La Couronne de Cuivre

" Ce n'est pas notre collègue ! s'exclama l'homme aux bottes, hilare. Mais il pourra sans doute vous aiguiller, oui.
— Juste... Evitez de lui faire la morale sur ses activités. Les chasseurs et les druides ne sont pas toujours les meilleurs amis du monde."
Il tapota son parchemin du bout de la plume.
" Mais tout est bien noté. Je vous fais ça pour ce soir."

Astrée eut une légère grimace. Bien sûr, le fait que le dénommé Réginald soit un chasseur lui titillait la conscience. Mais elle attendrait de le rencontrer pour juger de ce que valait l'homme, au-delà de cette passion discutable.
" Je ne lui ferai pas la morale... Enfin... j'essaierai au maximum de faire abstraction de ses habitudes. Après tout, je chasse aussi, pour me nourrir. Il ne me viendrait jamais à l'esprit de chasser les yétis, évidemment. Enfin bref... Je n'en parlerai pas."
Elle haussa les épaules.
" Merci pour les renseignements, en tout cas. Et à ce soir...."

Astrée regagna donc Belred Luyn sous un soleil qui, s'il était généreux, paraissait déjà moins accablant dans cette zone moins dense de la forêt, et surtout plus proche des montagnes. Un vent venu de l'est agitait les branchages et des oiseaux gazouillaient dans les hauteurs, côtoyant sans doute des elfes invisibles. La jeune femme n'eut aucun mal à trouver le comptoir dont lui avaient parlé les montagnards, un vaste entrepôt obscur, dans lequel s'affairaient une demi-douzaine de personnes. Il n'était pas accessible aux visiteurs mais de longues listes de matériel étaient disponibles et, pour ceux qui ne savaient pas lire, des employés serviables. Le temps qu'Astrée fasse ses emplettes, il serait sans doute midi et l'heure de retrouver Kalju et Félicie à l'auberge, histoire de faire un rapide point sur leurs préparatifs.

Astrée prit le temps de lire l'intégralité de la liste. Elle avait besoin d'une corde d'une dizaine de mètres, ou quinze si elle était suffisamment légère, adaptée au froid, et comptait y ajouter quelques pitons puisque le secteur qui la concernait semblait particulièrement escarpé. Mais peut-être vendait-on également des vêtements particulièrement chauds, des gants en particulier, un bonnet, un pull supplémentaire ou des chausses. Elle avait déjà dans son paquetage une cape doublée de fourrure avec une capuche, une écharpe, et des bottines souples en cuir fourré, très chaudes et relativement étanches -mais bien sûr pas adaptées à l'escalade, qu'elle réservait pour le bivouac. En fonction du volume de ses achats, elle déciderait si elle optait pour une toile de tente -un simple pan de toile tendu sur des pitons ou si elle s'en passait.

Astrée trouva sans mal tout ce qu'elle cherchait, même si les prix n'étaient pas aussi modiques qu'ils ne l'auraient été dans une cité plus vaste, et qu'il fallut chercher un moment pour trouver des modèles à sa taille. Belred n'était pas très fréquentée et les adeptes des hauteurs plutôt rares. A la mine de l'employé qui la servit, Astrée devina d'ailleurs qu'il la pensait à moitié folle... ou en tout cas, pas très honnête quant à ses réelles intentions. Mais il ne la questionna pas et se montra diligent.
La masse de ce qu'elle voulait acheter était néanmoins imposante, et si elle décidait de tout emporter, il lui faudrait réfléchir à un moyen d'harnacher Prince. Elle pouvait aussi profiter de Kimik, qui porterait tout ça sans grand mal, mais le problème se poserait quand elle quitterait Kalju. Peut-être la solution était-elle d'abandonner ses vêtements estivaux au moment de partir vers les hauteurs.

Le volume et le poids des bagages pourraient devenir un réel problème une fois sur les hauteurs. Tant que le climat et le relief n'étaient pas trop extrêmes, Prince pourrait porter son sac : elle avait depuis longtemps bricolé un système de sangles de cuir pour le fixer sommairement sur le dos de l'animal. Mais s'il fallait grimper, le cheval se ferait écureuil.
Elle devrait donc voyager aussi léger que possible... et en l'occurrence, cela signifiait que si Prince ne pouvait pas suivre sous sa forme équine, elle laisserait quelques jours dans une cachette quelconque, le long du chemin, une bonne partie de ses provisions et ustensiles de cuisine, voire la quasi-totalité. Elle pouvait se nourrir par des sortilèges, mais il était primordial qu'elle ait des vêtements chauds de rechange -à cause de l'humidité de la neige-, ainsi qu'une ou deux bonnes couvertures, sa cape fourrée, ses bottes, gants et bonnet, sa trousse de soins et son matériel. Elle pouvait également laisser le morceau de toile qui lui servait d'abri, et même un ou deux vêtements légers -pourtant utiles en guise de sous-vêtements. Le tout était de choisir -ou bricoler- une cachette sûre, protégée des chapardeurs à pattes ou à plumes, pour retrouver ses affaires au retour.

