La Couronne de Cuivre

-Néanmoins, si j'étais vous, j'y songerais à deux fois avant de me séparer des œuvres d'art conservées ici. A titre personnel, j'ai toujours trouvé qu'un lieu perdait une partie de son âme si on en retirait certaines de ses décorations originelles et que celles-ci avaient moins de lustre une fois transportées dans un autre cadre... Bon, il faut aussi admettre qu'elles ne sont guère mise en valeur dans la salle du trésor et que celle-ci est pleine à craquer...
Il eut un sourire pensif.
-Enfin, tout cela n'a rien d'urgent. Vous avez sans doute mieux à faire que de discuter trésor et ornementation. Et puis, il vaut mieux que vous preniez le temps, avant de décider quoi que ce soit, de consulter l'inventaire réalisé par nos amis et dont une copie a été laissée à votre intention dans la bibliothèque. Dans tous les cas, vous ne manquez pas de monnaie sonnante et trébuchante pour récompenser Wilhelm et ses compagnons de leurs efforts.

Asmodeus hocha la tête pour manifester son accord avec l'opinion d'Ebenezer avant de répondre d'un ton flegmatique :

- Il est évident qu'Asmodeus n'a pas du tout l'intention de dépouiller cet endroit et il compte d'ailleurs même le mettre en valeur. Mais il serait malhabile et inélégant de jouer au dragon gardant jalousement jusqu'à la dernière piécette de son trésor. Il voit cela comme un échange de bons procédés : récompenser ses alliés pour les fidéliser, financer une partie des opérations qui abondent dans son sens. Et peut-être même sera-t-il enclin à mettre la main à la pâte comme vous le faites parfois vous-même.

-Oh, en ce qui me concerne, je n'ai jamais été d'un naturel contemplatif : j'ai besoin que cela bouge, qu'il y ait de l'action. Par conséquent, du moment qu'on me propose des activités que je juge distrayantes, je ne me fais pas priver.
Il jeta un regard autour de lui.
-Même si je ne vous connais guère encore, vous me faites l'impression d'avoir moins besoin de distractions que moi. Néanmoins, je vous vois mal demeurer tranquillement ici en permanence. Ce serait dommage, d'ailleurs : vous ne manquez pas de moyens d'action, comme vous le constaterez quand vous aurez pris la mesure de vos nouveaux pouvoirs.

Asmodeus se frotta le menton - ou plutôt les bandelettes qui se trouvaient à cet endroit - et répondit d'un ton enthousiaste :

- Asmodeus n'aime pas particulièrement l'ennui et la solitude et il espère pouvoir régulièrement s'entretenir avec vous ou d'autres comme ce brave Kurt par exemple. Cela vous dit-il ? Avouez qu'il y a tout ce qu'il faut pour recevoir des visites de courtoisies ici !

Il balaya les lieux du regard tant pour appuyer son propos que pour en prendre pleinement conscience lui-même.

-C'est le moins que l'on puisse dire et, en ce qui me concerne, c'est volontiers que je viendrai vous rendre visite. En revanche, j'ai un peu peur que trop de mouvement dans les parages, de mouvements effectués par des personnes non immatérielles, j'entends, ne vous vale une prompte visite des Kelemvorites. Mais aucun problème n'est insoluble, évidemment... Oh, et si vous ne craignez pas trop les mondanités, je pourrai faire en sorte que vous soyez convié à la prochaine petite fête à être organisée au cimetière. Nous en donnons assez régulièrement, si bien que vous n'aurez pas trop à attendre...

Se montrer prudent était dans sa nature - ceci n'avait en tous cas pas changé - mais l'idée d'Ebenezer suscita son enthousiasme et il ne chercha pas à s'en cacher, bien au contraire :

- Cela parait à Asmodeus être une excellente occasion de joindre l'utile à l'agréable. Car il est très important de faire la connaissance de ses voisins et s'il y a en plus l'occasion de se distraire un peu, Asmodeus accepte cette invitation avec joie. Surtout si c'est l'occasion de revoir ce bon vieux Kurt et la Dame qu'il n'a fait que croiser avant une certaine mission...

