La Couronne de Cuivre

Chandara avança son autre main de son visage et le toucha du bout des doigts jusqu'à ce qu'il regarde à nouveau dans sa direction. Elle-même sentait son cœur battre la chamade mais pourtant elle trouvait en elle la force de ne pas baisser les yeux.

- Je partirai dans deux mois peut-être : c'est le temps dont j'ai besoin pour rassurer les miens et faire l'aller-retour vers Cojum. Je viendrai au plus vite ensuite : nous avons bien mérité des vacances, vous et moi. Et je verrai jusqu'où il est raisonnable de vous tenter et ce que vous pourrez ou non me refuser alors, mon cher Arthur.

Elle n'avait pas le droit de lui faire une chose pareille. De lui toucher le visage, et de l'ensorceler avec ses grands yeux verts, et de lui parler de cette voix suave. Il ne savait plus quoi faire de lui-même, de son corps, de ses mains, de ses lèvres.
Ne l'embrasse pas, souviens-toi du désastre.
Il trembla des pieds à la tête, mais parvint à se contrôler. Il n'était pas sûr de lui. Pas sûr d'elle. Il était peut-être en train de se fourvoyer, elle était peut-être en train de se jouer — très agréablement — de lui.
Dieux, que c'était douloureux.
" Je devrais. Les portes. On va s'inquiéter de mon absence."
Qui ça, au juste ?

Mais toutes les situations qu'ils avaient vécues ensemble avait démontré au moins une chose : Chandara était bien plus impulsive que lui et n'avait pas acquis la même maîtrise pour se contrôler. D'autant que l'attitude du jeune-homme en face d'elle était un vibrant appel à pousser son avantage. Elle répondit d'une voix rauque et triste :

- Moi je m'inquièterai de votre absence !

Sans qu'elle su s'expliquer comment ni même si elle l'avait fait en toute conscience des conséquences, Chandara se jeta alors à son cou et l'embrassa fougueusement sans se soucier des passants qui devaient les regarder avec curiosité. Et, avant que le paladin ait pu comprendre ce qui lui arrivait et se reprendre, elle se détachait de lui et détourna le visage pour qu'il ne puisse pas la voir pleurer. Le Clos était tout proche, elle devait l'atteindre sous peine de ne pas pouvoir trouver la force de le laisser retourner auprès des siens.

Mais il la retint d'une main sur son épaule, presque par réflexe, l'empêchant de fuir.
" Chandara, je..." lâcha-t-il stupidement.
Que dire alors qu'il avait le sang en feu ?
Rien. Rien d'intéressant ou d'adéquat, en tout cas.
" Nous nous reverrons. Je vous attendrai. Je vous le promets."

Elle s'arrêta net en sentant la douce pression sur son épaule. Ainsi coupée dans son élan, elle se sentait si stupide d'avoir ainsi cédé à ses impulsions. Elle n'osa pas se retourner de peur de lire de la réprobation dans l'expression d'Arthur, n'osa rien dire de plus de peur de se perdre la maîtrise de sa voix. Elle avait agi sottement, elle était allé trop loin et pourtant elle aurait eu envie qu'il la retienne, qu'il la prenne dans ses bras, qu'il apaise ses doutes comme il avait su le faire plus d'une fois déjà.

Il ne lui suffit que de quelques mots pour qu'elle parvienne à réprimer un sanglot qui aurait achevé de la faire paraître ridicule. Ce n'est pas cette image d'elle qu'elle voulait qu'il emporte mais elle se sentait soudain faite d'argile, incapable d'esquisser moindre mouvement de peur de s'effondrer. Elle parvint tout de même à murmurer un timide mais déterminé :

- Je l'espère.

Et, dès qu'il eut retiré sa main, elle reprit sa course éperdue, incapable de s'arrêter ni même de ralentir, sans aucune conscience des passants qui se dressaient sur le chemin de sa course folle.

Comme l'avait prévu Chandara, les rues menant du Clos jusqu'au temple étaient désertes. Non loin s'entendaient les clameurs d'une multitude de voix célébrant la mémoire d'un proche disparu. Même sans lumière, les manostiens s'étaient réunis sur la grand place au milieu des édifices religieux. A l'écart, celui dévolu au culte d'ilmater était peu fréquenté en ce début de soirée. Bon nombre de patients sauvés par la découverte miraculeuse de l'antidote étaient rentrés chez eux trouver le réconfort de leurs familles. Seuls les plus faibles restaient pour recouvrer leurs forces.