Elle opta pour l'achat d'un sac de cuir supplémentaire, qu'elle réserverait au matériel susceptible d'être temporairement abandonné en cas de nécessité. Elle prendrait le temps, en fin d'après-midi, de faire le tri nécessaire. En tenant compte du fait qu'elle serait vêtue de la moitié de ses vêtements chauds à ce moment-là, le volume restant était tout à fait raisonnable.

Elle reprit le chemin de l'auberge, bien chargée mais sereine : elle avait tout ce dont elle aurait besoin.

A l'auberge, Kalju et Félicie étaient en train de déjeuner et ils l'accueillirent à leur table.
" Alors, on est parés pour demain matin ? demanda Félicie.
— Je pense qu'Eyri s'est procuré le nécessaire. Il est revenu chargé, en tout cas. Je n'ai posé aucune question... pas que j'arriverais à le faire, si je l'avais voulu, mais je pense qu'on devrait s'en sortir. Il nous reste juste les provisions et nous pourrons partir."

Elle s'assit avec un certain soulagement -piétiner en faisant les courses n'avait rien d'agréable- et se découvrit un appétit insoupçonné. Elle commanda la même chose que Félicie, sans vraiment se préoccuper de la nature du plat en question, et acquiesça à la question de Kalju.
" Je me suis renseignée un peu à ce sujet. Il nous faut au minimum de quoi manger pendant 4 jours, jusqu'à la première carrière. Là-bas, on trouvera du ravitaillement pour la suite, mais pas avant. Et je dois récupérer une seconde carte ce soir, plus complète, avec les abris, les points d'eau... qui me servira aussi pour la suite de mon périple. "
Elle ne voulait surtout pas sous-entendre que la carte de Kalju était incomplète, même s'il fallait sûrement bien plus que ça pour vexer le génasi.
" Est-ce que vous avez prévu une tente ? Ils disent, à la guilde, que c'est préférable, que les abris sont parfois occupés ou en mauvais état..."

" Moi j'en ai une, dit Félicie. Mais je ne crois pas que tu rentrerais dedans, Kalju. Ni toi, en fait, Astrée.
— J'en ai une aussi, fit le genasi. Mais je dois dire que j'aime autant dormir à la belle étoile tant qu'il ne pleut pas, ou pas trop. Il y a moyen de dormir à deux dedans, mais elle pèse son poids et si tu pars ensuite vers les hauteurs, tu auras besoin de ton propre matériel. Je pense qu'on ne doit pas se soucier d'Eyri : il se débrouillera. Au pire, on peut dormir à trois sous ma tente."
Il haussa les épaules.
" Est-ce que les quatre jours de ravitaillement, c'est avec ce qu'on peut pécher ou chasser en route ? A cette saison, la nature est généralement généreuse. Je pense qu'on devrait pouvoir trouver des champignons et des baies à profusion, au moins la première journée, si c'est comme par chez moi."

" Il faut juste retenir qu'on ne trouvera rien à acheter avant quatre jours. Je pense moi aussi qu'on trouvera de quoi se nourrir dans la nature, tant qu'on n'est pas trop en altitude, même si le paysage va vite devenir minéral. Mais juste au cas où nous jouions de malchance, ou pour compléter ce qu'on trouvera, on devrait avoir sur nous une petite provision de légumes secs... et un peu de viande séchée, de fromage, du pain pour un ou deux petits casse-croûte... et du thé... et un peu de farine et d'huile pour faire des galettes. Bref, du dépannage. Quant à la tente, je suis d'accord avec Kalju : tant qu'il ne pleut pas, nous dormirons dehors. Mais ils disent que les pluies d'automne seront bientôt là, et elles sont conséquentes, donc il vaut mieux prévoir de quoi s'abriter. J'ai ce qu'il faut de mon côté, même si je trouve généralement des abris dans la nature..."
Elle haussa les épaules.
" Mais donc, on est au point au niveau du matériel. Il ne nous reste plus que l'aspect provisions."