-L'un comme l'autre seront ravis de vous revoir, je n'en doute pas un seul instant. Certes, Dame Élisabeth regrettera peut-être de ne pas avoir pu goûter à votre sang : comme les amateurs de grands vins, elle est toujours curieuse de découvrir de nouvelles saveurs... Enfin, en même temps, si vous aviez été convié à nos réjouissances dans votre état précédent, les bonnes manières l'auraient empêchée de s'abreuver contre votre gré : c'est une grande dame, après tout ! Et puis, il n'est pas rare que nous prévoyions des proies pour ceux qui auraient un petit creux ou qui voudraient davantage d'action que des danses ou des conversations...

Décidément, le quartier du cimetière semblait être un lieu bien et bon vivant ! Asmodeus auraient souri si une telle prouesse était possible pour une momie.

- Voilà qui est très prometteur ! Même si Asmodeus ne trouve que peu d'amusement à l'art de la chasse, il est certain de trouver s'amuser ou au moins à converser avec les occupants du cimetière. Il est aussi important pour lui, d'un point de vue social, de se faire connaître des personnes qui comptent ici. En dehors de vous, bien évidemment !

-Vous me flattez ! Mais, en toute honnêteté, vous découvrirez que d'autres comptent beaucoup plus que moi, en ces parages. D'autant qu'en ce qui me concerne, je ne suis qu'un visiteur : ma résidence est ailleurs. Et peut-être aurai-je le plaisir de vous y recevoir un jour... D'ici-là, vous aurez ma parole : vous serez convié à nos prochaines réjouissances où vous pourrez deviser à loisir. Et qui sait si le goût de la chasse ne vous viendra pas à cette occasion ? Même si je préfère d'autres jeux, et de loin, il faut admettre que c'est parfois distrayant !

Asmodeus appréciait de plus en plus le personnage d'Ebenezer mais s'il ne résidait effectivement pas au cimetière, il faudrait remettre à un moment où il pourrait trouver un moyen de se déplacer librement pour lui rendre cette fameuse visite de courtoisie. Pour l'heure, le fantôme avait raison de se concentrer sur des réjouissances à leur portée et l'élu divin répondit d'un ton flegmatique :

- Traquer attire parfois des gêneurs et les fouineurs or Asmodeus a dans le sentiment qu'il en aura bientôt bon nombre à remettre à leur place ! Cela dit, il n'y aurait probablement rien de tel pour mettre en pratique cette nouvelle puissance dont il dispose.

Le fantôme opina du chef.
-Alors que j'attendais votre réveil, et comme, je l'avoue, je trouvais le temps long, je me suis permis de survoler quelques-uns des ouvrages de votre bibliothèque décrivant les Gardiens mortuaires, puisque c'est apparemment ainsi qu'on nomme les personnes ayant votre charge. En toute franchise, je crois que vous aurez largement de quoi vous amuser. néanmoins, je ne vous en dirai pas davantage, pour ne pas gâcher la surprise...

Un Gardien mortuaire ? Le terme sonnait bien et était plutôt plaisant. Asmodeus était donc impatient de se plonger dans ces ouvrages autant pour satisfaire sa curiosité et son ego que par pragmatisme : il lui semblait fondamental d'apprendre le plus rapidement possible à appréhender ses nouvelles forces et faiblesses et aussi ce qu'il était censé accomplir. Et, si possible, il allait devoir se familiariser avec toutes ces informations avant le retour des Kelemvorites ou d'autres gêneurs du même acabit. Ce faisant, il songea à un autre détail qui lui restait à éclaircir :

- Et qu'en est-il du passage que vous aviez découvert vers la surface ? Avez-vous pu l'ouvrir et l'explorer grâce au médaillon ?

Il secoua la tête.
-J'aurais pu, sans nul doute, car sa forme correspond au réceptacle. Cependant, je n'ai pas essayé de l'y placer, comme je n'ai pas essayé de savoir où débouche le passage. Il m'aurait en effet paru discourtois de vous griller la politesse : ceci est désormais votre domaine, il vous appartient donc d'en découvrir les secrets. Toutefois, je vous encourage à être prudent : si l'escalier aboutit dans une maison habitée, et si ses habitants vous aperçoivent, votre tranquillité future pourrait grandement en pâtir.