En ce début de soirée, les clercs du dieu souffrant étaient beaucoup moins nombreux qu'ils ne l'avaient été en pleine épidémie. Léonard se trouvait parmi eux. Son visage tiré par la fatigue indiquait qu'à l'instar de Chandara il n'avait pas pris de repos. Il sourit cependant à l'arrivée de la jeune femme. Son expression avenante se modifia sensiblement quand il reconnut Amélie.

"Qu'est ce qu'elle fait ici ?"

La barde qui s'était laissée mener sans encombre leva à peine les yeux et ne répondit pas.

Chandara ne s'était pas attendue à un accueil aussi froid fait à Amélie mais il est vrai qu'elle n'avait pas pressé la jeune femme de questions sur les raisons de sa brouille avec Léonard. Qu'à cela ne tienne, l'ancienne paladine fit les gros yeux au jeune clerc et répliqua d'un ton sans appel :

- Elle s'est blessée et a besoin de soins. Et je pense qu'il est tout indiqué que ce soit toi qui t'en occupes, Léonard !

Elle l'avait regardé dans les yeux, cherchant des indices et une ressemblance avec les souvenirs qu'elle avait de l'adolescent qui l'avait un temps intimidé pendant son enfance.

Et Léonard recommença à gratter nerveusement le chaume de sa barbe. Et en quelques secondes, sous l'impulsion de Chandara, le visage de l'adolescent butté s'effaça de nouveau et il reprit du ton plus doux que Chandara lui connaissait.

"Ce n'est pas ce que je voulais dire. Bien sûr que je vais la soigner. Mais c'est vraiment ...
- Une surprise ? C'est sûr qu'après tout ce temps ..., demanda Amélie avec un petit sourire.
- On peut dire ça comme ça ... Maintenant, est-ce que je peux examiner ..."

Ses yeux s'arrêtèrent sur le pansement.

"Joli bandage.", dit-il admiratif. , est-ce que tu penses que je peux le défaire maintenant ?"

Chandara était satisfaite de la tournure plus apaisée que prenait la conversation et elle hocha doctement la tête, sûre d'elle :

- La coupure est peu profonde et remonte à plus de dix minutes maintenant : l'hémorragie a dû stopper maintenant mais mieux vaut que tu regardes, oui.

Elle ne relâcha pourtant pas Amélie, de peur que celle-ci perde à nouveau pied : elle voulait lui éviter de montrer une telle faiblesse devant Léonard.

"Bien ..."

Léonard qui avait tous les éléments pour agir approcha les mains du pansement. Amélie fit mine de retirer son doigt. Son visage avait reprit une teinte cireuse.

"Je crois qu'il vaut mieux qu'elle s'assoie", commenta calmement l'ilmate.

Il ne semblait pas tirer partie de la faiblesse d'Amélie, bien au contraire. Avec l'aide de Chandara, il installa son amie sur une chaise et s'accroupit en face d'elle. Son regard retourna se poser sur la jeune paladine.

"Peut-être que tu pourrais peut-être lui parler un peu pour la distraire."

Le regard d'Amélie alla chercher celui de Chandara et ne le quitta pas.

Chandara s'accroupit à son tour pour placer son visage souriant devant celui d'Amélie tout en devisant pour faire diversion des soins effectués par le jeune ilmate :

- Tu sais que ça me rappelle les fois où je prenais soin de mon petit Marvin ? Il avait beaucoup de mal à supporter la moindre petite égratignure mais je le soupçonne d'avoir fait parfois semblant d'être triste pour que je le console. Si tu lui demandes, il niera, bien sûr mais ni toi ni moi ne serons dupe, n'est-ce pas ?

Amélie sourit à son tour. Captivée par le discours de Chandara elle eut l'air d'oublier Léonard défaisant doucement le pansement. Si elle eut une légère grimace, elle reporta rapidement son attention sur la paladine et sourit de nouveau.