" Très bien. Nous nous en occuperons dès que nous avons terminé ici, dit Kalju. Nous irons ensemble.
— Il vaut mieux, oui. J'ai l'impression que vous n'allez acheter que des choses sérieuses et austères et rien de bon ! Or, le plaisir, c'est au moins... les trois quarts des bienfaits qu'apporte la nourriture. Il nous faut au moins du miel et des épices. Et quelques uns de ces fruits elfiques délicieux qu'on ne goûtera sûrement plus avant des mois et des mois ! Et un excellent saucisson de sanglier. Et peut-être aussi un petit tonnelet de cidre.
— Je devrais peut-être vous laisser y aller toutes les deux...
— Mais on doit quoi... tripler les quantités pour toi ?"

Astrée rit joyeusement.
" Je vote pour le saucisson et les fruits, c'est indispensable ! Le miel, au pire, je sais en trouver... mais il n'aura pas le même goût. Et tu oublies leur délicieux muesli du matin... Le plein d'énergie pour la journée !"
Puis elle ajouta, sur un ton très sérieux, à l'adresse de Kalju.
" Bon, tout ça dépend finalement de Kimik : selon toi, quel poids est-ce que ton yack peut porter ? Un quintal ou deux ? De quel taille doit-on prévoir le tonnelet de cidre ?"

" Vous comptez vraiment emmener autant de matériel ? dit Kalju, interdit. Kimik peut sûrement porter un quintal, un quintal et demi, mais ça me semble complètement superflu. Nous ne sommes pas des ogres.
— Ce n'est pas pour la nourriture, c'est pour toutes nos toilettes de damoiselles, répondit Félicie.
— Vos fripes pèsent si lourd ?"

Astrée se remit à rire.
" Mes vêtements sont lourds, oui, puisque je vais jusqu'aux glaciers : j'ai prévu des fourrures ! Et tu oublies tout le matériel d'escalade !"
Elle reprit son sérieux.
" Mais ne t'inquiète pas, on plaisante. Enfin, à demi : je pense que les fruits, le saucisson et le muesli sont une bonne idée : puisqu'on a une bonne bête de bât, autant en profiter pour ne pas trop se rationner au niveau du ravitaillement. L'alcool, on devrait réussir à survivre sans..."

" Moi il me semble que le problème principal, ce sont les fonds, dit soudain Kalju. Je ne sais pas pour vous, mais personnellement, je dois commencer à surveiller ce que je dépense. La traversée de la Lorien n'est pas si bon marché et le matériel, dans cette ville, est plus couteux qu'ailleurs. Si je veux pouvoir rentrer chez moi sans avoir à trouver du travail, il faut que je me modère.
— Je suis un peu dans la même situation, mais je vais devoir bosser ici ou là de toute façon, donc ça ne m'inquiète pas plus que ça." répondit Félicie.

Astrée sourit.
" De toute façon, bivouaquer en pleine nature en achetant quelques provisions de base coûtera forcément moins cher que loger en auberge ! Vous allez voir toutes les économies que vous allez réaliser dans les jours à venir ! Je pense qu'on peut s'autoriser quelques fruits et de quoi casse-croûter les deux premiers jours... Et si on n'a pas assez, je me charge de chasser, cueillir... Donc vous ferez des économies ! Vous avez repéré des boutiques d'alimentation, d'ailleurs ?" "

HRP : Astrée a plein de sous, elle ? Je te laisse gérer de toute façon

" Il y en a deux, dit Kalju. Un qui fait plutôt des choses fraîches et l'autre plutôt du sec et en conserve. Ils sont l'un à côté de l'autre et je pense que c'est la même famille qui les tient."
Astrée put en juger peu après car, une fois leur repas terminé, les trois compagnons gagnèrent les lieux. Les boutiques étaient raisonnablement achalandées compte tenu de leur situation dans un des coins les plus inaccessibles d'Hélonna. On y trouvait un mélange de produits montagnards et de produits sylvestres. Rien ne semblait très campagnard et surtout, absolument rien ne venait de la côte. Mais Astrée put y trouver ce qu'elle cherchait, dans les quantités requises, le tout pour un prix modique pour les denrées très locales, et un peu plus coûteux pour le reste.

HRP : aucune idée... elle a dépensé cher pour une carte et un guide à son départ, elle a payé des auberges... il ne doit plus lui rester grand-chose après l'achat du matériel (aucune idée du prix, mais relativement cher je pense), mais la nourriture, c'est pas cher !

Astrée était consciente qu'elle devait garder suffisamment d'argent pour pouvoir se loger sur le trajet du retour. Bien sûr, dans le pire des cas, elle dormirait dehors et se nourrirait de baies magiques, mais un minimum de confort, en pleine saison des pluies, serait bienvenu. Et puis, la traversée de la Lorien serait plus compliquée si elle ne pouvait pas se payer d'auberge. Elle avait dépensé, de son point de vue, bien assez d'argent, et privilégia donc les produits locaux et peu cher : fruits et muesli elfique, viande séchée, saucisson et légumes secs.