Asmodeus s'attendait à cette réponse et était indécis sur la marche à suivre : d'une part il était rongé par la curiosité et le besoin de savoir ce qui se trouvait juste à côté de son sanctuaire mais d'autre part il comprenait les réticences et les appels à la prudence du fantôme. Il manipula le médaillon entre ses doigts tout en réfléchissant avant de répondre :

- Encore une fois, la priorité d'Asmodeus sera donc d'apprendre tout ce qu'il peut sur ses capacités et sa charge. Il s'intéressera ensuite à ce passage si toutefois il ne trouve par ailleurs aucune information dans sa bibliothèque.

Sa bibliothèque : oui, il commençait à réaliser que cet endroit et tout ce qu'il contenait lui appartenait désormais !

- Asmodeus compte d'ailleurs sur vos conseils, puisque vous avez pris un peu d'avance, sur les livres qu'il devrait lire en premier lieu.

-Ceux que j'ai trouvé les plus intéressants et que je consultais en attendant votre réveil sont restés sur la table, ce me semble. Quant à ceux que je comptais compulser dans un second temps, j'ai pris la liberté de les laisser légèrement dépasser par rapport aux autres, ce qui m'évitait d'avoir à les chercher de nouveau et ce qui, en l'occurrence, va vous permettre de gagner du temps.
Le spectre sourit.
-Mais je vais à présent vous laisser tranquille : vous avez maintes choses à lire, maintes choses à découvrir. Si vous en êtes d'accord, je viendrai vous rendre visite dans les jours à venir, pour voir comment se passe votre... emménagement.

Asmodeus était ravi à cette idée : recevoir régulièrement de la visite ne pouvait pas lui déplaire même s'il aspirait effectivement à pouvoir se poser pour appréhender un peu mieux cette situation inédite. Cela, Ebenezer semblait l'avoir parfaitement compris et anticipé et cela lui valut un ton amical de la part de la momie :

- Vous êtes évidemment le bienvenu et Asmodeus vous remercie pour toutes les dispositions que vous avez prises. S'il osait l'expression, il ajouterait que vous êtes plein de savoir vivre !

-Et vous avez bien fait d'oser ! Certes, je m'amuse à employer le terme de non-vie, mais au fond, l'existence que je m'ène, l'existence que vous menez aussi, désormais, ne diffère pas tant de celle d'avant... Le trépas n'est qu'une étape. Ce n'est que le début, pour reprendre les mots prononcés il y a peu en votre salle du trésor...
Sur ces belles paroles, Ebenezer salua courtoisement son hôte et se volatilisa.

Asmodeus s'amusa de cette dernière sortie pleine d'allure mais ne tarda pas à se tourner vers des considérations bien plus immédiates : il avait du pain sur la planche comme rarement il en avait eu de son vivant ! Mais maintenant qu'il disposait d'un temps certain et qu'il n'était plus forcé de se reposer toutes les dix minutes, il allait certainement pouvoir abattre rapidement la tâche colossale qu'il comptait s'assigner : lire une partie des ouvrages sélectionnés par Ebenezer serait son premier mouvement ensuite de quoi il consulterait l'inventaire de son trésor afin d'y trouver ce qui pourrait éventuellement lui servir mais aussi pour décorer un peu ce lieu et le faire sien : garder le tout dans une salle bouclée à clé comme un dragon ne lui paraissait guère convenable.

Sur le bureau de la bibliothèque, outre des livres, on avait déposé des rouleaux de parchemin, sans doute ceux-là même que Wilhelm et Ebenezer avaient découvert dans le fameux coffre : Asmodeus aurait tout loisir de les lire si, d'aventure, il voulait savoir ce qu'avait traversé son enveloppe charnelle tandis que son esprit était absent. Mais pour en revenir aux ouvrages, les choix effectués par le fantôme étaient judicieux : ils dépeignaient, en détail, le rôle et surtout les capacités de ces êtres que l'on nommait Gardiens mortuaires. Et il y en avait long à lire... Toutefois, l'élu divin avait l'éternité devant lui, sans compter qu'en ces lieux, il y avait peu de chances qu'on vienne souvent le déranger...

