces maudits malarites, la résurgence souillée est en effet le principal problème auquel je suis confronté. Votre aide pour la purifier est donc très appréciée ! Mais puis-je demander... Seriez-vous druide ?

L'elfe sourit.
" Oui, je suis druide. Et mon nom est Thanaën. "
Il lui tendit une main amicale.
Au loin, au mêmemoment, Kasumi aperçut un mouvement : un arbre qui se déplaçait. Le sylvanien, Akuburanar, était en train de s'approcher de la source.Mais il se trouvait encore au-delà du rideau de buis.

Kasumi serra la main dans la même attitude amicale et se présenta à son tour :

- Enchanté, Thanaën. Moi, je m'appelle Kasumi et je suis rôdeur. Même si vous l'aviez certainement déjà deviné.

Il se tourna ensuite dans la direction du sylvanien en se demandant s'il allait oser approcher. Il l'espérait sincèrement en tous cas.

Le Sylvanien s'approchait, mais sans se presser. Le druide ne l'avait pas encore aperçu.
" Vous pourriez être clerc ou druide, pour qu'une déesse vous confie une telle mission..., fit-il remarquer. Il est rare que de simples rôdeurs se préoccupent de redonner vie à un bosquet sacré. Mais c'est tout à votre honneur..."

Le demi-elfe sourit, prenant la remarque du druide pour un compliment :

- J'ai bien conscience du grand honneur que m'a accordé Mielikki en me faisant confiance pour accomplir cette mission. Et je me dis parfois que le sylvanien qui m'a confié le gland n'avait pas de meilleur candidat sous la main mais je m'efforce d'être digne de leur confiance.

Il préféra ne pas évoquer le sylvanien qui approchait, le laissant prendre son temps et qui sait, soigner son entrée. Si de telles considérations traversaient l'esprit des membres de son espèce.

Le sylvanien finissait d'approcher en toute discrétion, tandis que l'elfe poursuivait.
" Pas de mailleur candidat... Je ne pense, pas, fit-il, pensif. Le temps des sylvaniens, le temps de la nature, n'est pas celui des humains ni des demi-elfes. Ni même celui des elfes. Si vous ne lui aviez pas paru de taille à accomplir cette mission, il aurait attendu quelques siècles de plus pour trouver quelqu'un d'autre..."
Il finit enfin par percevoir un mouvement à la limite de son champ de vision -ou peut-être un regard de Kasumi vers le Sylvanien l'avait-il trahi. Il se tourna d'un bloc, méfiant, et son visage s'illumina aussitôt.
" Akuburanar ?
- Thanaën.
- Je ne m'attendais pas à te croiser ici, vieille branche !"
Et sans plus de cérémonie, il se leva et s'approcha du sylvanien, posant avec familiarité sa main sur son tronc.

Kasumi sourit de ces retrouvailles impromptues auxquelles il lui était donné d'assister. A bien y réfléchir, il aurait tout de même dû déduire que l'elfe connaissait le sylvanien : à n'en pas douter, Akuburanar avait lui aussi dû fréquenter l'ancien bosquet avant sa destruction. Même s'il se sentait un peu déplacé de se retrouver au milieu de cette scène plutôt personnelle, cela lui mit un peu plus de baume au cœur : finalement, il n'était pas impossible que le nouveau chêne permette de fédérer les bonnes volontés de la région même si elles n'étaient que de passage.

Il apprit, en écoutant la conversation qui s'ensuivit, que l'elfe et le Sylvanien se connaissaient depuis des siècles -littéralement-, et qu'ils se croisaient simplement de temps en temps, au détour d'une source sacrée, même si leurs secteurs habituels respectifs étaient très éloignés l'un de l'autre : les défenseurs de la nature n'étant pas nombreux dans cette forêt, ils en venaient, au fil des décennies, à se connaître.
" Puisque Thanaën reste quelques jours, je songe à profiter de l'occasion pour retourner à mon bosquet, finit par dire le sylvanien en se tournant vers Kasumi. Il y a plusieurs jour déjà que je m'en suis éloigné et j'aimerais vérifier que tout se passe bien là-bas. Je peux être de retour juste après la Longue Nuit... Il y a généralement une cérémonie organisée par une prêtresse de Shiallia et j'aime y assister."
Il semblait hésiter.
" Mais je ne veux pas vous mettre en difficulté..."

Kasumi ne voyait pas comment refuser ou même rechigner à laisser le sylvanien retourner auprès de son propre bosquet. Et même si cela risquait de compliquer sa propre surveillance des environs, il n'avait pas le cœur à le retenir :

- Loin de moi l'idée de vous faire manquer la cérémonie ! Mais je serais effectivement heureux et rassuré si vous pouviez passer de temps à autre par ici. D'ici là, je vais m'efforcer d'appliquer au mieux les conseils que vous m'avez donné et je prendrai soin du jeune chêne. Avec l'aide de Thanaën pour la résurgence, je devrais pouvoir m'en sortir !