Elle décida également de se débarrasser de la carte détaillée de la route entre Belred Luyn et Togoria. C'était un poids inutile, dont elle n'avait pas réellement besoin. Idéalement, elle songeait la laisser à l'aubergiste pour qu'il la mette à disposition de ses clients, et la récupérer au retour. A défaut, elle lui demanderait s'il existait une boutique où revendre le petit guide. Ou peut-être qu'elle pouvait intéresser Félicie, après tout...

L'aubergiste était prêt à reprendre le livret mais il conseilla à Astrée d'aller la revendre au comptoir, si elle voulait en tirer quelque chose. Ensuite, la jeune femme eut tout le loisir de préparer son paquetage pour un départ —*à l'aube !*— le lendemain. Kalju entendait bien profiter des heures les plus fraîches et Eyri, apparemment, guettait leur départ comme un oiseau de proie la souris vagabonde. Félicie n'était pas ravie, mais elle se contenta de ronchonner, sans réellement protester.
Enfin, Astrée put retourner à la guilde des montagnards. Dans la petite salle, elle retrouva l'elfe et la femme, ainsi que l'homme qui lui avait promis la carte. Il déroula son oeuvre devant elle. Elle n'était pas très grande mais elle comprenait plus de détails que celle de Kalju, assurément.
" Je ne savais pas si vous voudriez la plier ou la rouler, alors je l'ai laissée telle quelle. Vous jugerez. C'est du vélin de bonne qualité mais il faut penser à la huiler de temps en temps, si vous en avez l'occasion. Elle survivra à l'humidité et à une légère pluie, mais pas aux averses plus violentes ou à une immersion dans la rivière."
Il lui indiqua Belred, figurée par une série de petites maisons stylisées.
" Belred ici, la Sereine progresse là, puis elle explose en cinq rivières plus modestes, qui deviennent vite des torrents ou des ruisseaux. La route passe entre la deuxième et la troisième, puis elle se divise en trois. Une route vers le sud, une vers le nord, qui disparaissent en fait très vite, car elles ne sont pas vraiment reconnues, et celle qui monte à la carrière. La première carrière est au pied de la moyenne montagne, la seconde beaucoup plus haut. Et la vieille mine est tout au sud, ici, près de la Kuluina."
Il désigna des ronds et des triangles.
" Les ronds, ce sont des grottes, les triangles, des abris en dur. Vous voyez qu'il y en a quelques uns en basse montagne, un peu ici plus haut, et puis quasiment plus dans les hauteurs. Et la carte s'y arrête aussi, car personne n'y va jamais. Ici et là, je vous ai mis les pics les plus élevés, et là, ces flèches, c'est pour indiquer par quel flanc il faut les aborder. Mais là encore... personne n'y va jamais. Sans doute Réginald pourra-t-il l'annoter avec plus d'informations."

Astrée écouta attentivement les explications, retenant la signification des différents symboles.
" Et donc vous disiez... quatre jours pour la première carrière, deux de plus pour la seconde..."
Elle repérait machinalement les abris possibles pour les nuits intermédiaires.
" Si jamais on doit faire les deux carrières et que mes amis vont ensuite vers la vieille mine au sud, ça va prendre pas mal de temps. La saison des pluies sera sûrement commencée en basse montagne, comme vous le disiez. Est-ce qu'ils ont un risque de se retrouver coincés par les premières neiges ? Si c'est comme chez moi, ils ont largement le temps d'avancer tant qu'ils restent en moyenne montagne, un mois et demi je pense... Mais est-ce que la neige arrive tôt dans ce massif, notamment vers la seconde carrière qui est plus en altitude ? Bref, est-ce que je dois leur dire de mieux s'équiper ?"

HRP : tu as une idée de la date approximative ? J'aurais dit mi-Eleinte ?

L'homme secoua la tête.
" Non, la neige ne viendra pas avant un bon mois et demi. Il va pleuvoir beaucoup, il faut faire attention à la boue, aux inondations... Le terrain peut devenir assez glissant dans les zones rocailleuses et le vent est parfois fort mais la neige, pas avant fin Marpenoth. Il fera froid la nuit, à la carrière, mais ils vous logeront au chaud, sans soucis."

HRP : je dirais autour du 10-15 septembre... mais je n'ai pas compté !