Asmodeus attela les heures suivantes et sans doute une bonne part de la nuit - pour autant que cette notion revête encore beaucoup de signification - à la lecture des livres, gardant celle des parchemins pour un temps où il serait certainement piqué de curiosité à cet égard mais où il serait aussi suffisamment habitué à sa nouvelle forme pour s'en détacher parfaitement.

Après avoir fini son deuxième tome et parcouru rapidement un troisième, il décida de se ménager une pause pour assimiler la matière qu'il venait de manipuler. Son cerveau lui semblait un peu plus lent qu'à l'accoutumée mais, de ce qu'il savait, il fallait en imputer la responsabilité à la transformation que son corps avait subie. Et l'un dans l'autre, ce qu'il avait gagné et notamment en vivacité et en endurance, compensait largement ce désagrément.

Pour reposer son esprit il s'attela donc à une autre tâche moins cruciale mais distrayante : l'aménagement de son intérieur. Il procéda avec une certaine méthode, explorant tout d'abord chaque pièce en détail pour y repérer des emplacement vides et propices puis il consulta l'inventaire de son trésor pour en répartir certains objets par thématiques, vaisselle, armes et armures, scènes épiques ou plus contemplatives dans les décorations ou les peintures que la momie précédente avait accumulées. Il réserverait bien entendu une place spéciale à tout ce qui évoquait la mort ou la non-mort pour la salle du temple.

Mais Asmodeus constata rapidement que toutes les œuvres portant sur ces thèmes qu'il chérissait entre tous avaient déjà été installées par le précédent occupant des lieux et ce, d'une manière qui les mettait en valeur et témoignait de la sûreté de son goût. Les tableaux, sculptures et autres bibelots contenues dans la salle du trésor abordaient d'autres sujets dont la diversité n'avait d'égale que la qualité d'exécution : la momie avait été un esthète. Un esthète et un humaniste car, en plus des arts et des lettres, elle s'était intéressée aux sciences et à la magie, comme l'élu divin le découvrit en arpentant des salles visiblement dévolues à des expériences de tous ordres.

Voilà qui lui donnait assurément d'intéressantes perspectives pour occuper son temps une fois qu'il serait venu à bout des premiers ouvrages de la bibliothèque... Il était toutefois trop tôt pour risquer de se disperser en tentant de comprendre les expériences pour espérer les poursuivre mais un premier tour de propriétaire dans ses différents laboratoires fut très instructif et prouva une fois de plus combien l'aménagement de son repaire avait été bien pensé.

De quoi s'occuper un bout de temps et repousser quelque peu la curiosité d'explorer les environs des catacombes et surtout le passage secret dont son médaillon était la clé. Etant versé - au sens figuré - dans l'art de préparer certains poisons, Asmodeus s'intéressa particulièrement aux installations alchimiques et se trouva fort satisfait avant de juger qu'il pouvait reprendre ses lectures encore pendant quelques heures.

Ses pauses ultérieures le ramenèrent dans les parties du sanctuaire qu'il avait découvertes en premier : la salle aux colonnes où s'était déroulé l'un des affrontements contre les Kelemvorites ; les salles des gardes aux sarcophages désormais vides ; le long couloir qui s'ouvrait entre elles... Ce dernier était toujours barré par la lourde porte qui, en son temps, avait empêché Asmodeus et ses compagnons de passer. Quant aux passages secrets, ils avaient été refermés. Bref, aucun risque d'être pris au dépourvu par des ennemis, même si le corridor donnant sur les cryptes proprement dites demeurait béant...

Asmodeus avait maintenant du temps pour étudier les bas reliefs tout son saoul mais, pour l'heure et alors qu'il pouvait bénéficier d'un grand espace vide pour mener des expérimentations, l'élu divin se concentra sur lui-même et se mit à incanter, testant les sortilèges qu'il maîtrisait depuis de longue date pour se rendre compte de sa nouvelle puissance et prendre l'habitude des différences de son corps et notamment de ses mains et ses doigts. Il tâtonna un peu au début mais il parvint à prendre le coup après plusieurs sortilèges sans que cela ne le gêne plus vraiment. C'est alors qu'il tenta un exercice bien plus difficile : il escomptait lancer un sort qu'il avait conscience de connaître désormais mais qu'il n'avait jamais eu l'occasion d'utiliser : son choix s'était porté sur le sortilège délicat de barrière de lames.