"Effectivement, c'est bien Marvin. Et je peux te confirmer qu'il lui arrive parfois de faire semblant pour qu'on s'intéresse à lui. Et il sait se montrer très convainquant. Mais il sait aussi prendre soin des autres et sans qu'on leur demande. Il n'y a pas si longtemps, lorsque j'ai pris un mauvais coup de froid alors que mes parents étaient absents, il a pris soin de moi durant cinq jours.
- Cinq jours ..., maugréa Léonard, je ne savais pas ...
- Parce que tu n'étais déjà plus là.
- Parce que tu ne m'as pas retenue non plus."

Il s'interrompit le temps d'incanter. La blessure d'Amélie se referma sans encombre.

Chandara avait souri avec tendresse à la mention de son frère jumeau et de son comportement mais l'échange entre Amélie et Léonard la ramena à la situation présente et à la tension qu'il existait entre eux. Elle attendit que le clerc ait fini de soigner son amie avant de prendre la parole d'un ton ferme et décidé :

- Il va falloir me raconter ce qui s'est passé entre vous. Il est hors de question que vous restiez brouillés après ce que nous avons tous traversé !

Elle pensait à la guerre, à l'affaire d'empoisonnement mais aussi à leur complicité d'autrefois. Dans ces conditions, il fallait mettre de côté les contrariétés et se serrer les coudes, pardi !

"Ce n'est pas important ... Juste que du jour au lendemain, Léonard est parti.", murmura Amélie en baissant la tête.

Un pli de contrariété vint ourler la mâchoire du clerc.

"J'étais venu te l'annoncer, et tu ne m'as rien dit. Tout du moins, tu t'es contentée de sourire et tu m'as souhaité bon vent ..."

Les yeux de la barde s'écarquillèrent en grand.

"Parce que tu attendais autre chose ? Que je pleure pour te retenir ? Tu voulais que je te dise que j'allais être triste parce que je ne te verrais plus ? Tu avais l'air tellement fier dans ta nouvelle robe. Tu me disais que tu voulais voir du pays. Et c'est ce que tu as fait, non ?
- Mais tu ne m'as rien dit comme si cela ne te faisait rien que je parte. Parce que toi, tu avais ton Marvin et que moi, je n'étais plus rien ! Avoue que quelque part, cela te faisait plaisir parce qu'au moins, je te laissais tranquille !
- C'est ce que tu crois vraiment espèce d'imbécile ?"

La voix d'Amélie s'était cassée d'un coup et les premières larmes ne tarderaient pas à apparaître. Elle se tourna vers Chandara avant de lui demander.

"Est-ce que tu crois qu'on peut partir ?"

Chandara regarda les deux jeune gens d'un regard un peu attristé : elle soupçonnait qu'une certaine jalousie de Léonard envers Amélie et Marvin ait été la cause sous-jacente des tensions mais elle était bien trop inexpérimenté dans ce domaine pour en jurer. De toute façon, elle estimait qu'attaquer frontalement le problème sur le moment n'était peut-être pas la chose la plus indiquée à faire. Elle répondit donc d'un ton apaisant à la barde tout en ménageant le clerc :

- Oui, je crois que nous devrions rentrer : je meurs toujours de faim ! Mais j'aimerais aussi que Léonard puisse passer au Clos demain. Pour me tenir au courant de l'état des derniers malades...

Ce n'était qu'une excuse et ni l'une ni l'autre ne devaient en être dupes mais elle ne voulait pas laisser cette situation douloureuse perdurer sans rien tenter pour la résoudre.

L'intervention de Chandara fit une nouvelle fois redescendre la tension. Et Amélie garda le silence pendant que Léonard hasardait.

"Je viendrai. Mais seulement si Amélie accepte."

La jeune femme se leva lentement puis prit amicalement le bras de Chandara. Juste avant de sortir, elle se tourna vers l'ilmate avec un petit sourire.

"Alors à demain."

Et les deux jeunes femmes regagnèrent le Clos des Roses.

Hrp : je te laisse poster là-bas.