" Thanaën a la sagesse et l'expérience, je sais qu'il sera de bon conseil.
- Tu me fais trop d'honneur !
- Ne sois donc pas si modeste, elfe !
- Voyons, tu sais que je ne suis qu'un humble druide...
- Ça doit faire quatre siècles que tu es au service de la Nature, et ce jeune homme n'en est qu'à ces débuts... Prometteurs, certes. Mais il aura besoin de ton aide. Faire renaître un bosquet, ça n'a rien de trivial...
- Et tu es sans doute le seul de nous à savoir comment ces choses se produisent... et tu nous laisses !
- J'ai dit à Kasumi tout ce qu'il avait à savoir. Attendre la Longue Nuit. Puis attendre, encore, qu'une dryade, peut-être, y naisse... mais peut-être n'y en aura-t-il pas, ou pas tout de suite. La Nature va à son rythme... Mais je reviendrai après le solstice, c'est promis. D'ici là, je vous souhaite bonne chance. Que le Seigneur des Feuilles et la Dame des Forêts veillent sur vous.

Le rôdeur salua très courtoisement en lui souhaitant un chemin paisible jusqu'à son bosquet. Il affirma aussi être impatient d'avoir un jour une occasion de visiter ce dernier. Bien sûr, cela attendrait qu'il ait fini son travail ici - ou plutôt qu'il puisse se permettre une pause - ce qui n'était certainement pas près d'arriver. La Longue Nuit ne semblait être qu'un début plutôt qu'une fin en soi sans compter tous ses beaux projets prévus pour l'automne et au-delà.

Thanaën et le sylvanien échangèrent des salutations en sylvestre -de longues phrases auxquelles Kasumi ne comprit pas un mot- et Akuburanar s'éloigna, lentement. Son bosquet était à plusieurs dizaines de lieues et il espérait avancer une partie de la soirée pour le rejoindre le lendemain soir.
Le druide, une fois son ami éloigné, se tourna vers Kasumi.
" Demain, je vais m'occuper de cette résurgence... mais pour être tout à fait sincère, je ne peux complètement la purifier. Je peux utiliser un sortilège qui neutralisera la sanctification maléfique qu'elle a subie, mais il ne la dissipera pas véritablement. Il en atténuera les effets, mais certaines créatures y resteront sensibles, c'est un peu comme si les deux sortilèges coexistaient. Il est impossible de faire autrement : seul le temps peut dissiper ce genre de malédiction. Elle disparaitra d'elle-même un an après avoir été lancée... De la même façon qu'une source, pour rester sacrée, doit recevoir un sortilège de sanctification une fois par an à la même date. Généralement, on choisit un jour sacré..."
Il fronça les sourcils.
" D'ailleurs, si vous me pardonnez ma curiosité... qui a sanctifiée cette source au cours de la dernière année, si ce n'est vous ? "

Kasumi était friand de ces explications même si elles mettaient en lumière à quel point il n'était pas préparé à s'occuper du bosquet et tout ce qui lui restait à apprendre encore. Il réfléchit longuement à la question du druide avant de répondre d'un ton un peu incertain :

- Je pense que la source était déjà sacralisée à mon arrivée sinon le gland n'aurait pas poussé avec une telle vigueur. Je ne sais donc pas qui s'en était occupé. Mais la source a été souillée la veille du départ des malarites. Le chêne a lui aussi été attaqué. Cette nuit là, alors que je me remettais de mes blessures, j'ai aperçu une étrange créature : elle est passée du chêne à la source puis à moi. Au matin, les blessures de l'arbre étaient colmatée, j'étais guéri de ma fièvre et l'eau de la source était plus merveilleuse que jamais.

Il racontait cela d'un ton passionné, encore aujourd'hui pénétré par cet instant mystique.

L'elfe sourit.
" Une créature envoyée des dieux... Cette source est vraiment bénie, au sens propre du terme ! Et ses pouvoirs surpassent largement les miens : je parie qu'elle ne s'est pas contentée d'une simple sanctification, qu'elle est parvenue à lever complètement le maléfice... Mieux que ce que je pourrai jamais faire à la résurgence. Mais je ferai mon possible."
Il eut un sourire rêveur en laissant ses doigts courir à la surface de l'eau.
" Quant à ce qui préexistait à votre arrivée... Je dirais que c'est un peu comme s'il y avait ici un point où notre plan reçoit directement de l'énergie divine d'un autre plan, à l'état pur. Il y en a quelques-uns comme ça, sur Hélonna ou ailleurs, et les druides d'autrefois y ont depuis toujours érigé des bosquets sacrés. Aussi loin que ma mémoire remonte, cet endroit a toujours été baigné d'énergie divine, même lorsqu'il n'y avait pas de clerc ou de druide pour y veiller. Certes, il y avait d'ordinaire une dryade, et elles ont leur rôle à jouer dans la préservation de ces lieux lorsqu'il n'y a personne d'autre. Mais même sans dryade... Je parie que la source s'est dissimulée en attendant des jours meilleurs..."

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Aubépine