Il avait pensé l'épreuve difficile et pourtant, il n'en fut rien. Bien que ne les ayant jamais répétés, il fit les gestes et prononça les paroles avec une spontanéité déconcertante, comme s'il les avait toujours connus, comme s'il s'en était souvent fendu. Le résultat ne se fit pas attendre : sitôt l'incantation terminée, une véritable muraille de lames tourbillonnantes, haute d'environ dix pieds, se matérialisa à quelques pas devant lui, coupant en deux la vaste salle où il se tenait. Celui qui aurait voulu franchir l'obstacle aurait eu bien peu de chances d'en sortir vivant...

L'élu divin - ou plutôt le gardien mortuaire élu divin, se corrigea-t-il mentalement - était on-ne-peut plus satisfait de ces premières observations : non seulement il avait réussi à lancer ce sortilège de haut niveau sans peine mais le résultat dépassait en outres ses attentes les plus folles. Dès lors, il laissa le phénomène se maintenir quelques instants avant de tenter d'incanter à nouveau - un simple sort de sanctuaire cette fois - juste pour déterminer s'il avait besoin de maintenir sa pleine concentration pour faire perdurer la barrière de lames ou s'il était toujours libre de ses actions.

Entre les expériences, la lecture, la décoration et les explorations, le temps passa sans qu'il en ait conscience. Combien exactement ? Bien malin qui aurait su le dire : dans ces catacombes, le cycle des jours et des nuits était une abstraction, sans compter que, désormais, il ne pouvait même plus se baser sur celui du sommeil...
Toujours est-il qu'une durée indéterminée s'était écoulée lorsqu'on toqua à la porte de ses appartements. Seuls les Myrkulites et Ebenezer étaient en mesure de pénétrer aussi avant dans son sanctuaire et la suite prouva que le visiteur n'était autre que le fantôme venu prendre de ses nouvelles, comme promis.

Asmodeus était plongé dans la compulsion d'un ouvrage particulièrement abscons décrivant la relation entre un gardien mortuaire et les âmes liées au lieu qu'il gardait. Il s'arrêtait fréquemment après certains passages philosophiques ou techniques pour tenter d'appréhender au mieux le mécanisme et prendre conscience de son environnement. Celui semblait désormais faire partie de lui-même comme une extension de son corps et de sa conscience : un phénomène des plus dérangeant mais avec lequel il finirait vite par se familiariser. Lorsque l'on toqua, il eut la conviction qu'il ne s'agissait pas de Kelemvorites ou d'autres gêneurs du même acabit : par simple déduction car ils n'auraient pas pris la peine de se signaler mais aussi par une conviction profonde que nul intrus ne pourrait parvenir à ainsi le surprendre en son domaine.

- Ah, soyez le bienvenue, lord Ebenezer, répondit-il d'un ton joyeux en se levant pour l'accueillir.

-Salutations, messire. J'espère que vous ne m'en voulez pas trop d'avoir pénétré si avant dans votre demeure mais si j'ai bien pensé à frapper à la porte principale, je me suis dit que cela vous ferait déplacer pour rien...
Il sourit.
-Comment vous portez-vous ? Avez-vous fait de grandes découvertes entre ces murs ou entre les pages de vos livres ?

Le fantôme n'avait manifestement pas perdu une once de son enthousiasme et sa visite changeait d'autant plus agréablement de ses longues heures - sinon jours - d'études. L'élu divin s'empressa de répondre quoiqu'avec son calme et son flegme coutumiers :

- Asmodeus a commencé à explorer bien des perspectives et elles seraient sans doute vertigineuse s'il n'avait pas la sensation d'avoir toute l'éternité devant lui ! Et vous-même, lord Ebenezer, avez-vous fait des expériences dignes d'intérêt ? Apportez-vous des nouvelles de la trépidante surface mélandienne ?

La Couronne de Cuivre

L'antre d'Asmodeus