[Quête : Peste]

Aril, Kyrone et leur nouveau compagnon Orion avait quitter le temple de Kelemvor pour se rendre dans un autre temple celui d'une divinité plus populaire notamment auprès des pauvres, des miséreux mais aussi des malades Ilmater. Et c’était justement pour rencontrer des malades et une soigneuse qu'ils étaient là. Les portes de ce temple simple et dépourvue de décoration, semblent grandes ouvertes, comme une invitation à les franchir : ainsi le petit groupe était libre d'y faire son entrée.

[Quête : Peste]

(HRP Novice est un terme pour designer les personnes venant juste de revêtir les habits de prêtre, du coup ce n’était pas forcement péjoratif. )

Le temple malgré un manque certain (et certainement volontaire) d'apparat, était assez fréquenté : quelques fidèles étaient dans le temple pour la plupart ils semblaient être des gens pauvres : des mendiants, des familles nombreuses, etc. Le petit groupe put remarquer à une place surélevé, un homme d'environ 40-50 ans portant des habits simples, semblait canaliser l'attention de la petite foule par un discours de prêcheur :

- ... Loué sois le seigneur Ilmater car il souffre pour que vous n'ayez plus à souffrir. Vos blessures sont ses blessures. Vos souffrances sont ses souffrance. Vos peines sont ses peines. Venez ! Nous vous soulagerons du poids de vos souffrances sinon nous vous aiderons à le porter.

Soudain sans doute avait il remarquer leur présence, il tourna son regard vers les aventuriers, leur adressa un sourire et leur fit signe d’approcher.

[Quête : Peste]

Orion n’émit qu'un simple grognement devant ce spectacle. Le prêtre lui face à l’hésitation des aventuriers, avança de quelques pas les mains jointes et un sourire aimable au visage.

- Que venez vous faire ici messires ? Les serviteurs Dieu qui pleure peuvent-ils vous aidez d'une quelconque manière ?

Le prêtre n’était visiblement pas malintentionné, et ne semblait pas avoir remarquer la nature particulière des individus qui se tenaient devant lui.

Non visiblement le prêtre n'avait pas l'intention de les initier à l'auto-mutilation ou autre acte masochiste. C'est avec soulagement qu'il retrouva son calme. D'une vois naturelle, Aril répliqua:

-Heu, en fait nous ne souhaitions pas interrompre votre prêche. Je me nomme Aril et mes compagnons ici présents sont Kyrone et Orion. Nous souhaitons simplement nous entretenir avec Eldatha. Nous aurions quelques questions à lui poser.

[Quête : Peste]

Orion avait saluer le prêtre d'un simple grognement et maintenant montrait quelques signes d'agacement : Tout d'abord il tapa du pied, regardant ses deux compagnons et le prêtre d'un air sévère.

L'Ilmate pris un air surpris puis sans quitter son sourire posa une simple question.

- Oh ? Vous la connaissez ?

Orion finit par pousser un soupire et répondit d'un ton sec au pauvre prêtre.

- Non, mais on est pressé.

Le relationnelle et la patience ne semblaient pas être les points forts d'Orion, loin de là.

Aril se demanda si le légiste avait bien fait de leur confier Orion. En l'espace d'un instant, il l'avait imaginé le confier à Aril et Kyrone de manière à éloigner les personnes à risque du temple de Kelemvor. Si l'impatience d'Aril était d'importance, il en était pire pour Orion. Aril jugea sur le moment le plus sage de faire venir Eldatha avant qu'Orion ne pete les plombs. Mais cela confortait bien Aril dans cette pensée: mes kelemvites méprisaient les Ilmates.

-J'avoue ne pas connaître cette Eldatha mais je pense qu'elle dispose d'un témoignage clé qui pourrait nous être utile. Serait il possible de nous entretenir avec elle?

Aril espérait ne pas en avoir trop dit. Mais il n'avait pas parlé d'enquête au prêtre.

[Quête : Peste]

Circonspect devant les agissements d'Orion, le prêtre répondit en cherchant un peu ses mots.

- Euh... Oui je vais la faire venir... Je pense que cela facilitera les choses.

Toujours interloqué il partit au fond du temple et franchit un petite porte. laissant ainsi les aventuriers seuls au milieux du temple et de quelques fidèles. Orion afficha un sourire :

- Au moins ce fut efficace.