Astrée hocha la tête. Pas de mauvaise surprise à attendre en ce domaine, du moins, pas plus que dans n'importe quel massif à la météo capricieuse en automne. Comme partout, la neige pouvait survenir dès la fin d'Eleinte, mais c'était rare.
" D'accord. Je crois que je n'ai plus d'autre question... Ou plutôt, j'en ai beaucoup, concernant les yétis, mais je les poserai à Réginald quand je l'aurai trouvé. Encore merci pour toutes ces informations..."
Il ne lui restait plus qu'à rentrer dîner... et dormir. Tout son paquetage était prêt, ses affaires triées, son guide inutile revendu pour une somme modeste. Elle était prête à partir à l'aube.

" Avec plaisir. Bonne route à vous et soyez prudente en montagne. Mais vous le savez."
La femme se leva.
" Excusez-moi mais vous allez monter jusqu'à la deuxième carrière ? Est-ce que ça vous conviendrait d'y convoyer un petit paquet en échange d'une juste rétribution ?"

Astrée la regarda avec surprise.
" Oh... oui, bien sûr, nous pouvons y emmener un paquet. Kalju, le génasi, possède un yack, donc on n'est pas trop limités en bagages. A qui voulez-vous qu'on le donne, là-bas ?
Elle songeait que même s'ils trouvaient l'origine de la faille dès la première carrière, elle-même continuerait certainement dans cette direction. Elle pouvait donc s'engager sans souci à livrer un colis.

" Au cordonnier, Derek. Ce sont des peaux dont il a besoin. Pas un gros ballot, ne vous en faites pas. Je peux vous payer pour le transport, ou, si vous préférez, lui faire un message pour qu'il vous répare toutes vos bottes gracieusement.
— Si j'étais vous, j'aurais tendance à opter pour ça, dit le cartographe. Derek est un artiste."

Astrée hésita. Elle se moquait éperdument de l'aspect de ses bottes, et elle disposait d'un sortilège pour les réparer, au besoin. Mais Félicie pourrait être sensible à la proposition. Et elle n'avait pas un besoin d'argent si important. Et puis, à la réflexion...
" Vous pensez qu'il saurait renforcer des bottes pour le froid, avec de la fourrure ? J'en ai, qui sont un peu anciennes, il pourrait peut-être les améliorer un peu... Pour ce qui est des réparations ordinaires, je peux le faire d'un sortilège..."

" De la magie pour réparer des bottes ? Evitez d'en parler au cordonnier, dit le cartographe.
— Y'a de la magie pour tout, de nos jours. Les gens font plus rien de leurs dix doigts ! dit la femme en riant.Mais c'est vous qui voyez. Je peux aussi vous donner une pièce d'argent pour votre peine."

Astrée jugea que une pièce d'argent, ça n'était pas beaucoup, comparé au travail du cordonnier.
" Non, je vais opter pour les réparations, plutôt. Je verrai l'état de mes bottes en arrivant, et si jamais je n'en ai pas l'usage, je pense que ma compagne de voyage va adorer profiter de l'aubaine..."
Félicie devait être du genre à aimer les jolies bottes. Quant à elle... en-dehors des périodes où elle avait été en couple, amoureuse, et désireuse de plaire, son apparence avait toujours été le cadet de ses soucis. D'ailleurs, à bien y réfléchir... l'état de ses bottes en témoignait. Les réparations ne seraient pas si inutiles.

" Parfait. Je vais chercher le paquet et lui rédiger une petite note pour qu'il connaisse notre arrangement".
Elle ne partit que quelques minutes, le temps qu'Astrée range sa carte, et lui apporta le paquet, effectivement très léger, de la taille d'une citrouille.
" C'est de l'écureuil argenté. Apparemment très doux pour les pantoufles, dit la femme en le lui donnant. Si vous n'allez pas jusqu'à la seconde carrière, vous pouvez le confier à l'intendant de la première, il fera suivre."

Astrée hocha la tête en prenant le paquet. Elle renonça, vu sa taille, à le glisser dans sa besace.
" Il est probable que je poursuive vers la seconde, ou que ça ne me fasse pas un gros détour, puisque je dois monter en altitude. Tout dépend ce que me dira Reginald... et de l'endroit où je le trouverai. Mais sinon, je ferai comme vous dites"
Et tant pis pour les bottes. Elle faisait cela avant tout pour rendre service, et cela ne lui coûtait rien.
" Merci encore pour la carte et les explications, ajouta-t-elle à l'adresse du cartographe. C'est parfait !"
Il ne lui restait plus qu'à rejoindre ses compagnons à l'auberge. Elle comptait faire un petit détour par l'écurie pour rendre visite à Prince des Frelons qui devait s'y ennuyer ferme.

La Couronne de Cuivre

[Lieu] Belred Luyn